I need your help - ft. Willow

FERME DE WILLOW — New Jersey, 2025.

— Allo ? (...) Oui, bonjour. Je cherche à joindre Willow Bowman. (...) Oh... Et quand est-ce que je peux l'avoir ? (...) Ce week-end ? D'accord. Très bien. Merci beaucoup monsieur. (...) Merci, bonne journée à vous aussi.

Ce week-end, Keeran ira dans le New Jersey. Il n'aurait jamais pensé partir à la recherche de la famille de sa femme. Elle qui a toujours été si secrète vis à vis de sa famille, Keeran a toujours respecté ça. Mais il se sent tellement dépassé depuis que ses enfants ont été confrontés à leur première déchirure. Il n'est pas mutant, il ne sait pas comment les aider. Il a besoin d'aide alors il a fouillé dans des vieux cartons, violant l'intimité de Kira en lisant de vieux journaux intimes. Il a détesté le faire, mais ça lui a permis de trouver une piste. Une certaine Willow Bowman et sa ferme rénovée dans le New Jersey. C'était peu, mais c'était mieux que rien. Lorsqu'il a appelé, la voix masculine qui lui a répondu l'a d'abord découragé, mais finalement, il a commencé à avoir de l'espoir.

L'impatience le hantait chaque jour de la semaine. Jusqu'au samedi. Enfin. Il n'a pas averti ses enfants de sa démarche pour ne pas leur donner de faux espoirs. Il ne voulait pas non plus les bouleverser plus qu'ils ne l'étaient déjà. Chaque chose en son temps. Il devait d'abord explorer lui-même cette piste avant de leur dire quoi que ce soit. Il a pris sa voiture et a roulé pendant 1h30 pour parvenir jusqu'à l'adresse de la ferme. Son coeur bat à toute vitesse dans sa poitrine alors qu'il se gare devant l'immense bâtiment.

Keeran sort de la voiture, il claque la portière derrière lui puis il s'avance jusqu'à l'entrée de la ferme. Il toque à la porte et tente de calmer les tremblements de son corps. Il ne sait pas encore comment il va se présenter. Il craint de se faire envoyer chier, mais il essaye de ne pas perdre la face. Il est là pour ses enfants et pour eux, il irait au bout du monde.

FERME DE WILLOW — New Jersey, 2025.

Vendredi soir. Son service à la bibliothèque terminé, Willow a immédiatement pris la route pour le New Jersey, et sa maison. Un besoin de prendre l'air, de quitter la grande ville le temps de deux jours, pour déconnecter. De retrouver ce lieu si familier pour elle, et si apaisant. Et son programme est déjà tout établi: de la lecture en toute tranquillité, de la peinture, ainsi que la fin du réaménagement d'une des pièces de la maison. Un moment pour elle et parfait à ses yeux, qu'elle ponctue d'une déconnexion technologique: elle coupe son téléphone et ne le regarde que deux fois dans la journée. Au cas où. En un mot, Willow profite de son moment loin de New Blossom, dans son petit nid douillet, seule, où tout l'attend déjà, prêt à l'accueillir. Comme à chaque fois.


Le samedi est nuageux, et après une matinée à jardiner et s'occuper de la maison, l'après-midi de la blonde est réservée à sa détente. Assise dans la véranda, qui donne sur l'arrière de la ferme, la piscine, le jardin et le verger, Willow peint, de la musique en fond sonore. Des bandes originales de film, comme toujours. Des musiques qui l'inspirent, même quand elles sont l'objet de moqueries gentilles de la part d'Abel, lorsqu'il passe la voir. Ou quand il était adolescent. Une pensée qui lui donne le sourire, alors que son pinceau parcourt la toile blanche, terminant de donner vie à la nature morte que la blonde peint. Un moment de détente soudainement interrompu par un bruit sourd qui résonne dans la vieille maison. Quelqu'un toque à la porte. Surprise, Willow se tourne vers l'intérieur de la maison, un sourcil levé. Elle n'attend personne. Et personne ne l'a prévenu de son arrivée. Ce qu'elle vérifie sur son téléphone portable après avoir posé son pinceau et quitté la véranda pour l'entrée. Non, pas de message.
Intriguée par ce toquement qui se fait à nouveau entendre, la blonde s’avance silencieusement jusqu’ à la porte d’entrée. Une seconde d’hésitation, avant qu’elle n’ouvre la porte en bois de quelques centimètres. Assez pour voir qui est là, et être vu, sans pour autant ouvrir en grand. Méfiante Willow ? Un peu, oui. Méfiance qui s’apaise cependant quelque peu quand elle voit le visage de la personne qui vient de toquer. Un homme, un inconnu, qui lui donne une bonne impression, sans qu’elle ne sache vraiment pourquoi. Ce qui la rassure quelque peu.

- Bonjour.

Souffle Willow en ouvrant un peu plus la porte, tout en l'observant.

- Que puis-je pour vous ?

FERME DE WILLOW — New Jersey, 2025.

L'attente avant que cette foutue porte s'ouvre lui semble interminable. Keeran garde ses lèvres pincées entre elles. Il fait du surplace, il piétine, d'un pied sur l'autre. Peut-être que venir ici était une mauvaise idée finalement... mais en même temps, il ne voit pas d'autre issus. Il n'y a aucune possibilité. Keeran ne sait vers qui se tourner pour aider ses enfants. Il a besoin qu'on l'aide et il espère trouver des réponses ici. Le musicien est prêt à s'asseoir sur le bord des marches et attendre devant la porte d'entrée jusqu'à voir quelqu'un s'il le faut.

Il se fait tout un tas de films dans sa tête. Le stress ne le quitte pas, quand soudain, la porte s'ouvre enfin. Enfin devrait-il plutôt dire qu'elle s'entrouvre à peine. Keeran peut à peine apercevoir le visage de celle qui se cache derrière. Il passe sa langue sur ses lèvres pour les humidifier tout en prenant une grande inspiration pour se donner un peu de courage.

— Bonjour... Je suis désolé de vous déranger. Je cherche une femme qui répond au nom de Willow Bowman. Cette ferme lui appartient. On m'a indiqué que je devais venir ce week-end pour la rencontrer.

Il dit ça à toute vitesse, comme si à tout moment, la porte pouvait se refermer sans qu'il n'ai obtenu de réponses à ses questions. Si c'était le cas, il serait horrifié. Ce serait comme s'il devait repartir de zéro. Ces recherches ne l'aurait mené à rien et ça risquait de lui mettre un sacré coup au moral. Alors dans la précipitation, il lâchait le prénom de sa femme.

— Je suis le mari de Kira.

Il ne précise pas immédiatement qu'il est veuf. Ce serait précipité et pourtant... sa venue venait également annoncer une mauvaise nouvelle. Sauf si Willow était déjà au courant du décès de sa petite-fille. Encore fallait-il qu'il arrive à voir cette femme pour pouvoir lui annoncer cela.

FERME DE WILLOW — New Jersey, 2025.Un toquement qui se fait entendre dans le silence de la ferme de Willow, l'interrompant dans sa peinture. Surprise, elle rejoint l'entrée de la maison dans le plus grande des silences. L'oreille tendue, elle écoute un instant vers l'extérieur, avant de tirer doucement la porte. De quelques centimètres. Suffisamment pour pouvoir voir qui vient de toquer, qui s'est aventuré jusqu'à chez elle. Un homme, inconnu, qu'elle salue rapidement, demandant de quelle manière elle peut l'aider. Et à vrai dire... La réponse, elle n'est pas sûre qu'elle lui plaît.
Je cherche une femme qui répond au nom de Willow Bowman. Les iris bleues de Willow se figent sur le visage du jeune homme qui la recherche. Comment a-t-il pu arriver jusqu'ici ? Il est rare qu'on arrive jusqu'à sa ferme pour la trouver. Et qui a pu lui indiquer qu'il devait venir ce week-end ? Enfin, à part le jardinier-homme à tout faire, elle ne voit personne d'autre qui a pu annoncer sa venue pour ce week-end. En tout cas, elle reste sceptique la blonde, et continue d'observer en silence l'homme qui semble nerveux, et qui ajoute avec rapidité qu'il est le mari de Kira.
Au prénom, le sang de Willow se glace. Son coeur semble rater un battement. Ou même deux. Sa respiration se fait courte, tandis qu'elle se reprend et ouvre la porte de manière à apparaître complètement. Ses yeux sont toujours posés sur le mari de sa petite fille, dont elle n'a pas eu de nouvelles depuis des années. Une descendante qu'elle n'a pas réussi à retrouver malgré ses recherches.

- Vous êtes le mari de Kira ?

Répète-t-elle interrogative et surprise. Elle ferme les yeux et secoue la tête une seconde. Puis, elle ouvre la porte en grand pour de bon. Elle ne court aucun risque. Enfin, elle l'espère.

- Je suis Willow. C'est moi que vous cherchez. Et vous êtes ?

En dehors du mari de sa petite-fille. Car il connaît son prénom, et même son nom, mais elle, elle n'a aucune idée de son identité. Une position de désavantage qu'elle n'aime pas. Sans parler du fait qu'elle aime savoir à qui elle a à faire.

- Venez, entrer. On sera mieux pour discuter.

Et au chaud aussi car le froid de janvier est mordant dans cette partie du New Jersey. Un bon feu de cheminée les attend dans le salon, où ils se rendent une fois le brun entré dans la demeure de la blonde. Elle l'y guide et lui indique le canapé quand ils y arrivent.

- Je vous en prie, asseyez vous.

Des mots qu'elle prononce en prenant place en face de son invité inattendu, prenant quelques secondes pour l'observer en silence. Et puis...

- Je peux savoir pourquoi vous me cherchiez ?

FERME DE WILLOW — New Jersey, 2025.

Keeran a envie de hocher la tête lorsqu’elle répète et lui demande s’il est le mari de Kira. Dans un sens, il l’est toujours, mais ce serait plutôt la conjugaison qu’il faudrait changer dans cette phrase. Il l’était. Kira n’existe plus et c’est encore aujourd’hui l’une des plus grandes souffrances présentes dans son cœur. Il suffit d’écouter ses albums et ses concerts pour comprendre que sa femme tient encore une place importante dans tout ce qu’il fait. Le barman serait peut-être prêt à passer à autre chose, qui sait ? Mais cette idée ne le traverse même pas. Ce sont plutôt ses enfants qui insistent pour qu’il refasse sa vie. Quoi qu’il arrive, Kira ne quittera jamais son cœur et son esprit, même s’il y a un jour de la place pour d’autres personnes.

— Je m’appelle Keeran, parvient-il à dire.

Même s’il a réussi à rentrer en lien avec cette femme, le stress n’a toujours pas quitté son corps. Il est toujours terrifié qu’elle lui referme la porte au nez. Ce serait une chance de moins d’aider ses enfants. Keeran devrait alors trouver une autre solution, emprunter un autre chemin. Et le problème c’est qu’il ne sait pas du tout vers qui aller ensuite.

Lorsqu’elle s’écarte de la porte pour le laisser entrer, Keeran ne parvient pas à retenir le soupir de soulagement qui s’échappe de ses lèvres. Il y voit une vraie chance de pouvoir aider ses enfants. Même si rien n’est sûr, c’est un pas de plus vers de l’aide potentielle. Et il ne peut qu’en être heureux.

Hésitant, Keeran la suit à travers cette ferme entièrement rénovée. L’intérieur lui semble décoré avec goût, mais il fait attention à ne pas être trop observateur pour ne pas mettre mal à l’aise l’hôte chez qui il vient d’être invité. Le musicien s'assoit finalement dans le canapé, près de la cheminée. Il réalise alors que son corps était gelé. Trop occupé à penser à son objectif, il en a presque oublié le froid de janvier.

La question vient ensuite de nouveau sur le tapis. Que fait-il ici ? Pourquoi cherche-t-il à parler à Willow ? Keeran ravale sa salive, car il a conscience qu’il vient aussi annoncer une mauvaise nouvelle.


— Je pense que vous pouvez avoir des réponses à certaines de mes questions… Il marque une pause et prend une grande inspiration. Du moins je l’espère sincèrement.

Non pas pour lui, mais pour ses enfants. Il n’y a qu'eux qui compte. Ils ont toujours sa priorité depuis que Kira les a mis au monde. Sa famille a toujours été sa priorité.
Avant de poursuivre, il réfléchit à la meilleure manière de présenter le décès de Kira à sa grand-mère, il se dit que parler des jumeaux pourrait être un bon début. Après tout, c’est grâce à eux qu’il est là. Keeran sort son téléphone et il cherche une photo de ses enfants. Il tend l’appareil vers Willow et les lui présente.

— Ce sont vos… arrières… petits enfants.

Hésitant. Eh oui, il faut dire que Willow est loin de ressembler à une mémé, alors prononcer ces simples mots lui semble assez fou. Keeran continue de faire défiler des photos, laissant le temps à Willow de digérer cette première nouvelle plutôt positive. Viendra ensuite le moment de parler de Kira. Mais il a besoin de prendre son temps, il craint d’être trop bouleversé par l’émotion.

FERME DE WILLOW — New Jersey, 2025. L'homme qui vient de toquer n'est autre que le mari de Kira. Une de ses petites-filles, dont elle n'a pas de nouvelles depuis des années. Tout comme sa mère, Tony, fille de Willow. Partie en désaccord avec sa famille, elle n'a plus jamais donné de nouvelles, au grand dam de sa grand-mère... Et voilà qu'aujourd'hui, son mari toque à la porte de la ferme de la blonde. Seul. Sans Kira. De quoi intriguer l'Originelle, qui ne peut s'empêcher de répéter ce qu'elle a entendu, interrogative, avant de se reprendre. Une longue inspiration, ses iris closent un instant, alors que le nom du brun lui parvient aux oreilles. Keeran. Quand elle repose ses yeux sur lui, Willow lui adresse un signe de tête, un léger sourire sur les lèvres.

Elle ne court aucun risque. Phrase qu'elle se répète intérieurement, tout en s'écartant de la porte pour laisser entrer l'homme qui lui fait face à l'intérieur de sa maison. Il y fait bien plus chaud que sur le pas de la porte d'entrée. Et pour discuter, ce sera plus agréable. Surtout qu'elle se doute que la conversation à venir va être intense en émotion. Son intuition qui lui dit ça. Alors, elle guide Keeran jusqu'à son salon, où un feu crépite dans la cheminée, donnant une chaleur brute à la pièce, comme la blonde aime.

Assise face au jeune homme, Willow croise ses jambes et observe un instant le brun avant de lui poser la question qui lui brûle les lèvres: pourquoi est-ce qu'il la cherche elle ? La question la taraude depuis plusieurs minutes, et la poser la soulage un peu. Pourtant, elle attend la réponse avec une certaine impatience... Et doit avouer être surprise par la première réponse qu'elle a.

- Des réponses ?

Et voilà qu'elle répète encore. Il faudrait qu'elle se reprenne. Mais voir quelqu'un venir jusqu'à chez elle, ici, dans cette maison qui est son refuge, et peu connu, ça la bouleverse plus qu'elle ne le pense.

- Je m'excuse, j'avoue que tout cela me déboussole un peu.

Confesse-t-elle après quelques secondes, non sans se redresser dans son fauteuil. Elle s'éclaircit la voix, et voilà qu'elle reprend la parole.

- Je ne sais pas si je vais avoir des réponses, mais si je peux vous aider, ça sera avec plaisir.

Un sourire vient ponctuer sa phrase. Un sourire à la fois amicale et encourageant pour Keeran, qui semble réfléchir à tout va... jusqu'à sortir son téléphone portable pour y chercher quelque chose. Une photo. Qu'il montre à Willow en lui tendant son téléphone. Une image sur laquelle se trouve deux adolescents souriant à l'objectif. Deux enfants qui sont ses arrières-petits-enfants. La surprise se lit alors sur le visage de la blonde. Une surprise renforcée quand les paroles de Keeran lui arrive au cerveau: il a bien dit arrières-petits-enfants ? Comment sait-il que...

- Comment ...

Commence-t-elle avant de se reprendre et de regarder à nouveau le portable qu'elle tient entre ses mains. Elle en profite pour réorganiser ses pensées afin d'avoir un discours cohérent. Quelques secondes pour tout assimiler. Puis, elle relève les yeux vers Keeran, son téléphone toujours entre ses doigts, pas décidée à lui rendre. Pour le moment.

- Comment est-ce que vous savez ?

Qu'elle est leur arrière-grand-mère ? Kira aurait dévoilé ce secret ?

- Ils sont magnifiques en tout cas. Comment s'appellent-ils ?

Y aller doucement, car l'émotion la remplit, et elle a envie d'en savoir plus. Comme leur âge par exemple, ou ce qu'ils aiment. Ou s'ils ont des mutations. Comme elle et beaucoup de ses descendants. Mais chaque chose en son temps. Et puis... il y a Kira aussi. Oui, il n'a pas parlé d'elle. Pas encore en tout cas.

- Et Kira ?