seek & destroy (deon)

cw: deuil

Lorsqu'il quitte le bureau, il est déjà tard. Esteban rate son bus et décide de ne pas rentrer pour l'instant, il envoie un message à Pasqual pour l'informer de son intention. Ils aiment se rassurer mutuellement sur leurs positions, encore plus depuis son accident. Ca fait des années maintenant, mais l'inquiétude reste la même. Sans doute un signe du destin qui le force à rester dans le quartier du Nexus. Il pourrait faire demi-tour, prétexter avoir oublié un dossier et se glisser dans son bureau. La ville ne dort jamais et le crime attend en général le crépuscule. Sauf que si un supérieur le croise il risque de se faire jeter dehors. On a pas besoin de types qui se tuent à la tâche. Il a besoin de toute sa clarté d'esprit.

Il pourrait passer voir Deon.
Esteban refuse d'arriver les mains vides alors il s'arrêter dans une boutique pour récupérer une boite de biscuits, ou du chocolat (qu'il ne pourra pas manger). Il hésite longtemps et réalise qu'il peut se payer les deux. Il fait assez de choix tous les jours, des vrais choix. Tout de suite, ça le fait relativiser sur les conséquences qu'il rencontrera s'il se trompe de paquet de céréales pour le matin. Nulles. Comparées aux décisions qu'il est amené à prendre parfois. Maintenant il est l'exemple vivant qu'on peut s'en sortir dans la vie avec de l'anxiété. Il paye et reprend sa route. Le flot de ses pensées est si calme qu'il est tenté de s'y perdre, mais dès qu'il s'y attarde trop Esteban est rattrapé par l'inévitable et tout ce qu'il essaye de fuir.  Shallom.

Il a reçu le coup de fil qu'il redoutait le plus. Jusqu'au dernier moment il a cru qu'on lui apporterait une bonne nouvelle. Ce n'est plus qu'une question de temps maintenant, avant que tout ne s'effondre. Il se prépare à affronter les prochaines semaines. Esteban n'a pas encore identité le sentiment qui le prend à la gorge. La peine, le manque, quelque chose en plus qui lui rappelle vaguement un autre homme et la même fatalité. Son coeur se brise encore.
Il s'en veut d'aller le voir parce qu'il a besoin de vider son sac et qu'il refuse d'imposer ce fardeau à son frère, lui faire revivre le même traumatisme par lequel il est passé. Pas mieux pour Deon pourtant. Sauf que Deon l'a vécu, l'a traversé, il n'a pas eu la version happy end. Esteban non plus ne l'aura pas. Il a besoin de quelqu'un qui ne sera pas tenté d'être optimiste. Puis, peut-être qu'ils n'auront même pas à aborder le sujet. Juste une soirée improvisée entre potes si Deon veut bien de lui. Esteban connaît l'adresse, le numéro, s'y rend sans mal. Fatigué et rêvant maintenant de s'affaler quelque part et ne plus bouger. Des tensions inconnues se font sentir dans son dos. Il sonne à l'interphone par politesse. Si Deon ne répond pas il sera sage et rentrera. D'ailleurs, il aurait dû faire ça. Mais trop tard. « Deon ? C'est Esteban, je sais qu'il est tard mais j'ai ramené le dessert et je passais dans le coin... Il ne sait même pas l'heure exacte, juste que le soleil s'est couché depuis.   Je suis désolé je ne t'ai pas appelé avant, si tu préfères être tranquille je comprends. »  

Esteban se faufile, un brin coupable. Il prend les escaliers parce qu'il le peut, peut-être une crainte latente des ascenseurs. Parfois il s'imagine à nouveau, tomber, tomber, être enseveli et il veut choisir sa tombe. Un ascenseur écrasé ne lui évoque rien de bien réjouissant. Ce sont des craintes infondées. Elles sont là, des réminiscences de quelques choses. Il n'est pas essoufflé même après avoir couru. Il devrait s'en réjouir, Esteban déteste être déchiré. Il a décidé, aussi, qu'il se parlerait ainsi. Mutant ne lui convient pas totalement, il ne s'identifie par dedans‧ Il ne s'identifie pas à grand choses de sa vie, son genre, sa nature. Le monologue interne est toujours plus acerbe, plus vif. Il n'y a que sa famille qui soit parfaite. Que ses proches, ses amitiés et peut-être sa carrière. Les autres, forcément, tout va mieux quand il s'agit des autres, quand ils sont là pour l'influencer ou le soutenir. S'il était seul il serait misérable.

L'accolade familière fait du bien. Une étreinte au coeur. Il lui sauverait une centaines de fois la vie au prix de la sienne. Avant, Deon c'était tout ce qu'il aurait aimé être. Marié, un enfant, le cours normal de la vie. A la place, il n'a jamais touché quelqu'un du bout des doigts, il a aimé toutes les mauvaises personnes possibles, incapable de lui rendre. Il ne voudrait pas transmettre sa malédiction, il en serait malade. (Il remercie le ciel de ne pas lui avoir donné la capacité de le porterpar dessus le marché). Un doux rêve, brisé, car même son couple goal n'est pas immunisé aux drames de la vie. Il marche sur les œufs depuis. Il a au moins confirmation d'un doute qu'il avait depuis longtemps ; l'amour est mort, n'existe plus. « I don't want to wake the kiddo, don't worry I'll be quiet. I'm good at it. Même quand il parle normalement, Esteban murmure. Il sait disparaître, après tout, et effrayer quelques collègues. Il sait être transparent. Il ne le sait peut-être pas, peut-être qu'il est tellement déchiré qu'il peut réellement disparaître.
Ce serait drôle.
S'il pouvait disparaître, est-ce qu'il voudrait réapparaître ?

« I-I don't remember. I'm fine with a glass of water you know. I don't want to bother you. » Pas alors qu'il se pointe à une heure impossible. Esteban trouve un endroit ou s'assoir et déballe le paquet de donuts. C'est très bien, ça, pour diner, ça lui suffit. Les repas sur le pouce et puis les semaines où il se gave de protéines et de compliments en tout genre. Il connaît. « How are you ? And how's Dewey ? You do look tired. Il devrait partir. Deon a peut-être envie d'une soirée au calme.
Mais il ne peut pas être seul avec ses pensées.
Avec son fantôme, celui qui va bientôt venir le hanter.
Il en a tellement, des fantômes, il ne devrait plus en avoir peur. Il est capable de s'en foutre quand il n'a pas leur nom, quand il ne sait pas s'ils ont une famille. C'est trop facile quand il appuie sur la gâchette, quand il sait pourquoi il le fait. Quand il y a une sorte de justice.
Rien n'est plus injuste qu'un accident. C'est le principe.

Il trouvera un moyen de lui rendre la pareille, il lui déposera quelque chose demain  - enfin, plus tard. Esteban a l'habitude de nourrir les autres, moins lui même. Il attend de ressentir la faim dévorer ses entrailles, mais lorsqu'il est concentré il est capable de l'oublier, jusqu'à atteindre un point critique. Il n'essaye pas non plus de faire des efforts. Il tient debout, c'est suffisant, non ? Il n'est plus autant sur le terrain qu'avant. Il abuse peut-être de boissons protéinés. Il  prend un bon brunch quand il va faire du sport. Esteban mange beaucoup le matin et après, c'est  au feeling.  « You're too good » Même si ce n'est que des pâtes, il ne va pas voir son ami pour la qualité du repas, comme si il avait dans un quatre étoiles. La cuisine de son ami sera toujours meilleure que tout parce qu'elle est faite avec le coeur.
Deon est too good, indeed.

Il y a une douceur en lui, peut-être est-elle venue avec sa parentalité (ou elle a toujours été là). Esteban ne met jamais le doigt dessus, effleure tout juste le concept ; il envie cette tendresse, cette légèreté qu''il libère. Le mutant sait combien il a souffert dans le passé, ces failles, ces cicatrices qui se sont refermées mais à l'intérieur la douleur tiraille. Comme un os mal ressoudé. Les pertes se trainent, des membres manquants, difficile d'imagine un seul instant comment il pourrait vivre sans son propre frère. Autant s'arracher le coeur à main nue, la douleur serait moindre. Autant mourir. Ce qui ne tue pas rend plus fort, il paraît. Endurci.
Il voudrait être comme Deon, il l'a en lui quelque part. Toujours plus simple devant les autres, d'offrir un sourire, une poignée de main réconfortante. On ne lui demander que d'écouter, ça lui évite d'avoir à donner son avis. Il ne saurait pas quoi dire.
Il n'a jamais su quoi dire.
Il a beaucoup de choses à dire.
En fait il ne sait pas comment le dire.

« A cat, really ? il sourit, amusé, I hope you're ready for the ride. You don't own a cat, the cat own you. » Du moins, c'est ce qu'on lui a toujours dit, personne pour démentir ce fait. Il a une relation particulière avec les chats, ou plutôt ils ont une relation particulière avec lui. Peut-être à cause de son odeur. Quelque chose comme ça. I think I still have my plushies. My old games, when he's going to be older. I love pokemon. Il a téléchargé Pokemon Go à sa sortie et le jeu l'a accompagné lors de ses footings. Kids, they're all the same aren't they ? » Les mêmes questions, les mêmes yeux innocents, les mêmes sujets trop profonds. Il paraît qu'il était un gamin comme ça, encouragé par son frère.

Comment il va ? Il va, ça va. Il n'a pas l'habitude de dire le contraire. « Tired. Il hausse les épaules, au bord du craquage mais tant qu'on ne le poussera pas dans le vide, Esteban s'y refuse. Il ne peut pas flancher. Il n'a pas le droit, pas maintenant, pas alors qu'il a maintenu la barre si longtemps, pas alors qu'il a toujours été fort. Il attaque ses pâtes avec voracité, il remplit le vide. Sauf que la nourriture n'a jamais rempli ce rôle, qu'il n'a ni alcool, ni sexe. Aucune putain de drogue pour faire passer le mal. Et le pire n'est même pas encore arrivé, alors il pleure en silence et essuie le coin de ses yeux en espérant qu'on l'oublie.
Qu'il soit vraiment transparent.
Il aurait préféré ce pouvoir.
Il n'aurait pas voulu redevenir visible.

Ce doit être un tel bonheur d'avoir un enfant dans sa vie. Qui vien boulverser le quotidien et donner un nouveau sens à la vie, Esteban veut être présent pour Deon et sa famille. Il met un point d'honneur à honorer cette promesse qu'il lui a faite, il se sent quelquepart, responsable de leur sécurité Il veillera toujours sur leur sécurité. Il  faudra qu'il vienne, pour le café, pour les bonnes nouvelles, pour faire autre chose que se plaindre, se lamenter de la sorte. Il se demande comment ses amis le supportent encore quand il émane autant de négativité, un peu trop conscient  soudain de décharger systématiquement ses bagages sans prendre la peine d'être présent pour les évènements heureux. Ce n'est pas comme ça qu'il est sensé les protéger.

Deon est préventif, Esteban peut le voir dans sa manière de prendre des pincettes avec lui. Il lit en lui comme dans un livre ouvert, il connaît ses failles, il sait à quel point il peut être sensible avec certains sujets. Le boulot est un sujet de conversation récurent, surtout depuis sa promotion et l'état de santé inquiétant de Shallom. Il vit ce que ses proches ont vécu, quand il était à sa place, allongé dans ce lit d'hôpital sans aucune certitude sur sa survie.  Branché aux machines qui le retiennent en vie. Il pense à Pasqual et se demande comment il a fait pour tenir aussi longtemps sans devenir fou. Chaque fois qu'il se dit qu'il peut le faire, qu'il peut aller de l'avant, quelque chose le renvoie dans les couloirs sombres de ses angoisses. Aujourd'hui elles ont gagné, les pires scénaros qu'il s'était imaginé sont tout simplement en train de se réaliser. Il est là, impuissant.   Shallom is... Shallom, it's about her yes, she's, she's not good Il lui faut plus d'air, maintenant. Esteban se ressere un verre d'eau et le boit d'une traite. Il aurait préféré un alcool fort. Il a cette image d'homms solides qui encaissent tous les maux de l'existence et les noyent sous une nappe d'alcool. It's over. I got a call earlier. She won't wake up. Juste comme ça, à cause d'un accident stupide. Il n'ose pas regarder Deon dans les yeux (il sait, il est passé par là).
Esteban soupire, capable de refouler ses émotions une fois de plus. Il n'a pas craqué jusqu'ici.

cw : mort & deuil

Esteban n'y est pas allé. En fait, depuis leur rendez-vous manqué, il n'a ni trouvé le temps, ni le courage de se rendre à l'hôpital. Il a peur de ce qu'il va y trouver. Il refuse que la dernière image de Shallom qu'il va graver dans rétine sera celle d'une femme affaiblie, branchée à des machines. Son corps s'accroche à la vie par réflexe mais quelqu'un part son esprit s'en est déjà allé. Maintenant le corps lâche parce qu'ils ne peuvent pas faire de miracle. Il y a tant de choses qu'ils peuvent faire, que le progrès à apporté, personne n'a encore trouvé le moyen de remonter le temps. Les gens meurent et Esteban prend conscience de la chance qu'il a d'être toujours vivant, mêlé à l'incompréhension et la culpabilité d'avoir survécu. Pourquoi lui, plus qu'un autre ?
C'est idiot et il le regrettera sans doute toute sa vie, il aurait pu lui parler. Il y a un enfant dans son coeur qui se dit qu'il aurait pu la convaincre de revenir et l'adulte qui pense l'avoir abandonné par lâcheté. Il n'a pas osé affronter, regarder dans les yeux la réalité alors que son propre frère y a été forcé. Pasqual serait resté, Pasqual aurait prié et Esteban s'est simplement enfermé. Il ne sait pas s'y prendre.

Il sait que ce n'est pas de la fuite et même si c'était le cas on lui pardonnerait pour cette fois de ne pas affronter l'ennemi de face. Il faut être honnête, ils sont tous assez fous pour aller au devant du danger et croiser le fer avec le destin, aucun n'est prêt à regarder la faucheuse droit dans les yeux. Enfin, peut-être, c'est déjà arrivé. Esteban s'en souvient, vaguement.
Sa déchirure a toujours eu un arrière goût de mort.

« I couldn't. » Il avoue, coupable. A la place, il gardera en tête son sourire, sa posture stricte et ses ordres toujours clairs. Maintenant il va devoir assurer la relève, il n'est plus question de faire du remplacement. Esteban prend pleinement conscience qu'il est in charge maintenant. Au milieu de la nuit, rongé par le deuil, il  s'en trouve incapable. « How do you do it ? Il ose à peine lui demander, la voix aussi basse qu'un simple.   How do you survive. » Il a perdu des collègues. Il a enterré des amis, des camarades. Shallom c'est autre chose. Deon peut comprendre, Deon a aussi perdu quelque chose qui lui a laissé un trou béant. « Maybe I wasn't supposed to hear what she wanted to say. Il ricane, amer. Maybe I killed her. » Et il ne devrait pas penser ça. It's just an accident. It doesn't make sense. » C'est injuste et brutal. Elle aurait pu mourir sur le terrain, ça aurait pu être un règlement de compte, ça aurait pu être la vieillesse.
Juste un accident.
Juste un accident.
Juste un accident.
Injuste.

Deon a le mot juste (évidemment). Ça ne devrait pas être une surprise. C'est exactement ce qu'Esteban ressent, parce que le deuil il en connait tout le rayon, il est passé par là. Esteban se raccroche à lui désespérément (comme il compte toujours trop sur les autres). La vie continue et lui a le sentiment qu'il manque quelque chose, qu'ils ont tous oublié quelque chose, laissé quelqu'un dernière. Parce qu'il le faut, se lamenter ne va pas accélérer son rétablissement. Maintenant que le sort de Shallom est fixé, il sait que rien n'aurait pu changer le cours des choses. Maintenant, c'est à lui d'assurer, de faire l'affaire et de montrer qu'un tragique accident ne l'affaiblit pas. C'est toujours le même problème. Esteban est trop sensible. Il se laisse trop facilement déstabiliser. Et alors ? « Thank you. It helps. I think I needed to hear that. »  Le sourire est douloureux. Esteban parvient à peine à le forcer sur ses lèvres. Il a remué toutes ces émotions ce soir et réalisé à quel point il est facile de tout mettre dans un coin et décider de laisser pourrir. Ce n'est pas un comportement digne d'un homme comme lui, mais c'est comme ça pour tout le monde. Son esprit cherche à se défendre de ce qui est trop violent. Presque insupportable. « When it's so sudden, it feels so much worse. And you know what I mean.  Il n'ose pas prétendre que si Shallom avait été malade, il aurait mieux supporté son adieu. Lorsqu'un accident se produit, tout va beaucoup trop vite. Il n'a pas le temps de digérer la nouvelle qu'on l'appelle pour lui dire que c'est maintenant qu'il doit venir ou jamais. Il ne sait pas encore s'il va regretter de ne pas avoir eu le courage d'aller à l'hopital. Une chose est sur, il se sent déjà coupable de l'avoir abandonnée dans ses derniers instants. It's unfair. »

L'affection qu'il portait à cette femme  est problématique depuis le début. Maintenant c'est un tout autre problème auquel il est exposé. Un genre d'héritage dont il n'a pas besoin. « I guess this is why you don't mix feelings and work stuff.  En particulier dans une intervention d'élite, encore plus quand ils sont ceux qui vont sur le terrain.
Esteban se calme lentement, sa main accroche le bras de Deon en miroir. Le contact humain le recentre, l'apaise, le rappelle sur terre et loin de ses pensées. Elles sont envahissantes la nuit. C'est pareil pour tout le monde. « You're like a little brother to me, you know ? If you ever need anything, I'll always be here. I know I say that all the time. I really mean it. » Il lui doit tellement. Tout ce support qu'il apporte sans même le savoir, cette présence réconfortante dans sa vie.

Pour sa supérieur, la fin n'a pas été rapide. Au moins, elle a été paisible. En partant dans son sommeil, il est persuadé qu'elle n'a pas souffert. Avec un peu de chance, elle n'a pas non plus senti l'accident, elle est passée du jour à la nuit. C'est ce qu'on souhaite à ceux que l'on aime, une fin noble et décente. Même si la sienne est injuste -ça l'est toujours - et que ça n'aurait pas dû arriver. Esteban ne saura jamais ce qui s'est réellement passé, à moins de mener l'enquête. Ses chefs ont été formels, il n'y a rien à élucider autour d'un accident. Ce genre de choses arrivent. Bien qu'ils s'imaginent tous mourir sur le terrain car les dangers y rôdent, personne n'est à l'abri du destin. Les choses vont vite. La vie est fragile, éphémère. On peut prétendre en avoir conscience, ce n'est pas vrai.
Esteban croit tout savoir, en fait il ne sait rien. Rien de son coeur, de ses sentiments, de ses réactions. De ce qui viendra après la peine.

Elle gronde déjà, la colère au fond de lui. Elle l'effraie. Il la réprime, cette nature honteuse qu'il aimerait pouvoir supprimer. You cannot control your feelings. « I must. Il porte sur ses épaules le poids d'un secret qui ne peut plus éclate au grand jour maintenant, des sentiments qu'il aurait mieux fait d'écouter avant qu'il ne soit trop tard. Ne reste que la frustration. I have to. Sa voix se brise.
Il doit se contrôler.
S'il ne le fait pas. Esteban ignore ce qui se produira.

Esteban ne devrait pas abuser de son hospitalité, mais lorsqu'il essaye de se relever toute l'énergie de son corps s'est évaporée et il reste le cul visée sur sa chaise, le ventre plein et le regard dans le vide. La fatigue le rattrape. Il n'a pas dormi plus de six heures depuis trop longtemps, il ne doit pas jouer avec sa santé. Sinon, il sera le prochain sur la liste. Ce n'est pas comme si qu'il rendra Shallom fière. Elle voudrait qu'il se batte pour toutes les valeurs qu'elle lui a enseigné, par qu'il se lamente et se noie dans toutes sortes de diversions. « Can I ? I'm not sure I can make it home tonight. Il baille. Il pourrait dormir sur la table. Il n'a pas envie de s'endormir dans le métro. I'll sleep on the couch, I'll probably be gone before you wake up. Esteban ne reste pas longtemps. Même chez lui, c'est à peine s'il connaît l'agencement de l'appartement. Il s'en rend compte lorsqu'il cherche ses affaires. Deon est un frère. Esteban a de la chance. Il a tant de frères, de tous horizons, qu'il soit de son sang ou non. Il n'est pas seul. You should meet my brother and my dads. I want you to be part of the family. » Il glousse.
Quel dommage que la solitude même parvienne à le convaincre de l'inverse.
Seul contre le monde. Parce que son monde s'écroule.