We can't escape ;; Maeve

TW : prise d'otage (cinéma), haine de soi, vulgarité narrative.

Il ne se reconnaît plus, dans le miroir.
Jophiel lui fait face ; l'ancien.

Dans la loge, il est seul, tout le monde parti dès lors qu'ils ont eu fini de faire tout ce qui était nécessaire ; ainsi Liam avait retrouvé sa panoplie de super vilain, retrouvé les cheveux blonds décolorés, les multiples piercings, la haine dans le regard. Cette dernière n'était pas si difficile à retrouver ; il lui suffit de continuer à se fixer pour qu'elle dégueule de tout ses pores.

La dernière fois qu'il était venu ici, c'était pour faire mine de prendre en otage le plateau, inviter un des Sept à les libérer s'il osait.

À présent, tout est différent.
Il est devenu un Sept.

L'ironie lui sale un peu plus la bouche ; rend l'air quasi irrespirable.

Et il fixe son reflet, tant qu'on ne vient pas le chercher. Parce qu'il ne sait pas quoi faire d'autre, que le tournage débutera bientôt ; parce que la saison 1 de "son histoire" est à peine au début de sa diffusion qu'ils tournent déjà la suite. Cet événement avait été marquant, parce qu'il avait s'agit de la fin d'un journal télévisé, que la pub avait fait parler d'elle et les places de cinéma vendues avaient explosé ensuite ; alors ils sont bien obligé d'en parler à nouveau, Icarus. Mais cette fois, le journal est fini depuis un moment ; cette fois, il fait même nuit dehors ; cette fois, il y a des personnes partout pour préparer les tournages du jour.

Liam n'aime pas cette effervescence.

Il se redresse finalement, pour soulever deux pans de son costume ; pour observer la cicatrice dont il a hérité, depuis l'attaque de la tour. Ses doigts la frôlent ; pour rien au monde il ne laisserait Cory faire disparaitre celle-ci. Parce qu'elle le fascine, parce qu'il a besoin de se rappeler qu'il est encore en vie ; devenu un Sept.


On frappe à sa porte ; les pans retombent et il se bouge ; vient et suit l'assistante de plateau qu'est venu le chercher ; Jophiel est maussade ; on dira qu'il est déjà dans le rôle ; et si autrefois il était méprisable, à présent il est incroyable.

Putain d'ironie.

On lui confie l'arme qu'il avait, la première fois ; Night n'est pas là, parce que le méchant avait envoyé son apprenti du mal seul, cette fois là ; pour lui prouver qu'il pouvait le faire. Et il l'avait fait, croupissant tristement sous les bottes d'un des Sept ensuite, jusqu'à perdre connaissance et être arrêté.
Et il est censé briller, à présent.

On appelle après les présentateurs ; on leur rappelle les informations qu'ils avaient dites, ce jour-là ; on leur donne leur texte à jouer, la surprise à simuler pour quand l'arme de Jophiel sera pointée vers eux.

3, 2, 1... Lumière.

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tw: prise d'otage, ptsd

Ca devrait être routinier.
Les caméras, les lumières trop fortes, les équipes de tournage qui vont et viennent au rythme et à l’organisation d’une fourmilière, c’est son plateau, ce sont ses collègues, son producteur, son prompteur, son quotidien… Ca devrait être plié en un clignement d’yeux, roulez les caméras et coupez.
Pourtant il y a un sentiment d’inconfort logé dans les côtes et accentué par le regard fuyant des gens autour d’elle. Chaque bruit de couloir quand elle passe est une variante d’une des questions suivantes : est-ce que c’est une bonne idée qu’elle soit là ? est-ce que c’est pas la meuf qui a failli mourir dans un livestream ? qu’est-ce qu’on fait d’elle si elle pète un câble ? Mais c’était la volonté des cols blancs qu’elle revienne sur le devant de la scène, qu’on ne perde aucune miette du buzz médiatique autour de son nom pour construire la suite de sa success story. Il était d’autant plus important qu’elle apparaisse dans la série sur Jophiel en reprenant son rôle, pour rappeler à son audience qu’elle n’en était pas à sa première prise d’otage, mais aussi pour profiter de l’aura de célébrité du nouveau Sept.
Chaque mouvement de sa vie est un calcul, une ligne de chiffres à maximiser et plus le temps passe et plus elle réalise que ça se fait à ses dépends. Elle est un rouage dans la machine, une pièce appartenant à son créateur, le corps à disposition par obligation contractuelle. Icarus exige et Icarus aura, c’est le deal qu’elle a signé. C’est pour ça qu’elle ne dit rien et s’habille d’un sourire rassurant quand elle s’assoit dans son siège face à son prompteur.

Dans son oreillette, on commence un décompte.
Elle a lu le scénario, elle l’a vécu, elle connaît Jophiel comme elle connaît Liam. Ca devrait être routinier.
Elle fixe la caméra devant elle comme si elle s’apprêtait à vraiment présenter le journal, le discours tout prêt sur les lèvres, la force de l’habitude qui prend les devant quand le réalisateur donne son signal. Sa voix s’élève, le rythme se module à cette élocution typique des présentateurs de journaux et l’appréhension se dissout petit à petit à mesure qu’elle entre dans le rôle.
On fait quelques prises du plateau, elle répète son texte, à chaque avec plus de conviction et à cause des lumières, elle ne capte pas dans la périphérie de son regard l’assistant qui prépare l’entrée fracassante du jeune homme. Alors quand la porte du plateau s’ouvre en grand, elle n’a pas besoin de feindre la surprise, celle-ci s’installe d’autorité sur son visage. Maeve était tellement prise par la situation qu’elle avait failli oublier la raison première de sa présence ici. Surprise également, parce que l’inconfort ressenti plus tôt se solidifie et lui remonte dans la gorge beaucoup trop rapidement. Elle a les yeux fixés sur l’arme et le reste se dissipe dans son esprit.

Ce n’est pas juste de l’inconfort, elle se rend compte que c’est un reliquat de peur, une peur qui ne l’a pas quittée une seule seconde depuis l’enlèvement - le vrai. Une peur qui la fige proprement sur place, les yeux rivés dans l’abysse du canon. Une peur qui l’empêche d’entendre le texte du villain et les instructions dans son oreillette, qu’elle n’exécute donc pas.

ft. @Liam Jones

Et voilà, il faut y aller.
Débiter le texte, se casser les cordes vocales.
Hurler comme si le monde en valait la peine encore.

Déverse ta haine, Jophiel.

Pantin vide depuis longtemps ; on lui a jamais appris les émotions, concrètement. Ils doivent être parfaits, intacts, mais brisés dès le plus jeune âge pour rentrer dans le moule qu'Icarus souhaite continuer à promouvoir. Qu'on continue de regarder leurs apprentis en se disant que ça doit être une vie merveilleuse ; ne pas se douter de la vérité, persister à se dire que ça doit être bien, beau, même remarquable de faire ça.

Ça.

L'armée est braquée ; Jophiel récite son texte, le grain de colère qu'il faut dans la voix ; la prise d'otage se fait en directe, alors il s'exprime à la caméra... Puis y'a plus rien ; plus personne pour réagir ; il regarde vers Maeve, parce qu'elle devrait parler, hurler, vouloir se cacher, maintenant ; et tout le monde attend quelques secondes, un flottement qui sera très aisé à couper au montage... Mais on ne peut pas faire des miracles avec du vide ; alors un retentissant "COUPEZ" fait que Jophiel n'existe déjà plus, pour les secondes à venir sans doute. On fait signe à des assistant·es d'aller s'occuper de la présentatrice et on l'a fait s'éloigner. Liam a l'impression qu'il a les mains moites, alors il repose l'arme factice là où elle était à l'origine et attend, écoutant pester le réalisateur du jour ; quelle putain de sotte ; et il fronce les sourcils, Liam, parce qu'il n'aime pas particulièrement qu'on parle des gens ainsi ; il a toujours été trop naïf.

Et le réalisateur hurle encore ; aujourd'hui, c'est sans doute lui le méchant de la scène ; Liam ne lui en veut même pas vraiment ; il sait la pression qu'Icarus est capable d'instiller chez les gens. Mais parce que l'attention est ailleurs, il se permet de disparaître de la scène, se dit qu'on reviendra le chercher quand ils auront tout en place à nouveau. Se faufile discrètement, retrouve le chemin de la loge et se glisse dedans ; s'attendait juste pas à y voir une autre âme dedans ; elle est cachée là. Sans doute la bonne idée d'une des assistantes que de le foutre dans sa loge à lui ; le réalisateur pourra pas aller la chercher par la peau du cou ainsi. "S-Salut." Liam reste surpris, presque interdit, avant de réussir à parler ; c'est pas fameux, mais c'est sans doute mieux que rien. "... On vous a ramené de l'eau ?" Il n'en voit pas à ses côtés ; alors se mouve vers le petit meuble réfrigéré où il en avait trouvé ; en attrape une et approche doucement de Maeve, pour poser délicatement la bouteille à côté d'elle. "Tenez. Elle est fraîche." C'est qu'elle a le teint livide, qu'aucun maquillage ne saurait camoufler ça ; elle va pas bien.

Liam comprend.

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tw: prise d'otage, stress post-traumatique, crise d'angoisse

L’espace de quelques secondes, Maeve trouve un endroit à l’intérieur d’elle-même dans lequel elle peut se rouler en boule et faire abstraction de ce qui se passe. C’est tout juste le temps qu’il lui faut pour tordre le cou à sa mutation, empêcher les émotions de se propager et révéler ainsi l’ampleur de sa vulnérabilité.
Son producteur a beaucoup moins foi en ses capacités à garder le contrôle et d’un signe de tête, il ordonne à une assistante de prendre la situation en charge. Maeve ne voit les choses se passer qu’en périphérie de sa vision, car son regard s’est plongé sur ses mains et elle appréhende le tremblement qui menace de gagner son corps depuis l’intérieur.
Quelqu’un lui touche le bras avec prudence et elle se laisse guider dans les couloirs sans résistance. Du moins, jusqu’à ce que ses doigts commencent à s’agiter et que le noeud dans sa poitrine remonte jusque dans sa gorge. Elle sent une vague de chaleur la traverser, pourtant sa peau se pare de mille frissons si délicats que la proximité de l’assistante est presque douloureuse.

“Va-t'en, Jenny.” Le ton se veut sec, mais la précipitation cache mal la panique qu’elle couve. L’assistante lui retourne un air interloqué et s’apprête à répliquer, mais sûrement que ce qu’elle voit sur le visage de Maeve la dissuade de dire quoi que ce soit et elle observe la présentatrice, la bouche ouverte mais les mots absents. Il y a une forme de sollicitude qui se creuse dans son regard, et ça ne fait qu’ajouter à l’agitation dans la poitrine de la brune. Cette fois, et avec plus de fermeté, elle attrape le bras de Jenny et la repousse. “Ne reste pas là. J’ai juste besoin de me poser cinq minutes et ça ira mieux mais…”
Elle a les poings serrés et elle force pour tout garder à l’intérieur, mais elle se sent pâlir à vue d’oeil, elle sent la sueur qui perle sur sa tempe et elle voit en miroir Jenny qui commence à traverser les mêmes étapes, gagnées par la même angoisse propagée en vague. “Juste va-t'en !” Et l’assistante ne se fait pas davantage prier, mais au lieu de rebrousser chemin vers le plateau, elle s’enfonce un peu plus dans le couloir des loges jusqu’aux bureaux du personnel et Maeve n’a pas d’autre choix que de pousser la porte juste derrière elle pour couper la zone d’influence de sa déchirure.

Elle n’a pas le temps d’analyser ce qu’il y a autour d’elle, elle ne se questionne même pas sur l’espace personnel qu’elle empiète, seul son instinct prend le contrôle. Les talons sont abandonnés au milieu de la pièce et elle fait encore quelques pas avant de se laisser glisser contre le mur jusqu’au sol. Maeve ramène ses genoux à elle et prend de profondes inspirations. L’obscurité et le silence soudain l’aident déjà à reprendre un peu de maîtrise sur elle, si bien qu’elle parvient à concevoir l’ironie de la situation, se souvient du même début de crise d’angoisse qui l’avait agitée dans la voiture pendant son enlèvement - le vrai.
La porte s’ouvre et la lumière se fait sur la triste scène qui fait un bien meilleur spectacle selon elle que la mascarade sur le plateau du réalisateur. Liam a une expression presque aussi penaude que la sienne, comme s’il était pris en faute dans sa propre loge. Maeve voudrait en sourire, mais son corps est au ralenti.
Lui aussi a de la sollicitude dans le regard, mais il trouve la présentatrice dans une meilleure disposition. Il approche avec précaution, comme on agirait avec un animal apeuré. Elle ne doit vraiment pas avoir fière allure. “Merci.” Elle articule avant de tendre la main et d’attraper la bouteille d’eau dont elle avale de longue gorgée avant de laisser sa tête aller contre le mur derrière elle. Les yeux fermés, elle prend encore quelques profondes inspirations et elle se sent revenir à elle, lentement mais sûrement. “Désolée, j’ai ouvert la première porte que j’ai trouvé pour être un peu tranquille.” Il n’y a pas d’autre excuse que le hasard pour les réunir à l’instant. Ca ne fait pas partie des habitudes de Maeve, le hasard. Tout est calculé d’ordinaire, manufacturé, savamment mis en scène, mais depuis l’enlèvement - le vrai, il n’y a plus que grains de sable dans la mécanique de sa vie. Tout est chaotique. Elle ne sait pas comment s’en défaire.

“Ronald doit être furieux.” Elle commente pour la forme, mais au fond elle n’en a rien à faire du réalisateur et de cette série et quelque chose en elle lui dit que Liam est aussi peu enchanté qu’elle alors qu’il en est le héros principal.
Maeve passe sa main sur son visage, sent la moiteur, la chaleur qui redonne des couleurs à ses joues, les petits cheveux collés à son front, ruinant les efforts de la coiffeuse. Le tourbillon d’émotion commence à se dissiper pour laisser place à une pointe d’agacement, celui d’avoir l’air aussi défaite devant le jeune homme. Heureusement, ce n’est pas sa première rencontre avec le héros et elle espère qu’il ne retiendra pas ça d’elle, parce qu’elle sait qu’elle tient une opportunité unique. Elle est devant un Sept, elle pourrait être proche d’un Sept. Il y a sept personnes importantes dans ce monde et il est l’une d’elles. Elle ne compte pas fermer cette porte trop rapidement.  


ft. @Liam Jones

Y aller doucement ; l'impression qu'aujourd'hui, ça sera peut-être le seul instant de douceur qu'ils pourraient avoir ; autant qu'il soit entre eux, au vu de la scène à faire. Alors il se pose juste à peine plus loin, quand elle a attrapé l'eau et l'observe, se rassure du fait qu'elle semble déjà un peu plus vivante à cet instant. Ses bras entourent le haut de ses genoux et son menton trouve cet amas de lui-même, pour s'y poser. "Aucun souci. Il ne viendra pas vous chercher ici." Parce que Liam est un sept, à présent ; qu'on leur laisse tout les caprices et qu'on ne veut pas les contrarier. Au moins ses prédécesseuses ont eu cet effet ; des tristes sires, mais fort de leurs royaumes tout de même. Il ne sait même plus pourquoi il les avaient tant admirés, tant tout lui semble factice à présent.

Mais il fera avec.
On l'a élevé pour ça.

Un haussement d'épaules. "Il l'est." Froncement de sourcils. "Mais il en est l'unique responsable." Il estime que c'est le cas ; qu'il faut être réellement stupide pour s'énerver contre quelqu'un qui est déjà dans le mal ; Liam sait que ça n'arrange jamais rien. Alors lui-même se mouve, se défaisant du cocon qu'il formait d'avec son corps, pour s'attraper une bouteille d'eau aussi. "Si vous voulez, je pourrais aller lui parler." Il propose ; sait déjà jouer avec ce rôle de monarque ; il sait qu'à présent, il est indispensable pour Icarus ; l'idée aurait été enthousiasmante, dans une autre vie. "Lui dire de se calmer. Vous n'avez pas à subir sa colère." Il peut l'encaisser ; ça ne serait pas la première fois.

Prend une gorgée d'eau ; la haine, il l'a déjà tant connu.
Elle était devenue une amie familière ; on le lui a reprise.

Pour autant, il songe chaque jour à celleux qui ont attaqué Icarus ; sait qu'un jour, cela reviendra. "Avez-vous besoin de quoi que ce soit, madame McAdams ?" L'a toujours été un gamin poli ; et pourrait tout lui donner sur un plateau d'argent, à cet instant ; il n'a qu'à claquer des doigts et on se casserait en deux pour le satisfaire.

Quel ennui.

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Si son regard fixe le jeune homme, son esprit dérive brièvement, remonte tous les chemins et les déviations de sa vie qui ont mené à cette situation : elle est dans la loge d’un Sept après avoir fait une crise de panique en se remémorant les conditions de son kidnapping. Si on retire chaque aspect terrifiant de tous ces événements, si on les ponce pour en retirer toutes les aspérités, ça laisse un constat en demi-teinte : quelque part, elle a réussi.
Ce n’est pas aussi réjouissant que ce à quoi elle s’attendait, mais elle s’éloigne de ce cheminement de pensée parce que la désillusion est la dernière chose dont elle a besoin dans sa vie.

“Oh, ne t’inquiète pas pour ça.” Maeve se compose un sourire rassurant. Comme elle reprend contenance, sa capacité à mentir lui revient. Les mensonges sont destinés à tous, mais à elle surtout, à ce reflet qu’elle aperçoit dans la périphérie de son regard là où se tient un miroir en pied. On n’est jamais mieux gaslight que par soi-même.
Bon héros qu’il est, il se propose en chevalier servant, armure brillante contre les foudres du réalisateur. Il sait qu’il est intouchable, paré de son nouveau titre qu’elle lui a annoncé sous les hurlements en délire de la foule. Il est un Sept et aux yeux de la société, c’est presque être un dieu. Mais Maeve a assez fréquenté les coulisses des relations publiques pour savoir que les vraies divinités sont les actionnaires et les directeurs d’Icarus qui font la pluie et le beau temps et s’amusent du spectacle de marionnettes qu’ils font du monde entier. Elle n’est qu’une poupée de chiffon entre leurs mains, Liam est une machine à sous, ils sont des lignes de chiffres avec un dollar à la fin.

“Il ne sera pas fâché bien longtemps.” Une lueur omineuse s’allume dans son regard, sa promesse se conclut par un sourire confiant. Son empathie ne fera qu’une bouchée du réalisateur. La colère lui remplira le ventre, malgré son goût de charbon et l’impression de sécheresse dans sa gorge après avoir avalé.

“Et non, je n’ai besoin de rien. Merci. Je vais déjà mieux.” Façon de parler. Le malaise qui la guette est bien plus profond. Mais il n’a pas besoin de savoir tout ça. A vrai dire, il a déjà trop vu d’elle, le monde entier a déjà trop vu d’elle, et elle s'inquiéterait de la sollicitude de Liam si elle ne le savait pas si serviable. Maeve avait trop mangé de la gentillesse exacerbée des gens autour d’elle, elle était fatiguée de les voir prendre encore plus de précautions pour lui adresser la parole. Finalement, elle ne se plaignait pas vraiment de l’éclat de voix du réalisateur. Au moins il se comportait normalement.
Elle se doute d’ailleurs que l’ancien apprenti a aussi vu le monde changer entièrement pour lui récemment. Pas pour les mêmes raisons. “Alors, comment tu t’adaptes à ta nouvelle vie ?”

ft. @Liam Jones

Il n'ira pas au devant de la colère ; ne sait pas si c'est Maeve qui souhaite l'en protéger en lui disant que ça passera, ou bien si elle le pense vraiment. Un brin de naïveté encore, malgré le nouveau statut ; sans doute est-ce ce fond qui l'a aidé à en arriver-là ; aisément manipulable, qualité requise pour être là où il est. Alors le gars acquiesce, buvant de son eau pour récupérer un peu de vie, de lui-même, de quelque chose en tout cas. "Bien, je vous fais confiance." Peut-être ne devrait-il pas ; qu'importe.

Voilà bien longtemps qu'il a donné sa vie à d'autres diables.

Conserve pourtant encore un bout d'âme ; de ce bout qui le fait être Liam plus que Jophiel encore. Veut aider, toujours, en permanence ; ne vit que pour ça, sans doute ; peut-être pour ça qu'on veut le protéger, parfois. Mais il n'y a personne d'autres qu'eux, là. Et même que Maeve, madame McAdams, prend des nouvelles de lui. Et peut-être est-ce la première fois qu'on lui demande, parce que tous supposent que tout doit être génial ; alors il lui faut de longues secondes pour se demander comment il s'adapte. "Hum... Bien, j'imagine." Ne saurait être sûr. "J'ai pas vraiment le temps d'y réfléchir. Tout va... Vite."  Depuis l'élection, il n'a qu'à peine le temps de respirer ; voir Andrea est compliqué, squatte parfois des nuits pour réussir à passer du temps avec elle. "Ca a quelque chose de reposant, en soi. J'imagine que ça va, alors." Il n'a plus le temps pour penser à ses peines ; pas même le temps de penser à Cory qui va se marier ; qu'il voit moins Dani aussi ; puis la colère de June, celle de Sloane aussi.

Pas même le temps de voir l'amour que le monde lui porte à présent.

Regard sur elle. "Et vous ?" Qu'il s'interroge. "J'imagine que présenter les élections a dû vous ouvrir des nouvelles portes ?" Liam ne peut que supposer, à ce jour ; il a pas le temps de regarder ce qu'il se passe autour du tourbillon dans lequel il est pris. Les gens avaient besoin de leurs Sept ; si fort, même, en tout ces temps troublés ; et Liam sentirait presque encore les cicatrices résultants de l'attaque des Orphans palpiter...

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Je vous fais confiance. Il ne le voit pas, parce que le sourire est intérieur. Beaucoup font cette erreur à la première approche, décident de laisser le bénéfice du doute à l’empathe, comme s’ils n’ouvraient pas la porte à un serpent. On ne peut pas leur en vouloir, elle a travaillé toute sa vie pour ça, pour contrôler la moindre inflexion de son visage, pour parfaire sa posture et sa présentation. Maeve connaît tous les codes sociaux, sait se glisser dans n’importe quel cadre, sait toujours quoi dire, quand le dire et à qui le dire, elle vit pour être le miroir des autres. C’est bien pour ça qu’elle ne sait pas qui est ce reflet ni ce qu’elle veut réellement. C’est bien pour ça que les stigmates de l’enlèvement restent, poisseux comme un filet de sueur dans un été moite. G.IA l’a déroutée, a vu sous le masque et s’est amusée à le montrer au monde entier.
Je vous fais confiance. Il ne devrait pas, personne ne le devrait. C’est pour ça qu’elle se demande s’il le dit simplement parce que ça appartient à la structure logique de leur conversation ou si c’est parce qu’il le pense sincèrement. Il est tellement doux qu’elle en conclut qu’il s’agit de la deuxième option. Maeve l’observe à la dérobée, se dit que c’est bien dommage qu’une âme comme la sienne passe dans la machine infernale qu’est Icarus. Il ne sera plus le même quand il sortira. Elle a vu les autres Sept…

Pourtant il dit qu’il va bien. Elle peine à le croire, parce qu’elle ne fait pas confiance facilement, elle. “Reposant, hmm…” Elle répète, laisse l’idée reposer sur sa langue sans y trouver ni goût ni sens. Il n’y a rien de reposant dans sa vie à part… Non. Elle ne doit pas penser à elle. Même si les tentacules de son pouvoir frémissent rien qu’à l’invocation, prêtes à grignoter le calme de sa pierre.
Maeve se concentre plutôt sur la question qui lui est renvoyée. “Ça m’a mis sur les radars, certainement.” Ceux des exécutifs et aussi ceux d’une certaine villain. “J’ai encore du chemin mais j’aimerais bien avoir ma propre émission. Si Icarus me laisse…” Elle se pince aussitôt les lèvres, parce que ça lui a échappé sans qu’elle y réfléchisse et ça lui arrive un peu trop souvent ces derniers temps. Sa faillibilité lui reste en travers de la gorge, ça fait des jours qu’elle a du mal à déglutir. Les mots contre la corporation ne sont pas censés sortir de SA bouche. Son seul atout, c’est bien sa bonne volonté à exécuter les ordres.
“En tout cas, j’aimerais sortir du créneau du matin au moins et enfin avoir un vrai rythme de sommeil.” Elle tente de se rattraper sur le ton de la plaisanterie, avec un certain détachement, parce qu’elle sait qu’elle ne devrait pas montrer le fil de ses aspirations, l’envers de ses pensées. Si c’était tombé dans les mauvaises oreilles, ça aurait déjà été utilisé contre elle. Mais Liam n’a pas l’air d’être fait du même tissu tendu et hypocrite du milieu médiatique. Il n’a pas l’air de tenir un couteau derrière lui, attendant patiemment la première occasion de planter les obstacles sur son chemin. Il lui inspire trop de métaphores d’innocence pour qu’elle se les énumère intérieurement.

“Et je t’en prie, appelle-moi Maeve. T’es pas obligé de garder un ton formel avec moi, je suis genre, à peine plus âgée que toi, tu sais ?” Et puis leur statut n’est pas le même, c’est elle qui devrait se plier en quatre pour être de bonne compagnie, pour attirer ses faveurs. Elle s’y refuse pourtant, parce qu’elle voit l’opportunité unique que c’est, de se lier d’amitié avec une des sept personnes les plus connues de la planète. C’est plus facile à faire sur un pied d’égalité.

ft. @Liam Jones

Acquiescement ; reposant, oui ; parce qu'il n'a pas grand choix à faire, qu'il est le pantin qu'Icarus a toujours manipulé. Il n'y a que quelques fresques qu'il se permet d'avoir, pour protéger celle devenue sa femme aux yeux de tout le monde ; et Icarus a fini par comprendre que c'était le seul sujet où le pantin pouvait se rebeller. Mais les fils sont serrés autour de ses poignets et il n'oppose aucune résistance à ce manège cruel qui se déroule, encore et encore. Alors Liam trouve ça, oui, reposant. Comme si tout était plus simple à présent, comme s'il n'avait plus à chercher comment on respire - Icarus a programmé toutes les alarmes pour le lui rappeler.

Ses yeux se posent sur la présentatrice, tandis qu'elle parle. Entend les ambitions, mais ne trouve pas ça surprenant ; ils en ont tous, après tout. Il a été le premier à souhaiter être quelqu'un, à briller, à être aimé. Grand mal lui en avait pris ; pourtant le voici à présent Sept, comme si tout avait été calculé depuis le départ - définitivement, non. "Je peux tenter de recommander votre nom, si vous voulez ?" Il ne sait pas bien s'il pourrait ; mais sans doute que s'il vante les mérites de quelqu'un dans une interview ou publiquement, simplement, ça pourrait l'aider à atteindre ses objectifs. Il ne sait pas bien, ne mesure pas encore à quel point sa parole est faite d'or, à quel point il est un trésor qui pourrait extraire n'importe quoi de son estomac qu'on lui donnerait l'aumône tout de même.

Et McAdams souhaite détendre un peu le ton ; et Liam n'est pas chiant, alors il se contente de hocher encore, comme s'il avait attendu la permission pour ça. "Maeve." Offre un bout de sourire, finalement. "Ca me fait un peu étrange, mais je vais vite m'adapter." La politesse est une valeur qu'on lui a inscrit au fer chaud dans le crâne ; difficile de se défaire d'un formatage aussi ancré. "Si ça peut te rassurer, je suis comme ça avec tout le monde." Liam est un être réservé ; pour autant, son rôle le force à sortir de tout ça, quand on attend de lui qu'il soit Jophiel - mais ici il n'y a qu'elleux. "Et j'ai un peu l'impression que la majorité des gens attendent ça. Du formel." Il s'étire un peu et se relève juste à peine, pour pouvoir attraper une barre de céréales qu'il a pu repérer ; lui désigne. "Tu en veux une ?" Savoir s'il lui lance une ou non ; dans tous les cas, il en finira d'avec une - devra bien passer à vérifier qu'il n'a rien entre les dents, lorsqu'ils devront repartir sur le plateau.

Se repose ; la regarde encore ; les jambes se retrouvent étalées de toutes leurs longueurs ; et bien y regarder, ses chevilles semblent si fines qu'on se demande comment il peut les avoir tant lier à Icarus sans se les briser. Comme quoi, le poids des chaînes ne fait pas toujours tout. "Est-ce que tu trouves tout ça ridicule ?" Qu'il demande, après un regard sur la loge. "Quand on avait tourné le braquage, à l'époque, il n'était pas question d'avoir ma propre loge ou quoi..." Un bref instant à y penser, avant de soupirer et secouer la tête. "Au moins tu as pu être tranquille." Sans doute est-ce là le seul point positif, alors qu'il croque dans sa barre pour récupérer un peu de vitamines.

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Liam est dans une pièce de théâtre dont il est le protagoniste et il ne s’en rend pas encore compte. Sa modestie paraît sincère, avec ce soupçon de maladresse qui va bien, il est seulement au début du chemin de la gloire et ne paraît pas encore comprendre le pouvoir qui réside maintenant entre ses mains. Certes, il n’est pas son propre maître à penser, mais son influence est son atout. Il lui suffit d’un clique pour impacter le monde et elle en est convaincue, il lui suffirait d’une mention pour propulser sa carrière encore plus loin.
C’est comme ça qu’elle comprend qu’il est vraiment innocent dans son approche, car il ne proposerait pas un tel service aussi gratuitement, comme s’il ne s’agissait pas de la commodité la plus importante de ce siècle. Nul doute alors qu’il est entouré de requins opportunistes, puisque son propre flair l’attire vers le sang frais. C’est dans ce genre de chair qu’elle devrait aussi planter ses dents.

D’un simple signe de la tête, elle décline son offre de barre de céréales et se félicite même de ne pas grimacer son dégoût de la nourriture à l’instant - et depuis plusieurs semaines même. C’est avec beaucoup de nonchalance qu’il reprend sa place à côté d’elle, alors qu’elle boue à l’intérieur de mille questions sur la marche à suivre, quoi faire et quoi dire pour attraper Liam dans son sillage et profiter de lui sans que ça ne se voit vraiment. C’est injuste pour lui, elle en est consciente, mais c’est le milieu dans lequel il signe et il n’y aura bientôt que des gens qui voudront tirer avantage de sa notoriété. Elle doit s’assurer d’être là avant eux.
Il est finalement le premier à reprendre la discussion et elle balaie la loge du regard également, mesure chaque mot qui passe dans son esprit avant de laisser tomber sur sa langue. “Absolument tout à propos de la célébrité est ridicule.” Et c’est ce qu’elle pense, bien au fond, quand elle voit au-delà du monstre dans le miroir. Ca ne veut pas dire qu’elle n’est pas désespérée, elle la veut malgré tout, en dépit de tous ceux qu’elle blesse, parce qu’elle a été élevé pour ça et parfois ça transpire un peu dans son égo de se dire qu’elle est même faite pour ça. “Mais si quelqu’un le mérite vraiment, je pense que c’est toi.” Elle a un maigre sourire, loin de ceux qu’elle offre au reste du monde, parce qu’étrangement, elle n’essaie pas de le séduire. Du moins pas de cette façon-là.

“J’ai l’impression que tu es le seul à ne pas avoir encore compris ce que tu es maintenant.” Et non qui il est, parce que son bon coeur et son identité n’ont plus d’importance. Il est un Sept, un héros, une superstar, un chouchou de l’Amérique et du monde entier et sous un certaine lumière, certains pourraient le méprendre pour une divinité.
“Je suis sûre que ton entourage te l’a déjà dit, mais tu ne peux plus proposer des services comme ça à n’importe qui, tu te rends pas compte du pouvoir que c’est. Même s’ils disent qu’ils t’adorent, pas tout le monde n’aura ton meilleur intérêt à coeur.” Elle en sait quelque chose, parce que c’est contre des gens comme elle qu’elle le met en garde. “Si je le vois à mon échelle, j’ose même pas imaginer ce qui se passe à la tienne.”


ft. @"Liam Jones"

Il est d'accord ; et pourtant, fut un temps il courait après. Avait tout abandonné, pour les beaux yeux d'Icarus ; avait su quitter son essentiel pour cette fameuse mise en lumière promise. Liam sait depuis longtemps à présent que c'était parce qu'il avait eu besoin de se sentir exister pour des gens ; et aussi pour éveiller des regrets chez celle qui l'avait abandonné. Ca avait été une impulsion enfantine, sans maturité ; mais qui l'avait prise à la gorge et fait accepter l'horreur absolu. Et la célébrité n'avait jamais apaisé le moindre chagrin ; n'avait fait que creuser plus le fond de leur rivière, les a transformé en lac.

Et depuis, Liam se noie.

Regard sur elle, face au mystère de ses mots ; ne sait pas bien pourquoi il mériterait plus que d'autres ; qu'elle, par exemple. Mais il a couru après et désormais la voici ; et il faudra composer avec, parce que de toute, voici longtemps que Liam Jones n'existe plus réellement... S'il a réellement existé un jour. Et acquiesce, à ses mots ; comme étrangement conscient de tout ça. "Ne t'en fais pas. Je sais bien que personne dans ce milieu ne tient à nous." Il en a conscience depuis longtemps ; d'autant plus en devenant Sept, car super vilain auparavant qu'on a négligé ; et maintenant, la loge. "Si mon naturel dérange, ils mettront quelqu'un d'autre à ma place." Ils l'ont mis là ; et peuvent le destituer bien assez vite ; comme ils ont pu le faire avec Siren auparavant. "Ca a quelque chose de rassurant, je trouve." Offre un sourire à Maeve pour accompagner cette réflexion. "D'ici-là, si j'ai pu aider parfois, ça sera une grande victoire pour moi." Pas celle d'Icarus ; pas celle de Jophiel.

Mais celle de Liam.

Le fait même un peu rire, tiens. "Ma naïveté me perdra." Et il secoue la tête, comme pour chasser la pensée ; cette vérité ; celle qui tuera le coeur d'enfant pour définitivement y plonger les griffes d'adultes. "Tu es arrivée à cette place comment ?" Qu'il demande alors ; curieux ; Maeve avait-elle était construite par d'autres ? Ou était-elle celle qui avait décidé qu'elle serait là ; et d'autres encore.

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Il y a une forme de quiétude qui s’installe dans la loge, comme si les rôles étaient inversés et que c’était la force tranquille et l’idéalisme profond de Liam qui se propageait en vague, au lieu de l’angoisse et des manigances habituelles de l’empathe. “Et bien, tu m’as aidée aujourd’hui,” elle déclare tranquillement, savourant le cocon calme. Il a raison de se contenter de petite victoire, parce que toutes les plus grandes seront toujours pour Icarus.
“Ecoute, tant que tu suis ce que Sloane te conseille de faire, tout devrait bien se passer pour toi.” Les pensées s’envolent jusqu’à sa consoeur, cette force de communication qui sait toujours quoi dire et quoi faire pour le public. Elle a accepté d’aider Maeve à naviguer les retombées médiatiques de son enlèvement, à capitaliser sur la sympathie qui règne encore sur son statut de victime. Elles ont planifié ensemble ce à quoi devraient ressembler ses premières apparitions publiques et ses premières déclarations sur l’Argo après son post écrit à la va-vite à la sortie de l’hôpital. Dans ce milieu, il ne faut jamais laisser quoi que ce soit au hasard, le risque est trop important. C’est tout ça, “cette place” à laquelle Liam fait référence. Quant à savoir comment elle est en est arrivée là, dernièrement elle se pose vraiment la question.

“La réponse courte ? Tout ça c’est ma mère qui m’a poussé à le faire.” Oui et non, et pas exactement, parce que bien sûr qu’elle le veut, elle ne veut que ça et n’a toujours voulu que ça, la célébrité, l’argent, l’aisance, l’impunité… Mais elle le veut parce qu’elle n’a finalement connu que cette quête. Si elle avait eu une enfance normale, qui sait ce qu’elle aurait fait de sa vie à la place ? “Enfin, elle avait pas exactement la télé en tête, mais elle voulait que je sois connue en tout cas.”
Il y a des moments comme ça pendant lesquels tout remonte à la surface, un noeud dans l’estomac qui remonte tout le système et devient une confession inattendue. Sa vie n’est pas un mystère, il y a une page Wikipédia à son nom, mais il n’y a que du factuel et jamais le pathos qu’il y a dans sa voix quand elle se lance. “Quand j’étais petite elle m’a traînée tout le long de la côte Est pour faire tous les concours de beauté possible. J’avais horreur de ça, mais c’est finalement comme ça que j’ai eu ma première plateforme.” Elle a du mal parfois à se remémorer cette période, tout n’est qu’un amalgame, comme si elle avait passé l’année après son titre dans une très longue fièvre. C’est un peu le cas, elle n’était jamais vraiment elle-même, qui que cela puisse être.

“Après Miss America, j’ai eu besoin d’une pause et puis je m’étais dit que si je voulais vraiment faire de ce milieu mon métier, je ferais mieux de l’étudier. Du coup je suis allée à la fac, j’ai vaguement maintenu une communauté, et puis ensuite j’ai décroché un job chez Omnivox. Relations presse et gestion de crise, j’étais dans les bureaux, j’avais même pas prévu de revenir sur le devant de la scène.” Elle parle en fixant le vide, en fait, en fixant les souvenirs qui remontent petit à petit dans sa mémoire, son burn out, sa fatigue, sa relation avec Rapha, leur rupture, elle passe tout ça sous le tapis parce qu’il y a bien assez de tragédies dont Liam est au courant pour ne pas lui ajouter encore plus de quoi la prendre en pitié. “Le gig du journal, c’était pas du tout dans les plans, mais la présentatrice avant moi a eu un accident et elle pouvait plus travailler. J’avais un contact dans l’équipe de production qui m’a proposé de passer le screen test, juste comme ça, et j’imagine que la magie a opéré.”
Et maintenant elle ne se voit plus faire autre chose. Elle aime voir la lumière de la caméra clignoter, elle aime sa voix de présentatrice, elle aime les petits moments d’improvisation, les conversations codifiées, qui suivent des scripts. Elle aime voir les rapports d’audience, elle aime imaginer les tenues qu’elle va porter et la réception qu’elles auront… L’agitation du plateau, l’odeur du café, le challenge du prompteur, la gravité de son expression qui fane dans un sourire une fois qu’elle passe à une bonne nouvelle dans l’actualité… Et surtout, elle aime le chèque qu’on lui remet et les opportunités d’en faire plus. “Donc voilà, globalement un peu de mommy issues, beaucoup de travail, de la chance et les bons contacts. Et bon, évidemment, être jolie a pas mal aidé.” Elle énonce la dernière partie avec détachement, mais aussi une pointe de cynisme, de celle qu’on a quand on reconnaît que c’est en fait la fondation de son succès. “Pas le conte de fée qu’on voudrait entendre hein.”

ft. @"Liam Jones"

Petit sourire, à entendre qu'il l'avait aidé ; apprécie ces mots, ignore s'ils sont vrais ou non, mais les prend tout de même avec l'espoir qu'iels le soient. Souffle alors un rire à l'entendre parler ainsi de Sloane, se dit qu'il l'a déjà mise en colère contre lui une fois, mais ne parviendra jamais à regretter ; parce que c'était la seule preuve qu'il était encore en vie, à ce moment-là. "On verra bien." Il ne promet plus, Liam ; plus d'écouter tout ce qu'on lui dira de faire ; preuve en est aujourd'hui où il peut abuser de ce pouvoir. Faut-il juste qu'il en ait envie ; se rebellera si on veut toucher à Andrea ; ça, il ne le permettra jamais ; préfère tout perdre que de la perdre elle.

Liam trouve ça bien d'avoir quelqu'un à qui dévouer ainsi.
Il a trop goûté à une existence sans but.

Alors il écoute à présent l'histoire de Maeve ; tente de se figurer les choses, mais il ne peut pas comprendre réellement ; c'est que tout ce qui peut impliquer un parent, déjà, lui est inconnu. Il ne peut comprendre ce qui peut être négatif ou positif quand il s'agit d'une mère ; a érigé Icarus comme son propre parent, quand ils l'ont pris sous leur coupe. Pour ça qu'il est aussi dévoué, Liam ; il n'a jamais rien connu d'autre. Alors y'a pas de jugement, pas de compassion non plus ; c'est une oreille neutre, sans balance morale ; Maeve peut lui raconter sa version de l'histoire sans qu'il en cherche les fils décousues dedans. "Mais est-ce que c'est celle que tu aimes à raconter ?" Qu'il demande, plus curieux qu'autre chose. "Au final, tout ce qui compte, c'est si tu es fière de toi ou non." Il lui semble, à Liam ; et s'il fallait encore prouver sa naïveté, il ne peut que la montrer ainsi sans même se le dire. Idéaliste ; sans doute plus pour longtemps, mais le rouleau compresseur n'a pas encore terminé le travail avec lui ; dans quelques semaines à peine, ça ira sans doute mieux.

Pour le meilleur et pour le pire.

Il repense à quelque chose, soudainement. "Tu avais assuré d'ailleurs, aux élections." Un sourire, sincère. "J'ai regardé plus tard une rediffusion. C'était impressionnant." Il avait dû, parce qu'au moment présent il n'avait pas été réellement présent ; perdu dans ses pensées ; perdu ailleurs, partout, mais pas dans la cérémonie. Est-ce que ça avait été un rêve éveillé, pour elle ? Le journal n'était pas prévu ; et sans doute pas cette mascarade non plus, dès lors ? "Qu'est-ce que tu voudrais comme émission, du coup ?" Il l'observe, se demande lui-même dans quoi il la verrait. Il n'en a aucune idée, au final ; Maeve lui semble capable d'être bonne partout - une qualité dans ce métier.

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Il n’y a aucune histoire d’elle qu’elle aime raconter.
En fait, elle estime qu’on fait une meilleure expérience d’elle en l’observant, comme dans un film. Maeve ne se traduit pas très bien en mots, elle est un explosion d’émotions et de cinématographie, la pose toujours étudiée pour avoir le meilleur angle. Même maintenant, alors qu’elle récupère de sa crise d’angoisse, elle est dans le paraître. C’est ancré en elle et comme tous les autres, elle se voit à travers un écran, actrice, productrice et réalisatrice de son existence, toujours soucieuse de donner le meilleur plan.
Il n’y a que dans la détresse qu’elle ne joue pas, comme quand elle était sur la chaise, attachée, les bras mécaniques érigés en menace au-dessus d’elle. Elle ne veut plus jamais revivre ça. Ce n’est pas clair s’il s’agit de l’enlèvement en lui-même ou l’état de détresse en question.

"Tu avais assuré d'ailleurs, aux élections." Un fin sourire rhabille son visage terni par la discussion douce-amère. “Merci.” Sans grande conviction, petit brin d’humilité, elle fait semblant de ne pas prendre la remarque à la légère. Les mots ne la marquent pourtant pas, peut-être parce que Liam a tellement démontré de sa gentillesse et de sa simplicité qu’elle ne se soucie pas de l’impressionner.
Mais elle s’en était bien sortie, objectivement, surtout quand il avait fallu cacher la surprise du plottwist de la soirée, en annonçant le départ de Siren et l’intronisation de Jophiel. C’était un message clair pour lui rappeler qu’elle était du même côté de la scène que tous les autres pantins d’Icarus. C’est pour ça qu’elle s’acharnait, pour se défaire de ses fils et contrôler sa narrative. Sa propre émission. “Ce serait un talk show. J’ai envie de quelque chose d’intimiste, une vraie conversation, de l’émotion, partager un moment avec personne une connue et la dévoiler à l’Amérique.” Il suffit d’un petit coup de pouce de sa mutation pour pousser toutes les confessions. L’art de l’interview c’est l’art de la manipulation, et elle y excelle.
L’ironie de la situation la cueille finalement. “Un peu comme le moment qu’on partage en fait.” Et comme la connexion se crée aussi par le contact, elle se permet de poser sa main sur le bras du jeune homme, un geste d’affection, une marque d’amitié. Il ne sait pas encore, mais l’amitié pour Maeve est transactionnelle. Tout ce qu’elle lui dit, il devra le lui rendre un jour. “Peut-être que tu seras parmi les premiers invités sur le fauteuil.” Elle ponctue la remarque d’un sourire complice, les yeux se plissent brièvement quand ils sont gagnés par le ton rieur. Ce n’est pas une blague mais une invitation, à lui de l’interpréter comme il veut. Ou plutôt, à elle de négocier avec Sloane pour arriver à ses fins.  

ft. @Liam Regan

Il est intéressé par ce qu'elle voudrait ; parce qu'il a l'impression que, dans toute cette histoire, elle n'a jamais eu vraiment son mot à dire. Juste à suivre le choix des autres, au travers de sa mère ou des opportunités saisies. Liam est curieux, de ce qu'elle souhaite, Maeve ; de la suite de l'histoire, de comme elle voudrait l'écrire plutôt. Alors il écoute, sourit en l'entendant raconter cette émission aux antipodes de ce qu'elle fait à présent. Les informations, c'est creuser à peine la surface, survoler les choses ; et informer selon un biais précis, entre ce qui arrange le pays, la chaine, les gens aux commandes.

Elle a envie de partage, Maeve ; d'émotions.

Et sa remarque le fait rire. "Avec de la chance, il y a une caméra cachée quelque part pour le proposer en pilot." Liam n'aimerait pas, ceci dit ; mais quitte à être espionné, autant que ça puisse servir. Mais à l'invitation lancée, cette fois, c'est une réelle bouille amusée qui s'affiche. "Comment ça, un des premiers ?" Il tente une moue, mais l'éclat rieur dans son regard persiste. "Je veux être le premier, quand ça adviendra." Il n'exige jamais rien, Liam ; alors, ce n'est pas tant sérieux ; mais l'invitation est acceptée et il répondra présent, le jour où Maeve aura besoin qu'il le soit.

Puis, comme pour conclure ce moment sur cette promesse, on vient toquer à la porte pour rappeler le Sept sur le plateau ; et il se doute bien que Maeve est cherchée aussi. Alors il se redresse finalement et tend une main à Maeve. "Il faut retourner mentir." Les acteurs sont redemandés à l'accueil ; et Liam donnera tout ce qu'il est, pour jouer ce qu'il n'est pas.

Pour que tout se termine rapidement, pour qu'on arrête d'appuyer sur les plaies.
Show time.