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Karma Police

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TW : RAS, je crois


Le clic du zippo, une grande inspiration et la chaleur toxique vient s'immiscer dans ses bronches les plus profondes. John fait durer la brûlure en gardant la bouche close quelques longues secondes, avant de laisser les volutes s'évaporer par ses narines et sa bouche. Son regard ne cille pas. Il reste accroché aux prunelles de son client, lequel semblait bien avoir décidé l'emmerder en jouant au plus malin. D'un geste désinvolte, il tend la main, casse sa cendre lorsque son pouce vient taper le filtre d'un mouvement sec et précis.

« J'ai l'impression que t'as décidé de me faire perdre mon temps. »

Qu'il commence. Et il se trouve bien trop poli, considérant les circonstances. On lui a promis six milles bucks. De quoi se payer une petite avance sur son loyer et quelques cartouches de Lucky Strike et voilà que le client cherche à négocier. Première entorse aux règles de son business : ce qu'on se promet lors des premiers contacts n'est plus négociable quand il s'agit de faire l'échange.
Et comme à chaque fois qu'il doit y avoir négociation, ils ont la fâcheuse tendance à faire une autre entorse aux règles : interdiction venir accompagné sans avoir prévenu avant.

Le rital s'est mis en tête de débarquer avec deux clowns à la mine patibulaire juste bons à croiser les bras et à avoir un regard méchant. Mais s'écraser n'est pas vraiment son genre à Hunnigan. Encore moins face à des petits bourgeois de la surface qui voulait s'encanailler en flirtant avec le milieu de la contrebande. Et au petit jeu de qui blufferait le plus, il avait l'avantage.

Ce type est sûrement encore plus pitoyable que toi, Cloporte...

« J'ai même la sale impression que t'as décidé d'essayer de m'insulter. Pour six mille, c'est rare que je bouge mon cul et tu m'en proposes quatre ? »

Il coinça son clou de cercueil entre ses lèvres, et ramena sa main à l'intérieur de sa veste. Les deux gorilles se crispèrent un peu. Ils imaginaient sans doute une histoire de flingue. Hunnigan se contenta de sortir une enveloppe qu'il agita sous les yeux du client et de ses sbires peu crédibles.

« Tu vas allonger le fric qui était prévu, Manni, et tu vas sagement te barrer de ce bar. On se dira que tout s'est bien passé, et dans les jours qui suivent personne ne se dira que tu t'es fait botter le cul  parce que t'a voulu jouer au plus malin dans un deal. Ici c'est pas tes beaux quartiers de blindés du Nexus. Tu peux me ramener autant de gorilles à qui t'a appris à froncer les sourcils et croiser que tu veux, ça changera pas les règles. »

Sa prochaine bouffée cancérigène, il l'envoya droit dans le visage du client qui avait l'air bien moins sûr de lui, à présent. Les petits richoux d'en haut bien peuvent jouer les caïds parce qu'ils savent s'entourer, une fois dans la jungle mortifère qu'est l'Underapple, ils comprennent qu'ils ne font pas les règles.
Comment Hunnigan savait que ça ne finirait pas dans un bain de sang et que le client n'était pas un vrai truand ? Tout simplement parce que le dénommé Manni était prêt à raquer six plaques pour une saleté de babiole romaine qui en valait deux à trois fois moins. Parce que les vrais types dangereux ne se pointent pas eux-mêmes pour faire ce genre d'achats. Et parce que les vraies ordures ne pinaillent pas pour une somme aussi modique que six mille dollars.

« Allez, grouille-toi. J'ai pas que ça à foutre de mes journées. »

Ne le brusque pas autant. Entre aptères vous pourriez vous entendre.
Manni semblait enfin prêt à être raisonnable. Il allait aligner les billets, se barrer, et Hunnigan pourrait sagement rentrer chez lui avec la satisfaction du travail presque bien accompli.
Ne restait qu'à continuer sur sa lancé pour rester crédible, en fin de compte.

« Et pas de conneries, tu veux ? Regarde autour de toi. Tu bronches un peu trop fort et toi et tes deux princesses vous finissez un sourire de Glasgow. Ces types bossent pour moi. »

Il mentait. Mais puisqu'il avait l'ascendant et une franche tendance à abuser quand il avait envie que les choses aillent vite...

« Sérieusement, les amateurs. Vous êtes ici parce que j'le veux bien et que j'ai prévenu mes gars. Vous avez vraiment cru que n'importe qui peut se pointer ici et venir s'asseoir à ma table comme ça ? »

Hunnigan oubliait sans doute en partie que le destin ne l'avait pas à la bonne. Et qu'il aurait mieux fait de ne pas trop s'enflammer, et que s'inventer un service d'ordre dans ce bar n'était peut-être pas une si bonne idée que ça, parce que la porte du bar s'ouvrait et qu'une surprise l'attendait.
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(FLASHBACK – 2018) Elle le cherche. Depuis des jours. Dag croise et entrecroise les informations libérées par les gorges qu'elle interroge ou massacre. Parce qu'il lui a dit, qu'il était là. Il lui a dit des années auparavant et elle n'a pu effleurer les indices que récemment. Dans l'ombre de ses excavations et la liberté de ses instincts retrouvés. Seulement. Les lettres – ses lettres – ne sont qu'à l'éternité un ramassis de fadaises, une amputation du dialogue. Alors. Plus profond. Dans le bide de l'Underapple. Elle le cherche.
Lorcan ne peut pas être loin – plus tellement. À portée de ses griffes.
On lui a donné des adresses qui n'étaient pas les bonnes et on lui a donné des informations qui n'étaient que chiures et désordres. Et puis, il y a eu ce type. Ce type auquel elle a fait avaler quelques molaires. Ce type avait des informations concises et précises. Des informations qu'elle lui a – avec gentillesse et bienveillance, une caresse sur la joue et un sourire-dingue de mère chagrine – demandé d'écrire sur un bout de papier. Car Dag sait qu'elle ne retient plus rien. Ou si peu de temps qu'elle ne peut jurer de certitudes et conjectures futures.
Son sac à dos tape contre sa colonne vertébrale à chaque pas. Ses doigts autant que son esprit s'impatientent. Les phalanges s'enroulent aux bretelles et tirent les lanières. Le sac remplit de ses trésors remonte d'un coup sec jusqu'à se coller à la base de sa nuque. Là où le délicat de ses cervicales gondole la peau. Immobile devant un bar miteux du vieux Manhattan, elle observe. Les lieux d'abord, qui ne lui inspirent rien de palpitant et qu'elle redoute n'être qu'une nouvelle et terrible impasse. Puis c'est au tour des environs de recueillir sa curiosité mortifère. Ses billes bleues vont et viennent sur les contours et les renfoncements où trop souvent se cache la vermine et le bout de la rue prise entre une rangée de bâtiments en bonne partie délabrés. Il n'y a pas un chat. Ou seulement quelques-uns en forme d'hommes. Étalés sur le bitume crevé et vibrant de drogues – laquelle, elle ne saura exactement le dire. Mais ces lieux puent la débauche et la misère.
Un sourire craquelle sa face et elle expire son humeur d'un contentement tout personnel. Elle se sent enfin non pas chez elle car Dag n'a jamais su ce qu'était un chez-soi car Dag toujours s'est perdue dans le vide des espaces trop grands, mais au moins dans une vase qui lui est naturelle et lénitive.
Une inspiration et une nouvelle expiration et elle entre dans le bouge. Porte ouverte à la volée. Ses pupilles s’arrondissent sous l'effet de la lumière trouble et jaune et si basse quand le dehors inonde sa silhouette d'une lumière blanche et aveugle. Le tour d'horizon est rapide. Son regard déchiquette chaque putain de centimètres carrés à la recherche de la gueule familière. Et elle ne la voit pas – pas tout de suite. Parce qu'il n'est plus tout à fait ce qu'il était. Parce qu'une barbe lui ronge les mâchoires et que ses cheveux n'ont plus les mêmes nuances ni la même allure qu'il y a oh qu'il y a si longtemps.
C'est sa voix.
Sa voix qui perce le ronron paresseux de ce rade dégueulasse. Au lointain, crachée par des haut-parleurs grésillant une musique des âges anciens et tout autour d'elle des visages et des visages, si peu et pourtant si nombreux. Des yeux qui lui fouillent la tronche et peut-être aussi le crâne. Sa mandibule projetée en avant, Dag tente de se concentrer. Sur l'instant présent oui l'instant et seulement l'instant présent mais tout lui rappelle les yeux qui fixent et décortiquent ses mouvements et putain que t'es conne Dag mais qu'est-ce que t'es conne. Y a que toi qui fasse ça y a que toi qui aime ça y a que toi et toi seule car les soiffards n'ont pour amour et obsession que leurs boissons à l'alcool si fort qu'il calcine la glotte et les bronches et les poumons et les intestins jusqu'à l'anus.
[La toxine a beau l'envelopper il n'y a rien qui bouge hormis elle et ses délires de démembrements.] Lorsqu’elle se pointe à la table de Lorcan il y a trois types. Un maigre et un gros et un grand. Le maigre est assis pendant que les deux autres jouent des muscles et des mines de bouledogues. Dag s'en contrefout. Elle tire une chaise entre le maigre et Lorcan et s'y assoit et soupire. Un soupir long et théâtral et tandis qu'elle expulse l'air rance de ses poumons elle lève les bras au-dessus de son crâne et les étire. Crache un gémissement de chatte et rabat d'un coup sec son buste vers la table.
Je t'ai cherché.
Et dans cette simple petite phrase soufflée entre ses quenottes, une cargaison de reproches. Dag fixe Lorcan, les sourcils froncés. Elle le dévisage avec toute l'indélicatesse et l'incivilité et la discorde dont elle est capable. Le tranchant de sa main s'écrase presque aussitôt sur ses narines et en ramasse un début de mucus dégoulinant. Elle renifle. Suppose avoir pris froid. Le soleil n'a que peu l'occasion ou la possibilité ou même la faculté de trancher le ciel, par ici.
Tu n'as pas été-
On la coupe.
On prend la parole.
On l'oblige à la fermer.
Un homme. L'oblige. À la fermer.
– Ta gueule connasse et dégage plus loin, j'ai pas fi-
… ni ! Postillonne-t-elle, le buste désormais écrasé sur la table. Son minois complètement tourné non pas vers Lorcan mais vers Le Maigre.
Et elle se balance une nouvelle fois en arrière, fait grincer les pieds de sa chaise, et éclate d'un rire inouï. Un rire qui fait dresser l'échine et les poils de plusieurs ivrognes.
– J'ai-
Non, dit-elle aussitôt. Doigt sur sa bouche à la lippe déraisonnablement charnue.
Le Gros et Le Grand se tortillent sur place. Et lancent des œillades compulsivement inquiètes et interrogatives à leur maître. Leur maître dont la figure se tire sur une grimace entre la colère et la honte. Un orgueil qu'elle amoche, le risette féline.
C'est mon tour.
C'est son tour.
Virant son attention de nouveau sur Lorcan, Dag paraît lui transpercer le front. Droit au milieu. C'est d'ailleurs ce que son long doigt maigre et blanc et gribouillé de cercles d'encre fait. Pile entre ses deux yeux. L'index se plante.
Tout ce chemin.
Elle tapote son index sur le front de Lorcan. Puis bat des paupières, hésite sur les mots. Bute, trébuche, s'égratigne sur les mots.
Je suis là.
Elle est là.
Et elle récupère son doigt.
Le Maigre tente derechef sa chance et elle le coupe à peine un son affleure à ses lèvres. La poigne sèche et tentaculaire de Dag s'empare de la gorge du type. Et son visage coulisse avec une lenteur à faire crisser les os.
J'ai dit.
Qu'est-ce que t'as dit Dag dis qu'est-ce que t'as dit personne ne se souvient pas même toi.
Elle répète. Détache les syllabes :
J'ai dit.
Elle ne sait plus.
Alors elle relâche Le Maigre et elle remarque, par après, les deux bouledogues derrière ayant dégainé. Des quoi. Des quoi Dag ils ont sorti des armes des calibres combien gros petits surement bon à faire de minuscules trous devant et de gros cratères derrière n'est-ce pas.
Wow.
Son corps se rétracte et elle lève les mains. Paumes sales et bandées d'un fin linge blanc devenu jaune et brun et gris bien en évidence. Le Maigre parcourt de sa pulpe rose et humide de sueur sa gorge douloureuse et mollarde :
– Hunnigan, contrôle ta chienne.
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La porte du bar s'ouvre, John reste focalisé sur Manni. D'un geste presque théâtral tant il est lent, il dépose l'enveloppe avec le magot, suffisamment fort pour que le bois de la table claque quand le métal de la plaque vint le toquer. Derrière le panache de la fumée de sa clope, les yeux d'Hunnigan contemplent la sale gueule du client qui à l'air prêt à lâcher l'oseille. Il est mûr le Manni.

Seulement voilà. Les choses dérapent. Elles dérapent vite.
Quelqu'un tire une chaise et vient se poser là, à la table. Les deux déjà installés ont le même mouvement de tête parfaitement synchronisé. Manni a un petit mouvement de recul, surpris et perdu. Hunnigan lui, s'est figé comme un clébard de chasse qui vient de désigner une cible. Interdit, stupéfait, il contemple le visage qu'il reconnaît forcément.
Les traits sont peut-être plus tendus que dans ses souvenirs, les cheveux cernent le tout différemment que ce dont il se rappelait. Mais c'était elle. C'était bel et bien elle.

« Addie ?! »

Le simple fait de le prononcer à voix haut lui donne une drôle d'impression, c'est dire. Il est partagé entre l'envie de disparaître et de rire. Le contentement et la frousse. La satisfaction et... le souvenir de tout ce que les oreilles et les yeux de sa sauveuse ont vu et entendu. Elle sait ce qu'il a fait, mieux que personne.
Quand elle rompt le silence improbable qui s'est installé, ses mots ont quelque chose qui tient du reproche.

Elle est encore plus ravagée que toi, le cafard. Vous faites une belle tablée de ratés là, tous les trois.

Elle continue, mais elle n'a pas le temps de finir. Tu n'as pas été... Là ? L'amorce de phrase n'a pas le temps de venir lui peser que Manni la ramène. Il a l'air vexé Manni, qu'une nana bizarre débarque. Qu'elle lui ait prouvé par sa seule présence qu'il était à deux doigts de se faire enfler. Il est rageur d'avoir commencé à croire aux conneries débitées par Hunnigan. Et par le comportement de cette tarée vautrée sur la table, accessoirement.

À sa prise de parole, spectateur, John se retrouve avec un visage assez outré qu'on ose parler comme ça à Adalyn. Il fut un temps, pour sans doute moins, il aurait sauté par-dessus la table et ça se serait réglés à coup de poing jusqu'à ce que l'injurieux enfoiré n'ait perdu la moitié de ses dents dans la manœuvre et l'autre moitié à la santé du Roi d'Angleterre. Mais si Lorcan était prompt à l'action et impétueux, John, lui, préférait encore la mesure autant que faire se pouvait.

Le rire qui s'arrache de la gorge de l'Originelle semble faire frissonner l'assemblée toute entière. Ça jette un froid, ça pousse Manni à fermer sa gueule. Ça lui permet de venir lui tapoter le front de son index.
Vous pourriez remonter à la surface pour discuter ensemble du bon vieux temps, bras dessus bras dessus, et le dernier qui saute de la plus haute tour du Nexus est une poule mouillée. À ce train-là, ça rendrait service à tellement de monde...

Elle est là qu'elle assène. Il n'a toujours pas décroché un mot, incapable de savoir ce qu'il est supposé dire ou faire. Au moins, les choses restaient relativement sous contrôle, non ?

Non.

Manni saisi à la gorge, les deux sbires à la sauvette arme au poing. Addie déraille encore. Elle boucle.

« Tu as dit que tu étais là. »

S'empressa d'enfin répondre Hunnigan qui troquait son rôle de spectateur en se disant qu'elle avait déjà presque réussi à engendrer une fusillade en quoi ? Deux minutes de temps.

« Et je suis là aussi alors, tout va bien, non ? »

Manni l'ouvre à nouveau. Elle l'a relâché, mais il ne sait pas la boucler. Avec des canons braqués sur eux, les Originels ne sont pas en position de force. Sans Excalibur et sa capacité à le rendre imbattable, une balle dans un corps fera toujours d'horribles dégâts et Hunnigan à trop de chose à faire pour mourir connement ici et maintenant. ⛧ Oh, vraiment ?

« Manni, boucle-la. Vous devriez remonter à la surface illico toi et tes deux blaireaux. »

Il a repris son rôle, parce qu'il n'avait rien d'autre que le bluff pour se sortir de là.

« Elle t'a empoisonné, il faut que tu sois à l’hôpital dans les vingt minutes sinon tu vas y passer. Tu commences déjà à transpirer. »

Il avait eu l'idée en voyant les mains levées d'Addie, évidemment, et la couleur des bandages ainsi que son comportement lunaire de petit monstre intoxiqué. Pourquoi ne pas pousser l'idée plus loin hein ?

« Baissez vos flingues et amenez-le à l'hôpital avant qu'il avale sa langue. Il commence déjà à avoir des rougeurs, c'est pas bon signe. »

Je sais ce que t'as en tête, c'est une merveilleusement mauvaise idée qui commence à germer...
La boîte disait vrai. Il tentait le diable avec son idée. Des plantes. Parler de plantes. Elle devrait encore être capable hein ?

« Avec quoi tu l'as empoisonné, Addie ? Grande ciguë ? Ricin ? Aconite ? »

Elle t'a sauvé la vie après tout. Ça ne serait que justice qu'elle soit celle qui te fasse enfin bouffer les vers...

Mais il a insisté lourdement sur les trois choix. Il espère qu'elle comprendra son idée. Ou qu'elle se perdra dans des descriptions de poisons s'il le faut, tant que ça les aide...
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(FLASHBACK – 2018)
– Manni, boucle-la. Vous devriez remonter à la surface illico toi et tes deux blaireaux. 
Dag ne bouge pas, ou seulement ses doigts. Un sourire fendille son joli minois et elle fait « coucou » aux deux molosses qui n'ont pas baissé les armes. Manni déjà de moitié oublié dans les limbes de ses intentions.
– Elle t'a empoisonné, il faut que tu sois à l’hôpital dans les vingt minutes sinon tu vas y passer. Tu commences déjà à transpirer. 
Oh.
Dag a la nuque raide et les pupilles qui dérivent. Non pas vers Lorcan mais vers le fameux Manni. Manni qui, effectivement, transpire plus que de raison. Mais Dag jure qu'elle n'a rien fait non absolument rien et-
– Baissez vos flingues et amenez-le à l'hôpital avant qu'il avale sa langue. Il commence déjà à avoir des rougeurs, c'est pas bon signe.
Le sourire de Dag chavire. À la place s'installe une petite moue. Les sourcils ondulent au-dessus de ses deux flaques.
Mais j'ai-
– Avec quoi tu l'as empoisonné, Addie ? Grande ciguë ? Ricin ? Aconite ? 
Un courant électrique. Une décharge de plusieurs volts dans son corps. Elle ne répond pas mais se tourne de trois quarts et en oublie la menace pesante mais pas si pressante. Sa peau, trouée et déchirée et ouverte et crachant ses tripes et dévoilant le blanc des os trop de fois pour que l'idée – ou l'aperçu – ne la terrifie.
C'est Billie, jappe-t-elle.
Sa cognition absorbée par Lorcan qu'elle mire ou poinçonne méthodiquement de ses prunelles.
Addie est morte. Addie n'existe plus que dans le système limbique moisi des hypocrites et des fantômes. Et Lorcan n'est ni l'un, ni l'autre.
Et c'est pas moi qui t'ai fait ça m'sieur Manni, réplique-t-elle tout aussi vite.
La face tournée derechef vers sa prime victime, son corps ensuite.
Elle relève les bras, se remet en position. Parce que les armes ont bougé, un peu. Et elle ignore si c'est un tremblement nerveux de l'un des deux esclaves ou seulement un rappel à l'ordre.
Si y a un fautif dans la salle-
Elle fait mine de réfléchir. La moue mutine revient en travers ses ridules. Un bras tombe, l'index qui tapotait le front de Lorcan tapote désormais le bout de son petit nez.
Mhh…
Elle s'amuse follement.
Elle n'avait pas imaginé une seule seconde des retrouvailles aussi charmantes.
Tous les regards sont rivés sur elle. Même ceux des ivrognes, dans le lointain du bar, même celui du barman, qui déjà a attrapé son fusil à pompe sous le comptoir.
… c'est lui.
Et le doigt valdingue en arrière. Vers la cible toute désignée : Lorcan.
Lorcan n'aurait pas dû la contrarier.
– Putain d'merde mais la ferme ! La ferme ! La ferme !!
– Boss vous voulez qu'on-
– La ferme j'ai dit !
Manni s'énerve. Manni est devenu plus rouge que rose et des gouttes de sueur lui perlent sur les tempes et dans le cou. Manni perd le contrôle et Manni n'aime pas ça.
– Boss on dirait qu'vous êtes un peu-
– Je sais c'que j'ai ok ?! Alors toi tu fermes ta gueule et tu continues de viser.
Dag observe. L'air très concerné. Suivant la parole comme une balle de ping-pong aller et venir entre les trois acolytes. Elle ne jette pas un regard à Lorcan. Elle ne peut pas. Pas dans cette position. Dag ne perçoit que sa présence, là, à quelques centimètres d'elle. Au niveau de son épaule. Et peut-être que ça lui suffit. Et peut-être que ça l'apaise. Et peut-être qu'elle est encore très en colère aussi.
– Hanni-
Manni n'a pas le temps de terminer qu'elle s'est déjà levée, envoyant valser le magot toujours sur la table. Le magot attire toujours tous les regards. Et l'effet de surprise lui suffit à rejoindre un des bouledogues qu'elle désarme d'un coup de coude dans le ventre et d'une torsion radicale et sèche et nette du bras en glissant dans son dos. Une torsion telle que l'articulation du coude craque puis celle de l'épaule. Un cri déchire les lieux. Un coup de pied dans les reins s'ajoute à la manœuvre et le molosse flanche à terre. La trogne écrasée dans la poussière et la merde de l'Underapple.
Le Glock désormais niché dans le creux de sa dextre, Dag vise la tempe du second molosse – le gros. Et elle lance un regard circonspect à Lorcan. Un regard mi-innocent mi-interloqué.
… quoi ?
Oui quoi quoi exactement où est le problème qu'est-ce qu'il convenait de faire Dag rien absolument rien d'autre car la violence se règle par la violence car le dialogue est un concept fait pour les ignorants les idéalistes et les faibles.
Sa semelle rencontre les burnes de celui qui se tortille toujours à terre, sans que les orbes aient besoin de chuter. Nouveau cri. Un aboiement de chien qu'on martyrise. Un sourire lui ouvre la face en deux. Pleines rangées de dents blanches ; et le petit espace entre ses deux incisives n'a jamais aussi bien porté son nom. Les dents du bonheur.
Sa godasse reste enfoncée dans les parties génitales du Grand sans que son bras ne vibre et sans que son canon ne change de cible.
M'sieur Manni, j'te conseille de dire à Gras-du-bide de lâcher son arme ou je lui sors la cervelle.
Ensuite. Le grattement lui monte dans la gorge et lui pique les yeux et les narines et-
Elle éternue et presse la détente.
Pour de faux. Juste un glissement.
Une vague de frissons a traversé l'assemblée et elle éclate de rire, lève sa main mobile à hauteur de son visage et ses bandages absorbent sa morve.
C'est bon, faut s'détendre.
– Boss...
Pas une réelle question.
Je suis une pro-fe-ssio-nelle.
– … j'fais quoi...
Une grosse supplique.
Lorcan, assene Dag.
Coupant net Manni dans sa réplique (et ô dieu qu'elle jouit).
Ramasse... ramasse ça (sa bouille d'enfant-femme se penche vers l'enveloppe éventrée au sol) et tire-toi.
C'était si bien parti.
De l'autre côté du cloaque, un puis deux puis trois bruits. Le barman a armé la garde de son arme. Le fusil à pompe désormais dirigé sur le groupe.
– Personne sort d'ici.
Arnold est un homme de principe. Et un homme aux abois. Devoir gérer une bagarre peut encore passer. Mais devoir faire l'impasse sur un paquet de pognon, ça, jamais.

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Dès l'instant où il voit le visage de la blonde, un peu trop ahurie, un peu trop perdue, Hunnigan comprend que son bluff va s'écrouler comme un fichu château de cartes. Ne lui reste que le vague espoir que son intuition actuelle était fausse. Qu'Addie allait avec une pirouette parfaite appuyer ses dires et que Manni, pâle comme un mort et trempé de sueur finirait par gober cette couleuvre et se tirer vite et loin.
Et non. Raté.

La réponse de l'Originelle laisse John circonspect. Billie. C'est Billie qu'elle dit.
Alors il s'accroche aux branches comme il peut.

« C'est Billie qui a fait le poison ? Je croyais qu'on lui avait interdit de toucher aux plantes toxiques. »

Mentir toujours plus. C'est ça la solution. Concerto de n'importe quoi en Ré mineur. John fait l'orchestre à lui seul. Pipeaux et violons.
Mais Addie fait une fausse note, le tempo part en sucette, John lâche un petit rire nerveux quand elle conclut que ce n'est pas elle. Manni comprend qu'il a failli se faire enfumer une seconde fois. Ses deux lourdauds de sbires l'agacent à ne rien comprendre. On est à ça du carnage.

Et comme pour achever le tableau, Addie ⛧ Billie finit par le pointer du doigt pour l'accuser. Le rire nerveux double. Il retombe parfaitement assis, coince sa clope entre ses lèvres, et passe ses mains sous la table en laissant ses épaules s'affaisser comme une résignation mortifère. Il a merdé, tout a foiré, il est prêt à se faire trouer, semble vouloir dire sa gestuelle.

« Merci Addie » c'est Billie, connard.

Et avec tout ce Chaos, pas étonnant que la boîte commençât à bien l'aimer, la nouvelle Elle. ⛧ Et dire qu'on a promis d'arracher sa sale petite gorge avec tes mains...
Manni monte dans les tours. Manni pète une durite. Mais Manni sait qu'il n'a pas de flingue alors il aboie juste des ordres.

Sous la table, Hunnigan agite les doigts. Le Gros semble tiquer en voyant quelques halos, mais comme le Boss pète une durite, il ne le fait pas remarquer à haute voix. Il alterne entre fixer sa cible pour garder le canon bien pointé et les lueurs qu'il a pourtant bien vues.
Ça le déconcentre et quand Addie c'est Billie, putain ! tente une manœuvre, il ne sait plus quoi regarder. Le fric. La blonde. Les lumières.

En moins de temps qu'il ne le faut pour le dire, il ne reste que lui, son binôme étalé reçoit même un coup de pied si mal placé que tous les témoins masculins de la salle ont la même grimace, pleine de la seule compassion qui pouvait découler d'une vague notion de solidarité masculine. Les coups dans les valseuses, forcément...

« Rien, rien. C'était... bien joué. »

Qu'il lui lance. Il continue de bidouiller sous la table avec un air passif, absent, perdu ou... concentré sur autre chose.
Elle a l'air de gérer, il faut dire. Elle donne des ordres crédibles. Sa menace est la première phrase longue et construite qu'elle a réussi à articuler. Il s'imagine que tout va bien se passer et...

Click


Tout le monde sursaute. Hunnigan s'est arrêté de trifouiller sous la table. Manni est à la fois en panique et à la fois hors de lui.

Addie ⛧ sérieusement, tu le fais exprès, cloporte ?vient d'éternuer... et de manquer de déclencher une douche de plombs ici.

« Heu... à tes souhaits. »

Glisse l'Originel comme si tout ce qui se passait là était absolument normal. Mais elle est lancée. Elle lui ordonne à lui de prendre l'oseille et de se tirer. Un regard vers elle suffit en guise de réponse. Plutôt crever que de la laisser seule dans ce bourbier hein.
Le revoilà à faire ses trucs. Même Manni a l'air d'avoir capté une lueur. Arnold active la pompe de sa pétoire calibre 12.
Personne sort d'ici qu'il dit. Parce qu'il connaît ses droits. Qu'il a toujours était un fervent défenseur du second amendement. Et parce qu'il a vu de l'oseille, évidemment.

« On pourrait... »

Il n'a pas le temps de finir sa phrase qu'une drôle de musique germe dans la pièce, et que cette foutue lueur sous la table s'accentue. Cette fois, Manni, le Gros et même le Grand l'ont vu. C'est un son de lyre. Quelques notes agréables, apaisantes, douces qui émanent de partout et nulle part à la fois, comme un petit moment divin de qui ne dure qu'une dizaine de seconde.

« ...négocier ? J'achète notre départ à tous les deux. Addie... »
Oui continue à te tromper de nom, c'est parfait.
« … Bille j'veux dire, et moi. Contre quelque chose de beaucoup de plus cher que quelques billets. »

Forcément que ça intéresse. Il bataille sous la table, un curieux morceau de branche semble même dépasser. Il tire et quand il finit par lentement, très lentement se relever, c'est pour dévoiler à tout le monde une jolie pomme en or pur. Une merveille qui captera tous les regards cupides.

Il se décale, lentement pour éviter que quelqu'un finisse par déclencher l'ultime fusillade et entreprend de passer juste derrière la blonde, tendant sa main libre vers l'arme qu'elle tenait en lui glissant.

« Fais-moi confiance... »

Il ne fallait pas qu'elle garde cette arme entre les mains plus longtemps en présence de la Pomme d'Eris. En fait. Il fallait qu'il dépose le fruit meurtrier, et qu'ils partent avant que ses effets n'amènent tous les gens présents ici à se reprocher tout et n'importe quoi et à en venir aux mains.
Ses doigts essayèrent d'attendre délicatement la main d'Addie, son autre main bien levée pour garder la précieuse horreur dorée à la vue de tous.

« Arnie... j'peux t'appeler Arnie ? » ⛧ Sale journée pour les prénoms...
« Non. »
« J'vais poser ça au coin du comptoir. Et on va s'en aller. On laisse le fric. Je vous laisse la pomme.  C'est de l'or pur. Je te le donne. Ça permet d'acheter notre sauf-conduit. On sort tranquillement elle et moi. Ok ? »

Manni semblait déjà sujet aux effets, puis qu'il s'agaçait de plus en plus de voir son protecteur rouler au sol en se tenant les gonades. Le gros commençait à jeter des regards torves vers son employeurs. Deux potes au bout de la salle soufflaient d'agacement en s'échangeant. Il fallait qu'ils sortent d'ici.
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(FLASHBACK – 2018)
– On pourrait... hésite Lorcan.
Dag soupire. Un long soupir. De l'agacement saupoudré d'ennui. Elle glisse un œil en direction de Lorcan. Puis en direction du barman.
– … négocier ? J'achète notre départ à tous les deux. Addie... 
Les dents grincent et l’œil repart en direction de l'Originel.
– … Bille j'veux dire, et moi. Contre quelque chose de beaucoup plus cher que quelques billets.
L'éclat qui s'en suit bouleverse les sens. Une pomme d'or. Sous le front une cascade de contre-sens. Lorcan et ses merveilles. Lorcan et ses trésors. Lorcan et cette impossible capacité. La pupille s'attarde plus qu'elle ne le devrait sur l'objet et la main qui le porte.
Son ébahissement enfantin raye sa céphalée naissante.
Jusqu'à ce qu'il décide de bouger, se glissant dans son dos.
Le Gros suit le mouvement, plus hésitant que jamais. Il offre un regard fébrile à son compagnon gémissant sous la chaussure de Dag.
L'arme au bout de son bras n'a pas bougé d'un iota. Toujours pointée sur la tempe du Gros. À Manni de suivre les déambulations et surtout l'objet de toutes les convoitises.
La paluche de Lorcan glisse le long du bras de Dag et s'approche de son arme. Elle cille.
– Fais-moi confiance... lui susurre-t-il.
Autour d'elle, l'environnement tourne. Une tempête de mauvaises pensées et d'agressivité menace l’inonder.
Le bout des doigts de Lorcan effleure les siens et plus exactement la crosse noire du Glock tandis que le Gros ne sait plus très bien qui viser. D'elle à lui, la tentation le corrompt.
– Arnie... j'peux t'appeler Arnie ?
– Non, réplique aussi sec le barman de l'autre côté du bouge.
Le fusil à pompe lui non plus n'a pas bougé.
–  J'vais poser ça au coin du comptoir. Et on va s'en aller. On laisse le fric. Je vous laisse la pomme. C'est de l'or pur. Je te le donne. Ça permet d'acheter notre sauf-conduit. On sort tranquillement elle et moi. Ok ? 
Grésillements à la conscience. Dag perd le fil car Dag a du poison dans les veines. Tandis qu'elle perçoit les ongles de Lorcan sur sa chair, ces ongles trop proches toujours trop proches de son arme.
Un coup d'épaule brutal, pour l'éloigner d'elle. Elle abandonne le clébard gémissant, se coule comme une anguille de côté. Juste à distance nécessaire pour retourner l'arme contre lui.
Faire confiance.
Faire confiance et te retirer le 9mm et pourquoi Dag faire confiance et vous virer votre meilleure chance.
Sur sa bouille de môme revêche se disputent la colère à la confusion. Lorcan est un homme et aucun homme – plus personne – n'a droit à sa confiance. Fais-moi confiance qu'il dit Dag fais-moi confiance qu'il demande l'arme entre les doigts et sa diplomatie de merde sur la langue.
Rires et cris au cortex. Dag perd en fermeté. Se décale lentement, trouve une meilleure position afin d'observer le duo de flingues prêt à la trouer. Tout du long elle tient en joue Lorcan. Mais le bras tendu n'est plus aussi ferme qu'auparavant. Lorcan n'est pas tout le monde.
Expression trouble sur sa face. Elle le dévisage.
Perte de contact. Ses yeux s'accrochent à l'environnement et tous ces regards qui ne la quittent pas qui ne la quittent plus qui lui inspectent le corps et peut-être les pensées. Ses yeux reviennent sur Lorcan. Lorcan. Lorcan n'est pas comme les autres Lorcan est celui qui t'as évité la noyade du manque oh mais le manque de qui et pourquoi tais-toi de qui Dag de qui souviens-toi ferme-la Lorcan ment Lorcan est faible Lorcan est-
Ça suffit, crache-t-elle.
Besoin de se concentrer. De formuler.
Lorcan ta bouée pour des siècles et des siècles ton pansement qui soulage malgré les plaies purulentes du dessous malgré le pus qui te brûle et l'infection qui te bouffe Lorcan toujours là l'âme et les mots à l'encre et le papier jauni.
Besoin d'étrangler l'organe qui lui massacre les côtes et d'éteindre la conscience.
Besoin de se calmer. Le pouls comme autant de déflagrations.
Personne ne parle. Personne n'a professé un putain de mot.
Et elle tremble, un peu. L'index tatoué niché tout contre l'arc rassurant de la détente.
– Franck ! qu'est-ce que-
Pas une vraie question.
– ... tu branles.
Dans le timbre de Manni la peur et la rage.
Le chien retourne l'arme contre le maître.
Coups de tonnerre éclatements des tympans mélodie de démons et gerbes sanglantes.
Odeur de poudre déversée à l'atmosphère comme un tsunami engloutit une île.
De la matière grise sur le pantalon de Lorcan et sur la joue de Dag.
Le chien couinant a fait mine de se redresser et l'éclat de sa petite lame toute proche de l'aine de Lorcan a lacéré la rétine de Dag. Le coup de feu est parti et l'homme n'est plus qu'une masse inerte vomissant son cervelet. Manni a tenté de profiter de la larve imbécile et morte pour s'emparer de l'arme de Dag et son visage n'est plus qu'un trou rubicond où le blanc de l'os se confond au blanc du cartilage au blanc des nerfs au rose de la chair exposée au rouge des profondeurs rouge rouge du sang partout et son corps avachi et renversé sur sa chaise. Éclaboussures rouges sur son côté gauche éclaboussures rouges dans ses cheveux blonds éclaboussures rouges sur son t-shirt éclaboussures rouges tout autour jusqu'au mur derrière. Franck a orienté son arme dans un pur réflexe de défense d'horreur de panique en direction de Dag et la balle a emporté son nez et explosé son œil droit pour finir sa course dans l'encéphale ouvrir la boite crânienne dans un feu d'artifices de petits bouts d'os et de chair et de résidus d'intelligence.
Le silence.
Le silence enfin.
Ce silence si précieux.
Des chaises tombent derrière elle, deux ivrognes se lèvent et trébuchent et sortent suivis de deux autres mais elle s'en fout.
Dag soupire. Un long soupir. Du soulagement saupoudré de contentement. Tout est fini.
Et elle profite. Profite de ce répit de quelques secondes. Profite de ce silence. Ce silence qu'elle affectionne tant.
Puis elle se souvient : elle n'est pas seule.
Elle réintègre le réel. Et glisse un œil en direction de Lorcan. Puis en direction du barman.
L'arme est abruptement relevée. Dag vise Arnold. Et sur son minois légèrement penché et barbouillé d'hémoglobine et autres fluides innommables s'esquisse un petit sourire cruel.
Arnold a les doigts trempés et savonneux sur son fusil – la dernière chose qui le sépare et tout à la fois le relie au massacre. Arnold a les yeux écarquillés et n'est plus tellement certain de savoir s'il est prêt à tirer. Et s'il la rate et si elle bouge et si les munitions qu'il a achetées au marché noir n'étaient qu'une daube sans nom et que rien ne se passait hormis le déclic qui signerait son arrêt de mort et si tout ça n'était qu'un cauchemar plus vrai que nature et si il appelait sa mère et si il s'excusait auprès de sa copine et qu'il lui avouait qu'il veut bien de l'enfant oui l'enfant qu'il avait juste la trouille et si-

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Il essaye, Hunnigan, d'attendre l'arme en douceur. Il essaye de ménager la blonde, de se raccrocher aux vieux wagons d'il y a des siècles quand avec patience elle réparait les blessures terribles de son corps et qu'il lui semblait qu'elle savait, dans le fond, qu'il n'était pas que le monstre et le traître qu'on avait fait de lui.
Parce qu'il refusait que l'effet de la Pomme ne vienne la pousser elle à commettre quelque chose de terrible ici. Pas qu'il craignait pour sa propre vie. Juste pour, aussi bêtement que ça puisse sonner, son âme. ⛧ C'est dire à quel point tu peux être stupide, Vermisseau...  

La Pomme en évidence. Il croit avoir repris un semblant d'initiative. Il croit avoir atteint l'arme aussi. Lentement, très lentement, lui faire lâcher. Pas de tir, pas de morts, pas de douche de plombs. Tout le monde va rentrer à la maison ce soir.
Ou pas. Il se ment à lui-même et il sait très bien que s'ils sortent eux, les Originels, ceux qui resteront dans le bar seront soumis à l'horreur dorée qu'il brandit. Et qu'avec autant d'armes dans un si petit espace, en un mot comme en mille : c'est un carnage qui se profile.

Et voilà qu'Addie lui assène un coup d'épaule qui les éloigne l'un de l'autre. Il la fixe avec des yeux ronds de surprise et louche sur l'arme qu'elle vient de pointer sur son front. Soit. Au moins le geste brusque n'est dirigé que contre lui. Il penche la tête et la fixe. Il n'a pas envie de la craindre. Il a envie de lui faire confiance. ⛧ Oh, à un clic de finir le travail, la petite Billie...

« Addie... »

Il s'en fout que ce soit Billie maintenant.

« On peut sortir sans tuer personne. Tu peux garder ça sur ma tête si tu veux, mais on va sortir d'ici, ok ? »

Qu'elle imprime que c'est la seule chose qui compte, bordel.
Qu'elle accepte juste de le suivre hors d'ici.

Un drôle de silence s'étale ici. Hunnigan sait à quoi il est dû. Les regards en coin, les airs torves. La moindre respiration de son voisin qui devient une source d'agacement. C'est la Pomme. C'est les flingues. C'est le calme avant la tempête.
Il espère qu'ils seront loin quand l'orage va s'abattre.

Elle va vous trouer. Sauf si vous la trouez avant. Vous lui rendrez service. Arrachez cette putain d'arme de sa main...

Et puis tout va très vite. L'odeur ferreuse du sang lui prend immédiatement la gorge, puis arrive la cordite. Ça sent la mort.⛧ Oh voyez-vous ça... on s'amuse enfin. Des trous dans des saletés de têtes. Un raté en moins, deux puis trois. T'es le suivant, l'Aptère.

Il faut plusieurs secondes à John pour comprendre ce qu'il vient de se passer. Franck, Manni, l'autre con. Il n'y a qu'Arnie qui n'a pas pris une balle dans le buffet.
Quelqu'un aura essayé d'effectivement arracher l'arme de la main de la blonde. Grosse erreur. Il en est mort. Le reste ? Il croit que quelqu'un a essayé de le fumer, dans la manœuvre et qu'Addie lui a sauvé la mise. Les trois mousquetaires des bacs à sable viennent de tous se faire déglinguer le caisson. Il y a du sang partout. John agite la jambe pour essayer de chasser les débris d'os et de cervelles qui souillent sa cuisse et l'un des pans de son fidèle long manteau rapiécé.

« Sacrée gâchette, hein ? Mais molo Calamity Jane... »

Qu'il assène quand même. Sa main tremble un peu quand elle rentre dans sa poche pour aller chercher une autre cigarette. L'autre, presque entièrement consumée, lui est tombée des lèvres pendant la fusillade et le sang qui jonche le sol a déjà était absorbé par le papier et le filtre. Quel gâchis, vu le prix de ses saloperies.
La pomme toujours dans la main, coincer son clou de cercueil au coin de ses lippes lui demande de faire preuve d'adresse.

D'autant qu'avec tout ce bordel, sa paluche tremble de plus en plus. L'adrénaline.

Coup de zippo. Clic. Raté. Clic... la flamme naît, embrase la cime du cancer en tube qui ne viendra jamais métastaser ses poumons maudits par la vie éternelle de la Fontaine.

« Arnie va rien faire. J'vais lui donner la pomme. On s'en va. »

Qu'il lance.
Et déjà il tourne les talons en se dirigeant d'un pas lent vers la sortie. Pas de balles dans le dos. Pas de balles dans le dos. Pas de balles dans le dos.

Il pose la Sphère Dorée qui roule et tomber derrière le comptoir dans l'une des trop nombreuses choppes qui attendent la plonge. Hunnigan continue et pousse la porte.

« Tu viens, Billie ? Ça craint comme coin. Et t'as un bout de Manni dans les cheveux. »

Il a dit Billie, ouais.

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(FLASHBACK – 2018)

Sons parasites. Elle dodeline imperceptiblement du crâne. Le bruit métallique du Zippo de Lorcan et la flammèche crachotée. L'aspiration. Les bronches envahies. L'expiration. Et cette odeur de tabac qui se répand au milieu des nuances de sang et d'alcool et de transpiration et de poudre. Par-delà, patiemment, revient à ses perceptions le crépitement des haut-parleurs. Plus de musique.
– Arnie va rien faire. J'vais lui donner la pomme. On s'en va.
Dag se mordille la lippe. Son sourire ne quitte pas sa sale petite face. Ses yeux ne quittent pas Arnold.
Dans son champ de vision Lorcan s'insère et dérange. Parce qu'il se glisse entre Arnold et elle et qu'il redevient pour un bref instant sa cible. Gestuelle mesurée, ne souffrant que d'une tension de la nuque et des épaules remarque Dag et peut-être aussi un peu des jambes. Ses prunelles océaniques naviguent du  profil mâle à la veste dégueulassée au pantalon taché. Il passe. Et revient dans sa trajectoire Arnold et désormais la pomme d'or qui roule et roule sur le comptoir et disparaît de son champ de vision. Tombée de l'autre côté du bar.
– Tu viens, Billie ? Ça craint comme coin. Et t'as un bout de Manni dans les cheveux.
Arnold décide de se la jouer fairplay – il est terrorisé. Une main relâche l'arme et l'autre lui sert de bascule. Canon en direction du plafond. Puis arme soigneusement déposée au milieu des shooters et des chopes traînant parmi les ovales humides du zink.  
Arnold est incapable de prononcer ne serait-ce qu'une syllabe.  
Dag redresse son crâne dans son axe dans un craquement de cervicales et fait la moue. Elle entend sans écouter Lorcan préférant avancer et se cogner à l'arête du bar. Le bras qui tient l'arme se plie quand son coude se plante sur le métal collant du comptoir. Glock en direction du plafond, à son tour, elle reluque Arnold et sa risette découvre un peu de ses quenottes de fauve.
Merci pour les pistaches Arnie, déclare-t-elle dans la seconde, le corps détourné, prenant à la volée une pleine poignée dans le récipient de verre ouvragé mis à disposition de la misérable clientèle.
Et sans lui offrir un dernier regard, elle lève le bras pourvu de l'arme en l'air dans une esquisse d'au-revoir en rejoignant Lorcan à la porte. L'entrée devenue sortie les avale et les recrache dans la rue. La porte claque dans leurs dos et Arnold dégringole au sol, le souffle erratique et de nouveaux projets de vie plein la tête.
Dag range le Glock dans la ceinture de son futal sans se soucier qu'il soit sécurisé ou non et qu'une pression malencontreuse puisse lui forer la cuisse ou un pied. Le contact du métal contre son bas-ventre la fait frissonner. Dextre pleinement libre de ses mouvements, elle peut à présent grignoter en ouvrant les coquilles qu'elle jette négligemment dans le caniveau. Les pistaches entre ses molaires craquent tandis qu'elle fixe Lorcan. Et lorsqu’il daigne la voir à son tour elle lui lance un sourire à croquer. Et elle se fiche tout contre lui dans une expression de tendresse-animale somme toute envahissante. Le museau tombe contre son épaule et son bras droit enlace son bras gauche – flanc contre flanc, ses doigts interminables comme du lierre s'enroulent autour de ses doigts à lui et elle le tire. Elle jette le reste de sa ripaille sur le bitume et entreprend de remonter la rue sur ses longues et graciles guibolles.
C'était amusant, dit-elle après une minute de leur silence.
La mort semée comme des graines au vent ; les vies arrachées abandonnées dans le glauque de ses instincts. Et qu'elle soit couverte de restes humains lui est parfaitement indifférent.
Ils avancent et ses phalanges toujours ligotent celles de Lorcan.
Et c'était merveilleux.
Dag coule son regard liquide vers lui, et reprend dans un murmure trop articulé d'enfant partageant un secret : … ce que tu as fait.
Levant le nez en direction des cieux moroses et rongés par les structures désossées de trop nombreux bâtiments gris ; elle prend encore ses marques. Elle a besoin d'apprécier pleinement les contours et les couleurs. L'Underapple déjà l'aimante et la condamne.
D'où tu l'as sortie ?
Sa figure retombe et son intelligence paraît prête à écorcer la moindre ridule du quadragénaire, la moindre protubérance de mensonges ou semi-vérités. Sa main libre et granuleuse du sel des pistaches brutalement à hauteur de son visage qu'elle débarrasse d'un bout de chair. Le tendre et enrubanné de sa paume essuie ensuite les traces sanglantes de sa pommette jusqu'à l'angle de sa mandibule hirsute. Une cajolerie dévouée.
[Ses toxines les enveloppent.]
Je crois- elle réfléchit.
Se mangeotte la lippe.
Je crois que tu m'as manqué.
Ses dents délaissent sa lèvre pour s'attaquer à l'intérieur de sa joue, jusqu'au sang.
Elle rectifie : Pouvoir te toucher m'a manqué.
Et il n'y a rien de plus évocateur et trouble et bouffi de sous-entendus foireux.
Et il n'y a rien de plus doux et candide et saucé d'émotions crasses.

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Sa cigarette entre les lèvres, Hunnigan attendait à présent dehors, avec l'espoir que toute cette histoire allait se régler sans un mort de plus. Arnie renonce, Addie capitule et se dirige vers la sortie, non sans venir prendre des pistaches comme un gosse à qui on donne le droit de prendre autant de bonbon qu'il souhaite à la sortie du supermarché.
Flingue rangé, pas sécurisé, mais soit. Il s'en contentera. John soupire, sa main libre tirant sur sa nuque quand il relève un peu la tête.

C'était moins une, putain.

Il rêvasse un peu à refaire ce qu'il vient de se passer, certain que s'ils revivaient la même expérience dans des mondes alternatifs, neuf fois sur dix, ils y restaient tous les deux.
Son retour sur terre survient quand Adalyn vient l'attraper par le bras et s'appuyer sur son épaule. Son regard glisse vers elle. Difficile de ne pas lui trouver un côté totalement enfantin dans son comportement. Et difficile aussi de ne pas chercher à comprendre ce qui l'a fait finir ainsi.

Parce qu'il a beau retourner les choses dans tous les sens, la Boîte ne se trompait pas tant que ça. Elle aussi, à sa manière, semblait avoir été fracassée par les années et ça lui faisait de la peine. Il avait l'affreuse certitude qu'elle avait sans doute eut besoin d'aide et qu'il n'avait pas été là pour la lui offrir. C'était injuste, parce qu'à l'inverse, elle avait été là quand il était au plus mal. Ouais. Révoltant, même. Ça n'allait pas alléger sa conscience tout ça.

« Amusant ? »
Elle a raison, c'était drôle. Dommage que tu t'en sois sorti indemne, Johnny-boy.

Il s'était laissé entraîné à sa suite par la main qui avait saisi la sienne. Elle avait trouvé ça amusant.

« C'était moins une, tu veux dire. »

Il ne cherche pas à la questionner quant à la direction. Il vaut mieux qu'ils soient loin quand la pomme commencera à flétrir et qu'Arnie comprendra qu'il va simplement devoir nettoyer son bar et se débarrasser des corps qui y gisent sans pouvoir mettre la main sur la fortune qu'il imaginait. Les Hommes et les trucs brillants hein...⛧ Dixit l'amibe qui a passé sa vie à gratter le sable pour y trouver des trésors tss tss tss...

Truc brillant qui semble être le sujet de conversation d'Addie. Merveilleux qu'elle dit. Il lui lance un regard en biais. Derrière, les pistaches rescapées nourriront les rats de l'Underapple dans les heures à venir. Qu'importe.

« C'est pas aussi merveilleux que tu pourrais le penser. La Pomme est une vraie saleté, en réalité. »

Il est amer parce qu'il sait ce qu'elle peut engendrer comme problème. Il préférait éviter d'y avoir recours. Fut une époque où elle était utile quand ils composaient uniquement avec des ordures. Ses chasses aux trésors l'amenant à se confronter à des bandes entières de dingues sans foi ni loi qu'il n'avait que peu de scrupules à laisser s'entretuer. Mais Manni et les deux rigolos ? Des loosers qui se prennent pour des gangsters méritaient-ils vraiment d'être froidement tués comme ça ? ⛧ Oh oui, il le mérite. Il pourra te garder un siège dans le wagon pour l'enfer, Cloporte...

« D'où ? Oh heu... de l'Olympe d'après la Légende. »

Il répond, sans trop d'hésitation.

« Mon mojo me permet de la faire apparaître. Une des trop nombreuses choses que je sais faire et qui tue. » 

Qu'il assure, le visage un peu plus sombre et la mine fermée.
La main sur sa joue l'amène à un regard curieux. Il y a quelques minutes elle avait un flingue sur son front. C'est dire à quel point les choses pouvaient être étranges. Il se fendit d'un petit sourire en la fixant droit dans les yeux. Quelque chose de bizarre se passait. Il se sentait léger. Et si Addie avait toujours pu avoir un don pour l'apaiser, ça n'avait jamais été aussi... intense.

Il se sentait léger. Si léger. Son visage serré semblait fondre tant il se relâcha progressivement au point d'avaler les rides de ses regards sévères et épuisés. Il aurait presque eu dix ans de moins en apparence, si ses yeux, eux, ne trahissaient pas encore son trop grand âge.

« Addie, il se passe quelque chose... »

Qu'il avait sifflé. Ce n'était simplement pas normal qu'il se sente si bien. Qu'il ait envie de rire. Quelque chose arrivait. Il avait un sourire à présent, presque béat. Lui aussi, ça lui avait manqué de sentir ses doigts sur lui. Même si la dernière fois ils lui avaient fait mal quand il avait fallu recoudre et désinfecter les plaies. C'était si... agréable qu'il n'arrivait plus à le verbaliser. Il n'arrivait en fait progressivement plus à rien.

Et bien, cloporte. On dirait que tu vois les portes du paradis...
« Et bien cloporte, on dirait que tu vois les portes du paradis. »

Il y eut un moment de silence. Un vent lui caressait le visage, il était si calme qu'il en avait perdu conscience de son propre corps. Il avait envie de crier, mais à défaut d'user de ses cordes vocales il avait l'impression que c'était son âme tout entière qui riait. C'était au-delà du physique. Il se sentait si bien...

qu'est-ce que tu fais ?

« Qu'est-ce que tu fais »

Répétèrent ses lèvres sans qu'il n'en ait conscience. Et très rapidement, les Maux comprirent, sournoises petites horreurs insidieuses.

Billie. J'ai quelque chose pour toi.
« Billie, j'ai quelque chose pour toi. »

Dans la poche gauche de ma veste. C'est juste pour toi. Un cadeau.
Qu'il répéta encore, avec la même sale intonation mielleuse et agréable. Son regard lui, trahissait sans doute le voyage que les toxines faisaient faire à sa psychée. Un monde de lumière et de visages connus.

« Dans la poche gauche de ma veste. C'est juste pour toi. Un cadeau. »

Mais en effet, dans la poche gauche de son manteau, au milieu des tas d'inutilités qu'on pouvait transporter de nos jours se trouvait une petite boîte noire.

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(FLASHBACK – 2018)

– Addie, il se passe quelque chose...
Dag le fixe, indifférente. Elle aime seulement la texture de son visage et puis ses traits qui se tordent et se détendent sous sa caresse. Une chose extraordinaire, que de faire baisser la garde d'un homme. Elle ne s'en lasse jamais, s'en fascine toujours. Et que ce soit Lorcan sous sa pulpe à un goût de paradis perdu, de rêve éveillé. Dans le glauque de son ventre, de sa poitrine, les réminiscences passées sur le présent et elle y devine les futurs – car malgré les fracas et les horreurs et les absences et les silences, malgré tout ce qui l'a éviscérée jusqu'au plus profond de son âme faisandée, Lorcan est là. Sa voix-mots sur le papier, revenant et revenant encore, sous ses billes délavées.
Lorcan n'imagine pas comme il est essentiel à sa structure. À son architecture neuronale. Pour ne pas que tout dégueule que tout explose qu'elle se réduise en poussière d'étoiles et disparaisse dans les limbes du monde.
Il sourit et elle sourit en retour et il dit : et bien cloporte, on dirait que tu vois les portes du paradis. Et Dag comprend, évidemment qu'elle comprend. Car Dag est Dag et elle se sait être l'une des pires crevures que cet univers porte et supporte.
Il n'est plus lui-même tout en l'étant. Lui dans sa corporalité et ses expressions et sa langue arrachée par le désastre de sa psyché saccagée par les années et son poison. Ils ne peuvent pas s'en sortir – c'est impossible. Il ne peut pas échapper aux démons qu'on leur a enfoncés dans le crâne et les artères. Pas après tant de temps, pas après tant d'époques. Il y a un parfum de tragique, à l'éternité. Une dépossession de soi-même.
Sa main se presse davantage sur sa joue et elle penche le museau. Une moue tendre et triste derrière tous les résidus de macchabées.
– Qu'est-ce que tu fais, demande-t-il.
Je te regarde.
Il n'y a pas plus simple et pas plus vrai.
Dag le regarde et son cosmos paraît s'illuminer.
–  Billie, j'ai quelque chose pour toi.
Les sourcils s’arquent au-dessus de ses deux flaques. De la surprise et de l'excitation. Un bonheur mielleux d'innocence – tout ce que peut lui tendre Lorcan immanquablement et profondément l'émerveille. Il y a en lui, dans ses mains, sur son cœur et dans sa bouche, des histoires et des contes et des trésors qui la troublent et la morcellent de la plus agréable des façons.
– Dans la poche gauche de ma veste. C'est juste pour toi. Un cadeau. 
La patte de Dag abandonne la face de Lorcan. La patte de Dag se glisse aussitôt dans les replis de sa veste et une petite torsion du bras lui permet de découvrir d'abord un portable ensuite des clefs et pour terminer une boîte. Une petite boîte noire et lisse qui dans sa paume ne pèse rien.
C'est pour moi ?
Et Dag ne sait pas exactement quoi foutre de ça.
Suppose qu'elle y dénichera une pierre venue d'un pays lointain ou des graines exceptionnelles ou encore un petit bijou soustrait à la Terre pendant l'une de ses expéditions.
… merci, lâche-t-elle, le minois rougissant sous le rouge du sang.
[LANCER DE DES] Ses phalanges se craquent et se plient et soulèvent le couvercle tandis que son petit nez s'est approché, ses billes bleues dévorant l'intérieur qui-
Eh bien qui ne recèle rien du tout.
Lorcan, dit Dag, relevant le pif. Je crois que t'as oublié un truc.
À la parole l'explication le mouvement. Elle lui montre la boîte de Pandore, ouverte, béante, bouche crachant les quelques Maux de l'Humanité que Lorcan avait avec tant de mal réussi à réemprisonner.
… ça a juste fait un genre de pschit mais y a même pas d'odeur et puis elle est vraiment vide tu vois.
À la parole les élucubrations le mouvement. Elle lui fiche sous le nase la boîte de Pandore, ouverte, béante, bouche crachant son néant.
Le scrutant avec une attention renouvelée et anxieuse, ses sourcils clairs se sont froncés sur sa bouille.
T'es sûr que tu dors bien ?
Elle se grignote l'intérieur de la joue.
Tu prends des compléments ?
Dag est très attentive et très concernée.
Car Lorcan est ce qui la rattache au monde et son égoïsme et son nombrilisme et ses élans d'affection obsessive et pathogène la forcent à le garder en vie. Coûte que coûte.
Tu devrais essayer le calcium-
Et Dag range la petite boîte dans la poche arrière de son futal et continue, tout en récupérant la main de Lorcan dans la sienne.
… j'ai lu que ça aide à la mémoire...
Son regard de flotte coule vers le sien.
Tu sais, avec l'âge avançant...
Elle ne veut pas être trop brusque elle ne veut pas être trop incisive mais Lorcan est Lorcan et Lorcan a vieilli. Plus qu'elle plus qu'elle ne voudrait le percevoir plus qu'elle ne voudra jamais l'admettre en son intime. Car l'idée de le perdre la terrorise.
Un bruit éclate et la tire hors de sa contemplation. Ses pupilles dévient et un chat leur file devant. Et s'arrête. Et les observe, le cul posé sur le bitume fendu. Aussitôt Billie s'extasie et abandonne la main de Lorcan et Lorcan lui-même. Elle s'approche du chat noir avec l'impatiente contenue d'une enfant de dix ans.
Comment tu t'appelles toi.
Accroupie à deux pas du félin et à plusieurs mètres de Lorcan par conséquent, elle tend le bras et le doigt, grattouillant l'arrière de l'oreille du fauve [qui, comme tout le reste comme tout ce qui l'entoure comme tout ce qui la touche, a les perceptions zigouillées par sa toxique insanité.]
Oh Lorcan (elle l'appelle, sans se retourner) regarde viens voir oh- Lorcan tu devrais l'adopter.

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Les bonnes choses ont toujours une fin. Et dans le cas d'Hunnigan, elle arrive quand malgré les couleurs qui dansent devant ses yeux, les visages radieux de ses proches qui s'imposent à son esprit perdu dans son trip et le sentiment de contentement hors du commun qui l'étreint, quelque chose comme à clocher. Il y a un poids en moins dans sa poche. Comme si d'un coup d'un seul on venait de lui retirer une partie de lui. Comme si on l'avait privé d'un genou. D'un truc majeur qui composait son être et que ça n'était pas du tout supposé arriver.

Le bonheur, finalement, fond comme il était venu. Il entrevoit une dernière fois l'idée qu'il a pu être en mesure d'aider Dalia. L'image d'une Béatrix faisant sauter le verrou de son cachot pour l'arracher à sa captivité, les sourires engageant des Nightbringer qu'il n'aura, dans son trip, jamais trahis. Mais la béatitude et la joie ne sont pas pour lui. Tout s'efface et il se retrouve à contempler le monde dégueulasse dans lequel il croupit tandis qu'un cri monstrueux qu'il semble le seul à entendre tonne dans son esprit. Les Maux hurlent. Ils sont ravis.

Il a tout juste le temps de tourner la tête qu'il voit Addie, la Boîte de Pandore entre les doigts, occupée à lui expliquer qu'elle est vide. Qu'il n'y a rien dedans. Qu'il a oublié un truc.
L'air béat cède place au visage de l'horreur. Le teint rosé de ses joues luisantes des larmes de bonheur blanchit en une fraction de seconde et il peut se sentir saisi d'une chair de poule tellement violente qu'elle en est presque douloureuse.

« Oh non... »

Il est KO debout, Hunnigan. Et se laisse à nouveau entraîner à sa suite, totalement hagard et toujours sous l'effet psychoactif des toxines qui le rendait plus ou moins docile par la force des choses. Mais pas moins inquiet. Ça non.

« Je ne perds pas la mémoire. Je me souviens de tout » Avait-il répondu, l'air plus morne et fatigué que jamais. « Je n'ai rien oublié. » Comme un aveu douloureux. L'amnésie avait un côté enviable, il fallait bien l'avouer.

C'est quand elle le lâche qu'il semble céder. Ses jambes se dérobent sous son poids, il se retrouve lui aussi au sol, à genou, à fixer le néant.
La Boîte de Pandore, vient à nouveau d'être ouverte. Il lui faudra sans doute à nouveau des mois pour retrouver les quelques horreurs qu'il avait passé tout ce temps à identifier et capturer.
Cette vie là n'avait-elle donc aucune espèce de limite ?

Son regard s'attarda sur le chat, visiblement aussi déboîté que lui ne l'était il y a quelques instants. Il secoua la tête, dépité et sans même vraiment chercher à se remettre debout, glissa en plusieurs acoups sur le bitume crasseux de l'Underapple  jusqu'à venir se tenir à côté de Billie. Épaule contre épaule, à fixer la bestiole qu'elle cajolait.

« J'ai pas de quoi adopter un chat. Ni la place, ni l'argent, ni l'envie, je crois. »

Il ne les aimait pas spécialement, il faut dire. Il les trouvait feignants, imprévisibles, inconséquents et cruels. Ils ne valaient pas plus que les Hommes, en fait. Les chiens eux, avait le panache, une capacité à suinter la joie, la candeur d'oser aimer sans concession même les âmes les plus perfides et la grandeur d'être toujours loyaux. Tout ce que lui ne serait jamais à bien y réfléchir. L'idée lui arracha un petit rire cynique. Il fouilla sa poche, chercha une autre cigarette qu'il alluma avec la rapidité de l'habitude, avant que sa main libre ne vienne se poser sur l'épaule de la blonde, délicatement.

« Billie ? »

Demanda-t-il.

« Ad...Billie, je suis désolé, mais tu ne vas pas pouvoir garder la Boite de Pandore. »

Il fixait toujours ce putain de chat, espérant que jouer à câliner la gueule du félin allait la rendre un peu plus docile. Plus encline à rester terre à terre et à comprendre ce qu'il avait à lui dire.

« Elle est dangereuse. Elle prend le peu que les gens ont et les brise. Est-ce que tu peux me la rendre ? S'il te plait ? Tu es mon amie. Je peux pas te la laisser. Elle te détruirait. Elle détruit tout. »
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(FLASHBACK – 2018)

Lorcan lui revient. Sa présence en caresse. Son épaule à son épaule. Dag a le sourire ondulatoire, qui jamais tout à fait ne disparaît. Elle est extatique et heureuse – une joie de la proximité et du lien qui en elle se retisse comme autant de racines s'entrecroisent et se ligotent. Elle soupire d'aise, continue de gratter le petit fauve qui ronronne.
– J'ai pas de quoi adopter un chat. Ni la place, ni l'argent, ni l'envie, je crois.
Dag coule une œillade.
Le sourire grignoté par une moue de reproche.
Et l'habitude des gestes, dans sa mouvance. Lorcan tire une clope de son paquet, la niche entre ses lèvres, l'allume. L'odeur de tabac dispersée entre eux, en eux.
Puis sa main mâle accapare son épaule.
Un sursaut, léger. Une envie de se défaire presque aussitôt.
Le contact, Dag l'impose sans concession mais le reçoit d'autrui comme autant de gifles sur sa peau. Sa bouille dévie, elle fixe Lorcan. Et le contact lui devient sitôt plus doux, acceptable, désiré. Elle se souvient qu'elle n'a rien à craindre, tant qu'il est là. Elle se souvient qu'il n'a rien à craindre, tant qu'elle veille sur lui.
– Billie ?
Les yeux s'écarquillent pour la question qui ne vient pas. Un sourire plein de dents répond, encourage, dans l'attente.
– Ad...Billie, je suis désolé, mais tu ne vas pas pouvoir garder la Boite de Pandore.
Ses sourcils s’arquent.
La quoi ?
La boîte. De pandore.
… comme dans le mythe ?
Évidemment, crétine.
Son attention repart vers le chat que Lorcan observe. Sous sa minuscule mâchoire, les ongles de Dag fourragent.
Wah, expire-t-elle.
Le plus beau cadeau qu'elle n'ait jamais reçu.
Qu'elle soit vide, finalement, n'est plus si important.
Elle a un mythe dans sa poche arrière, là, juste contre son cul.
– Elle est dangereuse. Elle prend le peu que les gens ont et les brise. Est-ce que tu peux me la rendre ? S'il te plait ? Tu es mon amie. Je peux pas te la laisser. Elle te détruirait. Elle détruit tout.
Dag relève ses billes et abandonne le chat. Sa main qui caressait l'animal vient caresser Lorcan. Ses ongles sous sa mandibule, puis sur l'angle. Elle regarde ses doigts dégueulasses s'enfouirent entre les poils auburn, elle trouve ça charmant. Son majeur longe la ligne de l'os et s'impose finalement sur la bouche.
Ne dis pas de bêtises.
Dag sourit oh elle sourit tellement. Dag est défoncé au meurtre à l'horreur de l'existence et ces retrouvailles qu'elle a trop retardées – et elle regrette soudain, terriblement. Des nœuds dans son ventre.
Je ne peux pas non non-
Elle secoue son museau. Le penche. S'approche. À lui souffler son haleine tiédasse de petit monstre dans les narines. Son index et son majeur s'emparent de la clope qu'elle insère entre ses propres lèvres. Elle tire une bouffée qu'elle lui crache dans le visage.
Tu me dis qu'elle détruit  tout tu me dis qu'elle pourrait te briser et tu veux que je te la rende.
L'interrogative muée à l'affirmative. Elle chuchote.
Lui remet la clope entre les babines. Se faufile devant lui, les genoux ripant sur le bitume de l'Underapple. Ils ne sont à présent plus que tous les deux au milieu de nulle part sous un ciel absent. Ses paumes entourent sa trogne. Elle l'oblige. Bien droit dans les yeux – aucune échappatoire.
Je suis désolée oh Lorcan je suis désolée d'avoir autant tardé j'aurai dû revenir plus vite j'aurai dû-
Elle hésite, soupire. Se ratatine. Percute son front à son front et frotte sa chair à sa chair. Câlinerie bestiale. Elle est désolée de ne pas avoir su l'ampleur de son fardeau. Dont elle se doutait dont elle ignorait tout dont elle le libère.
… tu n'as plus à t'inquiéter maintenant.
Elle frotte son nez dans sa barbe.
Frissonne d'un plaisir chaque fois renouvelé. Dag Dag Dag tu n'es qu'une sale petite dingue une sale morveuse une idiote tu l'aimes et tu vas le faire tuer avec toutes tes conneries avec ton orgueil et tes élans de sainte-
Je vais veiller sur toi.
Elle se décale, un peu. Juste de quoi le mirer de nouveau. Ses orbes glissent jusqu'à son front puis ses cheveux. Une main se lève, replace les mèches dans un semblant d'ordre au sein du désordre.
Rien non rien ne va mal aller ne t'en fais pas.
Sa main dégouline de son crin à sa joue qu'elle supporte. Aimante, maternante, dégénérée.
Moi je n'ai plus rien à perdre tu sais... non vraiment plus rien si ce n'est toi.
Son pouce s'enfonce dans sa joue, s'amuse de la texture. Dag a déjà dérapé de l'autre côté du réel, Dag et ses obsessions Dag et ses pulsions Dag et son émerveillement de le savoir sous ses phalanges de le savoir si proche et si vivant. Et les années coulées dans les années coulées dans les années de sa mémoire éclatée ; ici ou avant ou maintenant. Le temps a perdu toute emprise sur son esprit dès lors qu'elle a refusé de vivre dès lors qu'elle a cédé au sang nourri de ses vengeances. Petites et immenses.
Tu ne l'auras plus jamais.
Et dans cette sentence, abrupte, sans hésitation : l'inconditionnel de son adoration.

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Comme dans les mythes oui, signifie le petit coup de tête affirmatif d'Hunnigan en guise de réponse à sa question. La réaction, elle, n'est pas celle qu'il attend. Pas d'horreur. Pas de peur. Pas de remords à l'idée de l'avoir ouverte.
Pire, Billie semble s'en extasier. Il insiste. Ça ne marche pas. Il le sait. Il le sent. Il comprend que les choses sont devenues très compliquées maintenant qu'elle l'a mise dans sa poche. Maintenant que la seule option qui s'offre à lui reste de la lui reprendre de force... ou par la ruse ?

Parce qu'il sait qu'il ne le fera pas. Il n'en est pas capable. Pas à elle. Son regard affronte le sien. La proximité ravive les sensations ressenties un peu plus tôt. Plus elle le touche, plus il se sent à nouveau partir vers des limbes colorés dans lesquels il est léger et heureux. Mais la Boîte n'est plus dans sa poche à lui. Les voix ne l'insultent plus. Et cette simple idée qui lui tord le ventre et lui gèle les viscères et suffit à ce qu'il garde un pied dans la réalité.

Addie enchaîne. Ses doigts glissent sur son visage. Elle divague un peu, mais à l'air plus en phase avec le monde à présent que depuis qu'ils se sont recroisés. Les yeux de l'aventurier scrutent ses billes bleues, ses lèvres se fendent en un sourire sans joie. Addie vient de lui annoncer qu'il n'aura plus jamais la boîte. Il sait qu'elle croit ce qu'elle dit. Il comprend que le monde est en train de s'effondrer sous ses basques.

« Bien sûr que si, je l'aurais à nouveau. Tu vas me la rendre. »

Il oppose des certitudes qu'il n'a pas avec l'assurance de celui qui est prêt à se cramponner à n'importe quel mensonge pour le vendre. Sa main à lui vient à son tour se relever pour se porter à son visage à elle. Dégager quelques morceaux de tête des cheveux qui avaient été blonds, avant les torrents d'hémoglobine du bar. Un débris de crane ici. Le gluant d'une bout d'encéphale là.

« Regarde-moi bien. Est-ce que j'ai vraiment l'air d'avoir moi aussi, quelque chose à perdre ? »

Sa clope se balade entre ses lèvres, au rythme de ses mots, trahissant là encore une habitude à en griller des tonnes, l'une après l'autre. La malédiction de la fontaine ne laissera jamais l'un de ses enfants se risquer à pouvoir mourir d'un simple cancer. Il peut s'y risquer sans craindre de tousser ses bronches.

« Elle m'a déjà brisé depuis longtemps, la Boîte. Et j'ai besoin de l'avoir pour essayer de réparer ce qui est cassé. »

Oh il n'a pas besoin d'avoir les Maux qui lui murmurent des horreurs pour savoir qu'il se dirige vers une plante un peu glissante. Celle d'un similichantage affectif. Du marchandage de sa reconstruction en échange de la boîte. Et même si ça n'était pas entièrement faux, puisque sans boîte, pas de rédemption, il se sentait affreux d'être contraint d'autant de bassesse pour essayer de faire germer l'idée que non, elle ne pouvait pas garder la boîte. Parce qu'en le faisant, elle l'empêchait, toute protectrice et maternelle qu'elle était, à pouvoir se reconstruire comme il semblait l'espérer.

« Je sais comment la contrer, tu sais. Mais il faut retrouver les Maux, les réenfermer, et alors je pourrais la cacher. J'en ai besoin, Billie. »

Une main sur une joue, l'autre sur la clope qu'il avait fini par arracher de ses lèvres.

« J'ai passé toute ma vie à faire en sorte qu'elle ne fasse plus de mal. Les choses ont mal tourné dernièrement. Elles peuvent encore être réparées. C'est la seule chose qui me permet de me dire que ça vaut encore le coup, tout ça. Se réveiller, vivre. »

Il se recule finalement et se redresse, un peu sonné par les effets des toxines qui le font même vaciller un peu. Le voilà debout, présentant son dos, il avait enfourné ses mains dans ses poches pour semer ce qu'il espérait être le petit coup qui lui permettrait de changer d'avis :

« Tu me rendras la Boîte. Je le sais parce que j'ai confiance en toi. Et parce que j'peux pas croire une seule seconde que toi, tu seras celle qui m'empêchera de faire le seul petit truc bien qui pourrait vaguement m'aider à me pardonner. »

Et toujours pas de voix pour lui rappeler à quel point c'est retors, comme levier. Ça avait beau être vrai, dans le fond, ça restait plutôt sournois.



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[LANCER DE DES]
Les doigts de Lorcan contre son visage. Dans ses cheveux.
Dag flanche. Un peu.
– Regarde-moi bien. Est-ce que j'ai vraiment l'air d'avoir moi aussi, quelque chose à perdre ? 
Le minois se fronce. Le regard tente d'échapper au regard qui la poinçonne. Désagréable sensation que d'être prise dans un jeu de dupe. Que d'être sensible et faible et concernée par un être. La solitude lui va mieux. La solitude fait moins douter. Et souffrir.
– Elle m'a déjà brisé depuis longtemps, la Boîte. Et j'ai besoin de l'avoir pour essayer de réparer ce qui est cassé.
Dans le petit crâne blondin, le schéma prend forme. Le pourquoi il la veut. Le pourquoi elle doit la rendre. La rédemption. Le besoin de faire le bien dans le mal. Et pourquoi. Et pour qui. Personne ne les a aidés, eux. Personne ne s'est soucié de leurs douleurs et terreurs à travers les âges.
Alors.
Pourquoi chercher la rédemption.
Pourquoi chercher le bien dans le mal quand tout peut se régler avec l'abandon de l'Humanité. Sa destruction dans la mort.
– Je sais comment la contrer, tu sais. Mais il faut retrouver les Maux, les réenfermer, et alors je pourrais la cacher. J'en ai besoin, Billie.
Mais... et toi alors.
Elle est obsessive. Elle est indifférente. Elle est exaltée et novice. Ne compte que son petit monde bordélique et Lorcan au milieu.
Main mâle sur sa joue. Dag baisse les paupières et savoure. Petite chatte languissante.
– J'ai passé toute ma vie à faire en sorte qu'elle ne fasse plus de mal. Les choses ont mal tourné dernièrement. Elles peuvent encore être réparées. C'est la seule chose qui me permet de me dire que ça vaut encore le coup, tout ça. Se réveiller, vivre.
Les paupières coulissent sur leurs flaques. Dag scrute Lorcan. Lorcan sans clope. Lorcan doit être concentré et angoissé. Car Lorcan parle avec une clope entre les lèvres car Lorcan boit avec une clope entre les lèvres car Lorcan probablement baise une clope entre les lèvres car Lorcan fait tout avec une clope entre lèvres.
Dag saisit que ce qu'il lui dit est très important – pire encore : primordial. Sans la boite, Lorcan s'effondre. Et sans Lorcan, elle s'effondre. L'effet domino dans sa version courte. Ils sont trois. N'ont besoin que d'un index mesquin pour pousser l'ensemble. À moins. À moins qu'elle se montre un peu moins conne qu'à l'ordinaire. Un peu moins butée un peu moins maniaque.
Et il s'évade. Se lève, l'abandonne. Déchirure à l'intérieur. Manque immédiat. Peur de la solitude tant adorée ; de la solitude depuis tant d'années préservée. Malgré les êtres autour malgré les pions. Que des pions. Sa luciole échappe à ses doigts. Dag en chialerait. Dos à elle, il est immense et distant. Mains dans les poches. Indifférence crachée.
– Tu me rendras la Boîte. Je le sais parce que j'ai confiance en toi. Et parce que j'peux pas croire une seule seconde que toi, tu seras celle qui m'empêchera de faire le seul petit truc bien qui pourrait vaguement m'aider à me pardonner.
Dag se redresse, créature fauve. Poupée désarticulée. Elle s'empresse de se coller à son épine dorsale. D'enfoncer son minois sale dans sa veste. Elle le respire, elle l'enlace. Ses deux bras autour de son torse. Les deux mains contre son ventre. Une à plat, pour ressentir les ondulations de sa respiration. L'autre en poing serré. Qu'elle ouvre. Lui ouvre. La petite boite noire dans la paume. Elle la lui rend sa foutue boite.
Et Dag gémit, la frimousse toujours enfouie : promets qu'on reste ensemble.
Et elle se coule par-dessous son bras droit et le rejoint. Du dos elle se glisse au thorax. Elle lève son nez vers sa trogne bourrue et elle murmure et elle s'inquiète et elle implore.
Plus de lettres avec des mots à l'encre mais seulement des mots avec ta bouche.
Et sa petite patte blanche coincée entre eux, toujours ouverte, sur la boite de Pandore vide mais refermée. Sur la boite de Pandore ayant dégueulé par sa faute à elle à lui à eux ses rares et derniers maux.
La patte blanche se referme. Disparaît. Se glisse dans la poche avant du pantalon de Lorcan. L'objet y est abandonné. Les longs bras décharnés de Dag s'enroulent ensuite tout  autour de la nuque de Lorcan. Elle se presse elle se love et elle chuchote à son oreille. Secret de môme dingue : avec moi je suis sûre vraiment sûre que tu les retrouveras très vite.
Et elle ne doute pas un seul putain d'instant d'elle-même. Dag ruisselle sur le chaos Dag nage dans la merde Dag vise à bout portant le monde entier pour le simple plaisir de se sentir puissante pour le seul sentiment éprouvé d'une vengeance accomplie et d'un amusement entrecroisés – pour sa seule et brillante et pleine liberté. Aimant à problèmes. Aimant à transgressions.
Elle se défait de lui. Entortille son bras au sien. Elle est insupportable – avec lui seulement avec lui. Elle est envahissante et tactile et douce – avec lui seulement avec lui. Plante carnivore.
Montre-moi où tu te réveilles et où tu vis.
Pour reprendre ses mots ; ces mots qui lui tournent dans la tête et lui cognent la raison et les certitudes. Et peut-être qu'il va la réveiller, elle aussi. Et peut-être qu'elle pourra vivre, à son contact. Vivre et non plus survivre, démolir, anéantir. Entre ses tempes, l'hilarité – Dag oh Dag espèce de crétine t'as tellement le goût du sang et du macabre dans la gueule que le manque de ravages te filera des migraines tu t'enfonces tu jouis tu te cabres contre les vertiges arrête ton délire.

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Debout, Lorcan attend. Marchera. Marchera pas ? Derrière, il l'entend qui bouge, qui s'approche. Et son contact dans son dos ne tarde pas.

Marchera, donc.

Il le sait avant qu'elle n'ouvre la main. Sous ses yeux, la Boîte de Pandore. Petite horreur de la taille d'une belle pomme. Il claque sa langue contre son palais, grimace. Il pourrait la prendre, mais il préfère être sûr. Sûr que c'est ce qu'elle veut.
Sûr qu'elle ne se dira pas qu'il est totalement ravagé et qu'il est prêt à tout, même à mentir, pour récupérer cette abjection cubique.

Elle lui demande de promettre. Il arque un sourcil. L'instant d'après, elle se faufilait déjà pour revenir se planter devant lui, contre lui. Toujours ce petit vertige quand elle est si proche. Bordel. La toxine enfonce ses serres jusqu'à son encéphale. C'est curieux de se dire qu'il doit se battre pour ne pas ressentir du bonheur.
Artificiel, le bonheur. Toxique, même. Il souffle, secoue la tête, s'ébroue comme le vieux clébard des rues qu'il peut être.

« Je devrais peut-être quitter la ville, de temps en temps. Mais si tu veux, tu pourras venir avec moi, Billie. Ou m'attendre et je reviendrais. J'ai pas mal de trucs à faire ici. »

Parce qu'elle a beau être bizarre et avoir la fâcheuse tendance à compliquer tout depuis qu'elle s'est pointée, il est hors de question qu'il l'abandonne quand elle requiert sa présence. Il lui devait au moins ça. Elle aussi, semblait avoir besoin d'un peu aide, de toute manière.

« Je te promets que je vais pas te laisser. »

Qu'il ajoute. Le poids de la boîte revint alourdir sa poche. Il regrette autant qu'il est soulagé de la récupérer. Son regard accroche le sien, et il approuve d'un lent, très lent signe de la tête. Ses yeux suintent les remerciements que sa bouche ne prononcera pas. Parce qu'il ne peut décemment pas dire merci en retrouvant un tel fardeau. Même s'il l'a exigé.

« J'imagine que oui, tous les deux, on devrait pouvoir les retrouver ouais... »

Ils ne seront pas trop de deux pour une pareille entreprise de toute manière. Il ne voyait pas à qui demander d'autre. Doyle ? Est-ce qu'au moins il était encore dans le coin ? Ou même en vie...
Willow ? Peut-être. Alice ? Est-ce que l'Enfant avait au moins pu survivre toutes ces années. Et Darla ? James ? Béatrix...
Qui d'autres pouvait réellement l'aider hein ?
Il y avait bien la descendante de la sale petite sorcière. La descendante Hoxha. La pire bonne idée qu'il ait pu avoir depuis un moment.
Non. En fait, comme depuis toujours, il n'y avait que si Addie qu'il pouvait immédiatement compter. Comme toujours. Aucune de ses autres idées n'était aussi concrète que sa présence à elle.

« Où j'crèche tu veux dire ? »

Il leva le museau pour observer les alentours, chercher où ils étaient pour mieux savoir où ils iraient. Bras dessus, bras dessous, il prit la direction de l'ouest. Il allait devoir marcher.
Ils trouveraient bien sur le passage un vendeur de bouffe pour avaler quelque chose. Tant pis si les saucisses des hotdogs étaient partiellement au chat, Hunnigan avait faim. Il avait faim comme lorsqu'il redescendant d'un badtrip. Une fonce-dalle naissante. Peu commun.

« J'espère que tu t'attends pas au grand luxe. C'est pas Byzance... »

Le voilà qui se justifie. Preuve que l'avis qu'elle a de lui est important, dans l'fond. Il reprend :

« Mais bientôt ce sera tout à moi, et bien mieux que ça n'l'est maintenant. »

Jusqu'ici oui, il devait raquer pour que sa petite briqueterie reste SA petite briqueterie justement. Et pour que tout ce qui se trouvait à l'intérieur puisse demeurer en sûreté. Il y avait là-bas ses fameux grimoires, le fruit de ses recherches, quelques pistes vers d'autres babioles mythiques qu'il n'avait pas encore su invoquer, mais dont les pistes étaient fraîches.

« Dis-moi, Billie »

Son regard glissa vers elle, curieux.

« Comment tu m'as retrouvé ? »

Comment avait-elle réussi à ne pas divaguer en remonter une piste qu'il imaginait pas si facile que ça à suivre hein ?

« Et comment tu t'es perdue ici, dans c't'enfer. Il y a si peu de plantes... tout y crève. »


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Elle irait jusqu'à boire un litre d'essence, s'il le lui demandait. Elle est ce qu'elle doit être – elle est ce dont il a (aura) besoin. Et c'est là son plus doux poison. Son plus miraculeux bonheur. Lorcan la réanime.
–  Où j'crèche tu veux dire ? 
Elle opine, le scrute. Ses deux billes bleues plantées sur son faciès. Et elle se serre un peu plus contre lui – comme si c'était encore possible. Ses creux et ses bosses contre ses creux et ses bosses. Dans son esprit volcanique, les éruptions se distancent les unes des autres. Elle s'apaise. La respiration reprend un rythme lent et mou quand en elle tout n'est qu'os et lames.
Et il l'embarque. Elle ne sait pas où ; et au fond, Dag s'en fout.

Prunelles perdues aux alentours. Les rues qu'elle découvre et redécouvre, des rues qu'elle n'a jamais traversées. Ce monde est neuf, pour elle. Il suinte la crasse et la tristesse et il se peut qu'elle se sente chez elle. Elle dans elle dans elle. Son intérieur comme ayant explosé au-dehors. Enfin, elle s'imagine pouvoir trouver refuge et prendre racines.
Il n'a pas menti.
Lorcan a décrit la douleur.
Dag y trouve le réconfort.
L'esprit résolument bouffé par sa présence et sa maladie propagée à travers sol.
– J'espère que tu t'attends pas au grand luxe. C'est pas Byzance...
Sa tête dodeline. Son attention dérape vers lui.
… tes doigts suffisent.
À cela, s'ajoute le sourire.
Et peut-être qu'elle est obscène et peut-être qu'elle le pense et peut-être que l'envolée de ses mots la dépasse ou peut-être pas.
– Mais bientôt ce sera tout à moi, et bien mieux que ça n'l'est maintenant.
Elle perçoit des piqûres de fierté et des présages d'espoir.
Lorcan oh Lorcan, Lorcan a les lèvres bien plus incroyables et la voix bien plus douce que son encre. Elle aurait dû, s'en souvenir. Elle aurait dû, chercher à lui revenir. Plus vite.
Mais Dag s'est perdue aux layons des années. Dag s'est perdue à travers les actes et les heures. Dag n'est même plus capable de donner son âge. Dag n'est même plus capable de dire la dernière fois qu'ils se sont vus.
– Dis-moi, Billie.
La question la jette hors de ses méditations vaseuses.
Ses yeux rencontrent ses yeux.
– Comment tu m'as retrouvé ? Et comment tu t'es perdue ici, dans c't'enfer. Il y a si peu de plantes... tout y crève. 
Dag lève sa patte libre, l'autre toujours (é)prise de la sienne. Son bras enroulé à son bras. Ses doigts grimpent jusqu'à sa mandibule. Elle caresse la barbe du bout des ongles. Se mordille la lippe et puis chuchote : je suis en exil.
L'intérieur de la joue est grignoté.
Dag tente de rassembler les bouts.
Ils veulent ma peau et moi je ne veux pas la leur donner alors je suis venue et il y avait tes mots et il y avait cet endroit où le monde est muet où Dieu s'est vengé et je me suis dit oh-
Elle inspire. Colle son museau contre l'épaule de Lorcan. Puis l'enfonce dans sa nuque. Elle le respire. Reprend.
… j'ai dû utiliser... la vi-o-len-ce.
Elle articule.
Parle lentement.
Pour qu'il comprenne.
Il est évident qu'elle a oublié. Il est évident qu'elle ne voit même plus les sécrétions désormais sèches qui les recouvrent de la tête aux pieds. Les carnages devenus tant et si bien naturels chez elle, que ses pupilles lavent les surfaces et les repeignent en blanc.
… parce que tu n'es pas si difficile à trouver à qui sait chercher ce qu'il cherche.
Elle bat des paupières.
Le fixe.
N'est plus tellement sûre du début quand elle doit arriver à la fin.
Sa patte diaphane se lève et balaye les explications comme on éloigne un essaim de petites mouches.
Il y en a qui sont morts il y en a qui ont perdu des dents il y en a même un qui a perdu un œil ! (elle éclate de rire ; un rire bref, stridulant) ... il y a en qui ont perdu quelques phalanges ou l'usage de la rotule et puis d'autres qui ont pleuré mais rien que tu ne doives redouter ne t'inquiète oh ne t'inquiète pas Lorcan j'ai fait attention !
Elle soupire.
Épuisée.
Puis reprend :
J'ai traversé les taudis et puis j'ai traversé les murs (elle le regarde avec une petite moue) pas littéralement...
Elle soupire.
Et recommence :
Je crois qu'on t'a souvent confondu avec quelqu'un d'autre ou alors je ne savais pas bien expliquer ce que je cherchais dans ce que je cherchais... tu comprends ?
Et elle retourne à son analyse des lieux. Et elle s'émerveille et elle le renifle encore. Son bras replié cette fois avec son bras, et sa paluche qu'elle colle à ses narines.
Elle soupire.
Et décrète :
Sous le sang et le tabac tu sens oh c'est extraordinaire Lorcan tu sens la fraîcheur de la mousse et l'aigreur du papier journal et le croissant braisé des pattes de chien.

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TW : Heu... drogue à la rigueur ?
Pas après pas, la bataille devenait plus compliqué. Déchiffrer les propos de Billie et lutter à la fois contre cette aura de toxine débilitante pour lui devenait de plus en plus délicat. Il se sentait parfois léger, parfois l'inverse. Il lui fallait cligner des yeux pour chasser les couleurs qu'elle faisait apparaître dans son champ de vision.
Addie semblait être devenue une dose d'ecsta sur pattes. Hunnigan le sent, Hunnigan le sait, Hunnigan s'en fout.

« En exil »

Il répète, un sourcil arqué. Comprendre ce dont elle parle réellement lui est difficile. Il connecte ce qu'il maitrise avec ce qu'il croit deviner. Ses mots. Ses lettres ? Sans doute.
Elle a suivi ce qu'il pouvait lui dire et s'est retrouvée ici.

Quel enfer. Lui qui l'imaginait à l'écart de tout, dans une serre gigantesque à vivre au milieu des plantes, heureuse à aider et sauver de pauvres types moribonds, à les remettre sur pied comme elle l'avait fait pour lui. Les petits mensonges qu'il se faisait en imaginant les Anciens. Les Nightbringer, chacun heureux et en phase avec la vie.
Une partie de lui se disait que Béatrix devait avoir fini par apprécier le cadeau empoisonné qu'il lui avait fait. Que l'Enfant qui lui avait fait comprendre qu'il n'était pas fou et que les voix étaient vraies pouvait profiter de jours indéfiniment heureux, à partager sa bonté d'âme avec quiconque en aurait besoin.
Dans son mensonge, tous étaient à nouveau amis. Et sans doute aussi que les morts ne l'étaient plus. Tout allait bien.

Et Billie dévastée et plus perdue que jamais lui rappelait par sa simple existence toute sa propre bêtise. Le triste petit naïf.

« Billie, je ne comprends pas. Qui veut ta peau, au juste ? »

Des morts, des dents perdues, des yeux en moins, des phalanges égarées et des rotules plus si fonctionnelles que ça. S'il voit l'idée et le sens, il lui est plus difficile de cerner ce dont elle lui parle. Va savoir pourquoi, il a pouffé quand elle a ri.

Est-ce qu'elle s'est mise à torturer des types pour essayer de remonter sa piste à lui ? C'est décousu. Et Lorcan a presque du mal à garder les yeux ouverts. Plus elle le touche, moins ça a de sens. Il est tenté de se gifler pour ne pas laisser son esprit s'arracher de sa tête et voguer plus loin. Il a même l'impression d'avoir oublié la raison pour laquelle ils marchent. C'est dire.

« Pas littéralement, évidemment... »

Ouais.
Il a un peu abandonné, c'est vrai. La fin est peut-être un peu plus compréhensible. Elle l'a cherché, s'est trompée, a insisté, sans doute en faisant du mal à des gens. Merde. Il savait qu'elle pouvait être terrible, à l'époque déjà. Mais dans son imaginaire un peu bancale, ses mains pleins de sang et de morve ici ne servaient pas à tuer. Elles rendaient la vie, faisaient pousser des plantes merveilleuses, et ne semaient certainement pas la mort.

Comme quoi. Les souvenirs et le réel se tamponnent souvent. Et le réel ne perd pas souvent. Même si proche d'Addie qu'il se sentait dérailler.

« Le croissant braisé de pattes de chien »

Il répète, encore. Et secoue la tête en notant qu'il s'est perdu dans le sens de sa phrase.

« Qu'est-ce qui t'est arrivé, au juste ? » Pour finir dans cet état. C'est implicite.

Il s'écarte légèrement, secoue la tête, retrouve en partie ses esprits. Ça se sent parce que la première chose qu'il fait, c'est évidemment d'aller chercher son paquet de clopes. Un clou de cercueil entre les lèvres, et un deuxième. Il est d'humeur partageuse. Un coup de zippo, une grande bouffée, les deux clopes s'embrasent. Il arrache une des deux, la tend vers elle.

« J'aurais dû te proposer de venir avec moi, je crois. Tu aurais aimé l’Amazonie. »

Qu'il lance avec un soupir. Refaire le monde et imaginer ce qu'il aurait dû être avait quelque chose de rassurant. À moins que la toxine ne cherche à passer par la nostalgie pour le faire à nouveau planer vers des torrents plus agréables que d'habitude.

« On y est presque... je crois » Il ne sait plus tellement depuis combien de temps ils marchent, mais les restes d'entrepôts pas loin des anciens docks s'étendent ici, face à eux. Il croit discerner la demi-cheminée circulaire effondrée de la briqueterie. Une vieille usine de petite taille en briques rouges, protégée dans l'enceinte d'un petit muret bas et d'un grand portail de taules défoncées et taguées. Il l'ouvrit d'un coup d'épaule et quelques pressions du talon. Grincements et couinements de l'acier mordu par le temps font office de trompette d'accueil. Il peut aller déverrouiller la porte d'entrée, et s'engouffrer dans la bâtisse.

Sans surprise... c'est grand. C'est terne, c'est en bordel. L'endroit a vaguement été rénové pour devenir habitable. Hunnigan l'a vaguement décoré à sa manière en recouvrant l'endroit de conneries mystique. Des tas de vieux bouquins ici. Des étagères pleines de babioles bizarres. Un tableau sur lequel des coupures de journaux sont collées à côté de plans et d'une photo d'une ado blonde trônait là bien en évidence au milieu d'un grand mur comme pour toujours avoir ces infos à l'oeil et ne jamais oublier. À côté de cartes, de loupes et trois doigts momifiés percés pour en faire un sifflet traînaient à côté d'une vieille dague tordue et d'un sablier doré.
La caverne d'Hunnigan cachait autant de trésors que d'objets inutiles.

« Y a des bruits bizarres, ça caille, c'est trop grand, c'est le bordel, mais y a l'eau courante, l’électricité et je peux essayer d'invoquer des trucs sans risquer de tuer tout le monde en allant dans l'ancien fourneau... »

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– Qu'est-ce qui t'est arrivé, au juste ? 
Un haussement d'épaules en réponse.
Il y a tellement à dire et si peu. Elle est arrivée là et c'est énorme. Elle est arrivée auprès de lui et le chemin fut tellement long qu'elle en oublie(ra) des bouts. Petit Poucet n'avait plus de pain et les cailloux le faisait chier. Petit Poucet a opté pour des morceaux de gens. Des pouces ou des dents ou des ongles et puis des oreilles. Elle se marre. Toute seule. Encore. Tandis qu'il allume de nouvelles clopes. Nichées entre ses babines. Bruit du Zippo. La flamme lèche les extrémités.
Lorcan devrait être mort. Lorcan ne devrait plus avoir de poumons mais une marée noire dans le poitrail.
L'odeur de tabac se répand. Elle renifle. Elle soupire d'extase.
Lorcan lui tend une cibiche qu'elle chope non avec les doigts mais directement entre ses crocs. Ses lèvres rencontrent ses phalanges. Pourraient les attaquer ou les embrasser.
Elle les embrassera toujours.
– J'aurais dû te proposer de venir avec moi, je crois. Tu aurais aimé l’Amazonie.
Dag tire une grosse latte. Garde la grisaille dans les bronches. Puis souffle le reste par les narines.
T'inquiète pas j'ai géré la vie comme elle vient.
La tige oscille, suit les mouvements de sa bouche.
Elle n'a rien géré du tout.
La vie l'a dévorée vivante. Et l'a finalement recrachée par bouts.
Les plus infectes. Les plus amers. Ceux qui lui filaient des aigreurs.
Mais Dag est Dag et Dag ne perçoit même plus les contours de ces horreurs.

–  On y est presque... je crois.
Devant eux, un coin qu'elle n'a jamais exploré. Les Docks. Des espaces désertés et triste comme- Elle ne sait pas. La pluie n'a rien de triste. Dag n'a jamais capté le sens profond de cette métaphore. Dag n'a jamais associé la pluie à rien d'autre que- Dag déraille et Lorcan la ramène lorsqu'il s'éloigne. Pour rejoindre une briqueterie minable. Un bâtiment sur le point de s'écrouler. Elle s'imagine dessous. Elle s'imagine que tout craque et qu'ils sont coincés et qu'ils crèvent sans crever broyés sous le poids du monstre. Elle se tétanise. Un muret et un portail en protègent les murs. Lorcan pousse la ferraille. Lutte pour l'ouvrir. Ça grince et crisse dans les airs. Des notes lui cisaillant les tympans. Elle plisse le museau. L'observe. N'a toujours pas bougé. Soudain l'hésitation – Dag n'hésite jamais. Soudain l'angoisse de se retrouver piéger – celle-ci est persistante. Son mégot tombe sur sa godasse et rejoint l'asphalte.
Mais Lorcan ne fait pas attention. Lorcan l’accueille. Lui ouvre déjà la porte qu'elle présume entrée. Et Dag a des nœuds au cerveau. Rester ici ou ne pas rester ici. S'engouffrer dans le bâtiment ou prendre racines. C'est lorsqu'elle ne voit plus le dos de Lorcan qu'elle (sur)réagit. Presque au pas de course, Dag pénètre la briqueterie à son tour. Laisse tout ouvert derrière elle. Portail et porte et son angoisse éventrée sur le bitume.
Dedans. Une vraie pagaille. Un foutoir qui la rassure et l'attise. Elle se sent en terrain connu, elle se sent à l'abri. Ses deux billes butinent et volettent en tous sens. Son corps s'ébroue à l'espace. Ses doigts capturent tout ce qu'ils peuvent. Reposent et désordonnent.
– Y a des bruits bizarres, ça caille, c'est trop grand, c'est le bordel, mais y a l'eau courante, l’électricité et je peux essayer d'invoquer des trucs sans risquer de tuer tout le monde en allant dans l'ancien fourneau...
Elle l'entend sans l'écouter. Trop absorbée dans sa découverte de cette caverne merveilleuse.
Dag a glissé des bracelets et des bagues trop grands à ses membres. Elle les fait cliqueter et carillonner en remuant ses bras rachitiques. Puis elle balance son sac sur le divan encombré de feuilles et de livres et de coussins et elle s'empare de doigts racornis abandonnés sur un meuble. Les lève devant son minois extatique. Les garde dans la paume quand elle s'avance vers un grand tableau noir accroché au mur et recouvert d'informations. De plans des annotations des images et des fils courant d'un bout à l'autre, punaisés. Une toile d'araignée. Et le visage d'une gamine, seule. Un vestige. Un rêve. Une folie.
Les doigts secs et antiques sont tendus, pointés, vers la photographie. Et elle dévie son attention, cherche Lorcan des yeux.
J'croyais que tu les aimais un peu plus vieilles.
Dag revient à sa folle exploration. S'approche toujours davantage des éléments mis à disposition. Parmi cet étalage, il y a une forme d'obsession – Dag est pétrie d'obsessions. Dag en renifle les effluves sans que les bouches aient à se prononcer. Pourtant. Elle se trompe. Sans se tromper. Et rapidement s'en rend compte. Il n'y a là pas une forme d'amour miséreuse. C'est autre chose.
Les doigts momifiés atterrissent sur sa lippe. Elle les tapote sur sa chair trop mûre sa chair trop dense sa chair bonne à mordre. Elle réfléchit. Puis les doigts momifiés rejoignent ses incisives. Elle mâchouille. Découvre des trous.
Sa concentration se fait la malle et elle retourne les doigts. Vers le haut vers le bas. Et puis les met à sa bouche et souffle. Et ses prunelles s'écarquillent de bonheur. Elle souffle et souffle et commence sa petite symphonie en se paumant derechef à ses délires. Dag repart à travers les lieux. Ses toxines s'envolent avec elle. Contaminent tout.
Dag reprend ses recherches. Les doigts coincés aux badigoinces, elle happe un sablier qu'elle retourne et repose non à l'endroit où elle l'a pris mais sur l'étagère d'une bibliothèque. Niveau sur lequel ses longs doigts sales courent et effleurent les formes et les matières.
Dag retire son pipeau macabre d'entre ses ratiches. Niché à sa dextre, elle joue avec. Elle l'envoie en l'air et le récupère. Et Dag retrouve Lorcan. Et elle se coule à ses formes. Son corps maigrelet se frotte à son torse rassurant, son corps massif. Elle passe les bras autour de son buste, s'enroule, l'étouffe. Son minois chutant à son encolure. Sa tempe tapant sur son épaule. Elle s'immobilise.
Ce n'est pas si grave si le toit et les murs s'écroulent finalement.
Et elle lève un peu le nez et elle le touche sans le toucher. Elle utilise les doigts momifiés pour lui caresser la joue.
J'espère que la vie ne t'a pas trop mangé j'espère que tu as su profiter de tout (elle s'arrête, sourit, lui sourit. Oh elle lui sourit tellement) parce que tu n'imagines pas non je suis sûre que tu n'imagines pas comme tu es précieux et prodigieux-
Précieux au monde.
Précieux pour elle.
Prodigieux par sa simple existence.
Prodigieux par ses dons.
Les doigts racornis de la relique qu'elle s'est appropriée grattent les poils de la barbe et longent la pommette et sinuent le long de la tempe et rejoignent la tignasse auburn.
… je ne suis plus très bonne pour soigner les gens mais-
Elle hésite.
Mais je vais faire de mon mieux pour alléger ta peine.
Comme elle l'a toujours fait. Comme il le fera toujours pour elle.
Parce qu'elle n'a pas oublié la photographie, elle n'a pas oublié le visage aux rondeurs de l'enfance. Et ce malgré ses circonvolutions malgré ses mouvances cataclysmiques malgré sa présence à la puanteur de chaos.

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Un temps, Hunnigan se sent redevenir lui-même. Billie ne l'a pas suivi et seul dans le bâtiment, les toxines ont moins d'emprise sur sa caboche. Il se sent vite usé, lourd et fatigué. Mais ça ne dure qu'un temps. Il entend les pas de la blonde qui s'approche, rapide, comme une gamine qui s'amuse à se faire peur avec son ombre et fuit des monstres imaginaires pour regagner la lumière.
Quand elle réapparaît, elle amène à nouveau avec elle cette étrange aura. Et en moins de temps qu'il ne le faut pour le dire, Hunnigan est à nouveau un peu ailleurs, un peu heureux, un peu perdu, un peu lent à tout, mais pas mécontent du tout dans tous les cas.

C'est l'air un peu rêveur et sonné qu'il l'observe dans sa découverte des lieux. Il se fiche bien qu'elle touche, qu'elle retourne, qu'elle joue avec ce qu'il y a à portée de ses doigts. Il est un peu paumé, Hunnigan. Ailleurs. Ici et pas ici à la fois. Enfermées, les toxines sont sans doute plus mordantes puisque retenues dans un environnement quasi clos. La briqueterie est vaste. Mais elle est bien isolée.

Reste la fin de sa clope finalement, qui lui crame un peu les alvéoles et le remet sur terre. L'empêche de trop se laisser aller. Ça, et le souvenir cuisant de ce qu'il s'était passé quand il avait lâché prise un peu plus tôt. La Boîte. La foutue Boîte avait profité d'une simple petite faille. Quelques secondes à peine et tout était déjà à refaire.

Avec un lent mouvement de droite à gauche de la tête, il semble s'amuser de la voir parée de bijoux. Des faux,  de la camelote vieillie chimiquement pour la plupart, mais aussi quelques vrais trésors d'une rareté telle que les historiens en feraient des syncopes. Des souvenirs des temples pillés avec ses comparses de l'époque. Billie devait avoir de quoi se payer une jolie villa sur chaque main. Et la même chose autour du cou.

« Assure-toi de ne pas les casser. J'en ai besoin. »

Les doigts momifiés semblaient bien plus importants à ses yeux que le reste. C'est qu'à part eux et les runes étranges gravés dans les phalanges, il avait peu de sources fiables sur lequel travailler ses incantations. Il savait qu'il touchait au but.

De son regard toujours amusé, il suivait ses gestes, et fut même incapable de retenir un rire cru, sale et terriblement franc pourtant à sa remarque sur la gueule juvénile de la môme de la photo.

« Même venant de toi, c'est très borderline, Billie. »

Mais ça n'était peut-être une blague ? Et c'était dans ce cas plutôt insultant. Qu'importe...

Son petit rictus cédé place à une petite grimace quand elle s'essaye à mettre les phalanges dans son bec. Il s'avance d'un pas, décidé à l'arrêter là.

« C'est vraiment vieux, vraiment mort, et j'sais pas où ça a traîné. Tu ne devrais pas mettre ça dans la b... »

Trop tard. Et voilà même qu'elle arrivait à faire naître quelques notes d'une musique cohérente, pas désagréable, mais qui sonnait comme quelque chose de mélancolique et mauvais à la fois. Hunnigan retint mal un petit frisson. Sans doute que l'entendre siffler lui rappeler à quel point il avait été difficile de mettre la main sur cette babiole dans les tréfonds d'une forêt glaciale de l'Oural. Car c'est au moins aussi loin de la civilisation qu'il fallait creuser pour mettre la main sur l’appeau morbide de la mère sorcière. Satanée mégère que cette Baba Yaga.

Revoilà Billie, tactile et un peu envahissante, pour changer. Dans le fond, ça lui va. Il la préfère comme ça qu'avec un flingue collé contre son front, à prendre des risques et à participer beaucoup trop activement aux fusillades pour que ce soit une bonne chose.

« Pourquoi est-ce que le toit et les murs s'effondreraient ? »

La caresse des doigts momifiés lui arrache une petite grimace. Il n'était pas aussi peu regardant qu'elle pouvait l'être. Il se fichait des choses mortes. Pourvu qu'il n'ait pas à les coller à son visage ou ses lèvres.
Quant aux espérances de Billie, il ouvrit la bouche avec l'idée première de les faire voler en éclat en lui expliquant qu'au contraire il s'était privé de tout pour comprendre et battre cette saleté de Boîte. Mais à la voir sourire, il n'eut pas le cœur à briser l'idée qu'elle semblait se faire de sa vie. Il secoua la tête de haut en bas avec un discret sourire, garda sous silence les sales moments, et fit en sorte de vanter seulement ce qu'il y avait eu de positif :

« J'ai beaucoup voyagé, oui. J'espère que tu recevais toutes mes lettres, j'ai essayé de te parler de tous les endroits que j'ai pu voir. Des cités d'or, des tombeaux égyptiens, des villages de natifs n'ayant jamais été en contact avec le reste de l'humanité, des vestiges partout et quelques rencontres intéressantes. C'était incroyable, comme tu l'imagines. »

Sa main arracha le mégot du coin de ses lèvres. Son regard remonta un temps vers le plafond. Toujours les lueurs colorées. Toujours la lutte contre l'espèce d'euphorie chimique qui menaçait de l'emporter. Il secoua la tête, essayant de revenir totalement sur terre.

« Qu'est-ce qui t'a fait changer ? Qu'est-ce qui t'empêche d'être toujours aussi bonne pour soigner des gens ? »

Qu'il finit par lui redemander dans une nouvelle question visant à essayer de comprendre à quel moment elle était partie si... loin.

« Qu'est-ce que tu as fait, toutes ces années ? »

Il haussa les épaules avec un sourire un petit idiot qu'il chassa en clignant des yeux et en essayant de se concentrer sur autre chose que la brume qui semblait vouloir s'emparer de son esprit et le guider vers un monde trop beau pour être vrai.

« Béatrix et Darla ne sont pas restées avec toi ? »

Hm, pour Darla il en savait quelque chose, en partie. Il avait croisé Dalia. Il avait essayé de l'aider. Et elle était morte. L'idée l'amena à s'assombrir un peu plus.

« Personne ne t'a aidé, n'est-ce pas ? »

Pas même lui. C'était sans doute pour ça que d'un coup d'un seul, le coton, les arcs-en-ciel et la pointe d'euphorie contre laquelle il luttait s'étaient estompés.

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– J'ai beaucoup voyagé, oui. J'espère que tu recevais toutes mes lettres, j'ai essayé de te parler de tous les endroits que j'ai pu voir. Des cités d'or, des tombeaux égyptiens, des villages de natifs n'ayant jamais été en contact avec le reste de l'humanité, des vestiges partout et quelques rencontres intéressantes. C'était incroyable, comme tu l'imagines.
Elle l'écoute. Silencieuse et attentive. La main momifiée toujours contre Lorcan qu'elle caresse avec l'indécence qui la caractérise. Lorcan toujours l'hypnotise toujours la fascine toujours l'émerveille. Lorcan en élément fixe et calme et gigantesque dans son monde de désordre et de cris.
Le mégot est arraché de ses lèvres par des phalanges négligentes.
Elle observe. Suspend la caresse.
Le museau de Lorcan rejoint les hauteurs.
Dag suit le contour de sa mandibule de sa gorge de sa glotte du petit creux de chair reliant ses cervicales. Elle se dit. Qu'il est magnifique. Elle se dit. Qu'elle est heureuse. Vraiment heureuse. Elle se dit. Qu'elle n'avait plus ressenti cet étrange sentiment depuis des années. Ça la fige. Et ses prunelles s'écarquillent et son macabre jouet retombe le long de son flanc. Elle n'est plus d'humeur pour ses cochonneries.
Il n'y a que son visage contre son épaule et son corps contre son cœur et cette certitude que tout ira mieux, désormais.
– Qu'est-ce qui t'a fait changer ? Qu'est-ce qui t'empêche d'être toujours aussi bonne pour soigner des gens ?
Dag se mordille la lippe. Dag ne veut pas en parler. Dag a des nausées à se souvenir de l'avant. De celle qu'elle a enterrée avec tout le reste de leur histoire – hormis des bouts des pans des déraisons qui ne la lâchent pas. Qui la hantent. Lorcan est l'une d'entre elles. Un bout de leur histoire. Un pan considérable. Une de ses plus grandes déraisons. Elle ne le lâchera plus. Elle ne l'a jamais lâché. Elle et lui à travers les siècles et le(ur) monde disloqué.
Elle pense. Qu'elle devrait peut-être croire de nouveau. En Dieu. En ce quelque chose de plus grand et plus lumineux qu'eux. Elle pense. Qu'elle devrait peut-être remercier de nouveau. N'importe qui. De lui avoir laissé l'opportunité de le toucher, encore. De le sentir. Malgré les années coulées aux années et la violence et le sang et les cris et le désordre.
Elle ne peut pas. Lui dire. Elle ne peut pas parler. Des nausées et de ses souvenirs. Dag est horrifiée à l'idée de voir traverser dans la lagune de ses iris le trouble et l'inquiétude.
– Qu'est-ce que tu as fait, toutes ces années ? 
Elle a erré.
Elle était ici. Elle était ailleurs.
Elle était partout et nulle part.
Elle était pleine de colère et pleine de silence et pleine de vide, surtout.
Et elle le remarque qui tressaille, qui retrouve le sourire et la mollesse de l'esprit dont elle l'accable. Et Dag se rappelle. Qu'elle devrait croire à nouveau. En Dieu. En ce quelque chose de plus grand et plus lumineux qu'eux. Elle pense. Qu'elle devrait peut-être remercier. N'importe qui ou quoi. De lui avoir pourri l'intérieur pour le soulager. De ressentir et s'écorcher. Malgré les années coulées aux années.
– Béatrix et Darla ne sont pas restées avec toi ?
Dag remue la bouille. La négative.
Inexacte. Dag ment.
Elle farde la réalité qu'elle ne veut pas affronter.
Car. C'est elle. Qui est partie.
Elle est partie quand il n'y a plus eu. Ni l'un. Ni l'autre. Quand ceux qui la (re)tenaient encore debout ont fini par s'effacer. Disparaître. Quand les deux êtres primordiaux à sa vie se sont évaporés. Et qu'il y a eu. Ensuite. Les regards. Les suspicions. La colère. Les désordres. Et comment aurait-il pu en être autrement. Comment leur en vouloir. Dag a aimé de tout son myocarde plein de démangeaisons les traîtres. Au clan. À la famille. Quelle connerie. Et elle n'a jamais réussi à justifier. Ni ses choix ni ses actes. Car. Comment justifier l'amour qu'on porte aux êtres. Son amour qu'elle donne et qui avale. Débordant dévorant écrasant abyssal.
Elle le tait. Sous ses grands gestes et ses grands sourires et ses mouvances odieuses, Dag préserve son intime. Se musse derrière l'absurdité de ses fureurs et délires. Dag préserve et protège Adalyn des traumatismes et des douleurs propagés à travers leurs siècles.
Elle le regarde et il la regarde et Dag détourne les prunelles.
Un peu honteuse. Un peu piteuse. Soudain terriblement mal à l'aise.
– Personne ne t'a aidé, n'est-ce pas ?  
Encore, son silence. Seulement son petit minois oscillant de droite à gauche quand elle bouffe convulsivement sa lippe. Et Dag s'échappe. Lui tourne le dos et s'imagine se recréer une contenance. Se trouver une nouvelle occupation un nouvel objectif. Dévier les attentions – dévier son attention. Surtout son attention. Puisqu'elle ne veut pas voir le trouble et l'inquiétude bousiller la lagune de ses iris, souviens-toi.
Qui est l'enfant sur la photo et puis qu'est-ce que tu cherches au milieu de tout ce bordel.
Pas une vraie question.
Dag est revenue devant le tableau. Les doigts macabres et secs déposés sur un meuble. Ses siens déposés sur les contours du visage féminin. Elle retrace et redessine la ligne de la mâchoire l'ovale de la joue et la rondeur du front. Elle fronce le pif. Les prunelles fiévreuses et déviantes. Allant piocher les informations. Ici et là.
Avant qu'elle ne lui adresse une œillade et une risette fauve.
Tu sais que je ne juge jamais.
Elle expire un rire.
Retenu entre ses petites dents écartées.
Les goûts et les couleurs... faut bien trouver un peu de distraction au milieu de l'ennui.
Elle est crapuleuse.
Moi j'ai jamais tapé en dessous de seize.
Elle se retourne, elle le rejoint à mi-chemin.
Lorcan est revenu. Lorcan est vivante. Lorcan est si solide sous ses doigts, à chaque fois. Elle en chialerait. Sa silhouette filiforme retrouve ses contours. Son bras s'enroule le long des lombaires. Autour de son torse. Ses jointures pianotent contre son ventre et elle le guide vers sa toile d'araignée monumentale.
Tu savais que c'est dix-huit ans, maintenant.
En Europe. Dans le lointain d'une de ses déroutes.
Elle lève le menton. Le dévisage. Très sérieuse.
Dag n'est pas (n'a jamais été) en phase avec ce qui l'entoure.
Dix-huit pour être un adulte c'est quand même un peu tard nan ?
Et Dag arrache du mur la photo de la fille aux rondeurs de l'enfance. La soulève devant leurs orbes.
On dirait voir un ange.
Et elle soupire. Et elle tremble. Un peu.
Sa proximité et sa présence et cette solitude qui les ligote. Jamais seule avec lui et pourtant seule au monde.
…tu sais. (son attention bifurque de l'Ange à Lorcan) je crois que si je les revois... je les tuerai.
Enfin. Une vérité.
Enfin. Un soupçon de sanité.
Cruelle et furieuse.
Je les hais.
Beatrix. Alexander. Darius.
Les seuls rechapés. Les seuls possibles. Les seuls dont elle puisse supporter la survivance et la fantaisie de meurtres ; là, perdue dans son petit cosmos envahi de fantômes glapissants. Les seuls qui sachent recueillir sa pleine amertume. Celle de ses propres échecs. De ses propres défauts. De ses propres erreurs. De ses vertigineux désastres.

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Pas de réponse ou presque. Billie semblait pourtant avoir retrouvé sa langue et la revoilà mutique. Hunnigan fronce les sourcils, à la recherche d’un indice pour comprendre comment Addie a pu devenir Billie. Mais il ne voit pas. Les doigts sont pourtant toujours les mêmes. Les mêmes petites phalanges qui avaient recousu ses chairs, appliqué les onguents, purgé les infections. La même voix aussi qui l’avait arraché aux griffes des hallucinations de ses fièvres. Le même toucher apaisant qui calmait ses terreurs nocturnes quand la mémoire commençait à lui revenir et qu’il revoyait ses propres mains serrer les gorges des gamins mutants qu’il avait chassés avec la Milice.
Comment en était-elle arrivée là ?

Quelque part, quelque chose le mettait même en colère. Addie avait, dans son esprit, toujours été là pour aider quiconque en avait besoin. Et à la voir maintenant, il se disait finalement que personne n’avait été là pour elle en retour. Ne pas savoir le rongeait par ailleurs un peu plus. Il mâchonna l’intérieur de sa joue, garda pour lui une pointe de rancœur qu’il ne tenait pas à partager avec elle. Une part de lui s’étonne quand même de savoir que Darla avait pu lui tourner le dos. Béatrix en revanche ? Elle l’avait laissé croupir en prison. Est-ce qu’il était surprenant qu’elle abandonne Adalyn à son sort hein ?
Dernière question, et pas de réponse. Billie file plus loin revenant vers la photo. La revoilà bavarde. Qui est l’enfant qu’elle demande. Il a bien vu tout à l’heure qu’elle y a porté une drôle t’attention. La question qui suit le fait arquer un sourcil.

« C’est vraiment toi qui me parles de bordel, Billie ? »

Il badine un peu, Hunnigan, avec un vrai demi-sourire un peu triste et un regard appuyé sur la photo punaisée qui lui ne suinte clairement pas l’amusement, mais la douleur sévère d’une méchante culpabilité venue gratter sur de méchantes plaies toujours à vif.

« Ce n’est pas aussi drôle que tu as l’air de le penser. »

Commente-t-il quand même à ses paroles. C’est surtout terrible plutôt qu’amusant, à bien y réfléchir. Serait-elle cruelle au point de vouloir jouer à ça avec lui ? Hm. Non. il n’arrive pas à l’imaginer si volontairement mesquine. Billie ne va juste pas bien parce qu’elle n’a pas été aidée. Parce qu’on l’a abandonné. Il en sait quelque chose des dégâts que ça peut faire, d’être laissé derrière.

« Dix-huit ans pour certaines choses, vingt et un pour d’autres. Dix-sept dans certains pays, sans doute plus jeunes dans d’autres. Mais non, je ne trouve pas que c’est si tard pour être un adulte. »

Plus à cette époque, en tous cas. Il tapota le dos de la blonde revenue contre lui.

« Nous étions adultes bien plus tôt avant. Aujourd’hui… aujourd’hui ils vivent longtemps et tout est fait pour les déresponsabiliser de tout. On couve ceux qu’on devrait punir. On cultive la bêtise et les gens se l’arrachent. »

Hunnigan n’aime pas ce monde pas plus qu’il aime l’humain. Chaque époque à ses tares, malgré tout. Mais une partie de lui se disait qu’il existait sans doute un peu d’honneur chez les débiles profonds bellicistes du dernier siècle en comparaison des crétins de compétition du moment. Des mutants élevés au rang de Super Héros. Sérieusement. Qui peut croire que le monde va bien quand les nouveaux Dieux sont les pantins des corpos ? Il soupira, et se retrouva face au visage de la blonde de la photo qu’avait approché Billie.

« Si c’est un ange, alors elle est déchue depuis longtemps. Et c’est de ma faute. »

Admit-il la mine toujours aussi sombre.

« Elle est à elle seule la preuve que je dois m’occuper définitivement de cette satanée Boîte. »

On ne pouvait, d’après lui, pas faire de meilleure description de la môme de la photo. Amer, il en détourna les yeux et chercha à se défaire de l’étreinte de Billie pour aller un peu plus loin des yeux innocents d’Holly. Il sembla en tout cas que ses confidences, même brève et cryptiques aient déliée la langue de l’Originelle. Il comprend de qui elle cause sans qu’elle n’ait à lui dire qui elle pourrait tuer. Qui elle hait.

« La vraie question Billie, c’est pourquoi tu les abhorres tous ?  »

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“Nous étions adultes bien plus tôt avant. Aujourd’hui… aujourd’hui ils vivent longtemps et tout est fait pour les déresponsabiliser de tout. On couve ceux qu’on devrait punir. On cultive la bêtise et les gens se l’arrachent.” Les époques superposées au présent. Sa parole flotte dans son crâne comme un mauvais rêve. Il y a de l’étrange dans le temps qui les consume, sans les abimer vraiment. Ou seulement derrière le rond du front, dans le secret de leurs esprits détraqués.
— Si c’est un ange, alors elle est déchue depuis longtemps. Et c’est de ma faute, avoue-t-il soudain. Sans qu’elle ne comprenne.
Son regard perdu au visage imprimé sur le petit carré de papier. Dans la voix de Lorcan, un monde sous un monde et le goût des remords. Elle ne le croit pas, elle ne peut pas. Lorcan est merveilleux. Lorcan ne peut pas esquinter les êtres - puisqu’il la soigne, elle.
Dis pas n’importe quoi, grognasse-t-elle entre ses dents serrées.
Dag refuse d'entendre ce petit bout de vérité qui lui écorche les synapses.
Dag n’en croit pas un mot.
Il y a toujours des circonstances. Il a, avec elle, toujours une multitude de circonstances. On ne nait pas enfoiré fini. Lorcan n’en a jamais été un. Pas pour elle, jamais. Malgré tout le sang lui maculant les jointures.
— Elle est à elle seule la preuve que je dois m’occuper définitivement de cette satanée Boîte.
La boite, revenue. La boite qu’elle a ouverte et rendue. Vide. Vide de sens. Vide de tout. Vide des maux, elle se rappelle. Car Pandore l’a ouverte bien avant elle. N’est-ce pas ?
Le monde pourrit dans ses tréfonds, par la curiosité maladive d’une petite connasse idiote.
Le monde pourrit dans ses encoignures, par sa curiosité maladive de petite connasse idiote.
— La vraie question Billie, c’est pourquoi tu les abhorres tous ?
La fille sur la photographie abandonnée aux pensées détachées de Lorcan. Ses pensées envolées autant que son corps s’écartant. Il souffre, voilà ce qu’elle comprend. Malgré son putain d’égoïsme et sa dinguerie propagée. Il souffre et Dag croit s’écrouler.
Alors, elle le laisse s’échapper, s’éloigner. Elle accepte, qu’il fuit. La certitude incrustée que ce n’est pas elle qui en provoque la mouvance mais. Cette gamine entre ses doigts. Et comment le retenir ouais comment Dag quand toi-même tu sais que la fuite est souvent tout ce qui persiste à la conscience pour affronter la douleur et la peur.
Il a changé de sujet.
Ainsi soit-il.
Ainsi Lorcan l’a décidé. Et pour lui, Dag ferait n’importe quoi. Quitte à s’arracher des morceaux de cerveau et les bouffer dans la foulée.
Parce qu’ils sont faibles et stupides.
La mauvaise foi et le poison pour toute réplique.
Elle est haineuse de cette époque. Elle est haineuse de son histoire. Elle est haineuse de ne jamais l’avoir retrouvé. D’être resté sans que plus rien ne compte vraiment. Sans Cecil, sans Lorcan ; le monde a perdu de ses couleurs et de ses contours. Le monde s’est ouvert sous ses pieds et l’a dévorée.
Il aurait mieux fait d’me bouffer.
Murmure rageur. Chevauchements de la mémoire. Son bordel irraisonné.
Alexander. Et son monstre internalisé.
Parce qu’ils n’ont jamais rien fait qui ait pu détruire le monstre.
Le vrai.
Icarus n’a jamais cessé de la hanter. Les médecins d’Icarus n’ont jamais cessé de traverser son sommeil - ce sommeil qui depuis deux siècles n’existe quasiment plus.
Dag reste immobile, la photographie entre les phalanges, qu’elle fixe. Ses pupilles figées sur le visage de l’Ange. Et à son bras de se tendre, à sa senestre de récupérer une épingle. Et de planter au mur la photographie. Non plus là où elle l’a prise mais en plein milieu du fourbi d’informations entrecroisées.
Le monstre continue d’exister et de créer d’autres monstres et pourquoi-
Dag se retourne, cherche Lorcan des yeux. Soudain, sa colère. Sa colère qu’elle redirige sur lui, sans pouvoir en contenir les éruptions.
Toi tu le sais mieux que personne non ?
Lui qu’elle a récupéré par deux fois en morceaux - des morceaux qu’elle a recollés sans jamais avoir eu la certitude qu’il n’en ait pas perdus en routes, qu’elle n’en ait pas laissés pourrir sous les plaies.
Tout ça c’était de la connerie et tout s’est démoli tout est démoli tout est foiré et je vous ai perdus-
Elle se craquelle. Et les larmes lui lèchent les yeux et lui cavalent brutalement sur les joues.
Elle les a perdus. Et si désormais elle peut toucher les contours du premier, le second est mort dans l’ignorance de leur - de sa - stupidité.
Je les hais Lorcan parce qu’ils n’ont rien réussi et que tout est gâché mais je promets oui je promets que je détruirai tout-
Son timbre part dans les octaves dans les aigus la musique doucereuse de ses phéromones s’irrite, devient toxique et méchante.
Je détruirai tout.
Ce monde qu’elle hait et surtout ces monstres qui le peuplent.
Qu’il se prénomme Alexander ou Darius ou qu’ils soient gigantesques dans le bedon d’Icarus.

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Prendre un peu de recul – physiquement – ne lui pas de mal à John. Il a l'impression de se reprendre un peu. D'être moins largué. Un peu en tous cas. Addie est toxique. Addie est entêtante. Addie le noie sous son aura qu'il peine à définir. Et la pièce entière accueille petit à petit ses toxines. Il allait falloir qu'il trouve un moyen de lutter contre ça aussi, sans quoi il se retrouverait à planer complètement à chaque fois qu'ils se croiseraient.

Et quelque chose lui disait qu'elle ne comptait pas spécialement le laisser tout seul ici.

« Faibles et stupides ? »

Il arque un sourcil. Il a l'air songeur, Hunnigan. Mais pas tout à fait contre l'idée qu'elle se fait d'eux. De lui, des autres. Faibles, ils l'étaient, tout en étant forts à la fois d'ailleurs. Stupides ? C'était une manière de voir les choses. Bêtement naïfs. Pétris d'espoir. En plein déni, aussi. Alors peut-être qu'il s'agit d'une pointe de stupidité. Il ne saurait vraiment le dire.

« On a fait au mieux. »

On oui. Parce qu'au fond, il refuse l'idée d'être différent d'eux. Lorcan et la famille. L'envie d'appartenir à un groupe, à s'y cramponner. Il refuse de se désolidariser d'eux. Quand bien même une bonne majorité ne voulait simplement plus entendre prononcer son nom après sa trahison.

« Le Monstre ? »

Il lui faut une petite gymnastique pour essayer de comprendre de quoi elle parle. Le Monstre... Darius ? Le Monstre Alexander ?
Oh !
Ce Monstre-là.
Icarus.
Devait-il s'inquiéter de commencer à si vite bien comprendre le langage de Billie ?

« Tu ne peux pas dire qu'on a rien fait pour le détruire. On a essayé. On a échoué. Mais on a pas « rien fait». »

Quelques pas plus loin, le voilà qui s'affale dans le vieux canapé défoncé. Il s'y étale, vautré dans la largeur à fixer le plafond. Billie enchaîne, mesquine, furieuse. Il la comprend, dans le fond. Même s'il a fait la paix avec l'idée d'un jour être en mesure de régler quoi que ce soit. Icarus est simplement trop puissant. Il se dit même que les ailes ne sont maintenant plus faites de cire, et qu'ils finiront forcément par atteindre le soleil sans se brûler. Rien ne semble pouvoir les arrêter, après tout. Ils claquent des doigts et font courber l'échine à des nations entières. Les nouveaux dieux sont des Super Héros. Et ils sont les maîtres de ces Dieux.

Alors eux, les Nightbringers, qu'auraient-ils réellement pu faire face à ça ?

Le regard sur le plafond, les pieds sur l'accoudoir, il sort de sa poche son paquet défoncé, et coince un énième clou de cercueil entre ses lèvres. Billie promet de tout détruire. Il lui lance un regard en biais, contemple les larmes.

« Va pour la destruction de tout, alors. »

Qu'il lance. Il peut sembler peu convaincu. Dans le fond, il se fiche bien de tout ça. Détruire pas détruire. Il a mis toutes ces histoires de côté et se contente de solder ses propres comptes avant se mêler d'autre chose. Se racheter, c'est déjà une cause perdue. Pas sûr que les cumuler serait de bon ton.

« Comment est-ce que tu comptes t'y prendre ? »

C'est qu'ils ont l'air de tout, sauf de menaces réelles. Et oui ils. Toujours Lorcan et la famille. Toujours Lorcan et le besoin d'appartenir à un groupe, et tant pis s'il s'agit d'un groupe de deux.
Sa main cherche son briquet, pour mieux venir cramer la cime de sa cibiche. Petite gorgée toxique.

« Billie ? Ne fais rien qui puisse t'amener à risquer de mourir. ? Détruis tout, mais tiens-toi loin des éclats, tu veux ? »

C'est qu'il ne tient pas à se dire, un jour, qu'il l'a perdue définitivement. Pas après d'aussi formidables retrouvailles hein ?
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Tu ne peux pas dire qu'on a rien fait pour le détruire. On a essayé. On a échoué. Mais on a pas rien fait. Ça résonne et résonne, en échos d’échos sur d’autres échos. Lorcan et sa faiblesse, Lorcan et sa gentillesse, Lorcan et son trop grand cœur qui le perdra. Ses nerfs se tendent et ses larmes cascadent et elle voudrait hurler et hurler encore. Mais elle ne fait rien. Et le regarde s’échapper plus loin, se vautrer dans le canapé défoncé et fumer son énième clope. Dag devrait, voudrait, doit - lui en vouloir. Mais Dag est incapable de maintenir toute forme de colère plus de dix secondes, avec lui. Ou peut-être une minute, c’est vrai. Elle se rappelle du flingue qu’elle lui a pointé entre les deux yeux. Et de cette envie dévorante de lui éclater la cervelle - était-elle pleinement maîtresse de ses gestes. Là, se pose tout son questionnement. Elle suppose que oui. Elle a tort. La pomme d’Eris ne semblant pas vouloir se rappeler à son bon souvenir. Mémoire fracturée.
— Va pour la destruction de tout, alors.
Parfait !
Lance-t-elle à la volée, crachant ses ultimes larmes comme un mollard acide ; et elle jette un dernier regard au méli-mélo d’informations qu’elle ne voit plus. Qu’elle délaisse au profit de Lorcan qu’elle recommence à fixer de son attention farouche (ou tout simplement  dégénérée). Lorcan son précieux monolithe dans son océan de conneries.
— Comment est-ce que tu comptes t'y prendre ?
J’sais pas bien, débute-t-elle en louvoyant jusqu’à lui.
Sa silhouette sylphide ondulant dans l’atmosphère pleine de fumée de clopes ; clope s'ajoute aux clopes ; clope qu’il vient d’allumer. Et de toxines irréelles. Ses spores merveilleux fabuleux ses spores en étoiles filantes dans les cerveaux des heureux élus. Leurs odeurs pour se mélanger et danser ensemble jusqu’au plafond. C’est magnifique, c’est inconcevable, c’est un retour à la vie dont elle n’osait même plus dessiner les contours.
— Billie ? Ne fais rien qui puisse t'amener à risquer de mourir.
Oh, allez…
Les yeux roulent dans les orbites.
Dag attrape à deux mains sa tignasse dégueulasse de bouts d'hommes qu’elle entortille avec un crayon qu’elle chope sur un pan de meuble. Petit chignon blondin et rubescent complètement déstructuré pour lui germer et fleurir sur le haut du crâne.
— … détruis tout, mais tiens-toi loin des éclats, tu veux ?
Et Dag se penche au-dessus de lui, le reluque ; risette fauve en maquillage appliqué au-dessus de ses orbes irrités des sanglots annihilés.  
T’inquiète je gère.
Elle gère. Elle gère tant est si bien qu’elle ne supporte plus qu’on lui rappelle son histoire, qu’on l’appelle par son prénom de naissance, qu’on lui soupèse la raison, qu’on la regarde trop longtemps ; elle gère tant et si bien qu’elle dort peu, voire très peu et lorsqu’elle dort c’est pour rêver de monstres et quand elle se réveille c’est pour se croire entre les pattes de monstres.
Dag tourne encore, un temps, non loin de lui, dans l’espace qu’il s’est créé. Jusqu’à retourner au canapé, se couler derrière et glisser ses bras puis son museau sur le dossier. Arquée par-dessus, elle contemple Lorcan alangui. Puis laisse couler un bras, lui effleure le poignet. L’index pour caresser les nœuds osseux. Chuter à son annulaire puis son majeur. Et de dévaler aux angles de son visage, perpétuellement. Redessinant la mandibule et l’arête du nez.
Bout de l’index sur la pointe du nase de Lorcan, elle chuchote.
C’est étrange de t’avoir si réel et si près.
Mélancolique petite connasse.
Dag contourne le canapé, et se juche sur l’accoudoir. S’y installe en tailleur. Récupère les pieds de Lorcan qu’elle fiche sur ses cuisses. Lui vire ses chaussures avec application. Les balance plus loin. Lui enlève ses chaussettes. Et puis lui masse la plante des pieds sans trop y penser, perdue dans son bordel intracrânien.
Je pense que je vais trouver quelque chose à ma mesure.
Aspirant sa lippe. La mâchouillant.
Elle détaille ses plans foireux.
Je vais essayer de les empoisonner (Dag coule un regard vers Lorcan, esquisse un sourire malin, puis repart à la contemplation du somptueux boxon de l’endroit) de l’intérieur (elle opine du chef, pour elle-même) enfin, intérieur pas vraiment intérieur car je ne vais pas me pointer à leurs bâtiments.
Dag appuie, fort, entre les os métatarsiens. Pour faire mal. Pour se venger. Pas de Lorcan - elle a oublié qu’elle avait son pied entre les mains.
Je toucherai à ce qu’ils ont de plus précieux.
Ce ou ceux ; les gens, les mutants, ces gros abrutis par milliers ; évidemment.

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Comment se retrouvait-il dans ce genre de conversation avec elle déjà ? Aucune idée. La fatigue, sûrement. Et le fait de se laisser porter par les effets des toxines qui le rendait plus nonchalant et moins râleur qu'il ne l'était habituellement. Sa brève tentative de se cramponner à des idéaux passés en défendant les Nightbringer n'alla pas au-delà d'une première opposition et déjà il approuvait partiellement les projets destructeurs d'Addie, sa seule et unique retenue concernant l'idée de tout réduire à néant se trouvant être la crainte qu'il ne lui arrive quelque chose à s'essayer à pareille entreprise.

« Je suis sérieux, Billie. Je n'ai pas envie de te perdre »

Qu'il annonça, un peu ailleurs, un peu rêveur, un peu fatigué, un peu tout à la fois. Sa réponse l'amena juste à jeter un œil vers elle. Oh allez quoi ? Oh allez ça va aller ? Oh allez ne soit pas rabat-joie ?
Il insiste. Et elle répond. Elle gère.

L'idée le fait souffler d'abord un petit rire, le temps de reprendre une longue taffe de tabac et de finalement pouffer pour de bon en seconde intention.
Elle ne gère rien du tout oui. Ils ne gèrent plus rien depuis un moment maintenant. Addie n'est plus que l'ombre d'elle-même. Elle est devenue Billie. Billie est dingue. Billie le fait planer. Billie a été capable de flinguer des gens sans aucune espèce de retenue dans ce bar merdique.
Trente secondes ensemble et c'était déjà le chaos. Ce n'était pas sa définition à lui d'une bonne gestion des choses. C'était même tout l'inverse, d'ailleurs.

« Tu me fais rire. »

Il commente l'évidence, avec un rictus en coin. Il plane complet, il faut dire. Est-ce que les choses allaient s'arrêter ? Ce qui lui restait de raison espérait que oui. Le reste souhaitait que non.

« Tu gères rien du tout. Tu es une ruine, comme moi. »

Peut-être que c'est pour ça qu'ils s'étaient toujours aussi bien entendus, à bien y réfléchir. Ceux qui se ressemblent s'assemblent. Sa vie à lui n'avait été qu'une longue, très longue quête centenaire pour lutter contre la Boîte. Traduction : une fuite en avant pour essayer de composer avec une immondice qu'il avait lui-même invoqué et qui voyait comme le nœud central de tous ses problèmes. Quant à Addie... Elle était devenue Billie. Celles qui lui assuraient que les mains merveilleuses capables de tout soigner n'étaient aujourd'hui plus que bonnes pour tuer.

« Je suis désolé de pas avoir pu t'aider, tu sais ? »

Qu'il rajoute, en fixant durablement le plafond cette fois pour ne pas avoir à affronter son regard. C'est que les yeux disent beaucoup de choses. Et qu'il était fatigué de voir le mépris et la colère dans le regard des gens. Et que ça lui ferait mal au bide à Hunnigan, de lire la même chose dans les grandes billes bleues de la blonde.

« C'est étrange pour moi aussi, je te rassure. »

Rien à voir avec le fait qu'elle était couverte de sang, de bouts de chairs, de terrine de cervelle et de débris d'os, évidemment.
Ceci dit, force était d'avouer que c'était là des retrouvailles à la hauteur du chaos de leurs existences à tous les deux. Finalement, quelque chose de simple et sobre aurait fait désordre. Il aimait bien l'idée que ça se soit passé comme ça. Tant pis pour Manny, sa clique, le pub et l'argent.

Le voilà finalement qui se redresse à l'aide de ses coudes. Billie a viré ses pompes et ses pouces jouent avec ses panards. C'est bizarre. Et agréable. Et il veut qu'elle arrête. Et il en veut encore. John secoue la tête, cligne des yeux, essaye de revenir sur terre. En vain.

« Qu'est-ce que tu fais ? »

Mais elle est partie dans ses idées. Quelque chose à sa mesure. Elle va les empoisonner. Oui. Elle l'empoisonne un peu à cet instant précis, alors c'est effectivement tout à fait à sa mesure ouais. Et là, elle va le faire pioncer.

« Mais les poisons ciblent trop bien ou trop peu. C'est rare, les justes milieux... »

Ils se limitent à la personne qu'on vise uniquement, en une dose. Ou ils se répandent et tuent sans discriminer. Or... s'il n'existe plus de vie nulle part, effectivement sa mission sera accomplie, mais personne ne saura alors profiter d'un monde purgé d'Icarus et...

« Aïe ! Billie ! »

Il s'est arqué, relevé sur un bras tendu, la bouche ouverte et le visage tendu de douleur en essayant de ramener son pied à lui.

« J'étais en train de me dire que tu avais tort et que tes mains savent encore faire des trucs plaisant sans détruire en plus ! »

Allez savoir s'il plaisante ou pas. Il est perdu, Hunnigan. Quoique con qu'il était, ça devait être sincère.
Il n'empêche que si elle veut toucher ce qu'ils ont de plus précieux, comme elle le dit si bien, ce n'est pas une raison de lui flinguer les arpions. Il les aime bien ses pieds. Ils transportent sa vieille carcasse depuis plus de deux siècles, et il tenait à ce que ça continue.

« Qu'est-ce qu'ils ont de plus précieux selon toi ? »  

L'argent ? L'image ? Le soft power ?
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