L’épique chasse au bug (et aux clients idiots)

Oh putain, oh putain, oh putain ! pourquoi ça me faisait ça maintenant, là comme ça, sans prévenir ni rien ? Le premier bip m’a fait un peu sursauter, d’accord, mais pas de quoi avaler de travers le thé glacé qui me servait de digestif. Ça pouvait pas être autre chose qu’un petit bug passager, un petit bug de rien du tout, genre une crasse sur le QR code ou un truc du style. Mais pourquoi ça s’obstinait à annoncer un putain de solde insuffisant ? 100 000 Lion Coin ça pouvait pas s’évaporer si vite, même pour une dépensière comme moi ! C’était juste pas possible, je venais à peine de débarquer !

Gros soulagement déjà : non j’ai pas dépensé tant que ça – quand je me suis jetée sur l’app pour vérifier le solde, bah comme je pensais j’avais à peine entamé les premiers 10 000 du pactole (en vrai c’était un peu plus que je le pensais, mais bon limite on s’en foutait, j’avais encore de la marge quoi !). La serveuse aussi je l’ai vue se détendre, elle commençait à la sentir mauvaise, alors des chiffres pareils ça rassurait sur ma solvabilité et donc ses chances d’avoir le pourboire en fin de compte. Sauf que là ça craignait, le paiement était pas foutu de passer et elle commençait tout doucement à suggérer de tester un autre moyen de paiement. Dans sa tête ça devait être logique, quelqu’un qui a autant de cryptos ça doit avoir des dollars aussi, non ? Bah justement, pas moi, mais là-dessus valait mieux la fermer.

J’ai fini par appeler l’horloge parlante à la rescousse, faisant toute seule la conversation d’une fille à papa que son vieux allait sauver de l’humiliation. J’aurais bien appelé le vrai, de Papa, mais j’avais pas son numéro et il était pas non plus trop au courant qu’il avait une fille dans la dèche, alors en attendant je recyclais les vieux trucs de Maman. Juste le temps que la serveuse se calme, se laisse distraire par une autre table, et… là, maintenant ! c’était le moment de filer sans payer.


Voilà voilà, j’ai échappé au danger immédiat, mais j’étais pas sortie de l’auberge (de la brasserie ouais, mais pas de l’auberge, bref). Pourquoi est-ce que mes paiements ils passaient plus ? C’était vraiment juste un bug sur le moment, ou ça risquait de se reproduire ? Resquiller un resto, c’était déjà chaud, mais je devais encore retourner à l’hôtel, récupérer mes fringues sales au service blanchisserie et… oh merde, qu’est-ce que j’avais déjà pris dans le frigo-bar ? Qu’est-ce qu’ils allaient faire avec mes affaires s’ils découvraient que j’étais fauchée ?

Sauf que j’étais pas fauchée, merde ! J’avais beau vérifier, il était toujours là le fric, à portée de QR code. Fallait juste qu’ils se bougent le cul pour régler cette connerie de bug. Alors quand j’ai vu que le siège social d’Icarus Inc n’était qu’à deux rues d’ici, j’ai pris une profonde respiration et j’ai décidé de réagir avec calme et méthode, comme une adulte responsable.

Genre en débarquant en douce dans leur département informatique pour réclamer les explications auxquelles j’avais légitiment droit.


Le secret, Maman disait souvent, c’était de faire comme si on avait toutes les raisons d’être là, parce que tant qu’on avait l’air de savoir ce qu’on faisait les gens partaient du principe que c’était le cas. C’est plus facile à dire qu’à faire, mais bon autant essayer… par chance c’était la fin de la pause midi, alors y’avait un paquet de gens qui revenait en petit troupeau vers les bureaux. Je me suis juste calée en queue de peloton en faisant mine de chercher mon badge dans le sac pour me laisser le temps d’observer les lieux. La bonne nouvelle c’était que ma cible n’était pas bien loin, sur la liste des départements à côté de l’accueil l’informatique figurait au quatrième étage (sur… un, deux, beaucoup, c’est qu’elle est vachement haute cette tour !). La mauvaise, bien sûr, c’est qu’il y avait un putain de portique sur le chemin. Pas très haut, c’était déjà ça, mais tout de même, il allait falloir ruser.

Inspirer, expirer. Bref coup d’œil en arrière histoire d’être sûre d’être dans les derniers. Triomphante, je me suis armée de la carte d’ouverture de ma chambre (qui avait plus ou moins les mêmes dimensions que leur bête badge) pour approcher la bête. Au moment de scanner, par contre, j’ai pris mon plus bel élan pour m’appuyer sur la structure métallique et projeter mes jambes par-dessus le portique. Une vraie figure de parkour ! Personne ne m’a vue au moins ? Pas trop le temps de m’en inquiéter, maintenant faut miser à fond sur l’effet de surprise pour prendre de l’avance. Du pas de l’employée rentrant à la bourre de sa pause midi je me suis donc tranquillement précipitée vers la porte marquée du symbole d’un escalier, dans l’espoir pas si fou qu’il me mène au bon étage.

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Le nom du monde est surveillance.
Brianna veille, dans sa tenue d'agent de sécurité pour Omnivox Média, fièrement. Ses yeux noirs ne cessent de se poser là ou ses oreilles les guident. Des portes de l’ascensseur jusqu'au dernier recoin de l'étage. Brianna veille. Elle se déplace avec une grande aisance. Ses oreilles ne perdent pas une miette des petits ragots que s'échangent les gens ici. La matinée avait été bien calme. Trop calme pour Brianna qui préférait quand les choses bougeaient vraiment. Elle était tout en bas de l'échelle sur les employés des agents de sécurité. Comme elle était du genre sérieuse et impliquée dans son travail, les heures supplémentaires ou les missions supplémentaire ne la dérangeaient pas. Il n'y avait aucun.e partenaire à rejoindre, aucun enfant à aller chercher - elle se trouvait bien trop jeune pour ça, elle se trouverait peut-être toujours trop jeune pour ça. - ni aucune excuse qui pourrait lui faire dire non. Alors généralement, c'est elle que l'on trouvait pour remplacer ou dépanner d'autres étages au pied levé. Elle ne bronchait pas, souriait et s’exécutait. Okay, elle n'était pas journaliste, le métier de ses rêves, mais elle aimait quand même beaucoup celui ci. Elle se sentait utile et sa mutation était un atout.

‟ J'ai vu ça avec un autre chef, du rejoint son équipe pour cet aprem, j'te jure les gens qui perdent leurs grands-mères pour la troisième fois en un mois ils pensent quoi, qu'on va tomber dans le panneau ? Et puis si tu donnes un coup de main, peut être qu'on va pouvoir s'arranger pour une prime à la fin du mois.”
‟ Vous en faites pas boss, j'peux gérer ça.”
‟ Ouai ouai, on compte sur toi.”

Les yeux pétillent, la confiance se gonfle. Brianna est prête pour cet après-midi. Elle prend les escaliers pour se rendre à l'étage ou son équipe temporaire l'attend. Déjà, le talkie Walkie qu'elle porte à la ceinture grésille.

‟ On a une intrusion dans ta zone. Une femme, petite, assez rapide.”

Brianna attrape le talkie Walkie et répond. ‟J'suis sur le coup.” Elle raccroche et fonce. Elle prend son air le plus sérieux, le plus féroce. Elle n'est toujours pas très effrayante, pas très impressionnante non plus. Elle ne ressemble pas à une armoire à glace, elle n'est pas aussi musclée que les autres. Seule sa tenue de travail prouve son rattachement à la sécurité.

‟ Hey !” Lance t'elle en ouvrant la porte des escaliers avec son élan. Son regard se pose sur la personne qui venait vers elle. Elle était petite, brune. Ça devait être elle. Brianna se met en travers de son chemin.

‟ Procédure de vérification.” Elle sort ce qui ressemble à un téléphone de sa poche. Ce n'en est pas tout a fait un. C'est un petit appareil qui lui sert à pouvoir retrouver n'importe quel employé. Avec les autorisations auxquels elle a droit. . ‟Je peux avoir votre nom, prénom, votre date de naissance, votre service aussi et l'étage ou vous travaillez.” Elle se doute bien qu'elle ne travaille pas ici, la fille correspond à la description qu'on en a fait. Si elle tente de s'échapper, Brianna à les moyens de la rattrapée. La sécurité est à cran depuis l'attaque des Orphans sur Icarus. Brianna était en congé à ce moment là. Elle n'avait fait qu'entendre les quelques personnes rescapées discutées de l'attaque mais aucune information officieuse ne s'échappait des lèvres des employés. Ils étaient plutôt soulagés d'ailleurs, que Madame Hatcher et l'avocat aient été sauvés par Megamind. C'est ce qu'il se disait par ici.

ft. @Amber Burroughs

Une, deux, trois, quatre ! Une, deux, trois, quatre ! C’était que j’avais une bonne foulée, mine de rien, pour mon petit format, alors j’avalais gentiment les étages qui me séparaient de mon objectif. Premier – fait. Deuxième – fait. Troisième…

Euh, c’était quoi cette madame qui hélait les gens à la sauvage comme ça, en pleine ascension d’escalier ?

J’étais un peu surprise, ouais, après je connaissais pas trop leur culture d’entreprise et en plus j’étais tout près du but, alors j’ai décidé de juste la saluer poliment d’un signe de tête, sans plus de chichi que ça. Enfin ça c’était le plan, mais elle n’avait pas l’air de vouloir en rester là, genre elle se mettait littéralement en plein milieu de mon chemin pour… une procédure de vérification ? Vérification de quoi, au juste ? Enfin bon, si ça lui faisait plaisir :

« Amber Burroughs, née le 8 avril 2002, et je dois vraiment rejoindre le département informatique à l’étage juste au-dessus, je lui répondais avec mon plus beau sourire plus blanc que nature. Est-ce que je peux passer maintenant, s’il vous plaît ? »

Allez, allez, allez ! Madame Procédure devait bien voir à mes grands yeux humides que c’était une urgence sanitaire, non ? J’avais même dit « s’il vous plaît », c’était dire à quel point j’étais désespérée.

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"Je regrette, mais je ne peux pas vous permettre de passer."

répond-elle sans hésitation. Elle se sent désolée pour Amber, mais la jeune femme n'a pas fourni toutes les informations qu'elle exige. Ce n'est pas agréable pour elle, mais elle se plie aux ordres qu'on lui donne. Elle sort son petit téléphone de service et questionne la base de données des employés, son nom n'y apparaît pas, elle ne peut pas la laisser partir. Brianna songe qu'elle pourrait faire un petit geste, outrepasser ce qu'on lui demande avant de se raviser. Icarus ne le permettrait pas et elle aurait de gros problèmes avec ses supérieurs, alors elle réponds machinalement ce qu'on lui a appris dès son arrivée.

‟ Ecoutez, vous n'avez pas l'autorisation de monter à l'étage, donc redescendez, prenez rendez-vous avec le service dont vous avez besoin et revenez.”

Amber n'avait pas l'air trop dangereux, mais après tout, il n'était pas question de sentiments, d'avoir l'air ou non. Les faits, elle devait rester sur les faits et ne pas s'attarder sur les sentiments ou elle serait perdue. Elle ne faisait que répéter ça à ceux qui voulaient brûler les étapes, ça devenait ennuyant, mais elle n'avait pas envie de se faire tirer les oreilles par son supérieur.

‟ Amber, je suis désolé de ne pas pouvoir vous aider davantage. Mais vous imaginez bien qu'on ne laisse pas n'importe qui entrer à Icarus comme dans un moulin. Ils sont plutôt regardants sur les entrées et sorties.” Elle descend vers Amber, doucement. ‟ Je peux vous avoir un rendez-vous rapidement, cela dit, je ne fais pas de miracle, mais je peux essayer.” Elle se tient toutefois prête, pour quoi? Elle ne sait pas vraiment, les gens peuvent avoir de drôles d'idées parfois quand ils veulent absolument passer. Sur sa poitrine, son badge de service était marqué de son nom. Elle inspire et garde une voix posée et distante.
" Je dois quand même vous prévenir, c'est la procédure, en cas de nécessité, je me verrais dans l'obligation de devoir user de tous les moyens pour que vous renonciez. Donc, vous voici prévenue, en cas de force majeur, Icarus ne prendrais en charge aucun soin et toute plainte serait irrecevable." Elle soupire, reste un instant silencieuse puis passe une main derrière sa tête.

" De toi à moi, je n'aime pas faire ce genre de discours mais c'est le protocole. Maintenant que j'ai bien blablater et que de toute évidence, tu ne sembles pas vouloir renoncer n'est-ce pas? En quoi puis-je t'aider?"

ft. @Amber Burroughs

Ah bah merde tiens, j’avais pas calculé qu’on pouvait si facilement vérifier ce que je disais, si j’avais su j’aurais peut-être cherché le nom d’une authentique employée pour donner le change. Quoique, si ça se trouvait il y avait une option trombinoscope à leur barre de recherche, ç’aurait été ballot. Au moins j’avais pas menti, je m’appelais vraiment Amber et il fallait que je contacte au plus vite le département informatique – même si ouais, je voulais bien l’admettre, j’avais pas le moindre rendez-vous ou lien contractuel qui pouvait légitimer ma présence. Seulement de grands yeux humides et une moue désespérée que je comptais faire peser de tout mon poids.

Après j’avoue que j’espérais pas pour autant une ouverture aussi rapide, Madame Procédure avait donc un cœur qui battait et qui était prêt à aider ceux qui le demandaient suffisamment poliment ? Bon peut-être pas au détriment de son job (j’allais pas lui en vouloir, c’était cool de manger autre chose que des pâtes en fin de mois), mais quand même j’allais pas cracher sur le fait de croiser un agent de sécurité qui me parlait comme à un être humain.

« Écoutez, c’est pas contre vous, ni même contre vos patrons, mais là je suis vraiment dans une situation de merde, je tentais le tout pour le tout, pas le temps de faire dans la subtilité vu tout ce qu’il y avait en jeu. J’ai perdu ma maman il y a quelques semaines et… (Ne pas chialer, ne pas chialer ! c’était la madame qui devait chialer, pas moi merde,) et tout ce qu’elle m’a laissé c’est une assurance-vie Icarus. Je suis venue à New Blossom pour prendre un nouveau départ en comptant dessus, sauf que là je comprends pas pourquoi j’arrive plus à accéder aux coins, j’ai que des refus de paiement depuis tout à l’heure. S’il vous plaît Madame, faut absolument que vos informaticiens fassent quelque chose, sinon ce soir je suis à la rue, et je sais même pas ce que l’hôtel va faire avec mes affaires. Aidez-moi, vous êtes mon seul espoir ! »

… euh merde, c’était pas une citation de Star Wars ça ? Ah bah bravo, paie ton effet dramatique à deux pennies. J’espérais qu’elle avait pas relevé, parce que pour le coup j’étais on ne pouvait plus sérieuse et désespérée.