Dearly beloved we're gathered here today to watch a big mistake | tommi

25/02/2023

Deon dort pas bien. Il dort jamais bien depuis le développement de sa deuxième déchirure. Il dort jamais bien depuis que son cerveau semble être en constante surchauffe. Deon, il a mal au crâne, tout le temps. Il dort bien - mieux, en tout cas - que lorsqu’il a Tomomi à ses côtés. Mais Tomomi n’est pas là. Tommi a voulu être seul, depuis des jours, et chaque jour, chaque nuit, Deon dort moins, dort pas. Il sait rien, Deon. Il sait juste que Tomomi ne va pas bien, et que Tomomi ne veut pas le voir. Tomomi qui a dit qu’il voulait rester seul, pour une raison qui lui échappe. Trois fois, Deon a fait le chemin jusqu’à la rue de Tomomi. La première fois, il a mis vingt-cinq minutes et trente-deux secondes. La deuxième, trente-quatre minutes et sept secondes. Il y avait du retard dans le métro. La troisième, vingt-sept et quarante-quatre secondes. Il est jamais allé jusqu’à la maison. Il a jamais toqué à la porte, il ne l’a pas appelé non plus. Il a respecté son souhait, mais il n’avait pas envie. Il n’avait vraiment pas envie.

La fatigue marquée sous ses paupières, Deon a envie de pleurer dans le métro. De frustration, d’inquiétude, de se sentir impuissant. Il est bloqué depuis dix-sept minutes et vingt-six secondes, il est trop loin pour finir à pied et le trafic à cette heure il ne vaut mieux pas y penser. Il va être en retard, il a déjà calculé. Il n’y a aucune chance qu’il arrive à l’heure. Il va être en retard et Tomomi sera déjà là. Et ça fait huit jours, six heures, cinquante-quatre minutes et cinq secondes qu’il ne l’a pas vu. Il envoie un sms rapide, se mord la lèvre d’angoisse devant son écran.

La migraine lui barre le front. L’ignorance le rend malade, ce n’est pas quelque chose qu’il gère bien, il y a trop de passif pour qu’il puisse ne pas s’imaginer le pire, et il y a trop d’angoisse concentrée dans son mètre soixante-treize pour qu’il garde la tête froide par rapport à la situation.
Enfin, le métro se remet en marche. Deon jure dans un souffle. Il est le premier à sortir, quand la rame s’arrête à sa station.

Enfin, enfin. Fébrile, quand il remonte l’avenue au pas de course. C’est stupide, Tomomi ne partirait pas, il ne changerait pas d’avis… n’est ce pas? Nerveux, quand il ouvre la porte de l’appartement. Il fait sombre et les lumières ne sont pas allumées mais il ne s’en préoccupe pas, Tomomi supporte mal la lumière et même si Deon a changé toutes les ampoules de l’appartement, la chose n’est pas naturelle pour son amant quand il est seul. “Tomomi?” Il s’annonce, incertain non pas de sa présence mais de ces retrouvailles, de ce qui a pu se passer. “I’m here” Il retire ses chaussures.

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— awake at night

I've wrestled with the truth for quite some time and I've been drowning in this restless mind.

21/01/2023

J’me sens coupable d’faire subir mon silence à Deon depuis des jours. J’me regarde dans le miroir et j’me trouve pitoyable, d’être dans cet état. Pourquoi ? Pour MinHo ? Il mérite pas, d’me foutre dans cet état. Il mérite rien du tout. J’le hais d’avoir ce pouvoir sur moi, après toutes ces années. D’avoir réveillé une rancœur que j’pensais effacée, des choses dont j’voulais plus jamais entendre parler. La vérité, c’est qu’j’ai aucune envie que Deon me voie comme ça, qu’il ressente la colère qu’j’ai pour mon ex, qu’il comprenne pas. J’aime pas montrer mes travers, mes faiblesses, il en sait déjà bien assez, Deon. Le Red, mon père toxico, la misère d’mon ancien appart’, c’est suffisant. J’veux pas causer de tout ça, j’veux pas qu’il me voie mal en point ou au bord du gouffre. C’bien pour ça que je le tiens éloigné à chaque fois que je prends ma dose de Red, c’est un truc que j’veux garder pour moi, parce que personne devrait m’voir comme ça, surtout pas Deon.

J’me sens coupable, pourtant, d’mes messages laconiques et des soirées annulées, et puis il me manque, aussi. C’difficile de prétendre qu’il est là en fermant les yeux sans les battements d’son cœur et sans sa chaleur, y’a qu’le silence du mien et mon corps glacé incapable de s’réchauffer. Alors j’fais l’effort de pas me défiler, même si mon reflet dans l’miroir me donne envie d’crever pour de bon. J’arrange mes cheveux, j’enfile des habits que j’aime, des lunettes de soleil papillon et puis j’me traîne des pieds d’plomb jusqu’à chez lui. Il est pas là, quand j’arrive, et j’sais pas si ça m’arrange ou si ça m’donne juste envie d’me dégonfler. J’pourrais faire demi-tour, dire que j’veux pas le déranger, mais j’reçois son message comme quoi il est en retard et j’ai pas la force de répondre autre chose que OK.

Mes baskets enlevées, j’erre un peu sans but dans son appartement. J’suis nerveux à l’idée d’m’asseoir et d’attendre, alors j’le fais pas. A un moment j’décide de m’lancer dans un inventaire des vêtements qu’j’ai laissé traîner chez lui, pour m’occuper l’esprit. Y’a une chemise qu’est portée disparue depuis quelques semaines, déjà. Peut-être qu’elle est quelque part ici. J’vérifie la penderie, mais rien à l’horizon, mon regard s’accroche aux étagères les plus hautes. J’attrape une chaise pour les atteindre, trouve des vieilles fringues dont il doit sans doute se débarrasser d’puis longtemps. J’pourrais les récupérer pour la friperie. Y’a des boîtes à chaussures et j’décide d’y jeter un coup d’œil. J’les tire à moi, mais perds l’équilibre une demi-seconde et elles dégringolent, j’ai juste le temps d’porter mes mains à mes oreilles pour étouffer l’bruit, tous les jurons du monde au bord des lèvres. L’bruit qui colle pas, pour des chaussures oubliées dans l’fond d’une armoire. J’me fige, le regard posé sur les doses de Red qui s’échappent d’une des boîtes. Y’a un instant de flottement, où j’reste debout sur ma chaise comme un idiot à me dire que j’suis seulement parano, qu’c’est sûrement autre chose. Et dans l’instant de flottement, y’a la voix de Deon qui résonne, hors de la pièce. J’bouge pas, j’dis rien, planté debout sur ma chaise, les mains sur les oreilles, les yeux rivés au sol sur des fioles de Red que j’vois comme en plein jour malgré les lumières éteintes. C’comme si mon cœur menaçait d’exploser dans ma poitrine, mais c’est celui de Deon, pas le mien.

25/02/2023

Ok, Tomomi a répondu simplement. Ok. ça veut tout et rien dire, ok, et Deon, il a du mal avec le mot, c’est ce qu’on utilise quand on veut se débarrasser d’une discussion qui dérange ou bien qu’on a pas envie de continuer. ça peut aussi être simplement qu’on est pressé, qu’on a vraiment pas le temps, ou tout simplement que oui, tout va bien. Dans les circonstances entourant leurs retrouvailles, Deon, il est pas rassuré. Et il s’en veut, d’être en retard, même s’il n’aurait pas pu prévoir, même s’il ne savait pas. Quand même. Après plus d’une semaine, il voulait être à l’heure. Il voulait vraiment être là, à l’arrivée de Tomomi. Il n’aura eu le temps de rien préparer dans l’appartement.

Deon, il a peur que Tomomi soit parti. Les lumières éteintes ne sont pas très inquiétante, l’absence de réponse, en revanche, ça l’est. “Tomomi?” Il répète, Deon, après avoir enlevé ses chaussures. “you’re there?” Personne, dans le salon et la cuisine, il se déplace jusque dans la chambre, la porte est ouverte.

Il y a plusieurs choses. “Tomomi?” Il demande. En même temps, il le voit sur sa chaise. “Tomom-” Le prénom, se meurt entre ses lippes. Et les fioles de Red, là, à terre. “What is-” Il ne finit pas de formuler la question. Parce qu’il comprend très bien, ce que c’est, pourquoi elles sont là. Deon, il comprend bien que ce sont les siennes, celles qu’il garde depuis des mois tout en haut dans le fin fond de son armoire. Dans sa poitrine, ça se met à cogner. Fort, fort. “I-” Il sait pas quoi dire, Deon. C’était pas prévu comme ça. C’était pas prévu du tout. Il se met finalement en mouvement, s’accroupit et commence à ramasser ce qui traîne à terre en tâchant péniblement de rester calme malgré la situation. Il faut bien ranger, mettre de l’ordre. Ce n’est pas comme ça qu’il a imaginé leurs retrouvailles, loin de là. “Are you-” Il déglutit, Deon. “Did you hurt yourself?” C’est ce qui passe finalement la barrière de ses lèvres, son inquiétude avant le reste, parce que le silence l’étouffe et que ses mains ne sont pas assurées alors qu’elles récupèrent les fioles de drogue. Dans sa tête, ça vole et ça cogne et s’entrechoque et c’est la panique qui commence à le submerger. Ramasser les fioles, d’abord.

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— awake at night

I've wrestled with the truth for quite some time and I've been drowning in this restless mind.

21/01/2023

J’suis tétanisé, debout sur ma chaise comme un idiot, j’en ai l’vertige, à regarder le sol et ces foutues doses de Red. J’sais plus comment descendre, j’ai oublié comment mon corps fonctionne, j’crois. J’dis rien, j’réponds pas à mon prénom. J’sais pas quoi dire, pas quoi faire, à part rester planté sur la chaise comme si en descendre c’était accepter la réalité. Y’a mes bras qui retombent le long de mon corps, à voir Deon ramasser c’qui a dégringolé par terre. J’devrais garder mes mains sur mes oreilles, en fait, les battements d’son cœur sont trop violents pour mes pauvres tympans, le p’tit tintement des fioles qui s’entrechoquent alors qu’il les rassemble. Y’a tout, qu’est assourdissant. Mon silence y compris.

J’réponds pas, à sa question. J’le regarde, juste, d’en haut, moi perché sur ma chaise, lui au sol à ranger. J’ai envie de pleurer, d’gueuler. J’ai envie d’partir. De pas poser d’questions, d’pas lui demander de m’expliquer, de seulement fuir la confrontation. Deon, cannya…, j’marmonne, trop fort pour moi, pas assez pour lui. Deon…, j’fais, à peine plus fort, tandis qu’il continue de remplir la boîte. Cannya stop now for fuck’s sake? Le ton est brusque, soudain ; j’ai enfin son attention. J’tends les bras vers lui, lui fait signe de se relever d’la main. Help me get down, I feel sick. J’m’appuie sur lui pour retrouver enfin la terre ferme et m’écarte aussitôt, l’cœur au bord des lèvres. J’m’adosse au mur, prends une grande inspiration inutile. What the fuck is this? J’fais un geste vague vers le bordel sur le plancher. Are ya taking Red? J’crois que j’préférerais que ça soit la réponse, oui. Pas qu’il ait fait exactement c’que j’lui ai dit de pas faire.

25/02/2023

Tomomi, il a pas l’air de bouger. Deon le regarde pas, parce qu’il n’ose pas le regarder, parce qu’il faut ramasser les fioles, d’abord, parce qu’il faut les faire disparaître, les ranger avant qu’elles ne fassent plus de mal, pour que, peut-être, peut-être, on oublie qu’elles étaient là. Mais c’est difficile pour lui de se concentrer sur cette action, quand il sent que Tomomi ne bouge pas d’un iota. Même s’il ne le regarde pas, il peut sentir sa présence sur la chaise. Elle est imposante, sa présence. Deon essaie de ranger, ignore les faibles appels de Tomomi, se persuadant peut-être qu’il ne les a pas entendus.

La voix est plus forte, brusquement. Plus froide, aussi. Deon relève le nez, enfin, vers lui. Il est toujours là, debout sur sa chaise. Les doigts de Deon s’immobilisent, lâche une dernière fiole qui reste à terre, malgré le besoin de la ranger au plus vite, elle et les quelques autres se trouvant encore au sol. Une inspiration douloureuse, il se lève pour apporter son aide à Tomomi, pour qu’il puisse descendre. “Yes. of course…” Le contact est court - beaucoup trop, après des jours sans se voir. A peine a-t-il mis le pied à terre que le blond s’éloigne aussitôt, et Deon ne bronche pas. Son ventre se noue un peu plus fort, en revanche. Deon, il le regarde. Il reste silencieux, alors que Tomomi s’adosse au mur, désigne les fioles à terre, demande, questionne. Deon, il le regarde. Y a un silence. ça l’étouffe. “No” il s’entend dire, comme complètement dissocié de son corps. Il sait bien que la question est pour la forme, il sait bien que Tommi sait pertinemment qu’il ne peut pas utiliser de Red. “It’s” Un, deux, trois. La tête lui tourne. ‘just in case’ il exhale finalement, un ton en dessous. La tension s’intensifie, et avec elle son anxiété. Il se trouve incapable de savoir quoi rajouter.

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— awake at night

I've wrestled with the truth for quite some time and I've been drowning in this restless mind.