(the fire bleeds) Echoes of history

Echoes of history
TW : Maladie, dépression, anxiété,
mention de mort

Conquest of Spaces - Woodkid

June est allongée dans le canapé du salon. Elle regarde les flocons de neige tomber sur les vitres et devenir pluie. Elle se concentre sur eux pour ne pas trop penser aux flots d’émotions tumultueuses qui la prennent aux tripes. Il s’est passé tant de choses en quelques mois à peine qu’elle ne sait pas comment réagir. Elle a même eu peur, un instant, que le stress provoqué par toutes ses révélations et mensonges ne viennent impacter sa maladie. Mais il n’y a pas de nouvelles de ce côté-là. Pas d'autres tâches, rien n’a bougé. Elle en est heureuse, tout de même. Même si cela veut définitivement dire que tout est lié à sa mutation et seulement à sa mutation. Prix peu cher payé selon elle, pour pouvoir au moins essayer de sauver le monde.

Drak0na, couchée sur le tapis, se relève et vient mettre sa tête sur le canapé, près de celle de June. « Quoi ? » La panthère indique la cheminée, dont le feu est à quelques minutes de s’éteindre complétement. « Ah oui, merci. » June caresse la tête du cybermon et se lève pour remettre du bois. Elle a donc le dos tourné à Drak0na quand la voix de celle-ci porte soudainement dans toute la pièce. June sursaute, manque tomber à la renverse. « Liam Jones est entré dans le périmètre de sécurité de la maison. » La Sept ferme la porte de la cheminée et se retourne vers Drak0na. « On fait comment si c’est toi qui me tues, K0na ? » Le cybermon ouvre légèrement la bouche pour répondre, micro caché dans la gorge pour plus de réalité. « Le contrat indique qu’en cas de blessure infligée accidentellement par un cybermon à une personne… - Ah c’est bon, t’es pas drôle. » June soupire et se relève. « Allons accueillir notre invité. » Elle hésite, alors que l’animal et elle se dirigent vers la porte. « Et reste près de moi, je vais avoir besoin de soutien. » Drak0na ouvre à nouveau la bouche. « David Allen indique que « Une grande partie du stress que ressentent les gens ne vient pas du fait qu’ils ont trop à faire. Cela vient du fait qu’ils n’ont pas terminé ce qu’ils ont commencé. » » June grimace à la citation impromptue, marmonne. « Génial, j’suis contente de le savoir. »

La main sur la poignée, June hésite à nouveau. Elle a peur. De revoir Liam. De voir Liam ici. De parler avec Liam. Elle a peur de trop ressentir, encore, et d’où tout cela va les mener. Parce que les enjeux ne sont plus les mêmes, les rôles non plus. Mais au moins pour la bonne harmonie des Sept, elle fera l’effort d’écouter. Alors elle ouvre la porte, et en voyant Liam sur le pas de celle-ci, elle affiche un sourire. Difficilement. « Salut. » Elle se décale sur le côté. « Entre. » Drak0na le regarde un instant, semble le juger. En réalité, elle le scan, s'assure qu'il n'y a aucun danger. June indique le porte-manteau d’une main. « Tu peux poser tes affaires ici et on pourra s’installer dans le canapé. » Et elle se rend compte qu’elle ne sait plus vraiment se comporter avec lui. Entre gentillesse forcée et inimitié dont elle essaye ne pas être envahie. « Tu veux quelque chose à boire ? » Au moins, elle tentera d’être une bonne hôte.

ft. @"Liam Jones"

Il ignore encore, Liam, s'il doit dire toute la vérité à June.

Il la lui doit, il n'a pas d'autres choix que de le faire même en vérité, s'ils veulent repartir sur des bases à peu près saines. Mais lui dire tout, c'est lui avouer qu'Icarus n'avait sans doute jamais vu leur relation comme quelque chose de voulue ; qu'ils avaient su activer les bons boutons pour la voir se briser. Liam doit-il en assumer pleinement la conséquence, dire que c'était lui seul qui avait décide de l'arrêter là pour ne pas la voir le détester de devenir le vilain dans les films ? Doit-il encore lui mentir, même aujourd'hui ? C'est qu'il n'en a plus envie, c'est qu'il est fatigué de le faire ; mais il souhaite le meilleur pour June.

Ignore juste ce qu'il pourrait être, ce meilleur.

Quand il arrive à proximité, il hésite encore ; la tête est remplie par trop d'idées. Et finalement, il fini de faire cette courte distance qu'il reste, jusqu'à la porte ; sans avoir encore la moindre réponse à ses propres questions. Se bouge juste pour sonner et attendre. Voir June lui ouvrir fait étrange ; c'est que des années sans sa vision et voilà que désormais, ils doivent faire avec les évènements qui sont survenus. "Hey." Et un signe de tête pour la remercier quand elle l'invite à rentrer, alors qu'il regarde un peu la bestiole aux côtés de June quand il pénètre dans les lieux ; défait son manteau en l'avisant encore, curieux ; puis en revient à June. "Merci." Le porte manteau trouve ses affaires ; et il est prêt à la suivre, parce qu'il n'a aucune idée d'où est le canapé. "Je veux bien de l'eau, s'il te plaît." Liam a toujours été poli ; ne déroge jamais à cette règle interne.

Et quand le plus simple - et le plus dur à la fois - a été fait, qu'il se retrouve avec un verre d'eau dans les mains en disant à nouveau "merci", ne reste plus qu'à trouver place sur le canapé. Il n'a toujours pas la moindre réponse à ses propres questions ; naviguera alors à l'instinct, alors qu'il avise June et ne sait pas bien par où débuter. "... Tu vas bien ?" Qu'il se tente, quitte à se faire envoyer chier ; ne lui en portera pas rigueur, parce qu'il comprendrait qu'elle s'en foute de lui dire si ça va ou non. Mais la dernière fois... Ah... Prend une gorgée d'eau, pour tenter de noyer l'appréhension qui broie son estomac, encore et toujours.

Au final, sans doute est-ce mieux qu'elle débute la conversation fatidique, parce qu'au moins pourra-t-elle y donner le ton qu'elle préfère prendre pour ce moment de vérité.

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Elle se rend compte qu’il est particulièrement étrange de le voir chez elle. Maison toute neuve qu’elle considère pourtant déjà comme une partie de son être, parce qu’il y a mis toute son âme et que la plupart de ses affaires viennent de son petit appartement. Pas le canapé, cela dit, vers lequel elle le guide, Drak0na les suivant d’un pas silencieux. Elle hoche doucement la tête à la demande. « Je vais te chercher ça, et tu peux t’installer. » June indique le salon à Liam avant de prendre la direction de la cuisine ouverte. En lui versant son verre d’eau, et en s’apprêtant à en faire de même pour elle, elle hésite une seconde. La bouteille de vodka est juste là, peut-être que ça l’aiderait. Mais elle se rappelle de cette soirée avec Theodore et de tous les secrets que l’alcool leur a fait dévoiler. Non, elle ne veut pas être aidée à ce point. Alors elle se sert sagement un verre d’eau à elle aussi, et apporte le sien à Liam.

Liam, toujours si poli, beaucoup plus poli qu’elle, elle en convient aisément. Surtout ces derniers jours, semaines, mois. (Années ?) Elle s’assoit aussi loin de lui qu’elle le peut, distance de sécurité autant pour elle que pour lui. Drak0na, suivant les ordres, s’installe à ses côtés, tête sur ses genoux. Et June grimace à la question. Politesse qu’elle n’a plus, qui lui semble presque déplacée alors qu’elle veut juste des réponses à ses questions qu’elle ne saurait sans doute même pas formuler. Mais elle fait l’effort de se rappeler que ce n’est qu’un « ça va ? » et qu’elle ne peut pas l’envoyer chier dès les premières paroles si elle veut une discussion digne de ce nom. Alors elle soupire. « Non. » June ne prend pas la peine de mentir, elle n’a jamais réellement su le faire à ceux qui comptent. Et Liam a compté, fût un temps. Elle hausse les épaules. « Tu vas bien, toi ? Après tout ça ? » Les mots sont hargneux, mais pas contre lui. Contre tout ça. L’attaque sur les on-ne-sait-trop-quoi. Le cirque qui n’en finit pas, pour appuyer leur victoire et s’assurer que le monde entier s’en rappelle. Et les non-dits, les mensonges. Même les siens.

June ne sait plus que croire, ne sait pas plus en qui avoir confiance. Le seul monde qu’elle a connu est en train de s’effondrer et, comble ou justesse particulièrement amère, Liam semble être celui à en tenir les derniers morceaux. Mais elle les voit déjà s’effriter, parce que peu importe ce qu’il dira, rien ne pourra plus apaiser la colère et la peine. De ça, elle en est certaine. Sa main se pose sur la tête du Cybermon et, un instant, elle ne regarde qu’elle. « On devrait entrer dans le vif du sujet. » Paroles presque murmurées. Qui ne le sont plus lorsqu’elle relève les yeux vers lui. « Ça fait des mois que je me demande ce que tu voulais me dire avec ton téléphone, et à l’hôpital. » Sans doute que c’était sa faute, en vérité, s’ils n’avaient rien pu se dire. Colère grondante, trop grande en sa présence, à la lecture de ses mots. Elle veut bien l’avouer. « Ma patience arrive à ses limites. » Les derniers mots sont dits avec un presque-sourire, qu’il comprenne que ce n’est pas un reproche, juste une blague qui tombe sans doute à l’eau. Peut-être qu’il s’en rappelle, de sa curiosité, de sa patience quasi-non existante. Peut-être pas. Elle a encore parfois l’impression de n’avoir jamais existé dans sa vie. Et, souvent, elle se dit que ça aurait été mieux pour lui.

ft. @"Liam Jones"

Non, elle ne va pas bien ; et ça pique le coeur, comme une poudre qu'on poserait sur la langue. Mais elle n'est pas sucrée, juste explosive ; laisse même ce goût de cendres dessus. Il se rappelle de celle de la tour, entre la poudre des bombes et de la poussière du bâtiment touché. Le souvenir le hante ; Hush et ses drôles de bruits, la lame s'enfonçant dans son bide ; de cet échec qui hante, parce que Bonnie était en train de tomber au combat aussi ; et qu'au fond, c'était elle que Jeremiah aurait dû sauver, plutôt que lui. "Pas vraiment, non." Hausse les épaules ; c'est qu'Icarus lui a appris depuis longtemps qu'il n'y a pas besoin de se soucier de ses propres émotions ; qu'elles n'ont de valeur qu'à être négocié pour y mettre plus de terreur encore dedans. De sa peur de perdre June, ils ont immiscé l'idée que de toute manière, ça se terminerait ; et les voici alors face à face, sans plus savoir se parler - mais c'était ce que qu'avait souhaité Icarus.

Mais l'histoire les réunis encore ; pour marquer celle avec la majuscule.
Pour raconter surtout celle qui fût la leur.

Un regard sur elle ; le souvenir de son impatience d'antan aurait pu le faire sourire ; mais depuis longtemps les souvenirs se sont fanés. Et c'est à s'en rendre compte qu'il se décide enfin à dire la vérité ; entière ; même si elle fera mal, plus encore que simplement dire qu'il était jeune et stupide. Oui, il l'avait été ; manipulé qu'il avait été, à mettre des années à se rendre compte de tout ce qu'il avait pu perdre. "Notre rupture..." Qu'il soulève, parce que oui, c'était bel et bien ça le point d'interrogation, le manquement de tout.

Il termine son verre d'eau, avant de se lancer.

Et Liam se souvient des paroles d'antan, de Siren ; de cette fatalité dont elle ne l'avait pas préservé - jamais. "Elle était dû à Icarus." Liam n'essaye pas d'enrober de miel la vérité ; elle sera cru et toute entière ; alors terrible, mais tant pis. Parce que June la mérite, parce que June en a sans doute tout aussi assez, des mensonges autour desquels on met du sucre pour qu'ils passent mieux. "C'était leur exigence. Une ligne dans le contrat, soulignée par les avocats." La raison pour laquelle Liam n'avait jamais aimé Edgar - parce qu'il savait qu'il n'avait jamais été un humain, pour lui ; juste une ligne sur un contrat. "Je n'avais bien sûr pas le droit de te le dire." Bien entendu ; Icarus ne pourrait jamais être mis en cause.

Et longtemps, l'enfant a cru en Lui.
Parce qu'il n'avait connu qu'Eux.

Depuis, il a grandi.

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Il ne fait pas semblant d’aller bien, et c’est déjà ça. Malgré le haussement d’épaules, qui la laisse pensive. Comme si c’était tellement normal de ne pas aller bien. Comme si ça n’avait pas d’importance. Impression de le voir défaitiste alors qu’elle ne comprend juste pas. Qu’elle voudrait que le monde entier soit aussi révulsé qu’elle. Pourquoi ne l’est-il pas ? Alors elle demande des réponses, une explication derrière tous ces mensonges et non-dits et semi-vérités auxquelles elle n’arrivait pas à croire. Juste quelque chose pour que tout fasse sens. Mais les deux premiers mots, déjà, font mal. Elle aurait dû le voir venir, pourtant il n’y a que surprise dans ses yeux alors que le sujet est abordé lentement. June ne dit pas un mot pendant que Liam termine son verre. Elle attend sagement. Elle a promis d’au moins écouter et elle s’y tiendra. Même quand le couperet tombe, et qu’elle empoigne l’encolure de Drak0na pour ne pas vaciller. Ça ne devrait même pas la surprendre, après tout ce que Sloane lui a dit. Ça ne devrait même pas la surprendre, maintenant qu’elle sait n’être qu’un pion dans un jeu auquel elle n’a jamais joué. Mais ça lui lacère le cœur, quand même. Et elle a le souffle court alors qu’il termine ses explications. Parce qu’elle comprend que la firme n’a jamais hésité, jamais reculé devant rien. Et qu’iels se sont toujours laissé-es faire. Par adulation, par peur, pour la gloire ou juste parce que dire non semblait impensable. Drak0na relève la tête tandis que le pouls s’accélère, la pose sur le torse et appuie légèrement. June garde un pied dans la réalité. Fatiguée, de l’esprit comme du corps. Colère, toujours, qui gronde, assez fortement pour que les larmes ne fassent qu’une rapide apparition sous les paupières, sans se laisser couler. Le silence qui s’étend entre Liam et elle à peine entendu, alors qu’elle se concentre sur la seule chose qu’elle sait : Icarus lui a tout pris, elle ne le laissera plus rien prendre.

Les minutes ont passé quand elle répond finalement. « C’était la célébrité ou moi, c’est ça ? » Le regard se fait sombre, de cette colère violente qu’elle ne s’est pas privé de montrer lors de leurs dernières rencontres. Sauf que cette fois, sa cible a changé. Pour le meilleur comme pour le pire, ce n’est plus lui qui est entièrement à blâmer. « Je comprends. » Elle ne se serait pas choisie non plus. Veut croire qu’elle l’aurait choisi, lui. Mais elle soupire, parce que la vérité est qu’ils avaient perdu dès le moment où Icarus lui avait proposé le contrat. Dès qu’Icarus avait mis la main sur eux. « T’as fait le bon choix. » Des mots qu’elle n’aurait jamais cru dire un jour. Qui la font grimacer, autant parce qu’elle n’y voit que la vérité que parce qu’ils tambourinent sur le palpitant. « Si tu l’avais pas fait, je m’en serais voulu d’avoir été le poids à ta cheville. » Si elle l’avait su un jour. « Et t’aurais sans doute eu des regrets. » Dans tous les scénarios qu’elle s’imagine, aucun n’a de fin heureuse pour le couple qu'ils étaient. « On se serait écorché vifs et ça aurait fait tout aussi mal. Au moins, là, on n’a pas assisté à la descente aux Enfers de l’autre. » Elle l’inclut dans ce « on » sans savoir réellement s’il a souffert de tout ça. Ou à quel point, du moins. Mais June commence enfin à croire que Liam n’est pas Jophiel, pas le super vilain en tout cas. Et s’il est encore ne serait-ce qu’un peu le Liam qu’elle a connu, alors elle se dit que oui, il a dû souffrir. D’une façon ou d’une autre. « Icarus savait très bien ce qu’il faisait. » Des ficelles à tirer sans prendre en compte les corps au bout, qu’il croit être des pantins désarticulés, à manipuler à sa guise. Peut-être même Rhys. Peut-être même Orion. Elle l’espère presque. Ça ferait moins mal de se dire que tout le problème vient de la firme, et pas des personnes en lesquelles elle a toujours placé une confiance sans faille. Mais la vérité n’est jamais aussi simple. « Ce n’est pas la famille qu’on a cru avoir. Ça ne l’a jamais été. » Et elle espère qu’il s’en rend compte, lui aussi. « T’as jamais essayé de me le dire ? Tu leur as toujours… obéit ? » Elle déteste le mot en lui-même, tente de n’y apporter aucun jugement dans le ton. Mais veut comprendre, parce qu’elle-même a désobéit, ou a caché plusieurs choses. Pas avant leur rupture, cela dit. Et peut-être que leurs chemins s’étaient encore plus drastiquement opposés que ce qu’elle pensait.

ft. @Liam Regan

Il ne sait plus bien, Liam, ce qu'il en avait été. Au départ, c'était cette obsession de briller enfin, pour rendre la pareille à Icarus ; avec le recul, il sait qu'il aurait été incapable de leur dire non de toute manière, aussi bien parce qu'ils les auraient brisés et auraient obtenu ce qu'ils voulaient, que du simple fait qu'il ne lui ont pas appris le mot. Il est leur création, en tout point ; conditionné depuis toujours à tout accepter pour qu'ils soient fiers de lui. "C'était Eux, surtout." La figure parentale ; des visages avec lesquels aujourd'hui il ne sait plus bien ce qu'il croit ressentir en les voyant ; sent son estomac se creuser de davantage d'indifférence au fur et à mesure du temps... Sans mesurer que c'est ça la dépression ; ressentir du vide, qu'elle graille jusqu'à la colère, qu'elle ne recrache que des yeux qui lorgnent rien. Et maintenant qu'ils sont Sept, ça empire ; mais il se raccroche au mieux à ce qu'il a l'impression de posséder : les mensonges qu'il peut entretenir pour échapper un peu aux griffes pourtant plantées dans sa cage thoracique. Il ne lutte même pas, Liam, a accepté qu'elles étaient là ; il essaye juste de garder juste un micro espace où le sang ne se déverserait pas.

Et June comprend aussi ce qu'il en aurait été ; que l'histoire n'aurait pas survécu à Icarus, parce que ces derniers les voulaient séparer dans tout les cas. "Je regretterais toute ma vie quand même." Parce que ça n'avait mené à rien ; qu'au vide. Aux coupures, aux griffes, au sang. Mais rien n'en témoignera jamais plus - Cory en avait effacé toutes les traces depuis longtemps ; ne reste que les cicatrices qu'Icarus lui a savamment mises là ; celles de l'attaque de la Tour, aussi. Oui, celles-ci ne disparaîtront pas. Parce qu'elles sont la preuve qu'il devait devenir meilleur, pour sauver les gens ; pour parvenir à aider celleux qui le méritent - au prix de sa vie un jour, mais qu'importe ; il a trop incarné le vilain de l'histoire pour encore s'en soucier.

Mais oui ; Icarus n'a jamais été une famille, finalement. Et l'idée brise un peu plus Liam à chaque fois ; rend la cage plus visible, plus étouffante encore. Et parce qu'il ne sait absolument rien de tout ce qui se trame, il comprend encore moins toute cette lourdeur dans l'air quand les Sept sont réunis ; la tension chez chacun ; l'impression de ne pas être à sa place qui se rajoute davantage encore. "Oui." Toujours ; toujours. "Ils... M'ont tout offert. J'imagine que je leur dois..." Il baisse les yeux ; c'est qu'il change, petit à petit ; a juste appris récemment à désobéir. "Il n'y a que..." Hésite, un instant. "Ma prétendue femme. C'est faux, mais... Je ne veux pas leur offrir la possibilité de jouer avec nous encore." Entre leur rupture, la mise en couple factice de June ; et cette peur viscérale de se retrouver dans une histoire d'amour fausse aussi ; pas quand il a trop aimé, qu'il sait ce que c'est ; pas en se disant que June ou Cory pourrait le voir en train d'embrasser quelqu'un d'autre à l'écran. "Elle a accepté de me couvrir sur ce plan-là." Celui sentimental. "J'apprends à cacher ce genre de secrets désormais, pour qu'ils n'aient plus les pleins pouvoirs sur nos existences." Mais il n'a pas encore grand-chose à cacher ; si ce n'est faire attention à ses ami.es non connu.es, à tenter de les préserver de toute cette merde.

Parce que ça ferait trop mal. "Mais en dehors de ça... Leur parole a toujours été celle que je devais écouter." Et il soupire, Liam, n'a même pas la force de faire comme si ça lui allait. "Et ça sera sans doute ainsi jusqu'à ce qu'ils trouvent comment m'enlever de là où on m'a mis." Il ne sait pas s'il craint ce jour ou non ; ignore ce qu'il adviendra de lui, s'il pourra alors enfin devenir libre ou s'il sera à jamais enfermé dans une image dont il ne pourra pas se défaire. "Et toi ?" Est-elle plus libre, ou tout aussi désespérée ?

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C’était ce qu’ils voulaient. Elle n’avait été qu’une petite tâche à faire disparaître. Ça avait plutôt bien fonctionné : elle avait réellement eu l’impression de n’être plus rien, de n’avoir jamais existé. Mais elle est encore là. Et une Sept par-dessus le tout. Elle se demande par quel coup de chance. Est-ce qu’on a tellement voté pour elle ? Au point qu’Icarus la laisse s’abreuver de lumière ? C’est la solution qu’elle préfère. C’est la seule qu’elle acceptera. Et pas celle de la petite voix qui se glisse dans ses pensées « Peut-être parce qu’Ils te croyaient la plus manipulable. » Ce qu’elle refuse, particulièrement parce qu’elle sait que c’est vrai. Jusqu’au mois dernier, elle avait toujours voulu croire en Eux. Petite poupée de son au réveil compliqué. Elle espère arriver à ne plus l’être. Elle espère pouvoir arriver à les manipuler à son tour. Peut-être que ce sera ça, sa meilleure revanche.

Mais pour l’instant, elle ne fait que froncer les sourcils aux regrets évoqués. Comme si tout ça n’avait servi à rien. « Ne dis pas ça. » Grimace dans les mots, alors qu’elle refuse qu’il regrette quoi que ce soit. Parce que tout ça n'a pas pu servir à rien. Et sans doute aussi parce qu’elle refuse qu’Icarus ait une telle emprise sur lui. Que sa vie à lui sera longue, et que les regrets s’estomperont. Tout autant que l’idolâtrie qu’ils avaient pour la firme. Alors c’est la colère qui continue son chemin. « Ils... M'ont tout offert. J'imagine que je leur dois... – Tu ne leur dois rien du tout. » Les doigts enfoncés dans le faux pelage de Drak0na, elle vocifère, crache. Autant pour elle que pour lui. Même si parfois elle en doute encore, parce qu’elle n’aurait rien été sans Icarus. Juste une inconnue parmi les inconnu-es. Peut-être que sa mère serait revenue la chercher, au moins. Peut-être que le père serait resté loin. Peut-être. Peu importe, au fond, parce qu’ils ne leur doivent plus rien. June est soulagée d’entendre Liam lui avouer son faux-couple avec Andrea. Elle ne joue par la surprise, elle l’a appris par Andrea-même. Reg1 plus précisément. Elle ne savait juste pas exactement pourquoi. Décision intelligente. Son visage ne cache pas une moue appréciative. Il n’aura pas à subir cet Enfer que ça avait été Jade. Et, évidemment, ça lui fait peur pour Aurora. Parce qu’elle ne veut pas lui faire subir ça. Pour l’instant, Icarus se contente de la vendre comme la jeune célibataire à convoiter. Elle s’en accommode. Mais ça ne suffira bientôt plus. Ça n’a jamais réellement suffit. June hoche doucement la tête. « Vous vous êtes bien trouvés quand même, alors. » Un faux-couple consenti sur ce qu’elle voit bien être une grande amitié. Dans son monde, ça ressemble presque à un peu de paix.

Elle secoue la tête à la dernière affirmation, qu’elle comprend à peine. « Mais c’est mieux d’être Sept qu’être un « super-villain », non ? ». Elle mime les guillemets. Dans ses souvenirs, Liam aussi voulait atteindre la place tant convoitée. Alors même si elle se souvient de sa surprise lorsqu’il a appris faire partie du concours, elle n’a jamais pensé qu’il ne le voulait pas, au fond. Soupir qui fait écho à celui de Liam. « Ils sont nos patrons, mais ils ne contrôlent pas qui on est là-dedans. » Main sur le cœur, palpitant tapé du doigt. De ça, elle n’a jamais douté. Même avant. Parce qu’Héméra a toujours été un peu elle. Et elle redeviendra elle toute entière. Malgré l’air confus qui s’affiche sur son visage à la question renvoyée. « Moi ? » Elle met une seconde à comprendre. « Si je désobéis, tu veux dire ? » Le regard est posé sur Drak0na un instant. Il n’y a pourtant aucune hésitation dans sa réponse. « Oui. » Et ces dernières semaines, ces derniers mois, elle a l’impression de n’avoir plus fait que ça. « Depuis des années, depuis… » Phrase qu’elle ne termine pas. Depuis la rupture. Après des mois dans une noirceur dont elle se souvient à peine, surtout. « Avec le Métaworld, sur lequel je leur ai jamais dit que j’étais. Avec les sorties à l’Eclipse un peu trop nombreuses à leur goût. » Qu’elle aurait voulu plus fructueuses. Parce qu’elle voulait juste se faire remarquer. Elle hausse les épaules. Le plus grand des mensonges est étalé sur son corps. Ce tatouage qui n’est apparu qu’après leur séparation, cette épée de Damoclès qui la menace depuis la déchirure de trop. Mais ce n’est pas un secret qu’elle est prête à partager. Ils ne sont plus amants. Ils ne sont plus vraiment amis non plus. Tout à refaire.

Peut-être à commencer par des secrets moins horribles, plus simples à porter. « Je ne leur ai pas dit non plus que j'ai rencontré quelqu'un. » Peur viscérale de savoir ce qu'il adviendrait si cela venait à se savoir. Plus rien ne l’étonnerait. « Je n’ai plus confiance en Eux, ni… Ni en la plupart des Sept. » Orion obtenant la palme d’or, évidemment. Rhys pas très loin derrière, cela dit. Et la seule à qui elle aurait dû faire le plus confiance l’avait laissée sans réponse. A cause des deux premiers. « Je m’dis juste que ce qu’on fait a encore un peu d’importance pour certaines personnes et que ça vaut le coup pour elles. » Sloane le lui avait rappelé : ça comptait, ça compte. Pour les petites filles et pour les jeunes femmes et pour les boursièr.es et toustes les autres. Ça doit compter. « Je suis en colère, honnêtement. Contre Eux et beaucoup de choses, et… » Elle penche légèrement la tête, se mord un peu la lèvre. « Je pensais que tu le serais aussi. Tu ne l'es pas ? » Elle pensait qu’il serait en colère contre elle, contre Eux, contre le monde entier. Peut-être parce que c’est ce qu’il avait fait semblant d’être pendant si longtemps. Ça l’effraie plus qu’elle ne le voudrait qu’il ne le soit pas. A quel point les ont-ils brisés ?

ft. @Liam Regan