Here comes Bob the Builder (Dale)

HERE
COMES
BOB THE
BUILDER /

Drums keep pounding a rhythm to the brain. We still need a song to sing.

(Britney Spears) (icons. inkmarrows)

Il y a des conditions de travail plus agréables que d’autres. Il y a aussi des conditions de travail plus horribles que d’autres. Il y a un entre-deux. Ce mélange du meilleur et du pire qui les rendent acceptables. Comme une balance qu’il faut trouver. Et puis, il y a celles qu’on s’impose avec plaisir. À la manière de Dani. Le cul posé à même le sol, au milieu de la poussière. Les jambes pliées, servant de support à un carnet ouvert. Pages couvertes de bouts de phrases, toutes raturées. Un extrait de ses recherches d’un slogan pour l’association. Persuadée que c’est ce qui manque à l’image de leur structure, qu’il ferait beau sur leur futur site internet, qu’il pourrait être étalé sur un écriteau qu’elles apposeraient à côté de l’entrée. Elle rêve, Dani. Mais les rêveries, c’est gratuit, c’est inoffensif. Ça donne de l’espoir, ça crée des ambitions, ça fait croire que tout est possible. Ça occupe le temps, aussi. Suffisamment, en tout cas, quand Dani débarque en avance.

Pas d’ombrage à arriver plus tôt que prévu. Au contraire. Dani en prend parti. A mis la musique à fond sur une enceinte. A ouvert un paquet de bonbons beaucoup trop sucrés, beaucoup trop acidulés pour le bien de son dentiste. S’est installée dans le couloir au rez-de-chaussée afin de ne pas rater l’arrivée de Dale. Comme s’il était difficile de la trouver dans le bâtiment. L’immeuble n’a rien d’un château. Au contraire. Il a plutôt des allures de maison qui, sûrement à une époque, était un endroit chaleureux et familial. Aujourd’hui, ce n’est plus qu’une ruine qu’elles comptent bien finir d’achever. Tout détruire à l’intérieur pour mieux tout reconstruire, mieux structurer les espaces, créer des appartements qui auront du charme. Voilà l’ambition. La réalisation est plus compliquée. Rapport au fait que ni Rapha ni Dani n’ont de compétences dans le domaine. Elles ont commencé le travail, ont évité la destruction de murs porteurs grâce à des gens bien renseignés. Sans cela, elles auraient sûrement fini par se prendre un bout de la bâtisse sur le coin de la gueule. Et vu comment elles sont mignonnes, ça aurait été dommage, vous en conviendrez.

Il existe une autre raison à mettre la musique à fond, à s’installer dans le couloir. La peur de ne pas voir une menace arriver, que des intrus pensent le bâtiment vide. Alors, en méthode de dissuasion : la musique à en perforer les tympans. Le choix douteux des chansons aussi. La faute à son travail. Dani a trop l’habitude d’écouter des artistes des années 90’s, si bien que c’est sur fond de Britney Spears qu’elle tente de se concentrer. Personne n'osera franchir le pas de la porte pendant que Britney chante ses histoires d'amour toxiques, non ? En tout cas, pas très étonnant que toutes ses idées soient merdiques. Dani n’a pas un neurone disponible pour se concentrer. Pas de neurone non plus pour lui annoncer que la porte du hall vient de s’ouvrir. Sûrement que ça lui aurait évité de sursauter et de raturer le dessin qu’elle commençait à gribouiller. “Dale ! Bordel !” Obligée d’étirer son cou pour croiser son regard. Qu’il est grand, le bougre. Trop grand, même. Quelle idée de pousser autant ? “Refais plus jamais ça !” qu’elle ordonne, la pointe du stylo dirigée en une menace vers lui. Elle se remet sur ses jambes, un peu gauchement. C’est qu’elle ne les sent plus, le sang ayant décidé de ne plus circuler correctement dans ses membres apparemment. “Pense à toquer la prochaine fois ! Imagine si je t’attendais avec un pistolet à clou ! J’aurais pu t’envoyer une salve dans la gueule et on aurait fait comment, hein ?!” N’empêche que ça aurait été un peu drôle. Dale aurait eu la tête d’un gars qui fait une séance d’acupuncture. Une séance un tout petit peu mortelle. Et après, il aurait fallu expliquer à Rapha qu’iels n'avaient pas pu avancer sur le cassage des salles de bains parce que leur pro s'était pris deux trois vis dans le crâne. C’est sûr, plus jamais elle ne laissera d’outils dangereux à portée de main de Dani, sans surveillance d’un·e adulte.

  @Dale Marr  

Dale porte sa fatigue comme des kilos en trop ; Il peut sentir l’engourdissement dans ses muscles, la tension qui habite chaque membre de son corps. Il pourrait se permettre une journée de repos mais son nouveau mode de vie est trop récent pour qu’il ose croire avoir le temps de respirer. Dale a beaucoup de choses à prouver ; à lui-même, aux autres surtout. Jin a beau avoir accepter de le suivre et aussi, accepter un nouveau poste dans un hôpital de la ville, beaucoup d’attentes reposent encore sur lui. Dale doit lui prouver qu’il a fait le bon choix en le suivant ; en venant vivre ici avec lui. New Blossom habite des fantômes de leur passé ainsi que les rêves de Dale. Mais Dale n’a jamais vraiment cru en ses rêves et s’il se laisse une chance, il sent la chose comme une brûlure qui ne veut pas être apaisée. Il se sent à vif ; toujours à attendre la chute, l’échec, l’erreur. Dale garde la tête haute et tait ses doutes, mais possède des angoisses plus nombreuses que ses grondements. Ceux-là, il ne les prononce pas. Il cherche des solutions sans partager ses craintes à Jin ; ne veut pas le décevoir, ne veut pas le faire douter. De lui, vraiment ; de la personne qu’il est. Dale ne veut pas que son petit-ami remette en doute l’affection qu’il lui porte simplement car Dale est incapable de garder la tête froide et de se comporter comme un homme confiant.
Plonger dans l’Underapple est une source d’angoisse dont il tait la connerie. Dale garde la tête haute, traverse les masses, ne regarde personne dans les yeux. Si le corps tressaute par moment, il se tend encore plus, serre le poing, garde ses outils près de lui. Il ne s’arrête pas, ne ralentit pas.
Quand il atteint l’immeuble où on l’attend, Dale ne se laisse pas prier et y pénètre sans faire preuve de politesse. La musique le trouble une seconde, et la réaction de Dani lui arrache un sursaut plus visible qu’il ne le voudrait. Une sueur froide lui traverse le corps avant qu’il ne puisse réagir ; Dani ne remarque rien.
- ...’solé, qu’il dit, grommèle. Le son de la musique couvre le son de sa voix. Dale dépose son sac contre le sol en soupirant. La pression n’est pas relâchée ; pas vraiment. La musique continue de résonner dans l’immeuble et la voix de Dani s’y mèle, dramatique et accusatrice. Du moins, Dale la trouve accusatrice.
Il finit par croiser ses bras contre son torse ; mal à l’aise et dérangé.
- Parce que tu sais t’en servir, peut-être ? Dis pas n’importe quoi Le ton est détestable et un brin misogyne. Dale secoue la tête et détourne les yeux, cherche l’enceinte des yeux pour fermer la musique qui le garde bien tendue. Quand il y parvient, le silence les accueille et la brute peut enfin soupirer, tout bas. Dos à Dani, il en profite pour ferme les yeux, inspirer un bon coup, avant de se redresser. Sans la musique t’aurais entendu, qu’il ajoute, quand il se tourne vers elle. Il l’accuse à tort peut-être, peut-être que non, qu’importe. Dale est de mauvais poil pour une énième fois, réagit de la mauvaise manière.

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(Britney Spears) (icons. inkmarrows)

La musique tambourine. Faut parler plus fort pour se faire entendre. Pas un problème pour Dani. Elle aime parler, souvent pour ne rien dire. Elle a tendance à parler fort, surtout quand elle est sous le coup d’une émotion forte. Comme là, à deux doigts de se faire dessus tellement elle a eu peur. Alors, forcément, il y a le cerveau qui déraille et s’emporte vers des hypothèses fumeuses d’une mort terrible. À croire qu’elle est quand même un peu traumatisée par certains événements autour d’elle. Les noisettes se font d’un coup plus noires, à la remarque de Dale. C’est peut-être justement parce qu’elle ne sait pas s’en servir qu’elle l’aurait attaqué avec. Mais ça, çaaaa, elle ne compte pas l’avouer. Oh que non. “Bien sûr que je sais l’utiliser !” Égo chatouillé, piqué. Dani est plus droite, plus assurée, plus fière. “Suffit de mettre des clous et d’appuyer sur… la gâchette !” Aussi simple que cela, n’est-ce pas ? Elle aurait pu écrire le mode d’emploi, à ce stade de connaissance. Oui, mais voilà, Dani n’en sait rien et aime juste s’enfoncer dans sa mauvaise foi pour ne pas laisser l’autre gagner. D’autant que Dale a un avantage : la mauvaise humeur. Ça aide quand on veut avoir le dernier mot.

Il se casse éteindre la musique et Dani grommelle déjà intérieurement (c’était son couplet préféré). Est-ce que sa mauvaise humeur serait contagieuse ? Par pitié, faites que non ! Et il recommence ce truc. Vous savez, ce truc-là. Mais siii, son ton chiant, qui agace et donne envie de tourner les talons. Dani se renfrogne, fronce les sourcils. “J’entends très bien, d’abord, j’ai une très bonne ouïe. Avec ou sans musique.” Les bras se croisent sur sa faible silhouette. Qu’est-ce qu’il a mangé (ou pas) ce matin pour être aussi ronchon ? “De toute façon, tu n’as pas toqué ! Ose me dire le contraire.” Pur coup de bluff, boosté par un sursaut de mauvaise foi. Alors qu’en vrai, il a raison. Il aurait pu toquer qu’elle n’aurait rien entendu. Mais hey, elle ne lui fera pas l’honneur de le lui dire. “Bon. Tu veux un bonbon ?” Le paquet est récupéré par terre, tendu en signe de paix à Dale (elle n’aime pas se disputer avec les gens). “Et dis-moi, tu vas bien ? Tu veux un truc à boire ? Tu t’es nourri aujourd’hui ? Tu as mal dormi ? Tu as besoin de quelque chose ?” Et à mesure qu’elle parle, elle se met à scruter davantage Dale. À la recherche de la source de sa mauvaise humeur. Sans l’avouer à haute voix, bien sûr. Elle sait que l’humeur serait encore plus horrible en pointant directement le problème. Mieux vaut enquêter avec discrétion et tact (tout ce qui la définit parfaitement). Faire sauter le carrelage et péter les wc attendront que Dale sourit et soit de nouveau léger, agréable. Joyeux. Si tant est qu’il sache ce que c’est.

  @Dale Marr  

L’irritation est un cercle vicieux. Dale déteste être dans un pareil état et par le fait même, ne fait qu’accentuer sa mauvaise humeur. Il est perdu dans un cycle qui ne sait pas prendre fin ; l’histoire de sa vie, vraiment. L’ouvrier a une conscience floue de ses lacunes ; aucun nom posé sur les problèmes, aucun mot prononcé sur la chose outre lorsqu’il est en présence de Dale, parfois. Des murmures prononcés lorsqu’ils ne sont que ceux ; des paroles que Jin comprend et qu’il ne prononce pas de nouveau. Il essaie de s’ouvrir ; a l’impression de craquer, de se briser encore plus à chaque fois. De ne pas être solide. Il y a du parcours à faire, encore. Dale sait tout ça ; difficile de s’en défaire, de ne pas y penser, de ne pas se détester.
Et les pensées résonnent dans sa tête, aussi.
On ne parle pas comme ça aux femmes.
Ce n’est pas ça, la politesse.
Qu’est-ce que ferait son père s’il l’entendait ? Oh, Dale le sait.
Il préfère ne pas y penser ; le fait quand même.
- Touche y jamais, qu’il prévient, concernant l’outil. De toute manière, il est là pour ça. Dale comprend qu’il doit lui apprendre à se servir des outils et pourtant, une part de lui juge que Dani ne devrait même pas s’en servir. Il y a une différence avec Rapha ; peut-être parce qu’elle est plus solide. Un jugement con qui est enfoncé trop profond de sa tête ; ça pourrait lui sortir par le cul tant que c’est de la merde.
Le regard se lève au ciel quand Dani continue de se plaindre. Dale soupire et secoue la tête, ne prend même pas la peine de répondre à ses questions. À quoi bon brasser du vent ? C’est inutile, complètement. Elle n’aime pas son anxiété, aussi.
- Quoi ?, qu’il dit, les sourcils se fronçant. Il n’est pas certain d’avoir entendu. Pourtant, le regard baisse sur le sac et Dale voit bien ce qu’il contient. Il reste paumé quelques secondes avant de répondre. Eh … non merci Un brin maladroit ; Dale ne mange pas de bonbons. C’est chimique, trop sucré. Il n’a pas grandi en les mangeant. Longtemps, il a envié les autres gamins. Pourtant, quand il en a mangé pour la première fois, il a détesté. Une déception.
Les questions tombent comme des balles de mitraillette et Dale ne sait pas les éviter. Il les prend comme des claques en pleine gueule, une nouvelle interrogation à chaque fois. Faut dire que c’est l’effet général de Dani. Autant avec elle qu’avec Rapha, il se sent paumé. Les raisons sont différentes, mais Dale n’y échappe pas.
- Dani - Dani. Tu peux ralentir une seconde oui ? Et après on s’étonne qu’elle mette les pieds dans le plat trop souvent. Dani ne sait pas s’arrêter.
L’homme secoue la tête encore, la regarde du coin de l’oeil - la juge, vraiment - avant de se pencher vers son énorme sac. Outils de toute sorte à l’intérieur, mais autre chose aussi. Il ouvre le sac pour en sortir des bouteilles de jus protéinés ramenées de chez lui, ainsi que des wraps au poulet. Il fallait faire le repas pour Jin, pour le travail. Dale s’en est préparé aussi et, au passage, a pensé à Dani. Pour bien faire les choses.
- J’ai déjà ça, tiens Il lui tend la nourriture. Une offrande sans générosité, juste pour s’en débarrasser. Dale tient les deux jus d’une main. Prends la couleur que tu veux, j’m’en fous Il boit les deux de toute manière ; se garde d’avoir une préférence. Il aime bien celui à la framboise, en vérité. Mais ça, Dale ne le dit pas. Jin sait, pourtant. Tu devrais bouffer des légumes plutôt que des bonbons., qu’il critique. A-t-il un sac transparent rempli de légumes coupés ? Oui, certainement.

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(Britney Spears) (icons. inkmarrows)

D’un coup, Dale a des allures de parent désapprobateur. Au point de lui interdire l’usage du pistolet à clou. Chose complètement injuste. Suffirait de lui apprendre à bien l’utiliser, plutôt que de l’en empêcher. Imaginez qu’elle doive clouer des trucs, un jour où Dale n’est pas là ? Elle ne compte pas attendre après lui pour cela, d’autant plus s’il y a une urgence vitale. Parce qu’il y a sûrement des urgences vitales de ce type dans le monde, d’abord. “Ouais ouais, si tu veux.” Ça a des sonorités de “dis ce que tu veux, rien à foutre”, mais en plus poli. Toujours mieux que de partir dans un grand débat interminable. De toute façon, il y a autre chose. Autre chose de plus inquiétant. De plus intéressant. Dale. Dale et son absence de sourire. Dale et son besoin de silence. Dale et sa mauvaise humeur. En fait, surtout sa mauvaise humeur. Pas de panique. Dani Duarte est là. Un sachet de bonbons dans la main. La générosité au bord des lèvres. Mais non, la bonne humeur ne viendra pas de là, les bonbons sont refoulés. “Ah bon… dommage.” Elle n’insistera pas. Égoïste quand il s’agit de nourriture et autres cochonneries à ingurgiter. Et puis, doublement dommage. Avec un bonbon, la suite aurait sûrement été plus agréable à vivre pour Dale.

Dani n’est pas un être humain stoppable. Non, elle est digne d’un train à pleine vitesse qui ne s’arrêtera que lorsque sa conductrice l’aura décidé. Peu importe si son passager réclame de ralentir. Son monologue se termine enfin. Tout cela pour… qu’il la juge, fouille dans son sac et sorte des bouteilles et des wraps ? “Ah ! Donc tu avais faim… Intéressant, intéressant.” qu’elle dit. Déjà certaine que sa mauvaise humeur vient de là. Elle compatit. Elle aussi, elle est désagréable quand elle a faim. Le wrap est pris. Le choix est facile, là. Par contre, le suivant l’est beaucoup moins : choisir entre deux boissons. “Je ne sais paaas…” Elle prend les deux. Observe les bouteilles. Les tourne. Décrypte la liste des ingrédients. Hésite encore un peu. Jusqu’à soupirer et abandonner la partie par un choix au hasard. “Je prends celui à la banane.” Oui, elle a une vie difficile. Non, ne la plaignez pas. Elle refuse votre pitié. "" Elle rit. Un éclat brut qui résonne dans le couloir vide. “Tu t’entendrais bien avec mon copain.” Archie lui dit la même chose. Lui concocte des plats vegan. La détourne de la malbouffe pour des repas sains. Il s’en sort bien. Elle n’a jamais aussi bien mangé depuis qu’il est dans sa vie. “Mais sache que je mange des légumes tout le temps. Il y en a toujours sur mes pizzas. Des champignons, des brocolis, des artichauts, des courgettes…” Dani se lance dans une énumération de légumes, avant de se rappeler que Dale s’en fout sûrement. Oui, c’est sûr qu’il s’en fiche. Autant que si elle lui disait avoir baillé.

“Merci pour tout ça.” C’est sincère. Malgré le bout de poulet qui semble confortablement enveloppé dans sa galette. Limite s’il ne lui fait pas coucou. Archie ferait un malaise de la savoir avec un wrap à la viande entre les mains. Encore une information qui devra rester secrète. Comme la fois où elle a mangé une pizza quatre fromages au lieu de la salade qu’il lui avait préparée. Le wrap est déballé, avec pour mission de ne jamais croquer dans le poulet. Mission compliquée qui la rend sûrement étrange à regarder. C’est qu’elle tourne le wrap dans tous les sens pour éviter l’irréparable. “J’aime bien commencer par le tour, avant de manger la garniture.” Le mensonge est proféré. Et le visage, lui, se trahit. La culpabilité explose sur ses traits, sans même en avoir conscience. “Mais je crois que je n’ai plus faim… je vais garder le reste pour plus tard !” Parce que faut bien l'avouer, le poulet a juste envie de sauter d'entre ses doigts et de s'enfuir sur les pattes qu'il n'a plus. “En tout cas, ce bon wrap met de bonne humeur !” qu’elle lance, les mains qui claquent sur ses cuisses, le soupire de contentement qui s'expulse et cerise sur le gâteau : un regard qui coule en direction de Dale. Il est de bonne humeur maintenant, hein ?

  @Dale Marr  

Les lèvres se tordent un peu, à peine, quand Dani choisit la banane plutôt que celui à la fraise. Il est content d’avoir la saveur qu’il préfère bien que, évidemment, l’homme ne verbalise pas la chose. Il est secret sur ce qui le rend heureux ; son bonheur a toujours été un activant pour la colère de son père. Par défaut, Dale étouffe ce qui le fait sourire, ce qui le rend heureux, et partage plutôt ce qu’il méprise. Une chose qui l’épuise lui-même sans qu’il se rende compte et qu’il essaie de combattre. Un tel combat est difficile avec toutes les années à agir de la sorte ; Dale sait qu’il n’est pas parfait, ne cherche pas non plus à l’être. Il essaie d’être moins pire, déjà ; c’est un bon départ, il suppose. Il ne sait pas s’il pourra faire mieux que ça. Dale n’a pas beaucoup d’espoir pour la personne qu’il est. Il ne s’aime pas, la plupart du temps. Il se déteste plus souvent qu’autrement. Mais ce genre de choses là, il ne le prononce pas. Il n’y a que les faibles qui se plaignent de leurs états d’âme.
- J’suis pas ta mère. Pas besoin d’me lister tes légumes d’la semaine, qu’il gronde entre les lèvres. Malgré tout, Dale est plus ou moins rassuré que Dani sache au moins reconnaître et nommer les légumes. Il y a des gens sur cette terre qui sont incapables de faire une telle chose. Taylor confondait les concombres et les courgettes trop souvent à son goût.
Les yeux se plissent à l’observer manger.
- Tu fous quoi ? Question à laquelle Dani lui offre une réponse aussi perchée que sa manière de manger. Hmm…., qu’il fait, dérangé. Dale prend une bouchée de son propre wrap et continuer de la zieuter du coin de l’oeil, bien dérangé par sa manière de faire. Il l’est encore plus quand elle lui annonce ne plus avoir faim. Elle n’a pas assez mangé, à ses yeux. Surtout vu les efforts qu’ils vont faire, bientôt. Le regard fixe, il l’observe s’exclamer être de bonne humeur ou une merde du genre. Dani l’épuise parce qu’elle rayonne trop. Dale possède du mal avec les gens comme ça ; il ne sait pas comment réagir. Ils sont trop vifs, trop actifs, trop heureux. Dale se sent décalé en leur présence.
Dani n’échappe pas à la règle.
- Donne moi quelques minutes, qu’il dit. Dale prend son temps pour manger ; c’est important de bien mastiquer, surtout la bouche fermée. Il s’est pris trop de coups derrière la tête pour ne pas le faire convenablement. Après je te montre D’un geste vague, il désigne les outils plus loin. Certes Dale ne veut pas que Dani s’en serve maintenant, mais c’est parce qu’elle ne connaît pas le fonctionnement. Il veut bien lui apprendre ; après tout, il a été engagé pour ça. Mais une chose à la fois. Dani semble toujours courir et il sait qu’elle pourrait se faire mal très facilement en étant distraite. Elle lui rappelle un peu Jin qui essaie de tout faire en même temps, sauf que ce n’est pas pour les mêmes raisons. T’veux faire quoi aujourd’hui ?, qu’il demande, continuant de manger, faisant la conversation maladroitement par … il ne sait pas, politesse ? Dale apprend encore.

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Dale ne s’étouffera jamais dans sa joie. Toujours bourru. Toujours mécontent. Il a le sourire rare, le sourire qui se fait désirer. Le jour où Dani le verra, elle le sait, ce sera la fin du monde. Quelque part, elle n’a pas hâte. Et pourtant, elle sait que son visage est capable de créer le plus beau sourire du monde. Si seulement il s’en donnait les moyens. Tant pis. Ce n’est pas ce qui ternira son humeur à elle. En fait, ça l’exacerbe. Comme un besoin d’équilibrer les énergies pour que l’une n’écrase pas l’autre. Alors, elle déploie davantage sa joie, quitte à en faire trop sans s’en apercevoir. Même quand il gronde ou qu’il juge. Peu importe. Ses remarques lui passent au-dessus. Il n’y a que ses silences qui parviennent à la déstabiliser. Elle ne sait pas faire avec le silence. Ça la dérange, la démange, l’angoisse. Le silence, c’est du vide dans l’air, c’est l’absence de vie. Le silence, c’est la fin. Mais c’est ce qu’il impose quand il demande quelques minutes. C’est ce qu’elle subit quand il veut juste manger en paix. “Oui, bien sûr, prends ton temps.” qu’elle balance, nonchalante. Totalement détendue à l’idée de ne rien faire pendant plusieurs minutes. Sans un mot. Sans musique. Ah. Ah. Ah.

Elle se mordille la lèvre inférieure pendant les quinze premières secondes. Les trente suivantes sont passées à pianoter sur ses cuisses. La minute d’après est occupée à observer les défauts du mur d’en face. C’est bientôt trop longtemps d’inaction pour rester statique. Statique et silencieuse. Alors, elle bouge. Ses pieds, ses jambes, son corps entier s’active à ranger, nettoyer ce qui peut l’être. Le tout en silence, dans l’idée de respecter le moment de calme de Dale. Ce mec ne parle pas. S’il le pouvait, il économiserait tous ses mots pour le jour où il aurait vraiment besoin de parler, Dani en est certaine. Ce jour-là, il aurait le grain rauque de celleux qui n’ont plus fait entendre leur voix depuis longtemps. Et surtout, il aurait quelque chose d’important, de très important à dire. Sûrement un “je t’aime” parce que Dale est un gars romantique dans le fond. Elle pourrait le parier. Faut juste biiiiien creuser pour le découvrir.

“T’veux faire quoi aujourd’hui ?” Dani lève la tête du seau de gravats qu’elle tente de porter tirer dans le couloir. Il parle ! Il a parlé ! À elle ! “Oh, ça y est, t’as fini ?!” Ça lui a paru une éternité. Ça ne devait faire que cinq minutes, pourtant. Elle se redresse, trop heureuse d’enfin pouvoir lancer les hostilités de leur journée. Le seau est laissé en plan, au milieu du couloir. Personne ne le leur volera, de toute façon. “Alooooooors, laisse-moi prendre ma to do list !” To do list étant griffonnée sur son bloc-notes. Faut juste trouver la bonne page. Les feuilles sont tournées, retournées, jusqu’à trouver la bonne. Un “tadaaaam” manque de lui échapper. La seule raison qui l’empêche de le prononcer, c’est la peur que Dale fuit. Elle a besoin de lui. Elle a promis à Rapha que les travaux avanceraient, donc ils doivent avancer. “On doit finir d’arracher la tapisserie des apparts du troisième, enlever le carrelage des salles de bains du deuxième, m’apprendre à utiliser un pistolet à clous, déblayer les gravats du rez-de-chaussée, prendre les mesures des fenêtres, retirer la moquette hideuse de tous les couloirs et euh… je crois que c’est tout.” Le nez est levé de sa liste. “On n’est pas obligé de tout faire aujourd’hui, hein.” Bien entendu. Non pas qu’elle les imaginait réussir à tout faire, mais quand même. Au moins avoir la satisfaction de rayer deux ou trois points. “Tu veux commencer par quoi ?” Elle est polie, Dani. Cherche à contenter Dale en le laissant choisir ce qui lui fait le plus envie dans cette liste. Parce qu’elle est une cliente sympa, à l’écoute des préférences de son prestataire. Elle oublie qu’à un moment, faudra bien faire les tâches qu’il aime le moins. Parce que c'est ainsi qu'est la vie. On ne fait pas toujours ce qu'on aime.

  @Dale Marr  

Dale essaie de bien faire ; du moins, il apprend à le faire. C’est quelque chose qui demande du temps et surtout, de la patience. Dale n’est pas certain d’en posséder, la plupart du temps. Il est persuadé que c’est quelque chose qui a été extirpé hors de ses veines au fil des années. Qu’on l’a empoisonné ou qu’il est né ainsi, simplement. Il n’est pas gentil, il n’est pas patient et surtout, il ne sait pas écouter les gens. Il tâche de faire son possible pourtant ; de ne pas déranger, de ne pas causer de problèmes, de ne pas éveiller les colères. Dale déteste l’idée d’irriter une autre personne ; il y a toujours une voix qui murmure dans son esprit qu’il ne mérite rien, qu’il est bon à dire, que sa simple existence est un problème.
Qu’avec une voix qui se lève, un poing se lèvera aussi.
Dale déteste cette peur. Il la méprise aussi profondément qu’elle est réelle. Pourtant, il n’en parle simplement pas. Encore pire ; l’homme n’y pense pas. Il ne veut pas y penser ; y accorder de l’importance.
Un soupir s’arrache de sa gorge et Dale ferme les yeux, une seconde.
- Oui. Oui, il a fini. Il ne pensait pas avoir besoin de le préciser et Dale ne le fait pas. Mais une question est posée et par défaut, il doit répondre. Ne pas répondre est un affront.
Quand il ouvre les yeux, Dani s’agite déjà dans tous les sens et parle d’une liste quelconque. Au moins, elle est organisée. Il peut au moins lui accorder cela ; mais la lueur d’espoir est remplacée par un découragement certain en la voyant fouiner à vive allure dans un carnet malmené. Dale est persuadé de voir un dessin - ou plusieurs - au travers des pages. Il se garde de lever les yeux au ciel.
- Tu devrais m’envoyer une copie A-t-il peur qu’elle perde la feuille ou même le carnet en question ? Oui, assurément. Dale ne partage pas ses pensées. Lui-même écrit ses notes un peu n'importe où. Il trouve souvent de pauvres papiers passés à la machine sur lesquels il avait pris des notes. Heureusement, Jin a tendance à vider ses poches quand il oublie de le faire.
Au moins, la liste est complète. Il lui accorde au moins ça.
- On avait déjà fini le carrelage du troisième ? Entre ses projets au motel et ceux ici, il se perd. Dale se gratte la barbe et hume, hoche de la tête. Si c’est l’cas, on peut faire la tapisserie au troisième. Vaut mieux faire la déconstruction sur les murs d’abord et garder la moquette pour la fin. J’sais pas encore à quoi ressemble le parquet en dessous, mais faudrait pas l’abimer d’toute manière. Une pause, le temps qu’il réfléchisse. On f’ra le carrelage après. Ou p’être la moquette. Et si t’as un coup d’mou bah - - j’sais pas, le pistolet ou les mesures, ça s’fait bien La liste est longue et Dale se doute bien que Dani est motivée - ça fait presque peur dans un sens - mais il veut aussi bien faire les choses. Faut nettoyer les merdes au fur et à mesure d’toute manière Quand on détruit, on salit. C’est comme ça. Dale le sait bien ; il s’sent sale souvent. Allez Un signe de la main avant s’il s’empare de son sac, sans oublier les breuvages amenés, et qu’il entreprend de monter les escaliers. T’as acheté les trucs que j’t’ai envoyer l’autre jour pour la tapisserie ? Dale a son vaporisateur, mais il espère que Dani n’a pas oublié le vinaigre et bicarbonate. Mais par principe, il demande encore au premier niveau de l’escalier, pour ne pas monter pour rien.