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« Il est mignon ton nouveau garde du corps, non ? » En fait, il avait fallu qu’on me fasse la remarque pour que je me pense activement sur la question. Avant ça, il n’était rien d’autre qu’une ombre, comme les autres. C’était à peine si on s’était adressé un mot, d’ailleurs. Je crois lui avoir proposé un café en entrant dans un Starbucks lors de son premier jour de taf, et comme il m’avait à peine répondu, je lui avais dit de se méfier, que je pouvais faire changer mon contrat pour que son rôle soit de PORTER LE MIEN. Juste pour voir sa réaction. RIEN. À deux doigts de me foutre à poil dans sa bagnole pour voir si ça lui faisait quelque chose ça. Bon sang, pense aux paparazzi. Non, on ne fait pas ça avec son tout nouveau garde du corps « amplement plus compétent que le précédent », avait argué mon père sur ce petit ton paternaliste que lui seul connaissait si bien. Si j’étais encore la naïve petite fille qu’il pensait avoir élevé, je prendrais ça pour une preuve d’amour, une marque d’affection toute particulière d’un homme trop riche pour se rendre compte de ce qui l’entoure. Mais je ne suis plus une petite fille, et encore moins la princesse stupide d’un de leurs Disney idiots. Alors je sais juste que mon père protège ce qui lui appartient, car s’il se montre faible face à ses concurrents et qu’il peut m’arriver quelque chose À MOI, alors tout le monde peut s’en prendre À LUI. Raisonnement qui se tient à peu près. Si on y réfléchit très fort.

Bref, Monsieur H comme mon père l’appelle, n’avait rien de « mignon » avant que je ne décide qu’il ne le devienne. Très certainement par ennui, ou alors pour le mettre en compétition avec mon ancien garde du corps, que j’avais réussi à mettre dans mon lit en trois semaines et douze heures, seulement parce que j’avais passé deux semaines enfermée à cause d’une foutue entorse à la cheville. Monsieur H me semblait être un assez bon défi ; et surtout, il y avait beaucoup d’avantages à mettre dans son pieu le type responsable de sa sécurité. Bon, et puis l’ancien était un bon coup. Ce qui m’avait un peu (beaucoup) désolée en apprenant son renvoi et ce qui m’avait rendue légèrement (beaucoup) hermétique à l’arrivée du nouveau taciturne qui semblait avoir tatoué sur son front « VIE DE MERDE ». Bon, et je peux le comprendre, me protéger n’est pas une mince affaire.

Surtout ce soir. Réception mondaine ++, le genre où je suis obligée de m’afficher au risque de subir quelques ragots. Je crois qu’on fête l’anniversaire de je-sais-plus-qui, une vieille peau qui se met tellement d’anti-rides qu’on voit plus ce qu’il y a dessous, à la recherche de ses années perdues cherchant à ne pas en perdre son mari.

Qui paye pour tout ça, évidemment. Un immense rooftop, si près du toit du monde que j’ai l’impression de pouvoir nager dans les étoiles, et d’ailleurs il y a une immense piscine, à deux doigts de sauter dedans mais c’est « pas encore l’heure » (et j’ai aucune idée de s’il y aura vraiment une heure pour ça, vu l’ambiance de la soirée). On a tenté deux fois de me regarder de haut, mais mon ego l’est plus que le mont Everest alors il faut se lever de bonne heure pour y parvenir. Et pour le moment je me noie dans un Negroni pas si bon que ça. Monsieur H a tenu à venir sur le toit lui aussi – à moins que ce ne soit mon père qui lui a bien dit de ne plus jamais me laisser seule dans une foutue tour après c’est qui s’est produit dans celle d’Icarus –, alors il est là, mine renfrognée, ou plutôt « mine H », parce que je ne crois jamais avoir vu personne faire cette tête-là précisément. Ce n’est ni une moue, ni un dédain, ni de l’ennui… ou alors, peut-être que si. Un mix des droits. Moudédui. OK on est arrivés au point de non retour. Je m’ennuie tellement que je crée des nouveaux mots inspirés par mon stupide garde du corps qui est pas si mignon que ça, hein !

Quand la sécurité de l’évènement vient discuter avec Mr H, j’en profite pour me faufiler vers l’entrée des artistes, aka les cuisines submergées par les serveurs ce soir. J’y échange mon Negroni vide avec une bouteille de champagne qu’un serveur s’apprêtait à servir dans des flûtes – pas sûre qu’il ait eu très envie de s’en séparer mais ce n’est pas comme s’il avait eu le choix, personne ne résiste à mon sourire shine bright like a diamond hihi [ou à mon regard noir] –  et je crois avoir vu un ascenseur de secours plus loin. Mon agent va détester mais j’ai hâte qu’on dise que j’ai quitté les lieux en catimini.

Et peut-être que je vais réveiller un peu Mr Ronflex.

ft. @Gustav Hansen
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Soirée mondaine, un toit suspendu aux étoiles ; où s'entasse un paquet de gros friqués dont il observe les allées et venues depuis ce qui lui semble des heures. Ce qui doit être des heures. Des heures réduites à une poignée de minutes devenue une heure. Ouais, un truc comme ça. Il n'en sait foutrement rien putain. L'ennui lui saccage les synapses. Il observe les visages, suit les mouvances. Cherche les failles. S'imagine mille scénarios possibles. Du plus terrible au plus dingue. Suppose que la soirée ne lui arrachera qu'une envie de bâiller et une nuit de sommeil écourtée.
Il déconnecte. Le moment lui échappe. Il ne comprend pas la moitié des discussions. Les mots se chevauchent aux autres mots, les voix s'entrecroisent et les bruits de semelles et les bruits de tissus et les bruits de verres ; tout carillonne sous les vibrations des rires qui lui pulvérisent les tympans.
Plusieurs fois, il se contraint à demeurer statique. Plusieurs fois, il s'oblige à rester. Rester ici, précisément ici. Dans cette soirée de merde où sa cervelle paraît se liquéfier. Car il a signé le contrat, car il a juré surveiller et protéger la fille de Blackwell. Auprès de ce fils de pute, auprès de son fils de pute. Trop de fils de putes sur sa route et une envie de survivre persistante. Des années à patauger dans sa merde existentielle pour lui forger le caractère. Alors, Gustav reste. Et Gustav la scrute, surtout. Ne passe pas une minute sans que ses yeux ne croisent un morceau de sa figure ou de son corps. La tête penchée, le buste s'écarte. Parfois même trois pas nécessaires pour se désencastrer d'un amas de gens dont il se fout. Ne compte qu'elle. Sa sécurité. Sa putain de sécurité. Pour la sienne. Jeu d'équilibriste. S'il manque à son devoir, on lui fera la peau. Ce point ne fait aucun doute.
Ses molaires se compriment et son émail crisse. Paluches enfoncées dans les poches de son pantalon de costard. La nonchalance lui macule ridules et dégaine. Il est pourtant tendu. Ses muscles raides de l'attente et de la fatigue et de la faim et du manque. Manque de quoi. De tout. Du silence et de l'espace et d'un horizon moins bousillé par les lumières artificielles qui lui défoncent les rétines. Plusieurs fois, des tentatives d'approches se font. Et plusieurs fois, sa mine patibulaire répond aux questions et aux minauderies. Il n'est pas là pour : faire la conversation draguer apprécier l'endroit l'instant les rencontres. Il est là pour : bosser. Alors quand un agent de la sécurité vient pour le dérider, son intérieur termine de s'immoler.
Les neurones crépitent et la langue s'agite et tape contre le palais. Les lèvres restent désespérément closes pour ne pas l'envoyer chier. Il demande : comment ça va ? Il demande : t'es pas d'ici hein ? Il dit : Comtesse sans déconner faut avoir un grain pour s'la taper. Il ajoute : enfin j'imagine qu'c'est son paternel qui t'a engagé. D'entre ses ratiches s'extrait un « oui » pour tout. Sans qu'il daigne développer, sans qu'il trouve de quoi répliquer, sans qu'il souhaite se ruiner la conscience au moindre effort de civilité. Et ce simple « oui » liquide son attention. Sa putain d'attention déviée de sa proie en contrat. Moins de cinq minutes auront suffi à tout envoyer valser. Tout faire foirer.
Comtesse en sale conne s'est barrée. Comtesse en sale conne a disparu du toit et ne voltige pas au milieu des étoiles. Gustav vrille son regard vers l'une des seules voies d'accès et harponne de ses pupilles animales la crinière ébène ; le brun et ses nuances mordorées disparues. Vision javellisée par sa mutation. Une épaule et le brillant de sa tenue finissent de lui crever l'iris.
Il s'esquive sans ajouter quoi que ce soit, remonte la masse mouvante. Le fauve sinue entre les silhouettes jusqu'à rejoindre l'entrée ou sortie – jusqu'à renifler le parfum de Blackwell. En suivre les notes mêlées à celles des autres, mêlées bientôt à celles de la bouffe qui lui tordent le bide. Il crève la dalle et ne s'en rend compte que maintenant. Les fragrances lui montent dans le nase, l'agressent. Il s'en goinfre. Son attention de nouveau valdingue. Jusqu'à ce que les pupilles s'écorchent au lointain. L'entraperçoivent encore. Un serveur bloqué, une bouteille de champagne fauchée et son échappée qu'elle reprend. Un sourire étire ses badigoinces. La traque agite ses instincts. Favorise son intérêt et la sale conne n'a pas l'occasion d'aller plus loin qu'il la retrouve et la coince. Agilité et vitesse qui n'ont rien d'humaines.
Phalanges repliées sur son bras maigre. Gustav se claque à son flanc, lui soulève l'épaule au passage, la presse vers l’ascenseur qu'elle a appelé et qui s'éventre devant eux. Blackwell est poussée dans la cabine métallique. Gustav se place devant les portes qui se referment. Son majeur appuie sur le bouton du rez-de-chaussée. Il ne la regarde pas, ne lui offre que son dos. Il rage, à moitié. Cherche les mots à cracher sans les cracher - jamais. La neutralité en obligation. Ne les trouve pas. Réfléchit. Le temps s'étire. Deux étages descendus déjà.
Recommence et-
Et quoi. Menace avortée.
Gustav s'est perdu au labyrinthe de ses conceptions.
L'évidence qu'il articule.
Pas sans moi.
Un bon début.
Sa voix de gravier lui rappe les cordes vocales. Son accent hache son anglais.
Il a la langue pâteuse. Il a les réflexions flinguées. Le mécanisme de l’ascenseur couplé au souffle de Blackwell inondent son ouïe.
Gustav chavire la face, coule un œil dans sa direction. La scrute. Trop longtemps. Son odeur lui revient comme une houle dans le nez et lui descend dans les bronches. Se matérialise dans son crâne, s'y imprime plus fort. Intellect mis en branle. La sueur sous le parfum. Son haleine, sa peau. L'alcool, la clope, la nourriture encore.
Les effluves saturent ses perceptions.
Je suis pas-
Il n'est pas quoi.
Ton esclave.
Pas de meilleur de mot.
Pas de meilleure approche.
Vouvoiement éradiqué. Le vouvoiement qui dans son dialecte n'est qu'une connerie ; elle ne mérite pas qu'il s'épuise.
Gustav se retourne entièrement. Les étages continuent de s'afficher en haut des portes. Les chiffres dégringolent. Il s'approche de sa proie et son odeur s'intensifie et il redécouvre ses nuances fauves ; les nuances qui ne devraient pas exister. Les nuances animales qui pourtant s'accrochent à sa chair sans qu'il ne s'en explique les raisons. Elle n'a pas de bestiole. Pas à sa connaissance. Nature mutante indiquée lors des échanges avec le père, qu'il ne saisit que partiellement. Mutante mais pas comme lui. Il l'aurait vu et senti. Il l'aurait perçu dès les premiers instants. Dès lors qu'elle bouge ou parle. Ses capacités qu'on ne lui a pas expliquées. Son rôle qu'on lui a vaguement exposé.
Gustav se penche et d'un mouvement brusque lui retire la bouteille des doigts.
Pourquoi, il questionne et met la bouteille hors de sa portée. Tend le bras.  
Il veut. Doit. A besoin de comprendre. Pourquoi. Pourquoi elle essaye de le fuir, pourquoi elle ne veut pas obéir, pourquoi elle cherche à les crever tous les deux avec ses conneries. Un ego surdimensionné ou une stupidité sans limites ; Gustav n'a pas encore choisi.
Pourquoi, il insiste, grogne entre ses dents serrées.
Il l'approche encore. Gueule menaçante, à quasiment la toucher. Gustav cherche le vrai au milieu des mensonges. Cherche les failles à travers les vacillements de sa voix.
Gustav ne lui a jamais autant parlé.

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Nouvelle présence à mes côtés, voilà que Monsieur H se lance au cœur d’une danse dont il ne maîtrise ni les pas, ni la mélodie. Sa paume s’enroule autour de mon bras, fais remonter une salve de frissons le long de mon épaule, mon don sur le point de se révéler. Je retiens les écailles de fleurir sur ma peau de porcelaine, car Monsieur H n’est techniquement pas censé être le Patron de l’Apocalypse, mais celui censé veiller sur moi. « Hey ! m’offusqué-je quand même pour la forme, étonnée de le voir si agacé et si renfrogné et si… » J’sais pas, on dirait que quelqu’un lui vole constamment son jouet préféré, c’est pas possible ! Il est si proche que je peux sentir son parfum scabreux crépiter sous mon crâne, et le monde tangue un peu, sous l’effet de l’alcool. Il me pousse dans l’ascenseur et je prends une gorgée de mon tribu, un peu désabusée. « Tu sais, on se demandait avec mes copines si tu savais te servir de ta langue. » Je me marre toute seule de mon sous-entendu, avant de planter mes omoplates contre la cage qui nous retient pour le moment. Enfermé dans un si petit espace, alors qu’il m’offre son dos comme un enfant boudeur. Bon sang, et moi qui pensais avoir mauvais caractère, je suis tombée sur bien pire que moi. « Recommence et… — Et quoi ? Tu vas me priver de sortie ? reniflé-je, dédaigneuse. — Pas sans moi. — Oh, trop mimi. Promis je ne t’oublierai plus mon ange.» Je lève les yeux au ciel, ne parviens pas à retenir le soupir qui s’échappe de mes lèvres maquillées.  Je pourrais presque trouver ça mignon si le type m’avait pas jeté comme un sac de patates dans ce fichu ascenseur.  

Et voilà qu’il ose enfin me regarder. Peut-être qu’il est au courant de mes pouvoirs, d’un autre côté, il croit que je vais user de mon regard de la méduse pour le méduser, même si je ne semble pas avoir besoin de ça pour lui faire de l’effet, car il a du mal à aligner plus de trois mots à la suite. « Je suis pas… » Yep, trois mots, le compte est bon. « Ton esclave. » J’éclate de rire, reprends une gorgée de mes bulles étoilées. « Bien sûr que si, tu es mon esclave. Tu n’as peut-être pas de collier autour du cou, mais tu es l’esclave du moindre de mes faits et gestes le temps qu’on… Mais putain ! » (Ton langage, Comtesse.) Il m’arrache la bouteille des mains, la mets en hauteur. Comme une gosse, je lève la main à mon tour, cherche à atteindre l’objet de mes désirs, mais une bonne tête doit nous dépasser malgré mes talons et je ne parviens qu’à me ridiculiser. « Rends-moi ça ! » Esclave, esclave, esclave. J’ai envie de le chanter pour le faire enrager, car nous sommes tous esclaves de quelqu’un ou de quelque chose, lui de son contrat, moi de ma famille, de ma célébrité, de mes besoins terribles et dévastateurs, ou plutôt de ces flambées de désir d’obtenir tout ce que je peux. « Pourquoi. — Pourquoi quoi ? Pourquoi le monde ne tourne pas autour de toi ? » Je m’agace, m’échine à vouloir récupérer mon dû, l’impatience flambant dans mes vePourquoi. » Toujours pas une foutu question ni une foutu réponse (vulgaire, à couper au montage), rien que des aboiements. Croit-il que je suis sa chienne ? Clairement pas. Je suis tout au plus un serpent, qui veut se faufiler sur son échine pour le mordre entre les vertèbres. Nous nous effleurons presque, dans un ballet qui embrase la grève de mes sens, parce qu’il veut jouer, parce qu’il me cherche, parce que le chien de garde ne peut pas me mordre… enfin… en théorie. « On mourrait d’ennui là-bas, sérieux. J’ai juste voulu pimenter un peu la soirée. T’aurais préféré continuer à taper la causette avec le mec de la sécu… ? Oh ! Je vois. Il te plaisait, c’est ça ? » Sourire goguenard, et je laisse tomber ma main, ne cherchant plus à atteindre ma bouteille de champagne.

Quelque chose de bien plus intéressant est en train de se jouer là.

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Elle s’énerve, sautille. Elle se débat contre son autorité ; Gustav jubile. Dans le lointain de son thorax qui le crame, la satisfaction s’introduit. Il ne bouge pas et il s’en fout. La contraint. Sans toucher, jamais. Gamine insupportable cherchant à récupérer son jouet. La boisson qui ne filtrera plus entre ses lèvres tant qu’il l’aura décidé. Sage putain tellement sage. Alors qu’il ne rêve que de l’écraser dans un des miroirs de l’ascenseur. Miroir dans lequel, vaguement, son regard s’attarde. Sa propre face qu’il observe, sans plus l’écouter. Reflet inconnu, continuellement. Gustav se mordille la lippe comme pour se prouver qu’il est.
Blackwell lui gerbe des conneries, toujours. Le prend pour un abruti. Le monde ne tourne pas comme il le devrait, ouais – elle défonce les projets et perspectives et l’assurance de leur survie respective. Il voudrait lui dire « ta gueule », il voudrait lui enfoncer les doigts dans les joues et lui plaquer la paume sur la bouche. Qu’elle se taise, qu’elle arrête d’agresser ses oreilles pour lui répliquer du bruit à défaut de réponses.
Sa bouche qu’il regarde, brusquement. Sa bouche humide d’alcool et brillante de son maquillage à la con. La couleur, Gustav essaye de l’imaginer. La couleur, Gustav ne peut que la supposer. Un gris foncé étalé sur sa peau gris perle. Brun, ou pourpre, ou quoi. Il ne sait même plus à quoi ça correspond. Des mots liés à des définitions. Des lettres et des phrases stériles.
— On mourrait d’ennui là-bas, sérieux. J’ai juste voulu pimenter un peu la soirée. T’aurais préféré continuer à taper la causette avec le mec de la sécu… ?
Et elle hausse les sourcils et il hausse les sourcils et avant qu’il n’ait pu lui répliquer quoi que ce soit, les conneries s’ajoutent au mont de conneries de la soirée à peine entamée.
— Oh ! Je vois. Il te plaisait, c’est ça ? 
Sourire qu’elle lui expose. Un sourire qui le coince et l'éventre sur place. Un sourire de petite conne satisfaite qui saurait filer des envies de saccage. Le sourire illumine son visage irréel de poupée et lui dézingue les pensées.
Son bras retombé, l’abandon de la lutte. La bouteille qu’elle ne veut plus.
Ouais, mâchonne-t-il entre ses crocs.
Pour le mec de la sécurité ou parce qu’ils crevaient d’ennui. Du pareil au même. Qu’importe la vérité quand il se noie depuis une éternité aux mensonges.
Pimenter ?
Verbe qui lui échappe. Sens qu’il ne parvient à assimiler, à conjuguer dans l’instant. Barrière de la langue qu’il repousse. Gustav continue de la scruter. La dévisage sans scrupules. Brûlure de son sourire. Ses pupilles ne décrochent pas.
Sa trogne hirsute penche sur la droite.
Jalouse ?
Ses incisives se plantent dans sa lèvre inférieure, Gustav retient son sourire. La neutralité qu’elle lui bousille. Impossible de se planquer dessous.
Jamais pendant le travail.
Anéantissant la moindre idylle entre mecs. Le buste autant que la trogne se détournent d’elle. L’attention portée sur les chiffres de l’ascenseur. Les étages défilent. Le rez-de-chaussée bientôt atteint. Gustav revient à Blackwell. Son battoir se coule jusqu’à son poignet. Phalanges dépliant sa main qu’il tire et dans laquelle il replace la bouteille de champagne.
Malenia Blackwell, articule-t-il.
Dégustation de la mélodie à ses tympans, des vibrations provoquées dans sa gorge. Des mouvements de sa langue contre dents et palais. Il ne l’avait pas encore prononcé oralement. Il en savoure les nuances en continuant de flairer ses odeurs.
Où tu veux aller ? Interrogation sitôt contrebalancée par l’ajout : avec moi.
Il espère nulle part. Il espère que ça l’achève d’avance.
Il espère qu’elle vide la bouteille et roupille à l’arrière de la caisse. Qu’il n’ait qu’à transporter son poids fantôme. Qu’elle arrête de miauler ses fantasmes et qu’il arrête de loucher sur son sourire.
Il espère pouvoir écouter son souffle et goûter ses effluves en paix.
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Il laisse tomber son bras, et je zyeute la bouteille de champagne, les bulles d’étoiles qui sont si proches de moi, mais si loin à la fois. « Ouais. » Encore un mot, qui ne veut rien dire, qui se glisse entre toutes mes questions et mes élucubrations. Bon sang, est-ce qu’il lui manque des neurones ? Est-ce qu’on m’a collé le dernier idiot du village (peut-être un peu sexy en fin de compte, surtout si proche, là, quand son parfum de… de quoi au juste ? je ne saurais dire, un genre de musc, de mâle et de fourrure mélangées, hm) ? Et si oui, pourquoi ? Mon père doit le payer une blinde, ce type. Tout ça pour qu’il me casse mon fun. SU-PER. Mais je sais maintenant que Monsieur H (ou plutôt Monsieur TT, ténébreux et taciturne, tourmenté et tourmenteur, têtu et tordu [oui je peux continuer encore longtemps comme ça]) est plutôt intéressé par la gente masculine.

Ou pas. Il a peut-être simplement dit ça pour que je la ferme.

Oh ! Encore un mot, pour l’amour du Ciel, je vais finir par vouloir les recueillir comme un assoiffé cherche des gouttes de pluie dans le désert. « Pimenter. » C’est l’accent du nord, qui fausse tout. « S’amuser, quoi. » C’est borderline si je l’apprécie plus en sachant qu’il aime peut-être les hommes ? Ou alors c’est peut-être simplement parce que pour la première fois depuis qu’il est sur mes talons, il prend la peine d’interagir avec moi. Et bon sang, j’aime quand on me regarde. Pas sûre que ce soit du désir – même clairement pas – mais ses yeux sur mes lèvres, sur ma peau, comme un fauve se questionnant sur les conditions d’une prochaine attaque, me donnent des suées.

« Jalouse ? » Je pointe le doigt vers lui, comme s’il avait justement mis le doigt sur ce qui clochait dans la situation. « Oui ! C’est moi que tu dois regarder, pas le débile de la sécu. Il était même pas mignon, tu pourrais trouver mieux. » Je hausse les épaules, boudeuse, m’adosse au mur de l’ascenseur, qui continue de descendre vers notre liberté prochaine.

« Jamais pendant le travail. » J’éclate de rire à cette phrase. Quatre mots. Bordel, je vais peut-être tirer quelque chose du scandinave qui tire la gueule. « T’as de l’humour, en fait. J’aime bien. » Il se détourne de moi et je scrute un peu plus ses fringues. Il faudra peut-être que je lui envoie mon styliste histoire qu’on ait des matching outfits. Ça pourrait être grave classe.

Je suis en pleine contemplation quand il me rend ma bouteille de champagne. « Malenia Blackwell. » Mon nom dans sa bouche, roulant sous les accents nordiques. Me like it. « Monsieur H, répliqué-je seulement. » J’aurais clairement pu l’appeler Gugus en hommage à mes dessins animés préférés durant mon enfance, mais je crois qu’il aurait fait autre chose de la bouteille de champagne. « Où veux-tu aller ? Avec moi. — Toujours avec toi, honey. » Mais y a bien un jour où je te filerai entre les doigts, crois-moi. Enfin, il suffirait que je demande à Sphinx de venir. Il pourrait m’emporter loin avec ses ailes, si loin que même Gustav ne pourrait pas me retrouver. Je porte la bouteille à mes lèvres tandis que la porte de l’ascenseur s’ouvre dans un ding sonore. « Et si on allait faire la fête ? Tu sais danser, le bodyguard ? Be careful, j’ai beaucoup de mal avec le mot « non ». »

ft. @Gustav Hansen
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Ce qu’il fout, Gustav n’en sait rien.
Ce qu’il fout : essayer de rester sur le chemin.
Sacrément tordu. Mais chemin quand même. Et cette petite conne joue avec ses nerfs, remue ses instincts, inonde son cortex de saloperies. Qu’il doit enterrer au lointain de ses mensonges et songes. Ses perceptions dès lors qu’il la renifle deviennent quasiment solides. Il pourrait les malaxer. Les explorer. Il pourrait également les décorer de davantage de saloperies.
Le taf. Rien d’autre.
— Toujours avec toi, honey.
Ouais, toujours avec lui. Et son putain de sourire qu’elle continue d’afficher. Ce sourire qui s’imprime sur sa rétine, colle à sa cervelle. Un sourire qui lui crame un bout, à l’intérieur. Acide sulfurique. Ses pulsions muselées avec son silence revenu. Prédateur contre prédateur. Sa langue glisse sur le tranchant de ses incisives, à l’abri de sa bouche close. Ses battoirs, Gustav les renfonce dans son futal pour ne plus rien toucher ni même effleurer. Sur la pulpe de ses doigts, la sensation persistante de la peau de Malenia
— Et si on allait faire la fête ?
Les sourcils se froncent. Sa mine de merde sous laquelle il se planque.
Nouvelle stratégie qu’elle lui propose ; afin de s’éclipser. Plus de monde, plus de bordel. Trop de bruits et trop d’odeurs. Il la perdra, en trois battements de paupières ou de cœur.
Dans leur piège d’acier, l’avertissement sonore claque à son ouïe. Le rez-de-chaussée est atteint.
— Tu sais danser, le bodyguard ? Be careful, j’ai beaucoup de mal avec le mot « non ».
La négative qu’elle lui arrache. Le non qu’il retient entre ses crocs.
La double porte de l’ascenseur s’ouvre dans un chuintement. Gustav ne répond rien, se détourne de Blackwell sans réellement la quitter – jamais.
Le hall gigantesque qu’il redécouvre. Des invités et du personnel se mélangent sous une lumière crue qui lui brûle les pupilles. Gustav se coule derrière Blackwell, suit sa trace comme une ombre. Il s’attendait à devoir patienter comme un connard à chaque richard sur le passage, il s’attendait à ce qu’elle minaude et crache de nouvelles conneries à la moindre occasion. Pourtant elle évite autant de gens qu’il lui est possible d’en éviter. Elle zigzague entre les corps, cherche la sortie.
Silhouettes l’approchant elle, qu’il observe lui. Le contact qu’il n’interdit pas, qu’il est prêt à rompre par la force au besoin. Qu’elle demande réclame ordonne. Il serre les mâchoires. Une légère grimace traverse sa gueule. Pas moyen qu’il tombe si bas.
Quand il comprend qu’elle se dirige vers l’entrée principale, ses phalanges se referment une nouvelle fois sur son bras. Biceps capturé. Gustav ploie. Sa joue coulée à sa joue tandis qu’un type les arrête encore et balance des banalités.
Son oreille pour recueillir sa voix.
Par derrière.
La horde qu’il imagine dehors, extatique à l’idée de rencontrer une de leurs idoles. Autant de flashs crevant l’obscurité et l’aveuglant. Cité pourrie jusqu’à la moelle. Son nase se redresse, sa trogne chavire. Son regard croise celui du mec. Un bleu surnaturel. Gustav repart en arrière, relâche le bras de Malenia. Retrouve sa place. Ses orbes dégringolent sur sa nuque, sur son dos, sur la courbe de son épaule puis dérivent sur le hall où l’agitation persiste. Une fourmilière qu’il fantasme ravager pendant que Blackwell gère le blond dont le visage brusquement lui revient. Une pub pour un dentifrice au charbon actif.
On y va, rauque-t-il.
Son impatience comme une démangeaison. Gustav trop habitué à faire obéir ses soldats de chair qu’il fait trop souvent devenir de plomb. Régression qui lui secoue la colère et lui tabasse la raison.
Maintenant.
Ordre craché au milieu de la conversation dont il n’a rien écouté. Insipidité qui lui lamine d’avance l’intellect. L’attention reportée sur le lointain, en direction de la sortie de secours qui les gerbera dans un couloir lugubre, présage-t-il. L’habitude d’emprunter les entrailles des immeubles, loin de l’agitation du commun.
Ses mains sont redevenues poings. Les jointures recroquevillées pour ne pas lui happer et tirer de nouveau un bout de viande. Il réussit à tenir l’équivalent de quatre expirations. Puis l’avant-bras est empoigné et Malenia Blackwell est embarquée. Avant qu’elle miaule ses menaces, Gustav mollarde : Ton père.
Son père et seulement son père, auquel il doit des comptes.  
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Garde du corps qui ressemble à un fantôme qui respire. Un mort qui marche. C’est dingue, ça, pourquoi on m’a collé le type le moins souriant de la planète ? Il n’aime pas boire, danser, s’amuser, rire ? Il n’a pas l’air d’aimer grand-chose, en fait, pas même son job. Je lève les yeux au ciel, comme une gamine à qui on ne donne pas son jouet. Je suis censée mettre des paillettes dans la vie des gens, pas la rendre plus noire que prévue. Mais j’ai au moins retrouvé ma copine la bouteille de champagne, échouée dans ma paume redevenue fraîche grâce au verre.

Nous quittons la cage d’ascenseur, je prends une nouvelle gorgée, tente d’amener les étoiles à mon esprit puisque Monsieur H ne veut pas s’en occuper et nous filons dans le hall. Je prends les devants, parce que sinon nous n’en sortirons jamais. Je planque plus ou moins efficacement la bouteille dans les volants de ma robe de Cendrillon. Pas qu’une photo me dérangerait – tout le monde sait ce que je fais des soirées de ce genre – mais je sais que certains associés de mon père se trouvent dans le coin et je n’ai aucune envie de subir leurs discours moralisateurs, misogynes et patriarcaux débiles. Un peu comme Monsieur H, les hommes n’aiment pas quand les femmes parlent, rient, dansent, boivent, quand elles se comportent comme des hommes finalement. Même si dans le cas de mon garde du corps fermé comme une huître, je crois qu’il déteste autant les hommes que les femmes, et que ce n’est pas réservé à une seule catégorie de personnes mais globalement à tous les humains. À deux doigts de lui poser la question quand il enroule finalement ses droits autour de mon bras, me force à le regarder. Pour un homme qui n’aime pas les gens, en voilà un qui aime la proximité. « Par derrière. — En voilà une proposition bien indécente, ne puis-je m’empêcher de le taquiner, un petit sourire taquin ourlant mes lèvres maquillées. Dis, il n’y a que moi que tu aimes pas, ou c’est le cas de n’importe quel être sur cette Terre ? » Tiens, dans les dents, bon courage pour me répondre en quatre mots et demi ! Mais pour la première fois depuis longtemps, je suis presque intéressée par la réponse.

Et le nombre de gens qui m’intéressent en ce bas monde se comptent sur les doigts des mains. D’une main, pardon.

Je suis alpaguée par un homme blond dont j’ai oublié le prénom – typiquement dans la catégorie que je citais au-dessus – qui m’a déjà demandé un ou deux rencards – par soirée – et que j’ai éconduit de manière très – peu – chaleureuse à chaque fois. Je ne supporte pas le « non », comme beaucoup de mes homologues il faut croire. « Oh, Travis, je suis vraiment navrée, je dois te laisser, j’ai une urgence. Cette petite soirée était délicieuse, j’espère qu’on pourra se revoir à un autre moment. — Devant un café, peut-être, tu sais, seul à seule… — On y va. — Bon sang, mon père m’a collé un nouveau garde du corps, il est terrible, j’ai presque interdiction de voir qui que ce soit ! Regarde son air renfrogné. — Maintenant. — Tu vois ? Vraiment navrée ! » Grand sourire, bisou envoyé d’une main avant que H ne s’empare de mon bras pour m’emporter loin, vers la sortie de secours, j’imagine. Dommage, j’aurais aimé faire quelques photos avec les paparazzis et mon « garde du corps trop sexy », ça aurait jasé et je n’aurais pas perdu la moitié de ma soirée. « Ton père, qu’il gronde, et il faut qu’il arrête de croire que je peux tout suivre ou tout comprendre, je suis pas très assidue. » Je parle pour deux, mais quand même, j’ai besoin d’un peu d’aide. « Quoi, mon père ? » C’est un con ? C’est lui qui paye ? Il est amoureux ? Comprends rien, bordel. « Si tu me dis que tu veux qu’on aille voir mon père, c’est mort ! Je veux aller danser. Ou faire autre chose, si t’es inspiré. » Wink, wink. « J’suis toute ouïe. » Et voilà qu’on arrive devant la porte de secours, que je presse avec attention, avant de reporter la bouteille de champagne à mes lèvres. « Tu dois bien avoir une passion, toi aussi. En dehors de protéger des gens. » Même pas sûr que ce soit le cas. Après un couloir où mes talons claquent avec fermeté l’air frais percute finalement ma peau rendue moite par la chaleur à l’intérieur et un frisson remonte le long de ma colonne vertébrale. Je lève les yeux vers le ciel, à la recherche de quelques étoiles, mais la pollution lumineuse est trop importante, même dans la ruelle pourrie dans laquelle on se trouve. « Oh. Je vois. Tu voulais m’emmener ici pour te débarrasser de moi ? Bien joué. » La ruelle fait vraiment flipper.

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— Quoi, mon père ?
Et en plus de ça elle n’est pas foutue de saisir ce qu’il lui dit. Il s’exprime pourtant très clairement. Distinctement. Son père. Son père comme un centre du monde pour elle et pour lui. Le point les reliant pour le meilleur et pour le pire.
— Si tu me dis que tu veux qu’on aille voir mon père, c’est mort ! Je veux aller danser. Ou faire autre chose, si t’es inspiré. J’suis toute ouïe.
Les sourcils se haussent et il se retient de rouler les yeux au plafond ou mordre sa lippe à sang. Il comprend qu’elle ne comprend rien et l’envie de lui vomir tout ce qui lui gangrène l’encéphale est là, sur sa langue, dans sa gorge, dans sa poitrine et au bout de ses doigts – ses doigts qu’il resserre autour de son bras.
Ses mâchoires s’entrouvrent, aucun son ne sort. Sa voix qu’il essaye de pousser hors de sa putain de trachée sans qu’une note concrète ne germe à la surface. Alors sa bouche, Gustav la garde désespérément close. Et qu’est-ce qu’il lui dirait, de toute façon. Qu’il n’a pas non plus envie de voir son paternel qui lui file le cafard ; qu’il n’a pas non plus envie de danser et encore moins de se retrouver noyé dans les sons et les odeurs ; qu’ils pourraient baiser, comme des bêtes à l’arrière de la berline, mais dans une autre vie, dans une autre ville – seule l’heure est envisageable, acceptable, si seulement il n’avait pas à garder au chaud son joli cul de pétasse insouciante.
La porte de secours est atteinte et poussée et elle continue de faire la conversation et il l’écoute plus attentivement qu’il ne le voudrait.
— Tu dois bien avoir une passion, toi aussi. En dehors de protéger des gens.
Son regard s’attarde sur un morceau de nuque et repart dans la tignasse de Blackwell. Des passions, est-ce qu’il a des putains de passions. Ça lui claque à la face comme une grosse gifle voire un coup de poing. Est-ce qu’il a des passions. Gustav ne se souvient plus avoir de passions depuis qu’il a dépassé l’âge fatidique de dix-sept ans. Gustav ne se souvient plus avoir de passions depuis qu’il a fait de la taule et qu’on lui a enfoncé la gueule dans la merde des autres. Gustav s’est oublié sur un bout de bitume et suppose qu’un enfoiré qui passait par là a fini le travail en lui trouant la panse ou en lui tranchant la jugulaire.
Le couloir est traversé sans un mot. Les talons de Blackwell pour rythmer les battements de son cœur. Sans ça, Gustav imagine qu’il aurait pu le dégueuler dans la minute.

Le dehors les percute, le froid de la saison griffe la peau. Gustav se frotte la tronche, laisse la porte se refermer dans son dos et observe la rue. Désertée, perpendiculaire à celle passante et encombrée. Les lampadaires diffusent une lueur pisseuse sur le macadam et éclaboussent les pare-brise et les carrosseries de reflets enflammés qui ont pour lui l’aspect laiteux des nuages.
— Oh. Je vois. Tu voulais m’emmener ici pour te débarrasser de moi ? Bien joué.
Son instinct retourne vers Blackwell. Le museau levé vers l’empyrée. Elle contemple les étoiles absentes, les étoiles éradiquées par les lumières de la ville et les immeubles immenses qui s’y dressent.
Merci.
Son sourire tire sur un coin de sa bouche, la soulève.
Son faciès redégringole vers le bitume et ses chaussures. Gustav se remet en mouvement, cherche dans sa poche de futal la clef de la bagnole qui les attend plus loin. Revenu à proximité de Blackwell, sa face chavire de côté, son buste se penche comme pour capturer son attention diluée au ciel.
Viens.
Plus réellement un ordre, maintenant. Une demande, une prière ; une espèce de complainte. Un ronronnement de chat bienheureux – ouais, brusquement, il capte qu’il sourit toujours et qu’il a dans la tête autant que la poitrine une sérénité qui l’imprègne et berce. Plus de bruits pour lui déchirer les tympans ; plus de luminosité lui agressant les rétines ; plus que son odeur à elle et celle diffuse des poubelles alignées contre le mur emplissant ses naseaux.
J’ai oublié, avoue-t-il enfin.
La voix en murmure.
Et il se redresse et se frotte un œil et vagabonde sur quelques pas. Se retourne vers Blackwell et ajoute, se rappelant qu’elle ne saisit rien à ce qu’il raconte ou presque, depuis le début de la soirée.
Les passions… j’ai oublié.
Il a oublié qui il était, aussi. Mais elle s’en fout probablement.
Son existence brodée par l’ennui et l’indifférence ; effilochée par la violence et tachée d'hémoglobine.
Il scrute les volutes de fumée s’échapper de ses lèvres, il remarque le grain de sa peau se durcir et ses poils et son fin duvet se hérisser. Gustav déboutonne sa veste de smoking, la retire et la lui tend, ne s’approche pas trop, ne la touche ni ne l’effleure – il l’a déjà trop fait et il le sait. Il en avait besoin. Il le désirait, la désire, et ça le déglingue.
La voiture.
Ils doivent y aller, ils doivent rentrer ; le chauffage qu’il montera pour elle. Le froid de l’hiver qui ne lui mordra plus l’épiderme et qui ne la rendra pas malade. Il ne manquerait plus qu’elle se chope une saloperie et qu’on le lui reproche ; qu’il n’a pas assez fait attention, qu’il a trop traîné, qu’il n’a pas réfléchi aux distances et à son job d’idole à la con, à moitié à poil de jour comme de nuit.
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La misère, la tristesse et l’incompréhension des autres ne m’intéresse pas. Ne m’intéressent plus. C’est trop épuisant de se lamenter, d’écouter, de faire semblant d’être touchée par la détresse de tout un monde que je ne pourrai jamais effacer, de toute façon. Je n’ai pas de baguette magique, on est pas dans un film Disney, les happy ends n’existent pas. Alors autant me concentrer sur le film de ma vie, c’est beaucoup plus intéressant. Oublier les autres dans l’espoir de s’oublier soi-même. Théorie validée par mes bons soins de psychologie assermentée.

Bon sang, je me pendrais si je devais écouter la misérable vie des autres. Peut-être que Monsieur H a tout compris, en fin de compte ; je préfère m’écouter moi, alors à quoi bon cracher des mots inutiles ? Mais j’aime aussi que les choses se déroulent comme moi je l’ai exigé, et si je veux qu’il parle, alors il doit parler ! Mince alors. Je vis en binaire, c’est pas très compliqué à suivre. « Merci. » Rauque qui pourrait crépir un mur, voix qui a la douceur de la scie dans le bois. Mais je peux sentir son sourire dans ces cinq petites lettres. Je pousse un soupir avant de me tourner vers lui, pas certaine que ce soit le meilleur partenaire pour… pour quoi, au juste ? Pour rien, en fait ! Ni pour danser, ni pour parler, ni pour baiser. Est-ce qu’il picole, au moins ? Un rail de coke, sinon ? On pourrait trouver les étoiles autrement qu’en levant le nez pour constater leur disparition.

« Viens. » Moi Jane, toi Tarzan. Je me demande ce que mon père avait en tête en me collant un mec pareil aux bask. Peut-être qu’il a eu trop vent des petites sauteries dans la bagnole de mon précédent garde du corps. Hihi. Faut dire que j’étais pas la plus discrète du monde. Dans le doute, je le suis, avec me bouteille à la main. Maintenant que j’y réfléchis, je crois qu’il n’a pas le droit de boire au travail, lui. Tristesse et damnation.

« J’ai oublié, qu’il répond. » Euh, j’ai peut-être aussi oublié ma question. Ah, ouais, les passions. Merde, il a oublié ? C’est triste. « Les passions… j’ai oublié. » Ah, ça y est, il commence à piger que je pige rien. « T’inquiète, je serai ta nouvelle passion. Tu pourras pas m’oublier, moi. » Et à défaut de m’offrir des mots, il m’offre sa veste de smoking, qui sent lui et alors je pourrai répliquer que son odeur aussi à quelque chose de particulier. Il sent l’aventure et les refus. Je l’attrape de ma main manucurée, avant de la glisser sur mes épaules dénudées. « Merci. T’as pas oublié d’être gentil. » Petite taquinerie parce que je ne suis pas bien sûre que gentil soit vraiment le terme adéquat le concernant, mais ça me fait marrer, les oxymores. Je dois en être un moi-même. « La voiture. » J’acquiesce, prends une nouvelle gorgée au goulot, avant d’enrouler mon bras au sien, comme deux amis sortant de boîte. Je sens nettement sa rigidité sous mon contact, mais j’ai l’habitude de faire ce genre d’effets aux hommes. « Allez, avoue tout, t’as pas choisi ce job, hein ? Moi non plus. But here we are. » Nous remontons l’allée et je le lâche une seconde pour tournoyer devant lui, sur mes hauts talons. Discipline très prisée dont je suis passée médaille d’or aux Jeux Olympiques. « Mais j’me doute que t’aimes pas danser, le TT. » Pour Taciturne et Ténébreux. « Mais j’suis pas fatiguée, j’ai pas envie de rentrer. Ça te dirait de braquer un musée ? Y a le musée de la sculpture, pas loin, on pourrait comparer nos corps au marbre froid. » À défaut de se les réchauffer. « Ou alors tu m’emmènes voir les étoiles sur les hauteurs de New Blossom. Sinon on passe choper Brit et on va foutre le feu au bar qui nous a refusées, la dernière fois. Trop vulgaires, t’y crois toi ? » Je me tourne vers lui alors que j’arrive dans la grande rue qui se trouve à l’arrière du lieu de réception. On peut cette fois-ci entendre la rumeur de la ville, le bourdonnement des voitures. « Sinon on fait un strip poker dans ta bagnole. Ou un action ou vérité. À deux, c’est plus rigolo. » Sourire démoniaque. « Ou alors un live Argo !!! Les fans de Comtesse seraient ravis de découvrir son nouveau garde du corps. » Mille idées à l’heure.
Tout mais pas s’arrêter.
Tout mais pas mourir.

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Elle s’approche, enroule son bras au sien. Contact imposé. Pas de mouvement de recul mais une méfiance qui l’allume, immédiatement. Il la sent contre son flanc, lui devine les courbes et les creux, s’imagine en découvrir au toucher la texture et se tend dans la seconde. Mandibule projetée en avant et museau redressé pour ne plus la regarder.
Il scrute un point fixe et sans consistance sur l’horizon.
La rue badigeonnée de gris, triste à crever ; à peine éclaboussée de lueurs d’opale. Les nuances l’hypnotisent et l’empêchent de vriller son attention lorsqu’elle recommence : elle parle. Elle irradie ; l’irradie lui. Et il ne devrait pas ressentir ça ni même le penser.
— Allez, avoue tout, t’as pas choisi ce job, hein ? Moi non plus. But here we are.
Elle macule son silence et la ruelle autour de ses étincelles en notes d’où crépite une mélancolie qui le foudroie.
Puis elle l’abandonne, brusquement. Non, le relâche.
Blackwell plus si Blackwell mais surtout Malenia, s’élance devant lui et tournoie. Poupée porcelaine sous une lune bubonique. Gerbante sauf quand elle danse dessous.
Son sourire revient peindre sa gueule revêche, creuse dangereusement dans ses joues.
— Mais j’me doute que t’aimes pas danser, le TT. 
TT ? Il demande. Les sourcils ondulent et sa question reste sur sa lippe, en suspens.
Bouche entrouverte sur l’incompréhension.
Elle s’en fout, ne répond pas et divague ; elle rêve d’un ailleurs qu’il entraperçoit.
— Mais j’suis pas fatiguée, j’ai pas envie de rentrer. Ça te dirait de braquer un musée ? Y a le musée de la sculpture, pas loin, on pourrait comparer nos corps au marbre froid. 
Elle expose le menu de la soirée, sa bouteille d’alcool à la main et sa tristesse en fard.
On peut tenter de lui mentir ; on le fait tout le temps. On peut tenter de lui dissimuler tout un tas de saloperies, mais à force d’écouter il a appris à devenir sourd aux mots. Ne compte plus que ce qu’il voit : les imperceptibles froissements de ridules ; ne compte plus ce qu’il écoute : les failles creusées dans les corps. Son souffle, son pouls, son odeur qui de manière infime se métamorphose et le submerge par vagues.
— Ou alors tu m’emmènes voir les étoiles sur les hauteurs de New Blossom. Sinon on passe choper Brit et on va foutre le feu au bar qui nous a refusées, la dernière fois. Trop vulgaires, t’y crois toi ? 
Il secoue la gueule, brièvement. Son sourire élargi. Un non foireux, un non au-dessous duquel il se marre en silence. Une réponse comme une autre, larguée comme si elle le comprenait pleinement ; comme s’ils n’étaient pas ce qu’ils sont. Comme s’ils n’étaient pas une énigme l’un pour l’autre mais des connaissances de longue date.
Ils se sont rencontrés il y a quoi, deux semaines. Peut-être trois.
Son sourire s’efface lorsqu’il ressent les craquelures se former à l’intérieur. Il se sait faible. Il n’a pas le droit de l’être. Il se sait trop attentif. Pas de la bonne façon.
Mais il y a. Il y a quoi- Sa fragilité derrière sa fureur. Sa délicatesse sous sa vulgarité.
Gustav se tait. Gustav a les pupilles dilatées à l’extrême et observe chacune de ses étincelles sous l’influence des lampadaires.
— Sinon on fait un strip poker dans ta bagnole. Ou un action ou vérité. À deux, c’est plus rigolo.
Le sourire de Malenia rehausse ses pommettes. Le sourire de Malenia pourrait faire fondre un iceberg. Son putain de sourire le percute de nouveau avec la violence d’un bus.
Gustav ne bouge plus. A trois mètres d’elle, les mains enfoncées dans les poches de son futal. Coincé dans sa chemise blanche, il étouffe. La chaleur lui fait flamber la tronche et la gorge. Il devrait grelotter de froid ; il n’a d’humain que la forme.
— Ou alors un live Argo !!! Les fans de Comtesse seraient ravis de découvrir son nouveau garde du corps.
Non, il feule, quasiment.
Non, ils ne feront pas un putain de live Argo. Non, elle n’affichera pas sa gueule sur le Metaworld et non il ne deviendra pas le centre d’une attention toxique – et dangereuse. Pour elle, pour lui aussi. Pour eux deux. Comment peut-elle être aussi conne.
Et il se souvient qu’elle ne sait pas qui il est, d’où il vient ; elle ignore probablement les activités annexes de son père, ne sait pas avec qui il magouille et pourquoi.
Ses mâchoires s’écartent et il tord la trogne. Essaye d’expliciter, encore. Parce qu’il est con, à son tour. Et qu’il ne veut pas qu’elle arrête de parler – lui parler. Il ne veut plus du silence et la disparition de son sourire dans la nuit.
Alors Gustav force les mots à s’aligner dans sa trachée mais rien ne sort. Ou un gémissement bas, très bas, inaudible sauf pour lui. Et sa frustration se mélange à sa colère et son regard dévie sur un bout de bâtiment, sur le lisse d’une carrosserie, sur le flash des phares d’une bagnole tournant au coin de l’artère.
C’est pas moi, s’empresse-t-il d'articuler.
Un mot manquant qu’il ajoute : pour moi.
Gustav suppose la phrase correcte, suppose le fond de sa pensée ainsi déversée sur le bitume, accessible. Qu’elle se penche et la récupère et la décode.
Dans sa poche, ses phalanges se resserrent sur son Samsung.
Plusieurs secondes s’écoulent entre eux. Une latence, une réflexion poisseuse ; ça lui colle aux doigts autant qu’à l’âme. Ça lui colle à sa fierté et la lui massacre.
Sa paluche s’extrait de sa poche, le portable contre la paume. Sa face penche vers l’écran qui s’illumine et il cherche son bloc-notes, vide. Toujours vide. Pourtant rempli de ses mots invisibles.
Son regard remonte vers Blackwell, la surveille – elle et les alentours. Et son attention re-dégringole sur l’appareil. Son pouce tape sur l’écran. Rapide, les lettres s’amoncellent. Les pixels se noircissent.

Bloc-notes
Pas bon pour toi, mon visage à côté du tien
Ton image c’est important. Pour tout. Non ?
Je ne suis pas bon.

Le musée = les flics
Le bar = les flics
Les étoiles = ok
Strip poker = tu vas perdre
Action ou vérité = les flics ??

Efface tout quand tu as fini de lire.


Gustav fait quelques pas. Lui tend son Samsung.
Avant qu’elle ne l'attrape, il se rétracte. Croit bon d’ajouter un détail.

Bloc-notes

(...)

majesty  1f600


Smiley jaune et souriant choisi dans la liste parcourue à la va-vite. L’humeur explicitée sans qu’elle ne monte jusqu’à ses traits. Cette fois, il est satisfait. Il n'est qu'un putain de crétin à la connerie infinie.
Mine neutre, imperturbable ; son esprit trébuche sous son front. Il se mâchouille l’intérieur de la joue, portable tendu qu'il n'éloigne plus ; une offrande en excuse. Ou des directives adoucies sans le gravier de sa voix.
Ses yeux l'évitent. La honte ou la timidité. Les deux, en simultané. L’aveu sans aveu. Son handicap qui d’ordinaire laisse froid ; simplifie les échanges et règle les problèmes. Rapidité, distance, efficacité. Tout devient un problème, avec elle. Et il se dévoile, rien qu’un peu ; et il sait déjà qu’il va le regretter. Mais ils sont coincés, n’est-ce pas. Coincés à deux, pour une période indéterminée. Jusqu’à ce que la mort les sépare, ou un truc comme ça, à ce qu’il paraît.
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