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I hate being a good samaritan
(#) Mer 13 Déc - 11:46
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J’ai le coeur qui bat à tout rompre.
Qu’est-ce que je fous ici ?! Non sérieusement… C’est juste une collègue de travail, pourquoi je me donne tout ce mal ? C’est la dernière fois. J’ai eu pitié, je crois, je me suis revue il n’y a pas si longtemps en arrière. J’ai pas pu la laisser crever dans son coin.
J’ai contacté Heidi après avoir hésité un sacré moment. Non parce que Jenna veut pas aller à l’hôpital, évidemment. Son mec risque de ce faire coincée ou je sais pas quoi. J’ai eu l’histoire en accéléré. Il est marié, riche et l’utilise. Voilà ce que j’ai retenu, même si elle parle d’amour et qu’il quittera sa femme. Une ordure comme lui, y a aucune chance.
Bref, nous voilà devant la porte. Je toque nerveusement, sans doute un peu trop fort. Je soutiens Jenna comme je peux, alors qu’elle vacille. Son mec l’a tapé un peu trop fort et elle est high, dangereusement high. Elle a besoin de soin et qu’on la surveille qu’elle s’étouffe pas dans son dégueulis. Ah tiens… les buissons sont en train de se faire arroser… Je grimace et détourne le visage sans pour autant la lâcher. Elle a déjà le visage défoncé, si je la soutiens plus, il y a des chances qu’elle tombe et aggrave son cas.
La porte s’ouvre et mon cœur rate un battement. Ça m’en fait mal, mais c’est psychologique ça. Quand il est question de mon cœur, je suis un peu hypocondriaque. BREF !
- Heidi !
(#) Mer 13 Déc - 18:47
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Disorder, disorder, disorder
Il est près de deux heures du matin lorsqu’un bruit monotone et insistant vient perturber ton sommeil de toutes façons léger. Tu rouvres difficilement les yeux seulement pour voir au plafond la lumière faible et diffuse de l’écran de ton téléphone, lui aussi réveillé par l’événement. Tu grognes en silence en te redressant sur ton matelas, et tu prends sur toi pour te frotter délicatement les yeux.
Un nom familier s’affiche sur l’écran de ton appareil : Avelina. Une ancienne patiente rencontrée lors de l’une de tes gardes aux urgences. Le genre angoissé ; il faut dire qu’en lisant son dossier médical, on comprend vite pourquoi, même sans être médecin. Transplantée du cœur, elle a des raisons de se faire du souci, tu en sais quelque chose.
Finalement, tu décides de décrocher, mettant fin aux vibrations désagréables qui faisaient trembler ta table de nuit. « Avelina ? Allo ? Avelina je ne te comprends p-… Av-… AVELINA ! Du calme, respire, doucement, tout va bien se passer. Maintenant dis moi ce qui se passe. Il faut l’emmener aux urgences. Comment ça pas possible ? Ok, ok, tu as mon adresse ? Je vous attends. » Un long soupir t’échappe lorsque tu raccroches enfin, sans doute parce que tu as intégré depuis le temps qu’il est d’usage d’être exaspéré lorsque l’on se fait réveiller en urgence en pleine nuit. La vérité, c’est que tu n'as pas ressenti autant d’adrénaline depuis longtemps.
Ca va faire bientôt six mois qu’on t’a forcée à abandonner la médecine ; est-ce que ça te manquait ? Des semaines et des semaines que tu fuis la réponse à cette question parce que tu sembles redécouvrir que toutes les vérités ne sont pas bonnes à prendre. Il y a des choses, des idées dans le monde qui ne peuvent rien faire d’autre que du mal. Oui, tu pourrais regarder les choses en face. Quelque part, tu t’en veux de ne pas le faire, mais tu t’en voudrais peut-être autant de renoncer si facilement à cette ambition qui a guidé tes pas pendant près d’une décennie.
Mais en attendant une réponse ferme et définitive, l’action d’abord, les questionnements existentiels ensuite. Tu te lèves de ton lit sans grande difficulté et tu t’en vas te mettre quelques vêtements sur le dos, piochés à moitié au hasard dans ton dressing. Un col roulé noir et un pantalon ample de la même couleur ; pas comme si tu en avais d’autres dans tes tiroirs.
Et alors, méthodiquement, tu te mets à préparer ton salon pour accueillir ta nouvelle patiente. De ce que tu as réussi à comprendre des déclamations désespérées d’Avelina, c’est une jeune femme sous substances qui a pris des coups. Pas vraiment un cas unique, surtout après une paire d’années à assurer des gardes de nuit aux urgences d’un des plus gros hôpitaux de la ville ; la différence ici réside dans le fait que tu n’as accès à peu ou prou aucun matériel médical ou pharmaceutique. Ceci, en revanche, te fait exprimer un véritable soupir venu du cœur derrière la cicatrice.
Tu viens à peine de terminer l’inventaire de tes médicaments lorsque l’on frappe à ta porte. Peu de doute sur qui se cache derrière ; tu zieutes à peine à travers le judas avant d’ouvrir le battant et de laisser entrer les deux jeunes femmes dans ton humble appartement sans décoration et meublé au strict minimum. Rapidement, tu refermes la porte derrière Avelina et son amie, et tu viens tout aussi vite l’aider à soutenir la victime, en effet bien amochée. Un nouveau soupir s’échappe de tes lèvres roses en constatant l’apparence des blessures.
« On va l’allonger sur le canapé, ok ? Elle est entre de bonnes mains, ça va aller. » Tes yeux perçants agrippent ceux de la bonne samaritaine avec un mélange de douceur et d’autorité qui t’est caractéristique, et n’en décrochent que lorsque tu as la certitude qu’Avelina retiendra sa panique. Avec une délicatesse extrême, tu guides l’autre jeune femme jusqu’au sofa sur lequel tu l’allonges sur le côté. Tu tires jusqu’à elle le seau dont tu avais prévu l’utilité avant qu’elles n’arrivent, puis tu te tournes à nouveau vers ton ancienne patiente.
« J’ai besoin que tu me dises tout ce que tu sais, et ce que tu ne sais pas. Si tu as un doute sur quelque chose, surtout dis-le-moi. Ce qu’elle a pris, où, quand, à quelle heure, avec qui. Est-ce qu’elle a un implant, si elle en a déjà eu un, si elle a un traitement médical, si elle a des allergies, si tu l’as vue éternuer y’a deux jour, tout ce qui te passe par la tête, ok ? Tu sais qui lui a fait ça ? » Le son de ta voix est d’un calme impressionnant, d’une douceur froide, maîtrisée. L’adrénaline déferle dans tes veines alors que la sensation de contrôle te revient et t’enivre. Tu avais besoin de ça, de contorsionner méticuleusement le sentiment d’urgence à la seule force de ton esprit entraîné. L’arbre des décisions à prendre se dessine sous tes yeux tandis que tu attends les informations d’Avelina.
Dans le même temps, tu te désinfectes vigoureusement les mains pour te préparer à ausculter celle dont tu ne connais même pas encore le nom. Dans le silence relatif d’une nuit à New Blossom, tu sembles revivre. L’étincelle au fond de tes yeux a gagné un éclat qu’elle avait perdu depuis longtemps.
« Et toi, tu vas bien ? »
(#) Lun 18 Déc - 13:49
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Putain ce que je ressens du soulagement en voyant la tête d’Heidi quand la porte s’ouvre. Je m’en veux grave aussi… l’heure, la demande, ce problème que j’amène à son domicile… J’entre et j’écoute tout ce qu’elle me dit.
- Ok. Le canapé donc. Aidée de la doc, doucement on dépose ma collègue sur les coussins.
Dès que c’est fait, je recule de quelques pas, me passant une main sur le front. Mon cœur bat à mille à l’heure, je la sens la crise d’angoisse qui est pas loin. Si mon cœur battait pas si fort dans mes oreilles, je me rendrait sans doute compte de la pluie qui commence à tomber dehors… de mon fait inconscient. J’essaie de me calmer en croisant le regard d’Heidi. Il y a un truc solide dans ses yeux, je sais pas si je peux qualifier ça de force, de calme, de pragmatisme, de fermeté… sans doute un mélange de tout ça. Sauf que pour autant, il y a bien de la douceur également. Je prends une grande inspiration pour tenter de retrouver un peu de sang-froid.
- On travaille ensemble. On traine pas tant ensemble après le boulot, mais elle me parle de sa vie. C’est la maitresse d’un politicien assez riche. Un gros connard qui la tape. J’essaie de réfléchir, mais c’est difficile tellement je suis stressée là. Je sais pas ce qu’il s’est passé cette fois, il lui a foutu une raclée. Elle s’est injecté un truc dans la ruelle derrière le boulot, je l’ai trouvé en fermant le café. Je pense que c’est de l’héro. Elle avait du mal à me parler, mais c’est ce que j’ai pu comprendre. Sinon euh… je sais pas bordel… Elle est allergique aux pommes ? Elle fume comme un pompier. Elle s’est fait faire des injections de botox y a un mois, filler dans les lèvres la semaine dernière. Elles sont toutes fendues sous les coups d’ailleurs… ses lèvres neuves. Elle a plus d’appendice. Je… je sais rien de plus. Je suis épatée de m’être souvenue de tout ça honnêtement.
J’ai des vertiges, les doigts qui picotent. Faut que je me pose quelque part. Je finis contre un mur, près d’une fenêtre. C’est là que je remarque enfin la pluie. Faut dire qu’elle tombe assez fort maintenant. C’est moi ça… Il doit pleuvoir sur 3-4 maisons. Fuck…
- Moi ? Oh je… oui. Angoissée ? J’ai un rire sans joie, comme pour essayer de dédramatiser, mais ça fonctionne pas. Désolé… je savais pas trop quoi faire et… je… me suis revue. C’est la seule raison pourquoi j’ai pas appelé une ambulance. Je regrette. Je me suis clairement projetée sur Jenna.
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