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(not very) happy awakening

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Contrairement à ce que pouvait dérouler la fiction dans ses meilleures séries, le réveil d'un coma ne se fait ni en deux jours, ni sans séquelles. Il va même de soi que les visites sont triées sur le volet pour ne pas aggraver l'état du patient, qui, depuis quelques jours maintenant, projette déjà de se barrer de là (et par la porte dorée).

Cinq jours plus tôt, Darius est passé le voir, sur sa demande. Ayant les idées un peu plus claires (discutable), Samuel a cru bon de vouloir lui parler de cette jambe qui ne répond plus vraiment. Celle qui se fait dépasser par des paresthésies et un froid qui ne lui plait pas. Force est de constater que cette information incroyable était déjà sue de ce dernier, alors qu'il ne se rappelle à aucun moment d'avoir essayé de marcher - une très mauvaise idée d'ailleurs, de faire marcher une personne aux fonctions encore à moitié endormies.

Deux jours plus tôt, c'est son père, seul, qui est venu le voir. Le fait qu'il soit venu sans rien dans les mains, mais plein de saloperies dans la besace, ne sont pas tout à fait étonnantes. Tout ce qu'il voulait, c'était de préserver l'image des Norton, car bien entendu, cette histoire avait été ébruitée sitôt que Samuel s'était enveloppé dans un long sommeil le jour de son anniversaire. Pas qu'il avait prévu le soir même la plus grande fête de l'histoire, mais on était pas loin niveau cachet. Le médecin alité aurait fortement apprécié pouvoir appeler ses infirmier-es comme au Moyen Âge, à savoir en les hélant comme gardes, pour faire sortir ce clown aux mocassins cirés. Il a essayé de savoir le pourquoi du comment, à bouffer à tous les râteliers pour dénicher l'information, pour mieux la contrôler ensuite. Un bon chien d'Icarus, comme toute la fratrie. Tous mutants et globalement brillants (Samuel est au dessus du lot, il le rappellera), ils ne se sont pas demandé un seul instant si ce n'était pas précisément ladite mutation qui s'exprimait ainsi. L'ego du patient est affûté et ses défenses ont pu retrouver de leur nuance, 'grâce à' (ou 'à cause de') cette visite. Samuel tait l'information et bénit silencieusement chaque jours qui passe de ne connaître aucun télépathe autour de lui (et que Yassine n'ait pas l'idée de s'implanter un énième dispositif dans la caboche pour le faire chier).

Parlant de ça, c'est Yassine - ou plutôt Abel - qui viennent le voir ce jour-là. Plutôt de marbre à cette idée, Samuel se rappelle pourtant de certaines choses qu'il a perçues lorsqu'il était de l'autre côté. Des choses pour le moins affligeantes. S'étonne même que Warda n'ait pas fait en sorte de missionner sa nounou préférée pour l'emmener le voir - force est de constater qu'elle a préféré se prendre de plein fouet son allergie, quitte à en avoir les yeux brillants par moments. Un acte de bravoure qu'il ne féliciterait pas, même si on le menaçait de le cramer sur place avec un rot draconique. Peut-être même que ce serait pas plus mal de retourner dans ce là-bas : au moins, il ne sentait rien de toute cette douleur, de cette fatigue, et de ces choses qui font qu'il est un homme qui vit.

Le Dr. Norton a reprit un peu plus du poil de la bête et, il valait mieux plutôt ça pour se montrer face à sa progéniture. Que va t-il lui dire ? Quelque chose d'idiot comme un 'papa je t'aime' ? Est-ce que ses lunettes sont réparées ? A t-il lu le livre qu'il lui avait donné, sur l'épigénétique ? Va t-il lui faire l'affront de pleurer ?

Lorsque la porte s'ouvre, il y a d'abord le visage du Dr. Dura qui apparait, et qui lui demande s'il est en capacité d'accueillir le duo. "Votre femme et votre fils sont là. - Ce n'est pas... ma femme," corrige t-il avec une incision certaine. Dans le dos de la médecin, Samuel croit même avoir entendu l'écho de la voix de Yassine, qui a corrigé elle aussi cette information douteuse (et particulièrement effrayante). Sans doute l'a t-il rêvé, comme tout le reste ces derniers temps. Quoiqu'il en soit, la petite tête et celle plus haute de l'agent CERBER apparaissent, et la porte se ferme. Qu'est-ce qu'il doit dire à ce moment-là ? Bonjour ? La spontanéité du gamin lui, permet de briser tous les murs qui pouvaient jusqu'alors les séparer.
"Papa !" L'enfant. Il ne lui laisse pas le temps de grand chose, fait le tour du lit pour aller sur l'un des côtés, et lui faire un câlin au bras, faute de mieux. "T'as rézon maman, il é révéillé !!" qu'Abel dit en tournant fièrement sa tête vers la concernée. Il lui a probablement demandé pendant ces derniers jours "quand est-ce qu'on reverra les yeux bleus de papa", ce qui est pour le moins poétique pour un rat de bibliothèque. Non, ça, c'est surtout ce qu'il s'imagine, alors que le gosse a dû pleurer plus qu'il n'a su parler. "Zé compté lé zour. Za fé vin... vin... virgule deux !" Samuel ignore pourquoi il le fixe aussi longtemps, et pourquoi il a l'impression d'avoir une vanne qui s'ouvre à l'intérieur. Ce n'est pas du tout sa façon de fonctionner habituellement mais, qui a t-il de vraiment habituel dans cette situation ? Ce père qui se hasarde aurait probablement été sarcastique, ou lui aurait servi un plat tout fait, dans de belles paroles. Or, rien ne sort.

"Maman ? (regard brouillé de larmes, inquiet) Papa, tu peu parlé maintenan hein ?" s'inquiète t-il, alors que les mouvements oculaires sont bel et bien naturels, et que le papa est en position quasi assise. L'on remarquera que le concerné n'a pas encore levé les yeux pour regarder quelqu'un d'autre que son fils (ou ses mains plus pâles que d'habitude, qui ont plus l'air d'un autoroute qu'autre chose). "Vingt et un," car il entendait déjà les gens comme avant au 21ème jour. Nous sommes arrivés courant juillet (pour ne pas dire presque à sa fin) et son anniversaire est loin. L'écho de sa voix, lui, fait vraisemblablement chouiner Abel. Il fouille dans son petit sac à dos à l'effigie de Wolfman, quelque chose, quelque chose qui a de la valeur pour lui. Mais beaucoup moins pour Samuel, a priori.

"Tien papa..." il lui tend quelque chose en baissant la tête. Il y a un dessin (très moche)(il aura hérité du sens artistique de ses deux parents) à moitié froissé (c'est des gouttes de larmes séchées qui a fait baver le dessus ?) et un objet en pâte à modeler cuite designé par le grand maître susnommé, qui représente... un ange ? Pourquoi diable aurait-il besoin d'un ange pour son annivers- ... "C'est quoi ?" Abel s'est réfugié dans les pattes de sa mère lorsque Samuel pose la question. C'est un dessin, oui, mais ensuite ? Qu'est-ce que c'est sensé représenter ? Pour ainsi dire, le gros cerveau de la pièce n'a pas fait le lien avec son anniversaire. Faut dire que c'était passé depuis un moment.

Ce n'est que dans cette tentative de déchiffrage qu'il va (enfin) attraper le regard de Yassine.

Et il ne sait même pas vraiment ce qu'il y voit non plus, à ce moment-là.

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cw. hôpital, angoisse qui va avec

Note à elle-même : écrire quelque part que si un jour elle était dans la même situation que Samuel, on pouvait la débrancher direct plutôt que de condamner les autres à compter les jours sans trop savoir quoi espérer. Le bip-bip des machines, ça allait cinq minutes. Tout comme le suspens. (Et l'odeur de l'hôpital, les malades émaciés, les couloirs à n'en plus finir, les vieux échoués sur des brancards déjà à moitié morts, les visiteurs transpirant l'inquiétude, les médecins en oiseaux de mauvais augures, les blessés n'en finissant plus de gémir, les images en appelant d'autres sans arrêt, la légère envie de vomir, la pogne qu'elle donnait à Abel était toujours un peu moite). Yassine n'était pas à l'aise mais venait quand même, parfois (presque tous les soirs), pas toujours avec son fils (mais elle le tenait informé, répondait à son interrogatoire de gamin angoissé). Déformation professionnelle qu'elle invoquait volontiers pour se convaincre, le sens du devoir allait avec la plaque militaire toujours à son cou.

Il s'était réveillé (enfin). Ils avaient du répit (enfin aussi). Cinq jours avant d'obtenir une visite : qu'il puisse se reposer, qu'Abel ne voit pas son père dans cet état (ça avait encore plus retourné le gamin, chez eux, on ne croyait que ce que l'on voyait). Puis elle, qu'est-ce qu'elle en avait à foutre qu'il soit réveillé et de le constater en personne, hein ? Il n'était rien à ses yeux, même pas un ex-mari (tout juste un coup d'un soir). Elle ne s'était inquiétée que de la potentialité qu'Abel devienne moitié orphelin. Que la famille Norton vienne s'intéresser au petit héritier aussi éventuellement. Il n'empêchait que les yeux de Yassine étaient moins cernés et ses épaules moins tendues. Le pas était même léger quand elle se rendit enfin au chevet du docteur, prenant soin de ne pas avoir l'air de s'être languie de trop de son absence.

"Papa !" Le mioche donnait l'air pour deux au moins et la brune se retint de rouler des yeux face à cette effusion qui ne récolterait que des miettes. Il était trop petit pour comprendre que les pères indifférents l'étaient volontairement. "T'as rézon maman, il é révéillé !!" Abel la regardait de ses grands yeux, elle lui répondit mécaniquement d'un poing fermé au petit doigt tendu. Elle avait juré après tout. "Zé compté lé zour. Za fé vin... vin... virgule deux !" Grimace réprimée, dés que Samuel était dans les parages, Abel forçait le zozotement. Tentative pour attendrir le daron en se faisant passer pour plus petit ? Là aussi cela lui échappait que personne n'appréciait les enfants au ton geignard (enfin si, leurs parents ou du moins ceux qui s'en occupaient).

"Maman ?  - elle s'approcha, presque mécanique, posa une main sur l'épaule de son gamin - Papa, tu peu parlé maintenan hein ?" Oui, elle lui avait promis. "Vingt et un". Voilà. On pouvait applaudir le daron et ses mots sacrés, toujours prompt à rétablir la vérité envers et contre tout, l'on repasserait pour le reste (des fois, Yassine avait l'impression de faire face à son père et ça lui faisait très peur sur ses choix de vie). Elle resserra sa pogne d'un iota alors qu'Abel entreprenait de fouiller dans son sac où tout était bien rangé (mouchoirs et pansements décorés dans la petite poche droite, pogs aux effigies de superhéros dans la poche gauche, barda de petit garçon trop sérieux dans la poche principale incluant des livres d'une tonne et demie avec trop peu d'images pour que la brune ne s'y risque).

"Tien papa..." fit le gamin avec plein d'espoir dans la voix. "C'est quoi ?" qu'on lui répondit pour écraser l'espoir en question. Elle aurait du l'étouffer avec l'oreiller pendant qu'il dormait encore. Cinq mots de Samuel et toute angoisse à son égard avait quitté son corps, quel homme rassurant (peut-être un peu dans le fond, elle l'aurait trouvé aimable, adouci, du genre au bord d'une ultime confession pour demander pardon qu'elle aurait fui). "De l'art symbolique." Le ton était léger mais comme Abel était tout contre elle et ne voyait pas son visage, elle foudroyait l'alité du regard. "Le dessin s'est un peu froissé, Ab' le garde dans son sac depuis vingt-deux jours. Il voulait pas que tu attendes plus pour ton cadeau d'anniversaire. T'auras qu'à le mettre sous quelques encyclopédies pendant quinze jours quand tu seras rentré." Elle hésita à ordonner à ce qu'il soit accrocher sur le frigo après ça. "En tout cas Samuel, tu as l'air en pleine forme, ton affabilité n'a pas bougé d'un pou - Maman, za veut dire quoi affabilité ? -  ... Explique ton dessin à Papa."

Elle s'assit sur le bord du lit, le plus loin possible des jambes du malades, fit asseoir Abel à côté d'elle pour qu'il puisse se lancer dans son long discours qui laissait entendre que chaque coup de feutre avait été réfléchi trois jours à l'avance (dommage que les gestes suivaient encore mal la pensée). Thème famille feat supers, les grands classiques, Abel au milieu, les trois silhouettes se donnaient les mains-fleurs aux tiges démesurément longues (pourquoi avait-il juste fait des traits pour les bras alors que tout le reste avait de l'épaisseur ?). Quant à l'ange... "Parce que tu dormais et tu te réveillais pas et la maîtresse a dit que les anges ils pourraient veiller sur toi et et et..." Et bam, les vannes étaient ouvertes, les joues de l'enfant dégoulinaient de larmes et Yassine fixait Samuel, air plus inquiet que menaçant, qui ne voulait que dire s'il-te-plaît, l'abîme pas.

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tw ; négligence parentale, langage grossier

Sa maladresse est bien entendu évidente dans pareille situation et, s'il a bel et bien un alibi cette fois, cela n'arrange bien entendu aucunement le tableau déjà bien garni d'horreurs. Toutes ces fois où il a mit sur les épaules du gamin une pression monstrueuse pour apprendre, où il l'a laissé dans sa chambre sans s'en occuper, l'a biberonné aux kebab plutôt que de cuisiner ne serait-ce qu'un bol de pâtes. L'enfant n'a l'air de lui en vouloir pour rien au monde, semble même avoir oublié ses frustrations passées avec lui, à chaque fois qu'il le revoit pour quelques jours ou parfois, pour quelques minutes, comme aujourd'hui.

La seule qui a encore la décence de lui en vouloir est là elle aussi, et Yassine a raison de faire tourner la roue du karma comme elle le devrait. Il y a pourtant quelque chose de différent à ce moment, probablement parce que Abel est dans un état second depuis des semaines, et qu'il sort enfin la tête de l'eau. Samuel se garderait de dire quoi que ce soit sur sa mutation, sur ce qu'il a vu, entendu, pas à Yass : elle en profiterait. La vérité est que lui pourrait en profiter en premier, pour la mettre dans un embarras sans pareil. Voulait t-il seulement parler de ce qu'il a cru lire sur sa face à certains moments ? Tout ce qu'il avait vu était une mère inquiète pour son fils et dépassée. C'est peut-être ce dont il s'aperçoit aussi encore ce jour, les yeux bien ouverts, la cognition roulée comme une boule de glace à moitié fondue.

Si bien que les considérations de la Warda sont salutaires.

"De l'art symbolique." C'est précisément la raison pour laquelle il ne parvient pas à catch son énergie, comprendre ce que Ab' avait voulu y faire vivre. "Le dessin s'est un peu froissé, Ab' le garde dans son sac depuis vingt-deux jours. Il voulait pas que tu attendes plus pour ton cadeau d'anniversaire. T'auras qu'à le mettre sous quelques encyclopédies pendant quinze jours quand tu seras rentré." Sur le moment, le docteur ne sait pas si elle s'adresse à son fils ou à son vil ex - qui n'est même pas un ex, seulement une erreur de parcours évidente. Les seules encyclopédies encore sorties dans sa villa trop grande, c'est celles qui sont préparées pour qu'Abel puisse s'en imprégner. Finalement, il ne voit même pas l'intérêt de le foutre à cet endroit, même s'il s'était fait étouffer par ses propres envies cyniques et dérangées. Peut-être parce que ça ne l'est pas assez. "En tout cas Samuel, tu as l'air en pleine forme, ton affabilité n'a pas bougé d'un pou" Le concerné s'apprête à lui dire T'es épuisante, mais la pensée est trop lente et les autres trop rapides. "Maman, za veut dire quoi affabilité ? -  ... Explique ton dessin à Papa."

Papa lui jette un regard lourd de reproche à cet instant, comme s'il lui en voulait d'avoir ramené son ressentiment à un moment pareil. La partition n'est pas comme celle qu'ils connaissent d'habitude, Samuel qui réagit comme une Warda blessée par la négligence qu'on porterait à son fils. Ces non-dits, ce regard, c'est comme s'il lui disait : c'est notre enfant.

(Terrifiant.)

C'est d'autant plus ressenti que femme et enfant s'assied sur le bord de lit. Il tend un peu la nuque pour pouvoir voir le dessin dans le bon angle - ou le meilleur, dépendant de ce qu'on voulait vraiment y trouver, sur ce dessin d'enfant. Abel explique avec grandiloquence pour son âge (normal, il tient de son père) mais devient de plus en plus fébrile au fil des secondes, laissant ses yeux et son coeur s'embourber dans des larmes qui témoignent de toute l'inquiétude qu'il a pu avoir pour son papa. "Parce que tu dormais et tu te réveillais pas et la maîtresse a dit que les anges ils pourraient veiller sur toi et et et..." Il se met à pleurer, à en menacer son dessin. Samuel ne sait pas ce qui l'inquiète le plus sur le moment : qu'il abîme ce cadeau ou bien qu'il se mette à noyer son lit déjà de très mauvaise facture. Peut-être qu'au fond, il pense un peu au gamin aussi, ne se l'avouera pas - il ne comprend déjà pas pourquoi il se sent avec si peu de filtres, Norton Jr.

Ni même pourquoi il frotte un peu la tête d'Ab', en récupérant son dessin doucement (il glisse de ses doigts sans aucune difficulté). "Abel ?" L'enfant a du mal à se sortir de ses sanglots, comme l'adulte qui lui, a l'œil brillant et quelque chose d'à son tour coincé dans la gorge. Est-ce que ça s'entend quand il poursuit, il ne sait pas. Si c'est le cas, il préfèrerait ne jamais s'en rappeler. "Tu diras à ta maîtresse qu'ils ont... bien veillé sur moi." S'agirait t-il de lui dire que ces anges ont omit de lui rendre la capacité de marcher comme avant ? L'idée en elle-même le rend mal, voire, en colère - sur le papier. Parce qu'il ne sait pas ressentir grand chose depuis qu'il s'est réveillé, ou plutôt sans savoir le nommer.

Du reste, il n'a pas de mouchoirs à lui donner, c'est à peine si l'on trouve quelque chose d'à peu près humanisant dans cette chambre. Y'a son téléphone mit en mode avion sur la table, un verre d'eau vide, et tout le reste participe au monitoring du patient.

"Merci. Il est cool ton... dessin." Samuel a fait l'effort d'utiliser un langage qu'il n'utilise guère à son habitude, bien plus apprêté pour les tournures péteuses. Abel, l'instant d'après, lui quémande un câlin. C'est bien entendu quelque chose qu'il subit sans rien dire, Samuel, l'air aussi éteint qu'un phare côtier en plein jour. Contre à toute attente, il laisse même sa vieille fringue d'hôpital se faire noyer par l'enfant qui n'arrive alors pas à le lâcher, maintenant qu'il a atteint ces bras qui n'en veulent jamais.

"Je sais pas... quand je ressortirais. J'ai des choses... à faire." souffle t-il un peu plus bas, à l'attention de Yassine, à qui il prête un regard sans beaucoup le soutenir. Il va de soi qu'il l'aurait fait avec tout le venin qui l'habite, d'habitude. Ces choses à faire, il n'en parle pas parce que d'une part, il n'a pas l'énergie pour ça. Cela sous entend surtout une rééducation, un suivi, un traitement stabilisant probablement aussi avant de pouvoir daigner ressortir d'ici. A commencer pour dormir, ce qu'il ne semble pas réussir à faire correctement depuis... "Je te dirais quand... je pourrais le garder à nouveau." Car finalement c'est la seule chose qui les relie encore aujourd'hui, sur le papier comme dans les faits - Abel est la glue qui les maintient, alors qu'ils auraient dû se perdre de vue depuis des années.

Abel encore dans les choux, le visage pressé sur le haut de son père, il déverse à nouveau des choses, des choses qui ont de l'importance pour lui visiblement. "Pourquoi... pourquoi maman t'aimes pas papa... et papa... (renifle) ...t'aime pas maman... pourquoi... (renifle encore une fois)" Si ce n'est pas vraiment le moment de parler de ça, cela coupe la chique à Samuel : l'enfant n'a jamais parlé de ça avant alors que pourtant, cela semble le tourmenter, et pas que depuis hier. Parce que c'est une connasse. C'est ce que son esprit aurait dû lui souffler comme l'évidence, à répondre à lui-même à cette question. A l'inverse, les pensées de la Warda ne doivent pas être très loin de ça non plus. Sauf qu'encore une fois, il n'arrive pas trop à croire à cette phrase devenue automatique, cette fois.

Comme si le mal du marmot venait mettre en lumière le bête et cruel exercice (quasi-rituel) auquel ils s'adonnaient depuis tout ce temps, sans chercher plus loin. Sans doute n'y a t-il qu'un seul adulte dans cette pièce, et il ne s'agit pas de ces deux-là.

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