New perspective | ALICE

Quelques jours s'étaient écoulés depuis les retrouvailles tant redoutées. Et pour retrouver une tranquillité d'esprit toute relative, Darla s'était focalisée sur l'aménagement de cette nouvelle maison, de cette demeure qui devait – pour la toute première fois – être autant sa demeure que celle de Leta. Entre les murs de la villa, la Eyre avait enfin la sensation de retrouver un foyer lui appartenant.

Il avait fallu des années et beaucoup de résilience à l'Originelle pour retrouver sa place dans un monde qui avait continué à avancer sans elle. Il lui avait fallu une pugnacité indéfectible pour que son propre corps redevienne sien.. Et ce, même à temps partiel.

Pour la première fois depuis trop longtemps, Darla se sentait plus apaisée que tourmentée ; elle se sentait plus en phase que défaitiste.

Le destin avait-il finalement terminé de lui faire payer le prix de ses erreurs ?
Elle n'osait le penser.
De crainte de réveiller son courroux.

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La veille ✧ en fin de journée

Bonsoir Alice,
J'espère ne pas te déranger. Accepterais-tu de venir me rendre visite ? Je viens d'acquérir une maison dans les hauteurs de New Blossom. Je ne te promet pas de gâteau pour fêter l’évènement, afin d'éviter une catastrophe.. Par contre, j'aurai un bon vin de déboucher pour l'occasion.

Darla.

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Un verre de vin et le journal devant elle, la Banshee était installée sur la terrasse ombrée faisant face à la piscine. Habillée d’une robe blanche, elle attendait la venue d'Alice. La veille, elle s'était enfin décidée à contacter sa fille afin de la revoir ; tout cela dans l’espoir fou de partager un moment avec elle, en toute simplicité.

Au-delà de cela, Darla souhaitait également s'assurer que les retrouvailles avec son père s'était bien déroulé du point de vue de la jeune fille (car oui, Alice demeurait une jeune fille dans l’esprit de la mère) ; qu'elle avait enfin retrouvée une paix de l’âme ayant surclassé la tourmente de leur histoire. Si l'idée semblait étrangement utopique, la Eyre s'y accrochait pourtant, alors même qu’elle était encore elle-même bouleversée par les retrouvailles avec l'ancien Anderson.

« Du vin et un journal.. Tu es décidément old school, Darling. » Se moqua intérieurement Leta tandis que l'ancienne sirotait son vin blanc.
« Peut-être, mais j'aime les plaisirs simples. »

La réponse provoqua l'amusement de Leta et en écho, le sourire de Darla qui tourna une nouvelle page du journal anglais.

« Dis, Darla ? » L’apostropha ensuite la réincarnée.
« Mh ? »
« Pourquoi est-ce que tu n'es pas plus sur tes gardes avec.. Le vampire ? » Si l’Originelle ne pouvait voir – en toute logique – l’expression de Leta, elle devinait pourtant sa grimace à la mention de Darius.
« C'est une drôle de question.. Pourtant, tu ressens ce que je ressens, non ? »
« Justement. Je ne comprends pas que tu puisses lui pardonner le mal qu'il t’a fait. »
« Et le mal que j'ai pu lui faire, devrait-il ne jamais me le pardonner aussi ? » Demanda Darla, tout à fait sereinement.
« ... »
« Le pardon.. » Entama Darla avant d’être interrompue abruptement par la rancœur de Leta.
« Il ne mérite pas le pardon ! Il t’a buté, bordel ! » Cracha cette dernière dans l’esprit de la Banshee.
« Le pardon ne se mérite pas, il s'offre. Tout est une question de cœur, Leta. »
« C'est bien ça, le problème. Le cœur. »

Darla sourit face à la réponse de Leta et fit le choix de garder le silence tandis qu'une voiture s'engageait dans l'allée menant à la villa Léthé.

Le regard mercure brièvement illuminé d'un éclat irisé, la Banshee n'eut aucun mal à reconnaitre les fils de vie de sa fille et se leva de sa place afin de lui ouvrir les accès sécurisés lui permettant d'atteindre l'allée principale.

Rejoignant cette dernière, l'Originelle arbora un sourire lorsqu'elle vit finalement Alice sortir de la voiture.

« Alice, je suis ravie de te voir. » La salua-t-elle avec enthousiasme en tendant une main dans l'espoir de pouvoir étreindre sa fille.
Diable qu'elle lui avait manqué.

Un sourire comme témoin du bonheur maternel que pouvait ressentir Darla, son regard mercure – lui – observait longuement chaque détail d'Alice. Intuitivement, il était aisé de deviner combien ce regard relevait du besoin ; celui d'inscrire la présence de sa fille dans sa mémoire afin de faire perdre à ses souvenirs leur pleine souveraineté. Aussitôt, la main tendue se changea en étreinte, et tandis que la Banshee refermait ses bras sur la Eyre, elle ne retint aucunement le soupir tranquille qui passait ses lèvres.

Sans jamais avoir pris conscience de son existence, Darla eu la sensation qu’un fossé invisible se comblait tandis qu'elle caressait la chevelure brune de la jeune Eyre logée dans ses bras. C’était étrange et instinctif, et surtout, cela ôta un poids considérable de ses épaules. Pour autant, aux premiers mots d’Alice, Darla ne put s'empêcher de ressentir sa tristesse. Et comme jadis, la mère tenta de réconforter sa fille en la serrant davantage contre elle.

« Tu m'as beaucoup manqué, tu sais ? » Lui confia-t-elle avec tendresse avant de finalement se détacher assez pour venir l'observer longuement. Le regard de la Banshee glissa sur chacun des traits figés dans le temps de la mutante tandis qu'intuitivement, ses iris s'illuminaient d'un éclat irisé pendant qu'elle analysait les fils entrelacés de leurs vies.

En quête de la moindre anicroche à l’âme ou au corps, Darla reportait rapidement son regard sur celui d'Alice. « Tout va bien, Alice ? » S'inquiéta-t-elle en replaçant une de ses mèches de cheveux lentement. Focalisée sur la réponse à venir, elle prit tout de même la main de sa fille pour l'entrainer vers la villa. Surement seraient-elles mieux au dedans que dehors. « Ça a été un long périple, mais ça en valait le coup. » Répondit elle ensuite concernant le fait qu'elle soit là.

Car même si elle le faisait passer dans le silence pudique de souffrances passées, Darla ne pouvait nier qu'elle avait traversé un enfer pavé de bonnes intentions afin de parvenir à cet instant et tous les autres qui suivraient la réunification de leur famille.

Reportant brièvement son attention sur la villa Léthé, la Banshee ne put s'empêcher d'esquisser un bref sourire en entendant la taquinerie d'Alice. Elle revint lui accorder une œillade malicieuse. « Il est plus facile de trouver ce genre de demeure qu'une maison d'époque.. » Sur le nouveau continent, c'était plus qu'une évidence. Darla n'était pas assez vieux jeux pour vouloir reconstruire une maison qui appartenait à l'histoire. « Et puis, Leta voulait absolument une piscine. » Continua-t-elle en contournant ladite piscine alors qu'elles arrivaient bientôt devant la baie vitrée ouverte donnant sur le salon. « D’ailleurs, elle te passe le bonjour. » Lança Darla, tandis qu'une nuance céruléenne se glissait subtilement dans ses iris glacées.

En gage de confiance, Leta ne semblait pas vouloir s'imposer.
Pas cette fois-ci.

« Préfères-tu que nous nous installions à l'intérieur ou sur la terrasse ? » Tandis qu'elles se plaçaient entre le salon et la terrasse, mère et fille avaient le choix.