lost and found (loterie du rp #1)

“If you want your children to be intelligent, read them fairy tales. If you want them to be more intelligent, read them more fairy tales.” @Dani Duarte

Bella n’était pas distraite. Elle était même ce que l’on aurait pu qualifier d’hyper vigilante. La force d’une habitude, non, d’une obligation, prise sur son lieu de travail et qui s’était glissée jusque dans son quotidien. Quand on avait littéralement la vie des gens entre les mains, on ne pouvait pas se permettre d’avoir la tête ailleurs. Alors elle étudiait tout, réfléchissait à tout, planifiait les choses de A à Z sans jamais laisser de place à l’imprévu. Ça laissait peu de place à la spontanéité dans son quotidien, mais les choses étaient mieux ainsi. Au moins, et même si ce n’était pas vrai, elle avait l’impression d’avoir le contrôle de la situation. Enfin, c’était avant que son mari ne revienne d’entre les morts et pulvérise toutes ses certitudes en moins de temps qu’il ne le fallait pour le dire. Depuis, elle avait du mal à mettre un pied devant l’autre sans avoir la sensation de chanceler. Conséquence de cette résurrection pour le moins inattendue, elle avait été contrainte de décaler plusieurs chirurgies et de poser quelques jours de congés. Il s’agissait en réalité davantage d’un arrêt maladie, mais Bella ne voulait pas que la nouvelle se répande. C’était encore trop frais et la dernière chose qu’elle voulait, c’était que tout CERBER se mêle de tout ça. Ça aurait impliqué que son père mette son nez là-dedans – à supposer qu’il n’en savait pas déjà plus qu’elle – et c’était une pensée qui suffisait à éveiller chez elle mille et une angoisses. Alexander aurait bien été capable de précipiter Ehvan dans la tombe alors qu’il en était à peine sorti.  

Les sorties semblaient presque irréelles pour Bella. Ses pensées étaient, hélas, parasitées par tant de choses qu’elle ne se faisait plus vraiment confiance. Elle faisait de son mieux pour garder la tête sur les épaules, pour Rosie, mais elle était au bord de l’effondrement et un rien suffisait à l’ébranler. Elle avait la chance d’avoir Louis et Keith pour la soutenir, mais quand ni l’un ni l’autre ne pouvait être présent, il fallait bien qu’elle assume ses responsabilités de mère. Parfois, il ne s’agissait pas de grand-chose. Comme emmener Rosie dans une librairie parce qu’elle voulait de nouveaux livres d’histoires à lire le soir. Sa mère et Louis avaient sans doute lu tout ce qu’il y avait dans sa bibliothèque, alors il était grand temps de rafraîchir le tout. Bella s’était convaincue, bon gré mal gré, que prendre l’air leur ferait du bien. Et qu’avec un peu de chance, elle trouverait un ouvrage qui lui permettrait d’aborder tous les changements que leur petite famille s’apprêtait à vivre. S’il y avait bien une chose à laquelle elle ne s’attendait pas, c’était que Rosie échappe à sa vigilance dans l’établissement, tandis qu’elle étudiait avec attention deux livres de contes. La petite fille avait appris à ne pas s’éloigner de sa mère, en aucune circonstance. La plupart du temps, Bella la tenait par la main. Elle ne la lâchait pas à moins d’être sûre qu’elle ne risquait rien. Et si Rosie n’avait pas croisé un adorable chiot, elle n’aurait pas quitté sa mère. Mais elle n’avait que quatre ans et l’envie de caresser l’animal l’avait emporté sur toutes les bonnes leçons. Le temps que Bella se retourne, et elle avait disparu dans les allées innombrables de la librairie. La panique fut immédiate, elle lâcha les livres qu’elle tenait et hurla le prénom de sa fille, comme si ce qu’il pouvait lui arriver de pire venait de se produire. Au fond, ce n’était pas loin du compte.


« Maman elle dit qu’il n’y a pas de monstre sous mon lit. Elle vérifie tous les soirs. » Rosie renifla un petit coup, sans quitter la jeune femme qu’elle avait abordée des yeux. Sa mère lui avait dit que si un jour elle était perdue, il fallait qu’elle trouve une autre maman pour l’aider à la retrouver. Elle ne savait pas trop si la dame avait des enfants, mais elle avait l’air gentille. Quand elle lui demanda à quoi ressemblait sa mère, elle fronçait les sourcils, réfléchit un instant et pointa du doigt une dame qui avait la même couleur de cheveux et un manteau qui ressemblait au sien, mais ce n’était pas sa maman. « Mais non, c’est pas ma maman… » Qu’elle essaya bien de bredouiller, mais à voix trop basse pour être vraiment entendue. Mais puisqu’elle ne voulait pas risquer de se perdre encore une fois, elle suivit bien sagement la jeune femme en direction de l’inconnue, qui eut toutefois vite fait de leur dire qu’elle n’était absolument pas celle qu’elle recherchait. Et pour cause, songea Rosie : elle ressemblait plutôt à une mamie qu’à une maman. « Ma maman, c’est la plus jolie. » Très bien, mais ça n’arrangeait pas trop leurs affaires, cette description pleine d’affection. Rosie réfléchit un peu plus fort ; comme quand Louis lui demandait de faire la liste de ses dinosaures préférés. « Et puis elle est grande, blonde, avec les yeux bleus… Oh, elle a mon sac à dos ! Il est rose, avec une licorne et des paillettes. » Pour la petite, c’était une description tout ce qu’il y avait de plus fidèle. Il aurait sans doute mieux valu qu’elle donne le prénom de sa mère à sa sauveuse, mais maman était… Eh bien, maman. Et puis d’un coup, un petit sursaut, et elle tire de nouveau sur la manche de celle qui voulait bien l’aider. Elle lui désigne le rayon des bandes dessinées et des comics, comme si c’était l’endroit le plus important du monde. « On est passées par là, et puis après on est allé voir les livres… Et après j’ai vu un petit chien, je l’ai suivi et je me suis perdue… » Rosie regarda encore une fois ses chaussures, toute gênée. « Tu crois que maman va être fâchée… ? »

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