The Devil wears Prada ;; Zohra

“The greater the artist, the greater the doubt. Perfect confidence is granted to the less talented as a consolation prize.” @Vico Caruso

Affalée sur le canapé de son immense salon, Zohra était entourée par ses félins de compagnie. Il y avait six chats, chez elle. Tous adoptés depuis des années, chouchoutés comme de véritables enfants que l’on aurait drapés dans le luxe dès leur naissance. Il y avait Keli, chat des forêts norvégiennes, énorme bête caractérielle qui ne tolérait être caressé que par sa maîtresse. Venait ensuite la somptueuse Sekhmet, Bengale aussi vive qu’elle était jalouse, toujours à essayer de détourner l’attention de Zohra de ses semblables. Puis il y avait Bagheera, le chat noir aux yeux dorés qui avait le chic pour disparaître dans le penthouse – parfois pendant des jours – pour ne réapparaître que lorsque son estomac se rappelait à lui. Éternellement dans les pattes de Zohra à miauler de tout son saoul, il y avait Nina la siamoise. Celui qui ne demandait rien, qui était juste content d’être là et n’avait pour seule motivation dans la vie que son bol de croquettes, c’était Charlie, le gros chat de gouttière à qui il manquait un œil, que Zohra avait trouvé un soir dans un parc et avait ramené chez elle sur un coup de tête. Et le petit dernier de la fratrie, encore chaton, Topaze, l’Abyssin pour lequel elle avait craqué. Une parfaite petite famille féline, que Zohra était toujours susceptible d’agrandir. Tout juste était-ce si elle savait se retenir de vider tous les refuges de la ville – après tout, il y avait de la place, chez elle. Mais puisqu’il fallait apparemment être raisonnable, quoique le mot ne fasse pas partie de son vocabulaire, elle se contentait de faire des dons conséquents, comme elle le faisait pour les associations de protection des grands félins qu’elle avait fondées. N’en déplaise aux mauvaises langues, elle ne faisait pas que dépenser sa fortune en haute couture et en joaillerie hors de prix. Même si, il fallait bien l’admettre, son dressing débordait.

Verre de vin en main, Zohra caressait machinalement le pelage parfait de Nina, qui ronronnait de bon cœur. Elle haussa un sourcil lorsqu’une notification apparut sur son téléphone, lui signalant une intrusion chez elle. N’étant pas de nature inquiète, elle se contenta d’observer l’écran un instant, avant qu’un sourire ne vienne étirer ses lèvres. Elle avait reconnu le petit geste de la main, fait de façon à ce que la caméra ne le manque pas. Elle s’enfonça un peu plus dans son assise, tandis que Keli venait se frottait à ses pieds. Elle n’était pas rentrée chez elle depuis très longtemps, comme en témoignaient les escarpins abandonnés à quelques pas, le sac à main balancé sur un coin du canapé, le tailleur sur-mesure pas encore troqué pour quelque chose de plus confortable. « Je prends toujours soin des remarques de mon grand frère adoré. » Elle leva son verre à la santé de son frère lorsque sa silhouette apparut finalement. C’était vrai – elle avait renforcé son système de sécurité sur ses conseils. Elle n’était pas sûre que ce soit utile, puisqu’elle vivait dans l’un des immeubles les plus sûrs de New Blossom et Neo Arcadia. Mais si ça suffisait à le rassurer, alors Zohra n’y voyait aucun désavantage. Elle avait même accès aux caméras du penthouse sur son téléphone, ce qui lui permettait de surveiller sa petite tribu quand elle n’était pas chez elle. Sans doute pouvait-elle se vanter d’avoir les chats les plus à l’abri du monde. « Quoi ? Toi, tu oserais tenter de m’assassiner dans mon sommeil ? Tu me brises le cœur. » Elle grimaça de façon exagérée, porta une main à son cœur, puis ricana. « Tentative de fratricide, je suis sûre que ça ferait grimper en flèche ma popularité. De quoi me retrouver en haut des tendances sur les réseaux sociaux. Je vais garder l’idée dans un coin. » Elle fit un petit clin d’œil à Vico, puis tapota la place à côté d’elle pour qu’il vienne s’y installer. Enfin, s’il trouvait un coin de coussin pour s’asseoir, entre deux chats. « Je me porte comme un charme, comme tu peux le voir. » Zohra n’était pas dupe. Elle se doutait bien que ce n’était pas tout à fait une visite de courtoisie – le timing était suspect – quand bien même Vico et elle avaient pour habitude de se voir régulièrement. « Alors, dis-moi tout. T’es venu pour me féliciter ou m’engueuler ? » Même pour quelqu’un qui ne passait pas sa vie sur les réseaux sociaux, impossible de passer à côté de son audition tapageuse pour la nouvelle équipe de Theseus. Zohra, superhéroïne en devenir ? Le verdict tomberait bientôt.

made by valkyrja