:: The Wasteland :: Les archives :: RPs archivés :: RPs abandonnés
everytime we meet, we'll be different version of ourselves
(#) Mer 19 Juin - 12:34
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
and again
ang again
La gravité sur la terre n’est plus quelque chose à laquelle elle est habituée. Le pas est toujours gauche, sur le full-g, malgré les sessions hebdomadaires pour ne pas oublier ce qu’il en est. Ce n’est pas une question de mémoire musculaire, car plus rien ne rapproche Rapha de cette définition. C’est comme se retrouver, éternellement, dans une nouvel endroit, une impression de déjà vu, tout en se sentant en décalage avec le reste du monde.
Et ce sentiment déchirant, qu’il lui manque quelque chose.
La Lune.
Il n’y a qu’une personne qui n’ait jamais réussi à lui faire sentir de la sorte.
Et Rapha est sur le point de la retrouver.
Une visite inopinée, même pas annoncée.
Rapha était juste dans le coin avec sa navette spatiale et son assistant lui a rappelé que Jeremiah Thompson était mort depuis deux mois maintenant. Ca aurait dû la marquer, une demande d’Icarus de rejoindre le fleuron des Sept.
Le mail était dans ses spams.
Elle ne sait pas ce qu’elle dira à Maeve. Ne sait pas s’il y a quelque chose à dire.
Ne sait pas si Maeve aimait l’homme-loup.
Si elle l’a jamais aimé.
Des considérations terrestres.
Rapha ne pense pas à ces choses.
Elle a arrêté de porter le bracelet qui lui a été offert dix ans auparavant, le token envoyé dans l’espace où leur possible appartient: nulle part.
Rapha sait ceci: Maeve l’a aimé.
Mais elles appartiennent au passé.
Il n’y a pas que le monde qui a changé.
Rapha n’a plus tellement vieilli, ses cellules qui se calment, en partie due à la mutation qu’elle porte tout le temps sur la Lune. Maintenant, se peau de chair semble être le masque et le derme la démange désagréablement sous sa combinaison de ranger de l’espace. La matière synthétique est pourtant à la pointe de la technologie, élégante et cinglée de ce Wayne sur la poitrine.
Le nom a gagné de l’importance, n’est plus qu’au-dessus d’une tour de New Blossom.
Il est dans l’espace aussi.
Elle n’a quand même pas eu le mauvais goût de cinglé la Lune de son patronyme.
Mais tout le monde sait, maintenant, quand iels voient la Lune, qui est derrière. (quelques jeux de pouvoir et de menaces ont été payants).
La NAVI s’est arrêtée sur le parking des voitures volantes, Rapha est descendue en congédiant son assistant pour la fin de son cycle de travail. Il n’y a pas eu une demande, une négociation. Peu osent la contredire aujourd’hui.
Elle ne sait pas si elle aime ça.
Elle monte les quelques marches qui mènent à la porte de la demeure des Thompsons. Quelques fleurs fraiches sont encore déposées devant la porte. Elle étudie tout cela avec le regard neutre, le visage inexpressif. Les portes s’ouvrent sans qu’elle n’ait à s’annoncer et elle croise la surprise de la gouvernante. “Marshal Wayne?” Les titres changent aussi. “We haven't been informed of your venue. – I’d like to say I’d swing by another time, but you might guess it’s not something I do easily.” La femme en charge se décale, pour laisser l’invitée inattendue rentrer. “I’m here to see Maeve.” Rapha sait qu’elle est là, ne demande même pas la confirmation.
Ne demande pas l’autorisation non plus.
Une figure au bout du couloir attire son attention.
Et c’est particulier, ce qui s’éveille chez Rapha.
Ce n’est pas une sensation, ni une émotion.
C’est l’émulation.
Ce qu’elle s’est jouée, infiniment dans les méandres de ses méditations, jusqu’à le créer au moment venu.
“What do you want with mum?” Le simili se plaque sur son visage, qui s’anime pour la première fois de fausses émotions. Caméléon des interactions sociales. “That’s a very good question. What’s your name?”
Rapha n’a pas besoin d’entendre la réponse, l’a déjà reconnue.
Marama.
Elle s’approche jusqu'à l’adolescente, prétend ignorer la sensation qu’elle sent fourmiller au loin.
La mère, en effet, n’est pas loin.
(#) Dim 23 Juin - 15:43
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
You’ll be the end of me, one day.
Il lui arrivait de dire ça à Maeve, après une dispute ou une demande excessive, et c’était censé être purement ironique parce qu’ils étaient presque sûrs que même la vieillesse ne l’emporterait pas. Increvable selon lui, il prétendait même avoir survécu à une explosion atomique, et elle hochait la tête avec un petit sourire pour ne pas perturber le récit que Marama gobait avec des étoiles dans les yeux. Son père, ce héros, un monument humain, une quasi divinité, qui croulait sous l’admiration du monde entier et ne trouvait de cocon d’humilité que dans les bras de sa femme qui mangeait la fureur de sa bête pour le calmer.
Invulnérable et pourtant…
Invincible, sauf si Icarus s’en mêlait.
World’s most beloved hero gone
Wolfman’s last fight
Farewell to a titan: the iconic werewolf passes away
Wolfman’s final roar
Not just a hero, a legend: Wolfman dies at age 64
Wolfman’s last fight
Farewell to a titan: the iconic werewolf passes away
Wolfman’s final roar
Not just a hero, a legend: Wolfman dies at age 64
Elle recevait encore chaque jour des fleurs, des lettres de fans, des dessins, des cadeaux, une avalanche d’attentions qui ne lui étaient nullement adressées mais dont elle lisait le contenu en espérant trouver quelqu’un qui puisse faire réellement écho à ce qu’elle ressentait.
Quand on est une éternelle mélancolique, le deuil est censé être bienvenu. C’est un amalgame de ce qu’elle connaît le mieux, la tristesse, la nostalgie, l’impression vague de ne pas être en phase avec le monde ; c’est toute une période pendant laquelle on l’autorise à sombrer dans ses abîmes. Mais ce deuil là est étouffant de culpabilité et de solitude. Il n’aurait jamais dû arriver et il n’a rien de familier, c’est le poids du monde et elle n’a pas les épaules pour le porter.
Maeve ne saurait dire exactement à quel stade du deuil elle était réellement. Elle avait passé le premier mois à courir les hommages internationaux et à enchaîner les rendez-vous juridiques autour de l’héritage et ne se laissait du temps que pour gérer vaguement Marama et dormir. Dans le miroir, elle a vu le coup de vieux du jour au lendemain, quelques rides sur le front, des tâches de vieillesse, des cheveux blancs et des cernes sombres comme le fond d’un canyon.
Quand les obligations sont devenues moins nombreuses, ses cauchemars ont augmenté. Elle se nourrit à peine, est torturée par ses démons et se gave de calmants pour ne pas céder aux crises d’angoisse.
Elle est misérable, le coeur lourd, un fantôme d’elle-même comme si c’était elle qu’Icarus avait abattu sans sommation. Dans son ventre, il ne reste qu’un fond de cette fougue bestiale qu’elle lui a grignoté avant sa mort et depuis elle n’a pas ingurgité la moindre émotion de peur de noyer et de perdre la dernière chose intime qu’elle a de lui. L’empire qui lui est légué a un goût de fade. Vingt ans auparavant, elle serait tombée à genoux et aurait remercié le ciel de se savoir aussi riche, tout aurait été éclipsé par la liste de propriétés qui sont désormais à son nom. Mais elle avait passé vingt ans à porter son nom et à l’avoir sous la peau, à le haïr de toutes ses forces et à crever de ne pas l’avoir contre elle avant de dormir. Vingt ans d’une relation trop loin de l’idylle pour être qualifiée d’amour, mais vingt ans d’eux quand même, et maintenant, elle était censée vivre sans lui ?
On l’évitait dans sa propre maison. Le personnel rasait les murs et baissait les yeux comme s’ils avaient peur de croiser son regard vide et son air hagard. En réalité, ils craignaient son marasme émotionnel, son néant intérieur, ses crises de larmes spontanées, ses colères intempérées et surtout, ils craignaient cette vague de détestation qu’elle trainait et qui était entièrement tournée vers elle. Marama avait dû intervenir plus d’une fois, bloquant la mutation de sa mère pour éviter que toute la maison ne coule avec la maîtresse des lieux.
Aujourd’hui pourtant, on vient frapper à la porte de sa chambre - qui est en réalité une chambre d’ami qu’elle a investie parce qu’elle se sentait incapable de dormir dans leur lit. La responsable de la sécurité est mollement invitée à entrer. Leurs entrevues sont quasi quotidiennes, car nombreuses sont les tentatives de lambdas et paparazzis à vouloir entrer dans leur espace pour rendre un dernier hommage au Sept ou pour espérer chiner un cliché de la maîtresse éplorée, titre qu’elle portera toujours, même si son mariage à Jeremiah a duré aussi longtemps que celui entre Bonnie et lui. Sa mort a été le rappel brutal qu’elle bénéficiait d’une aura de protection grâce à lui, aura désormais poreuse, malgré ses propres accomplissements et sa propre machine médiatique.
Elle pense donc en voyant Arte qu’elle aura droit à un nouveau rapport de toutes les intrusions repérées et gérées par le service de sécurité nec plus ultra payé rubi sur ongles pour garder un semblant de vie privé autour d’elle. Il n’en est rien. “We just let a vehicle in.” Maeve hausse un sourcil, curieuse de savoir quelle personnalité a foulé le parvis de sa demeure pour chambouler les habitudes de sa garde rapprochée. Arte étant très économe en mot, elle préfère déployer les images holographiques capturées par les caméras et les drônes qui sillonnent le parc autour de la villa Thompson. “It’s a Wayne Corp’s space ship and we think it belongs to… - Rapha?” C’est un sursaut, dans sa voix et dans son corps, alors qu’elle observe, incrédule, Raphael Wayne descendre de sa navette, dans un uniforme estampillé de son nom en gros. “Should we send her back?” Maeve secoue la tête en se relevant de son bureau. “No, it’s fine. I’ll meet with her. Let her in.” D’un hochement de tête, la cheffe de la sécurité accepte les instructions et s’éclipse discrètement pendant que Maeve appelle directement la cuisine pour informer de l’arrivée imprévue d’une invitée de marque.
Avant de sortir de la chambre, elle ose un coup d’oeil dans le miroir en pied. Elle est amaigrie, fatiguée, son pantalon n’est pas parfaitement cintré sur ses hanches qui ont fondu. Pour la première fois depuis longtemps, elle fait presque son âge, les altérations cosmétiques ne semblent pas tenir le coup face à sa peine. On pourrait croire que les années de pratique lui ont donné un masque impossible à fissurer, automatique, une carapace solide qui s’épaissit d’année en année, mais la lassitude l’a rongée de l’intérieur. Elle n’arrive plus comme avant à faire semblant. Ces dernières années, elle avait commencé à se retirer de la scène publique, après le clap final de son émission. Elle se sentait mieux derrière les caméras, là où on ne pourrait pas capturer de minute en minute l’âge qui s'agrippe à elle. Bien évidemment, ces deux derniers mois ont remis son visage à la une et son nom dans les circuits médiatiques, double peine, de subir et le deuil et la critique du monde entier.
Quand elle ouvre la porte, Orya, se trouve de l’autre côté et sursaute. Elle continue de porter son uniforme de gouvernante, quand bien même Maeve lui a dit qu’elle pouvait porter ce qu’elle voulait. C’est une femme d’âge mûr également, qui travaille dans cette maison depuis presque dix ans, le genre de personnel qu’on garde précieusement, pas seulement parce qu’elle est indispensable, mais parce qu’elle connaît trop de secrets. “I know,” coupe immédiatement Maeve. “Where’s Mara?” Orya regarde vers le bout du couloir qui mène aux escaliers qui descendent sur le hall. “Downstairs. I didn’t see her coming." La maîtresse de maison hoche doucement la tête. “It’s okay, I’ll go greet her.”
Avant qu’elle ne s’extirpe, la gouvernante réarrange le pull de Maeve, rentre proprement un pan rebelle dans le pantalon. Il y a un dernier échange de regard, elles n’ont pas besoin de parler parfois.
Marama danse d’un pied sur l’autre, pleine d’une énergie étrange, qui crépite dans l’air et chatouille sa langue. Elle n’a vu le marshal Wayne qu’en photos et en vidéos, mais a l’impression de la connaître personnellement, peut-être parce qu’elle vit autant dans les récits de sa mère que dans le morceau de pierre lunaire qui repose dans un cube de verre sur une étagère de sa chambre. “I’m Marama,” elle annonce, gargarisée de fierté, et elle s’approche de la magnat de la lune pour lui serrer la main, dans un geste bien trop adulte pour son âge. Elle se prépare pour les caméras.
Il y a tout de même un brin de méfiance dans la poigne, dans son regard qui scrute éhontément le visage de Rapha. Que veut-elle vraiment à sa mère ? Pourquoi venir maintenant ?
Si sa mère a insisté pendant longtemps sur le fait qu’elles étaient de simples amies, Marama avait fini par atteindre l’âge d’avoir son propre téléphone et donc un accès presque sans restriction à internet. Une simple recherche sur ses parents lui avaient appris bien plus qu’elle n’aurait dû savoir et elle avait fait payer pendant longtemps à Maeve et Jeremiah de lui avoir caché autant de choses. Elle détestait cette excuse qu’ils avaient, qu’elle comprendrait quand elle serait plus âgée, parce qu’elle était pleine de cette arrogance adolescente, convaincue d’en savoir plus sur le monde que le monde lui-même.
Elle tient plus de son père que de sa mère, elle est grande pour son âge, le visage rond, les yeux allongés, le teint hâlé, une posture qui se veut intimidante et une carrure athlétique. Ses longs cheveux bruns sont relevés dans une tresse haute et elle est simplement vêtue d’un short noir et d’un long tee-shirt à l’effigie des Sept. “Did you just get back from the moon?”
La question est précipitée, parce qu’elle n’a pas beaucoup de temps ; tout comme Rapha, elle sent le nuage particulier d’émotions arriver. A la différence de l’invitée surprise, elle sait où regarder cependant, et elle lève aussitôt la tête vers le balcon au-dessus d’elles.
Depuis deux mois, sa mère ne lui a jamais paru si humaine. Sans apparats, sans luxe, sans masque, imparfaite, les cheveux bouclés et sans discipline, la peau nue qui perd en élasticité, elle ressemble à n’importe qui, loin du plastique photo. Bizarrement, ça l’aide de voir ça, elle se sent validée dans sa tristesse, elle se sent libre de pleurer son père quand le monde entier pleure un inconnu. Et puis c’est comme une preuve qu’après tout, ses parents s’aimaient, malgré tout le reste.
La pointe de méfiance revient tout de même, dans le très bref silence qui s’installe alors que Maeve regarde Rapha du haut de son balcon et que leurs yeux semblent communiquer quelque chose, indéchiffrable pour elle. “Raphael.” La voix éclaircie et posée de l’ancienne présentatrice brise enfin la tension. “I didn’t think I’d see you again.” Le constat est posé là, traverse immédiatement une décennie pour les ramener à des adieux tendres et sans effusion.
Maeve descend les marches jusqu’à arriver à la hauteur de sa fille, dont elle entoure les épaules avant de déposer un baiser sur le haut de son front. “Honey, would you mind leaving us for a moment?” L’adolescente renvoie une expression indignée vers sa mère, mais la protestation tombe immédiatement en croisant les prunelles sombres dont elle a héritées. Elle adresse tout de même un dernier regard à Rapha, ses sourcils froncés passent de l’une à l’autre, comme une mise en garde : elle ne sait pas exactement laquelle des deux protéger de l’autre. “Can I come back before you go? I have a lot of questions.” Elle s’adresse directement à l’ancienne héroïne, parce qu’elle sait que si la milliardaire donne son accord, sa mère ne saurait leur refuser ce moment, par pure règle de politesse.
Quand elle retourne enfin au bout du couloir, sûrement vers la salle de sport, Maeve finit par ouvrir un bras pour guider l’invitée surprise vers un salon de réception où le personnel s’affaire à déposer le thé à l’anglaise et un plateau de victuailles. “To what do I owe the pleasure?”
(#) Ven 28 Juin - 10:03
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
and again
ang again
“I’m Marama.” Le I know est retenu, Rapha a appris à ne pas tout donner à la première personne venue. Mais il est sincère, portrait craché de ses parents, l’image gravée dans un coin de son esprit (celui des possibles), et on oublie difficilement l’enfant le plus prometteur de sa génération.
Elle se demande la pression sur les épaules de Marama, l’échelle à laquelle elle se mesure.
“No, I was just around.” Le sourire est poli, doux, entraîné, les lèvres qui s’étirent doucement dans une vision que Rapha offre rarement au monde. Loin de la vision rigide de l'impératrice de la Lune.
Pourtant, à la vue de l’adolescente, c’est surement un mensonge, un chronomètre qui rappelle que ça fait 6 heures et 42 minutes que Rapha a quitté l’environnement stellaire, pour se replonger dans l’atmosphère terrestre. Ce qui anciennement la gardait en vie.
Le regard de Marama se détourne et Rapha suit le mouvement. Il y a un œil vivant et un œil de pierre qui se posent sur la figure au sommet des escaliers.
Rapha sourit différemment.
Avec les yeux, avec l’usure du cœur et de la solitude.
Elle observe l’affre du temps sur Maeve, une coup de burin dans sa roche qui lui rappelle que le monde existe en dehors d’elle.
Que le monde existe sans elle.
(le monde, par contre, pourrait-il exister sans Maeve?)
“I didn’t think I’d see you again.” Rapha baisse doucement la tête, penche le visage vers le sol, l’amusement dissimulé par l’angle. Et puis, c’est presque enfantin, quand elle relève les yeux. “I can leave and pretend it never happened.” C’est joueur, dans une dynamique qu’elles n’ont que rarement eu.
Elles ne sont plus les personnes qu’elles étaient.
Les interactions seront peut-être nouvelles, elles aussi.
La figure maternelle prend place autour de l’enfant et Rapha les regarde faire tranquillement. Sa posture est détendue, aucun muscle qui ne bouge, aucun cil qui ne tremble.
Pas même la sphère lunaire qui remplace son oeil gauche.
Ses mains sont jointes dans son dos et on dirait à peine qu’elle respire.
Rapha n’est pas jetée dehors et l’expression amicale reste sur ses traits. “Of course. But I’ll only answer to five of them, and some answers might be classified.” L’aisance avec les enfants est particuliers, si elle ne s’entoure que rarement de jeunes, il y a une connexion simple qui se faite.
Il n’y a pas le vice des adultes et du monde en eux, encore.
Elle en voit si peu, sur la Lune.
Éternellement calme, elle suit Maeve, un regard qui coule sur le lieu, sans s'intéresser à la richesse de la décoration. Elle reconnaît néanmoins la griffe de Maeve sur certaines pièces, même une vieille peinture qui était dans son appartement.
Son regard se plisse doucement au souvenir.
Elle ne s’y attarde pas.
“I was around”, recommence Rapha, qui a la douce impression d’être un perroquet. Comme s’il était si difficile à concevoir, que la milliardaire puisse venir sans raison ultérieure. Comme si le monde (ou sa société) n’avait pas besoin d’être sauvé pendant deux heures. Elle considère un instant l’assise qui lui est proposée et elle fait preuve d’un trait de concentration en plus pour s’asseoir dans le canapé. Son estomac se révulse doucement à la sensation de tomber, et s’apaise quand elle est installée. Les muscles se détendent, elle échappe un petit soupir.
La rigidité, pourtant, semble toujours réelle, combinaison invisible au-dessus de celle flanquée de son nom. Rapha doit se rappeler de ce qu’elle veut sentir, avant que l'énergie ne change doucement, la posture qui s’ouvre, malgré les jambes croisées. Les épaules se dégagent, elle lève un peu le menton.
Retrouve la vision de Maeve. “I wanted to see how you are.” C’est sincère, réellement intéressé. “Make sure you’re…” Elle hésite sur le choix de mot, plisse un peu les sourcils.
Comment se sentait-elle, quand elle avait perdu Shishi?
Elle ne se souvient pas vraiment.
“surviving through the motion.”
Parce qu’il n’y a pas de mot, vraiment.
Pas décrire le deuil.
(#) Jeu 11 Juil - 13:23
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
Le visage presque inchangé de Rapha se pare d’une expression joueuse et Maeve jurerait voir la femme qu’elle a connue vingt ans plus tôt. Leur dernière rencontre était pourtant plus incisive, pointue comme une lame de pierre dans laquelle la milliardaire est taillée.
Maeve ne répond pas, hausse à peine un sourcil, l’idée d’analyser la situation lui effleure vaguement l’esprit mais il y a des montagnes entre elle et son pragmatisme. Elle n’est plus qu’une poche de chair remplie d’émotions. Elle laisse les choses venir, elle laisse l’une des femmes les plus puissantes au monde (l’espace compris) la suivre et s’installer sur un fauteuil. Elle ne croit pas une seule seconde que ce soit le fruit du hasard, qu’elle passait simplement par là, les restrictions de vol dans l’Aerium rendent ce genre de coïncidence compliqué.
“I wanted to see how you are.” La vérité frappe différemment, trouve un chemin qui titille le marasme émotionnel et l’agite tant et si bien que Maeve en a presque immédiatement la gorge nouée et le regard fuyant. Une part d’elle en veut directement à l’invité surprise. De quel droit venait-elle dans sa demeure familiale après n’avoir donné aucune nouvelle en dix ans ? En quelle qualité est-ce que Raphael Wayne se présentait devant elle ? Vingt ans plus tard et il n’y a qu’un souvenir, qu’elle chérit toujours tendrement sans pour autant s’y attarder longuement. Elles ne sont pas amies. Et pourtant elle est là, à lui demander comment elle survit à toute la situation. Mal, évidemment, et pour quelques personnes ça avait été surprenant de constater son chagrin véritable. Nombreux doutaient de la sincérité de l’union, parce que comme tout ce qui se passe dans leur monde, c’est né d’un coup de pub, d’un arrangement d’Icarus. Mais l’origine transactionnelle du mariage n’efface en rien les deux décennies vécues l’un avec l’autre, n’en déplaise à toute la classe médiatique.
Et qu’est-elle censée répondre ? Il y a tant de versions de l’histoire mais dans aucune d’elle elle ne parvient à exprimer le sentiment qui la tient réellement à la gorge : une profonde culpabilité. “I’m surviving.” Maeve déclare tout bas avant de prendre place au bord du fauteuil, la posture droite. C’est ce qu’on a beaucoup retenu d’elle, sa dignité, son port altier en toute situation, son air grave et triste mais aucune effusion, parce qu’elle est une personnalité publique et à ce titre, il faut qu’elle garde ses travers privés. “I have to.” La réalité transparaît dans ses trois mots. Il faut qu’elle tienne, pour le nom, pour l’image… et pour sa fille.
C’est bien la première fois qu’elle ne sait pas comment se comporter avec la femme en face d’elle. Trop de temps passé, un long silence, des émotions qui appartiennent au passé… Alors elle fait face comme avec une vague connaissance, une inconnue de son milieu, de relation mais pas de nom. “I’m still dealing with tons of paperworks. There seems to be no end to it.”
Une employée de maison prend leur préférence en matière de thé avant de dresser un présentoir avec des petits sandwichs, des biscuits, des macarons et des fruits. Maeve garnit son assiette de quelques fraises et cerises et croque la plus infime bouchée d’un macaron à la pistache. “When did you come back?” Elle demande sur le ton du badinage qui cache pourtant mal la vraie nature de sa question : why did you come back.
(#) Ven 12 Juil - 8:37
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
and again
ang again
“I’m surviving. – It’s good to hear.” Rapha aurait voulu dire I had no doubt, mais alors la visite n’aurait pas été justifiée. Elle a cet instinct, cet opinion, que Maeve est la femme la plus fort qu’elle connaisse. Ce n’est, bien entendu, pas une question de muscles ni de pouvoirs. C’est une question de résilience.
Maeve est capable d’accuser les coups du monde avec les dents serrées, et de faire croire aux caméras qu’elle sourit. Rapha n’a aucun doute, vraiment, que Maeve ira bien.
Ce n’est pas pour ce futur qu’elle s’inquiète.
C’est pour le présent.
Que Maeve ne lui donne pas l’occasion de voir. Ce n’est pas comme si Rapha s’attendait à ce que Maeve vienne s'effondrer dans ses bras, en veuve éplorée. “I have to. – You will.” Elles se parlent sans s’entendre, sans se comprendre. C’en serait presque frustrant, si Rapha pouvait encore ressentir ces émotions indésirables, que chaque retrouvaille est incapable de reprendre où elles en avaient été, dix ans auparavant.
Mais Rapha n’est pas la femme de sa vie.
Rapha n’est la femme de la vie de personne.
Et c’est tant mieux. Elle ne sait pas quand sa vie prendra fin. Pas comme ça.
“I can barely imagine. Thompson must have had a load of special contracts.” Rapha a la politesse de ne pas demander à propos de NDA, qui doivent aussi valoir leur pesant d’or et de cauchemar. Icarus doit garder un oeil sur Maeve, maintenant que son loup gardien est parti. Rapha, surtout, a le bon sens de ne pas offrir de conseils légaux (enfant de la filiale légale Wayne, avant de bâtir son empire dans la filière spatiale). La question soudaine lui fait détourner la tête de la maid à qui elle vient de demander un english tea, et il y a ce creux d’une seconde, entre le moment où Rapha entend ce qu’on lui demande et elle se rappelle qu’elle doit afficher une réaction, une émotion. L’absence d’expression est chassée par un trait de réflexion, l’intéret qui brille dans son regard. Rapha l’abaisse sur la montre qui cintre son poignet, étudie le chronomètre. “A tad more than eight hours. Even though, nowadays, I wouldn’t call that coming back.” L’évolution de la technologie fait qu’il lui faut tout juste une heure pour rentrer sur la Lune, quand le corps stellaire est aligné. “My initial engagement got settled faster than expected.” Elle ne précise pas ce qu’il en était. “And I wasn’t feeling like going back.” Rapha a pleine conscience que cela fait passer sa visite comme un caprice.
Elle ne cherche pas à se rattraper, se corriger.
Elle aime l’idée, que Maeve n’ait été qu’un caprice.
Ca lui donne moins d’importance dans l’histoire de sa vie.
(#) Lun 15 Juil - 5:10
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
Les échanges sont plats, contraints par la bienséance qu’elles observent par pudeur. Le territoire est inconnu, parce qu’elle ne sait pas comment elle a le droit de se comporter, ce qui convient réellement. Maeve ne se voit pas reprendre la conversation de dix ans plus tôt et encore moins celle de vingt ans plus tôt et ça devient rageant ces occurrences du temps qui les met l’une face à l’autre à chaque décennie. Jamais elles ne s’oublient vraiment. Elle ne sait même pas si c’est possible, tellement le fantôme de Rapha a hanté parfois son mariage, tapant dans les insécurités de Jeremiah quand il voyait le regard de sa femme dériver jusqu’à ses abîmes nostalgiques.
Ce goût pour le passé fantasmé a fini par lui passer. Il y a toujours les scénarios, les et si cruels qui lui dictent une vie sans les erreurs commises. Dans cet autre monde, il serait toujours là, dans cet autre monde, ils ne seraient pas mariés, peut-être même qu’elle était une Wayne plutôt qu’une Thompson. Plus récemment encore, elle s’est imaginée un monde dans lequel elle s’appartenait finalement, pour peu que ça existe réellement. Comme le souligne Rapha, Jeremiah faisait l’objet de nombreux contrats, et par extension, elle aussi. La bataille juridique qui a toujours lieu ne porte plus du tout sur les possessions, les maisons ont été triées sur le volet, cédées soit à Maeve, soit à Saul, la fortune a été répartie, un trust fund a été ouvert au nom de Marama, ces questions ont été expédiées sans problème. Ce sont des questions d’image qui continuent de donner du souci aux différents avocats, malgré le travail acharné de Jeremiah ces dernières années pour récupérer de plus en plus d’autonomie sur sa personne à travers son propre empire médiatique. Force est de constater qu’il est toujours un pion d’Icarus, même dans sa mort, et c’est le même sort qui l’attend et attend sûrement sa fille qui ne se sort pas de la tête de faire honneur à son père en intégrant les Sept.
Dans ce contexte lourd, parler de la lune a quelque chose d’un doux rêve. Un lieu où toutes ces luttes n’ont pas de sens, où elle n’est personne, comme si sa célébrité et ses problèmes ne passeraient jamais la limite de l’atmosphère. Sa part la plus nihiliste envie la pierre lunaire et son immuabilité, sa capacité à se fondre dans le satellite et dépasser son humanité en devenant un astre. You’re gonna watch me disappear into the sun.
A demi-mots, Rapha lui fait comprendre que ce détour n’est pas prévu, c’est un geste ou une distraction, l’interprétation est libre, mais a priori ce n’est rien de calculé. L’idée dénoue des fils de tension et Maeve se permet alors de s’enfoncer dans le fauteuil, cassant sa posture impeccable pour laisser voir sa lassitude. Elle n’est pas non plus entièrement soulagée, la méfiance est un automatisme, trente ans dans le métier l’y obligent.
“It’s nice for you to come check on me. Sorry for my defiance it’s just-” ses sourcils se froncent momentanément, rident légèrement son visage et elle défait l’expression de contrariété en se rappelant les invectives de sa mère “-ever since he’s gone, the vultures have been lining at my door pretending they care when they’re just out here chasing clout.” Elle ne doute pas que Rapha a connu la même nuée d’opportunistes à la mort de son père, et si les contextes sont bien différents, le sentiment est le même. “So it’s hard to trust anyone who comes by, especially when you left me with the impression we would never see each other again.”
(#) Mer 17 Juil - 5:39
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
and again
ang again
Rapha s’attendait à ce que Maeve lui tienne rigueur, de ne faire d’elle qu’une envie passagère, comme si elle n’avait pas pensé à Maeve pendant les dix années précédentes (c’est faux et elle ne le reconnaitra pas à voix haute. Le bracelet a été abandonné dans le vide de l’espace pour une raison). Le sourire ne bouge pas, comme le reste de Rapha. Il y a peu qui l’agite, se meut dans sa physique. La cage thoracique se soulève à peine pour ses respirations, cligne peu des yeux.
Il n’y a aucun mouvement parasite, aucune mimétique humaine.
Rapha ne l’est plus.
Plus vraiment.
& pourtant.
Quand elle bouge (enfin) et parle (enfin), il y a quelque chose de terriblement humain et vrai, sincère. Comme la manière dont elle sourit, silencieusement, l’expression qui arrive jusqu’à ses yeux, un humain, un lunaire, où même la pierre de l’astre figée fixée dans son orbite donne l’impression d’avoir pris un peu de son hôte. “It’s okay, Maeve.” Dire son prénom rend la rencontre réel. Maeve n’est plus un souvenir (ou une rêverie). Elle est là, devant Rapha, une beauté différente que celle que Rapha lui a connue. Maeve est là, en deuil, et la distance se creuse, mot après mot. “I won’t point the irony. As I recall, you were the one chasing clout with me, back in the days.” Ca n’a rien d’une pique, d’un reproche. C’est une sorte de private joke poussiéreuse. Une preuve, aussi, que Rapha n’est plus aussi innocente qu’elle ne l’était à ses vingt ans.
Elles ont changé.
Elles ont mûri.
“I understand the preservation reflex.” Rapha l’a eu pendant longtemps, ne jamais comprendre les intentions des autres, toujours en douter. Jusqu’à l’accepter et se servir des autres qui voulaient se servir d’elle. Boucle d’un enfer dont elle ne pouvait se défaire, à préférer dresser l’ouroboros pour au moins tourner dans la direction qu’elle préférait. “The people who care have been here all along, I guess.” Coup d’oeil vers la maid qui apporte les thés demandés, regard qui si fixe rapidement, à nouveau, sur Maeve. “As for me, we both know my care wasn’t welcomed.” Et c’est éternellement Rapha, éternellement doux, délicat.
Remplacer care par love.
Taire toutes les occurrences où Maeve l’a blessée.
Trompée.
Taire le fait que Rapha n’a plus été capable de faire confiance pendant des années, à cause d’elle. Ne plus se laisser approcher, de cette manière dont elle avait laisser Maeve s’approcher. Avoir trouver un certain soulagement à ne plus être capable d’aimer, de s’attacher.
De ressentir, d’en vouloir.
Apprendre à pardonner.
Elle attend que la maid se retire, pour reprendre. “Full disclosure, I wasn’t sure I’d see anyone again. It was a farewell.” Comprendre ce qu’il y a à comprendre. “As I said, If you’d like, I can just leave and pretend this never happened.” L’espièglerie est là. Sa main reste en suspend au-dessus de la théière délicate qui lui a été amenée. “It was, after all, a very nice adieu. A fond memory.” Elle ne précise pas like the one you gifted me. Ce serait donner un autre versant à leurs retrouvailles.
Et ces émotions là ont été abandonnées dans l’espace, offrande à la Lune, à ce qui est inatégnables pour les hommes.
Et les femmes.
(#) Dim 28 Juil - 15:50
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
“I won’t point the irony. As I recall, you were the one chasing clout with me, back in the days.” Le ton n’est pas incisif mais les mots font quand même mal. Ils sont réels. Elle était effectivement une opportuniste, et elle mourrait certainement avec ce mot pour épitaphe. Il est donc inutile de nier, de s’excuser, de pleurer que ce n’est pas le cas. Il y a longtemps qu’elle a accepté qui elle était. Ca ne l’empêche pas d’ajouter un peu de nuance. “The context was quite different though.”
Maeve répond avec sérieux, parce qu’elle n’arrive pas à écarter l’aspect sinistre de sa situation. Les opportunistes qui en ont après elle comptent sur sa vulnérabilité pour soutirer ce qu’ils peuvent d’elle. Avec Rapha, ça n’avait jamais été le cas. Et puis certes, leur relation avait commencé avec une motivation financière, mais s’était terminée pour des émotions réelles. Elle aurait fait une bien piètre opportuniste sinon, de refuser le monde que l’héritière Wayne était prête à lui offrir.
Dix ans plus tôt, le ton calme de Rapha lorsqu’elle énonce les manquements et blessures de leur relation avait profondément perturbé Maeve. Aujourd’hui, il ne fait que l’irriter passablement. Elle met ça simplement sur le dos de l’immobilisme émotionnel de sa visiteuse, décide que c’est superflu d’expliquer à quel point c’est indélicat de se présenter au chevet d’une veuve encore en deuil pour lui rappeler quelle mauvaise partenaire elle avait été à l’époque. Elle s’en plaindra à Orya plus tard, qui semble être effectivement la seule personne à s’inquiéter de son état. Dommage que toute cette attention soit conditionnée par le chèque reçu chaque mois.
“As I said, If you’d like, I can just leave and pretend this never happened. It was, after all, a very nice adieu. A fond memory.” Dans d’autres circonstances, elle aurait savouré le fait d’avoir arraché au destin une énième rencontre, malgré les adieux et l’absence d’émotions. Ce ne sont en fait pas les circonstances qui ont changé, c’est elle. Plus vieille, plus lasse, dévastée, incapable de retourner dans ses fantaisies sans se heurter au souvenir de son époux et la vague de culpabilité qui l’accompagne. Dix ans plus tôt, la nostalgie était un échappatoire, un scénario parmi tant d’autres dans la tête de la brune. Maintenant, elle a l’impression que ses constantes réinterprétations du passé sont une prison de plus. Elle a fané tellement de morceaux d’elle-même dans sa chasse à la mélancolie qu’elle n’a plus grand chose à présenter Rapha aujourd’hui.
“You’re already here.” Le mal est fait, il n’y a pas à l’effacer. Maeve se dit qu’il vaut mieux retirer le pansement d’un coup, souffrir toutes ses pertes en même temps, puis elle construira à son tour un barrage pour réguler son fleuve d’émotions.
Elle regarde un point vaguement au-dessus de l’épaule de son invitée, là où une photo de famille a été retournée temporairement. “How did you find out? Did the headlines make it to space?” Dans une autre vie, l’idée lui aurait arraché un rire, par son énormité et son absurdité, elle était vaine sur tant de plans mais pas au point de se croire plus importante que la terre. La vague qui s’est soulevée à la mort de Jeremiah a soulevé cette conception avec elle, jusque dans le trépas il défie l’humilité, fait savoir que les frontières de leur seule planète ne le suffisait même plus. Il aurait adoré ça, s’il pouvait être là pour voir.
(#) Lun 29 Juil - 9:56
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
and again
ang again
“The context was quite different though.” Rapha a la sagesse de ne pas répondre, parce que tout ce qu’elle aurait à offrir ne ferait qu’animer un peu plus les flammes qu’elle devine chez Maeve. Et Rapha n’est pas là pour obtenir justice sur ce qu’il s’est fait une moitié de vie auparavant. Même si, oui, elle pense à l’innocence qu’elle avait, au fait que les personnes peu scrupuleuses ont toujours existé, et que Maeve en a été une aussi.
Elle est sur la défensive parce que ça lui arrive aujourd’hui.
Mais Rapha sait que Maeve n’aurait eu aucun remords à être à la place, si elle n’était pas celle en deuil.
Comme quoi.
Vraiment.
Il y a des paroles qui doivent se taire.
Rapha n’est pas là pour une bataille de mots avec Maeve. Même si son esprit lui manque.
Rapha a conscience qu’elle a aimé un fantôme.
Une idée.
Et c’est mieux ainsi, probablement.
Qui aurait mérité son amour?
“You’re already here.” Ca lui arrache un petit rire, une expiration amusée, et quand elle lève son regard de son thé anglais, pour le poser sur Maeve, il n’y a aucune trace de remords, ni de scrupule. “Too late to go back.” Et il y a une étrange satisfaction, de se savoir une épine dans le jardin de Maeve. Au moins sont elles fixées.
Une nouvelle question et Rapha hausse un léger sourcil. Elle ne demande pas pourquoi Maeve pose la question, parce que la réponse lui échapperait. Elle hésite un moment, à raconter autre chose, à prétendre que son assistant l'a tenue informée. Mais elle n’a jamais eu le cœur de mentir à Maeve. “It was an inside information.” Avant les headlines, avant que le monde ne soit mis en branle.
Peut-être même avant que Maeve ne l’ait appris. “Wayne Inc. still represents the Seven’s insurance.” Rapha ne travaille pas sur ces contrats suite à des conflits d'intérêts, mais ça aurait coûté plus cher à Icarus de se trouver une nouvelle filière légale. Un raclement de gorge. “Including the death insurance.” Quelque chose que Maeve n’aura pas vu passer. Elle était l’épouse de Jeremiah, mais Wolfman appartenait à Icarus, avant tout.
Jamais des entités humaines.
Des propriétés.
“But I personally learned it a few days after the events.” Parce que sa vie, à elle, ne tourne pas autour de Jeremiah. Même si la Lune, elle, révolve autour de la Terre.
(#) Mar 13 Aoû - 15:38
Invité
Invité
CORPS
ESPRIT
ÂME
“It was an inside information.” Deux perles d’obsidienne se reposent soudainement et gravement sur Rapha. “Of course it was,” commente-t-elle sèchement, les nerfs sciés d’un coup, alors que serpentent à l’arrière de son crâne les commentaires cinglants que sa bouche ne dit pas : it’s easy to have insider info for an insider job.
Maeve se souvient parfaitement de tout le gravitas de l’annonce. Elle était entre deux rendez-vous et son véhicule avait été intercepté par la milice d’Icarus. On lui avait pris son téléphone et elle avait été conduite jusqu’au Palais, où un comité de costumes noirs lui avait annoncé la nouvelle avec une mine triste. On lui avait laissé à peine quelques minutes pour accuser le choc avant de la larguer dans une réunion de crise auprès des autres Sept. Elle avait été sonnée tout le long, fixant l’écran où la narrative d’Icarus s’écrivait en temps réel. Marama avait été récupérée au lycée et les pontes avaient eu la délicatesse de laisser Maeve le dire à sa fille.
Tout était à la fois un brouillard et à la fois extrêmement limpide. Le calme avec lequel la situation avait été géré et le timing impeccable de tout le déroulé donnait l’impression d’une mission bien exécutée. Ils étaient préparés. Parce qu’ils savaient. Parce que c’était de leur faute.
Et au fond elle savait aussi, un peu. C’était de sa faute à elle.
“You should read the full report.” Elle a le regard lourd, opaque, un voile de tristesse, de colère, d’incertitude et de peur empêche de démêler le vrai du faux dans ce qu’elle ressent. Elle-même ne sais pas. “The real one. I’m sure you’ll have no trouble getting it.” L’empathe n’avait évidemment que la version dorée, la façade toute fabriquée, la mort héroïque que le monde entier gardera à coeur. Personne ne voulait lui dire la vérité, celle qu’elle devine en comblant avec ses connaissances des méthodes internes.
Face à Rapha, elle trouve une hargne nouvelle. Peut-être parce qu’elle sait que la milliardaire ne soutient pas les intérêts d’Icarus et n’a aucun mal à parler d’eux avec un ton critique : tout ce que l’ancienne présentatrice n’avait pas le droit de faire. Sa vie à elle était aussi sur la ligne. “Then maybe I’ll know what really happened.” Ses derniers mots traînent un peu, se perdent dans la réflexion, le songe, la compréhension que Rapha est peut-être véritablement son chemin vers les faits et que ce qu’elle venait d’émettre par pure provocation couvait peut-être un fond d’espoir. Quelque chose dont elle se privait pourtant.
:: The Wasteland :: Les archives :: RPs archivés :: RPs abandonnés