promised land

tw : vulgarité

Deux heures après avoir tenu la jambe à un p’tit mec en cure, Nikki a jugé bon de “prendre l’air” après ça, toute proportion gardée étant donné qu’elle ne se sentait pas particulièrement motivée à prendre la bouche de métro la plus proche pour sortir à la surface sur Crimson Bay. Face à cette seule envie, la jeune femme se met à zoner comme elle a l’habitude de faire, une espèce de canne au bout du bras - qui n’était en réalité qu’un morceau de métal qui aurait pu faire office de pied de biche géant, s’il y avait eu les dents caractéristiques à leur extrémité. Il n’y en avait pas, pour sûr, sur cette canne qu’elle utilise tantôt pour taper sur la tôle du boui-boui pour qu’on lui serve ses nouilles favorites, tantôt pour intimider qui voudrait l’emmerder au détour d’une ruelle.

Y’a pourtant pas la peur au ventre comme les premiers jours, c’est dire si elle croit la ressentir encore. Nikki se sent chez elle, ici, après avoir tout perdu là-haut. Ce qu’il y a de beau dans tout ça, pour sûr, c’est qu’elle est loin d’être la seule dans son cas. Certains ont juste choisi d’être des enculés en puissance là où d’autres ont préféré aider. Il n’y avait pas besoin de tergiverser longtemps pour savoir dans quel camp la Batgirl se trouvait.

Assise sur une chaise haute, canne métallique entre les jambes, ailes contre son dos et pendantes de dessous son espèce de pull d’ogre trop grand pour elle, Nikki se sent repue comme jamais, penchée à même l’espèce de bar qui faisait office de table (sacrée planche, pourrait-on admettre). Le bouillon est quand même jusqu’au bord de son estomac, là, même plus haut s’il en faut.

“Nikki, tu t’es tâchée, là” que le tenancier, Kaisuke, qu’elle jurerait par trois en pincer un peu pour elle depuis le temps, (sans doute par pitié pense t-elle), lui lâche aussi naturellement qu’il aurait préparé ses ramens en tournant son dos à la clientèle. “Ah, cool, tu m’essuies ?” C’est qu’elle s’en fiche, d’avoir l’air de, puisqu’après tout, Nikki l’était, pas comme les autres. Y’a même que les gens qui la connaissaient, comme lui, qui ne la fixaient pas bizarrement lorsqu’ils la croisaient sans lunettes pour cacher ses yeux d’un noir obsidienne. Regarder dans le blanc des yeux, même ça, ils pouvaient pas le faire avec elle.

Elle sent quelqu’un se poser à ses côtés, sur la chaise libre. Il a l’air d’avoir faim, elle vient d’entendre son estomac gronder, là où d’autres n’auraient rien calculé. Elle sait pas qui c’est, mais alors que le tenancier vient de finir de lui essuyer le col, Nikki s’adresse à lui sans tourner la tête - à quoi bon, elle ne le verrait pas mieux ainsi. “Faut prendre ses Tonkotsu, c’est les meilleurs ramens du quartier.” Elle ne voit ni remarque le tenancier prendre quelques couleurs, alors qu’il demande au nouveau client de cette petite tablée rustre de trois, en ligne, ce qu’il voulait. “Merci Kai tu gères” gratifie t-elle tout de même le type qui venait de lui retirer un peu de bouillon sur son vêtement déjà pas très à la mode, ni clinquant.

@siwon jung

tw : aucun

“Vraiment ? Tout comme a dit la demoiselle !” Kai se lance après lui avoir demandé de payer, ce qui est somme tout à fait normal au vu des serpents qui traînaient souvent sous terre. Il y avait toujours un loustic pour essayer de le rouler, maintenant qu’il avait un peu pignon sur bidonville, au moins auprès de la bonne communauté. Nikki l’avait pas mal briefé faut dire, sinon il aurait continué à se faire avoir et ne pas pouvoir courir après des repas impayés, et d’ores et déjà coincés dans l’estomac du client malhonnête. Elle s’était même demandé, un jour, s’il n’aurait pas eu besoin d’un chien de garde ou assimilé. Il a chopé un vrai chien errant pour l’apprivoiser, au lieu de donner le plat à un sdf qui aurait très bien pu faire le boulot, en contrepartie d’un ventre rempli. On peut pas toujours expliquer facilement le fond de sa pensée, Nikki en est parfois la victime. Encore heureux qu’elle sache prendre de la distance avec les personnes qu’elle aidait, au moins sur le papier. Ca lui apportait une certaine paix.

Elle ne calcule pas la façon dont elle est observée, se tenant un peu le ventre en se replaçant sur le dossier (trop court) de sa chaise haute. Au même moment, et parce que le concerné ne peut bien entendu pas encore déguster son met, il reprend la parole.

“Je m'appelle Siwon. Enchanté. -  Nikki. Moi j’suis pas enchantée, j’sais même pas encore qui t’es.” précise t-elle quand même. Les gens disent toujours ça sans savoir, elle, elle est pas naïve et ferait pas la meuf ignare pour plaire à son auditoire. “T'as testé tous les Tonkotsu du quartier avant de faire ton choix ? - Ouais !” qu’elle répond en relevant le menton, sans doute un peu trop pour le coup, mais peu importe. “Y’en a pas beaucoup faut dire, ‘fin plus maintenant” même si les nouilles bon marché de manière générale étaient un très bon repas du pauvre, là-dessous. Sans doute pour ça qu’elle avait parfois la sensation d’elle-même devenir un bol de ramens.

“Alors, qu’est-ce que tu viens foutre par ici, Siwon ?” qu’elle lâche sans transition, tripotant la canne en métal coincée entre ses genoux, tapotant du bout de ses ongles mal coupés l’objet. “T’as besoin d’aide pour un truc, ptet ?” c’est toujours comme ça, ou à peu près, qu’un début d’histoire se construit avec Nikki. Elle tend la main, passe un marché, et vole vers une nouvelle aventure. M’enfin, peut-être bien que le type voulait juste manger voire discuter, ce qui lui ferait aussi passer le temps sans soucis, à dire vrai.

@siwon jung

tw : aucun

Il n’a pas l’air très susceptible, Siwon, c’est plutôt un bon point aussi pour lui. Les gens qui se prennent trop au sérieux, y’en a bien trop à la surface, et ça a eu tendance à parasiter les intestins de la ville. L’Underapple, quoi. Nikki pense que les gens qui s’énervent en deux secondes neuf se font plus de mal à eux qu’aux autres. Ca lui arrive aussi, elle est pas un caillou, loin de là. Mais à force de croiser tout un tas de profils et pas des plus dociles, y’avait une tangente qui s’était dessinée depuis.

Qui plus est, le type a l’air plutôt en gratitude, la chance qu’il a c’est certainement d’avoir ce sourire qu’elle entend sans le voir, d’être quasi sûr de ne pas avoir la chiasse après son repas. Pour le reste, on se prononcerait pas. Il est pas du genre trop égotique en plus, puisqu’il admet le cœur au bord des lèvres : “T'avais raison, super bon !”

Ce qui lui arrache une moue souriante, mais mutine. Ca veut dire tant mieux.

“Si je dois être totalement honnête, d'une part je viens me balader. - Ah, ben voilà ta première adresse pour le tourisme culinaire.” S’il n’a pas l’habitude de fréquenter ce côté-là des souterrains, c’est comme s’il était nouveau né dans un terreau de vautours. Y’avait pas meilleure image pour illustrer, malheureusement. Mais avoir déjà mit un pied ici rendait bien entendu ses propos moins alarmants. Sur le papier. “Tu proposes toujours aussi vite ton aide aux gens que t'es pas enchantée de connaître ? Ceci dit, c'est pas impossible. - Bah, la preuve que si !” rétorque t-elle, se frottant un peu le dessous du nez qui lui picotait. Nikki renifle un peu. Ici, c’est chez elle. Ca lui parait normal d’agir ainsi, pour la simple et bonne raison qu’elle l’a toujours fait. Ce qui surprenait toujours un peu l’autre, c’était plutôt la dichotomie entre son gabarit et sa façon d’être. Nikki s’en fiche un peu de déranger.

“Ca peut paraître chelou mais beaucoup d’gens ont besoin d’aide. Que je sois enchantée ou pas, c’est pas leur problème au final.” Littéralement pas leur problème. A vrai dire, on lui disait aussi très rarement qu’on était enchanté de la rencontrer. Ce qui rendait la conversation un peu plus inédite, encore une fois, sur le papier. Nikki hausse les épaules, le son de sa voix permettant au moins à l’autre de se rassasier. “Donc, t’as besoin d’aide ou pas ?” insiste t-elle, parce qu’il n’avait pas répondu quoi que ce soit à ce sujet, seulement renvoyé la balle. Au pire, elle lui demanderait juste s’il n’avait pas quelques trucs à troquer, parce qu’elle cherchait un produit en particulier qu’elle n’avait pas encore trouvé. Un truc qui date du début des années 2000, alors, forcément… “Si c’est à la surface, c’est pas grave, j’prends aussi.” Comme si, à la base, rendre service là-haut n’était pas vraiment un sujet en soi.

@siwon jung

tw : aucun

“Besoin d'aide comment ? Tout dépend ce que tu proposes, en fait. Y'a bien un truc qui pourraient m'intéresser, si t'étais capable de me trouver ça, ouais..”

Ce qui ne tombe pas dans l’oreille d’une sourde, pour sûr, elle se remet même mieux sur son assise, remontant un peu la barre métallique qui avait commencé à lui glisser entre les genoux. Il est prudent, Siwon, c’est ce que Nikki perçoit chez lui, et à juste titre, puisqu’il a l’air d’être à la fois dans son élément, et… elle saurait pas dire, mais y’a un truc de différent, chez lui. Peut-être parce qu’il n’a pas la démarche sonore de quelqu’un d’ici ? Qu’est-ce que ça voulait dire, en vrai ? Fallait boiter pour être un boug de l’Underapple ?

“Et puis tout dépend de ce que tu demandes en échange. - Oh, ça, ça se discute après ! J’suis même sûre que t’arriveras à trouver ce que je cherche. Mais c’est tes problèmes qui m’intéressent, t’inquiètes : on négocie après.” Une façon de lui faire entendre qu’il n’était pas en position de faiblesse à l’instant T : après tout, il trafiquait - ou promettait de le faire - auprès d’une mutante qui avait la dégaine d’une moisie du dessous. Quant bien même elle pourrait se targuer d’avoir un certain flow, sans même pouvoir se regarder dans un miroir pour le clamer. “A la surface j'ai déjà tout ce qu'il m'y faut.. C'est ici que j'ai besoin.”

Elle a l’air songeuse, la batgirl, avec une petite moue qui ne trompe pas son public. Nikki sait qu’elle a une touche : maintenant, fallait réussir à lui sortir les vers du nez.

“Toi, tu cherches quelque chose en particulier ? - Tu parles comme quelqu’un qui aime bien aider, toi aussi.” lâche t-elle aussitôt, pensée intrusive qu’elle s’est empressée de servir sans l’avoir prémâchée dans son esprit. Un jugement correct, fort heureusement. Ce n’est seulement qu’un indice sur ce qu’il voulait vraiment faire ici. Voulait-il de l’aide pour aider ? Ou bien s’installer ici ? Drôle d’idée. Dans tous les cas, les entrailles de la ville avaient de l’or dormant pour lui, Nikki commençait à vraiment y croire.

Trop investie dans ses réflexions et dans sa curiosité, la concernée en oublie la question d’avant : Siwon avait voulu lui relancer la balle, mais elle avait loupé le coche. Rien d’anormal, en ce qui la concerne, mais il pourrait mal le prendre, allez savoir.

“Ecoute, ici, tant que y’a que nous deux et Kai, t’es en sécurité. Tout ce que tu me diras ça sortira jamais de là.” Une mise au point élémentaire, mais pas des moindres : la sécurité en tant que telle, des corps, de la psyché et même de l’information, c’est ce qui manquait terriblement par ici. “Tu peux même chuchoter très bas sans avoir à le faire à mon oreille, je t’entendrais quand même.” Information capitale, sinon presque intime, sur le fait qu’elle possède une audition bien plus puissante que les autres. C’était sa façon à elle de lui tendre la main, et d’initier une relation de confiance, par la confidence. “Par contre, pour lire sur les lèvres, compte pas sur moi.”

Vague trait d’humour s’il en est, et seconde confidence ; sur ambiance de poker face, qui rend le verbe encore plus drôle. Mademoiselle entend mieux et ne voit rien. Si ça ce n’était pas un vrai gage de sécurité… rester incognito, tout en pouvant être aidé. Le pied !

“Tu veux installer un business ici, c’est ça ? Quel genre ?”

Prend les devants, suit sa petite voix intérieure.

Espérons qu’elle ne lui mente pas, cependant.

@siwon jung

tw : classisme

“Hmmm... Je sais pas trop. J'veux dire.. T'es sure de toi ? Si je suis pas capable de te trouver ce que tu cherches, on va se retrouver comme des idiots tous les deux. Enfin... C'est toi qui vois !”

Le problème réside peut-être là : non seulement Siwon a l’air d’être quelqu’un de gentil (une anomalie dans le décor putride des souterrains qu’ils fréquentent l’un comme l’autre), mais en plus de ça, il pense mettre à mal le deal avant même qu’il n’ait lieu ! Nikki fait mine d’être un peu sourde, sur le moment, et le laisse poursuivre avec une petite moue silencieuse sur les lèvres. Ca veut dire qu’il se préoccupe d’un non problème, et le meilleur moyen de ne pas entretenir cette illusion, c’était de ne pas s’appesantir sur le détail. Menu, pour sûr, vu ce qu’elle cherchait.

“Ho, heu, je... Et bien.. Peut-être. C'est ce qu'on me dit souvent en tout cas.” Bah, tu me traiterais pas de menteuse, quand même ? pense t-elle. “J'en déduis que c'est pas juste pour mon aura de charme incroyable que t'as décidé de me proposer ton aide, toi non plus. - On saisit les opportunités quand elles se présentent, non ?” elle se déride un peu, cette fois, subtilement. Le sourire n’est pas franc, ne le sera sans doute pas avant un petit moment.

“Compris.. T'es... une sorte de chauve-souris ? Enfin, si c'est pas indiscret. - Hm,” elle le laisse mariner, l’air de rien, et il poursuit, et c’est là que cela devient intéressant. Des précisions qui ont le goût d’aveux, mais qui est-elle pour juger de la discrétion de ce garçon ? Si elle croit parvenir à lire entre les lignes, en l’imaginant mutant, elle préfère en avoir le coeur net. D’un rebouteux pas fiable, c’est franchement pas facile à appréhender pour lui filer un coup de main, si les compétences sont déjà pas là. Pour autant, l’idée va droit au but, au delà de ce détail à rediscuter.

“Tu veux faire ça gratos, alors ?” C’est une vraie question, pas un reproche, mais ça pourrait complètement changer la donne. Pour lui demander, elle s’est penchée un peu sur la table qu’ils partagent, histoire de maintenir un tant soit peu de confidentialité. “Tes capacités, là, c’est parce que t’es mutant, c’est ça ?” Légère pause, de quoi glisser deux trois infos au passage. “J’ai bien une idée, en fait, mais pour ça faut que je sois sûre que tu saches vraiment faire ça, et surtout bien.” A part être tributaire de ses promesses, il pouvait pas y avoir grand chose ; le seul avantage étant que ses compétences, même amoindries, seraient utiles. Des bénévoles, on en a besoin au dispensaire, mais c’est surtout de bénévoles fiables et non intéressés par l’argent, qu’il lui fallait. “J’suis mutante aussi, j’te fais pas un tableau.” Réponse à son histoire de chauve-souris, qui la fera bien pouffer quelques heures après. L’heure est pourtant à garder sa poker face. “Et y’en a d’autres des comme nous qui sont pas bien, et ils ont besoin d’aide. Ou de mécènes, en fait, mais ça c’est une autre histoire, tu sens pas trop l’or ou le carat, si tu veux mon avis.”

De la surface, oui, mais pas un riche qui sent l’eau de cologne et dont les vêtements se froissent comme nul autres. Aux yeux d’encre de la batgirl, c’est plutôt une bonne nouvelle, même si relevant d’un certain classisme.

“Si je peux avoir confiance en toi pour les aider à pioncer gratos, je te donnerais rendez-vous pas loin et je t’y emmènerais. Mais pas aujourd’hui, hein. C’est quand même pas moi la boss partout, faut qu’j’en parle avant.” Reniflement vigoureux. “Alors ?”

@siwon jung